Sur un chapon discrètement farci d’ail, La Landonne Côte Rôtie Guigal 1996 allait montrer toute l’intensité de son génie. Ce qui frappe, c’est l’extrême simplicité du message. Tout parait facile comme la voix précise de Frank Sinatra, qui charme sans que ce chanteur ait besoin de pousser la note. Le contraste avec les bourgognes est saisissant. On pourrait dire que certains grands bourgognes sont des Noureev quand les grandes Côte Rôtie sont des Fred Astaire. C’est simple, le message est compréhensible par tous, mais c’est parfait. J’ai reconnu la petite amertume de fin de bouche, marque d’un bois un peu austère, que j’avais ressentie comme une signature pendant la dégustation systématique lors de ma visite à Ampuis. Ce signe permet de penser que ce vin vieillira bien et sera encore plus redoutable dans une dizaine d’années.
Après trois soirs de célébrations de Noël nous n’avions toujours pas ouvert les liquoreux que j’avais prévus. La fatigue en est la cause. Il est temps de voter sur ces vins de Noël et les votes furent disparates mais concentrés surtout sur trois d’entre eux : le champagne Cristal Roederer 1993 dont l’élégance magistrale a ravi nos cœurs, la Côte Rôtie La Landonne Guigal 1996 car c’est du soleil généreux en bouche, vin de joie, et le Côtes du Jura blanc château La Muyre 1969 car c’est sans doute celui qui a la palette aromatique la plus complexe, appel d’une cuisine de folle création. Une mention spéciale mérite d’être faite de La Croix Saint-Jacques 1975 en demi-bouteille qui a étalé des sérénités de Pomerol d’une justesse rare. Si à ce stade on ne cite toujours pas Salon 1985, vin divin mais que je connais sur le bout des lèvres, c’est que les vins couronnés de votes étaient diablement bons.