Je quitte ces deux domaines, ravi d’avoir touché de près le rêve et la perfection. Comme on m’avait proposé de garder des flacons, pour que les fonds de bouteilles égayent mon dîner, j’appelle au plus vite un ami à partager ces merveilles. Et ce soir là, caprice du vin, les surprises sont au rendez-vous.
D’abord les vins sont très nettement meilleurs. Ils ont pris de l’oxygène, ce qui leur a fait du bien, et n’ont pas souffert du voyage. Le Richebourg 1965 est complètement transformé. Il est devenu accompli, brillant, et a gagné une longueur extrême. On l’a ressuscité alors que le 1964, qui avait brillé au déjeuner avait sans doute estimé qu’il en avait suffisamment montré. La Romanée Conti 1975 avait perdu toutes ses petites faiblesses et l’on comprenait vraiment tout ce qui fait le charme de ce vin. Avec mon ami, nous nous faisions la remarque qu’il s’agit d’une des plus belles bouteilles de la Romanée Conti que nous ayons bues. Comment après cela se fier aux hiérarchies écrites dans les livres ? Le Grands Echézeaux 1948 brillait encore mais légèrement moins, tout en confirmant l’extrême complexité de ces magiques vins anciens. On s’amusa à classer les vins, le 1948 étant en tête, ex aequo avec le 1965. Le 1975 venait ensuite puis le 1964, alors qu’à midi, j’aurais classé 1948, 1964, 1975, 1965. Bienheureuxles dégustateurs qui peuvent donner des jugements péremptoires et définitifs.
J’ai ouvert au cours de ce même dîner une bouteille de Rausan Ségla 1924 du même lot que la bouteille bue quelques jours plus tôt (voir ci-dessus). Elle apparut brillante, sans trace de blessure, et trouvait toute sa place à coté des vins du Domaine.
Pour finir ce dîner où les vins du midi étaient devenus nettement plus brillants, je voulais porter un toast en hommage à mes hôtes du Domaine. Ce fut avec une Fine Bourgogne du Domaine de la Romanée Conti 1979, sensuel alcool qui mettait un point final à une journée de rêve absolu.