Du jamais vu ! Au déjeuner de famille j’ouvre un Champagne Dom Pérignon 1996. Il est bouchonné. L’odeur de bouchon progresse et devient entêtante. En bouche, le goût de bouchon va osciller, devenant plus ou moins présent, avec parfois des lueurs de pureté, mais il est inutile de persévérer.
Je vais chercher en cave un Champagne Pommery Brut 1990. Et là, stupeur, le champagne est aussi bouchonné. Alors que les bouteilles bouchonnées sont très rares parmi toutes celles que j’ouvre, deux bouchonnées coup sur coup, c’est du jamais vu. Les deux bouteilles étaient au frais au même endroit mais seulement depuis peu et n’avaient pas été rangées précédemment dans les mêmes zones de cave. Il ne peut pas y avoir une cause commune à ce goût de bouchon. C’est donc le fruit du hasard.
Alors, la bouteille qui doit être le clou de ce repas sera-t-elle marquée par la même malchance ? Lorsque j’ai ouvert la bouteille du Châteauneuf-du-Pape La Bernardine Chapoutier 1949, le nez montrait une petite acidité sous-jacente. Au service, elle a disparu et le parfum est royal, opulent et riche. En bouche ce n’est que du bonheur. Le vin emplit la bouche de façon gourmande. On a l’impression de croquer de gros grains de raisins bien rouges. La mâche est large, le vin a une belle râpe de vin rhodanien, et tout en lui est solaire. On sait que l’on boit un vin qui a de l’âge, puisque les saveurs sont un peu fumées ou léchées de tisanes, mais le vin, par sa force de caractère n’est en aucun cas un vin vieux. Il n’est que de plaisir. Ce vin est vraiment émouvant car il représente une forme joliment évoluée d’un vin rhodanien plus que d’un Châteauneuf-du-Pape.
Pour l’apéritif nous avions une quiche lorraine qui devait convenir aux champagnes. La pintade à la purée de pomme de terre est parfaite avec le vin de Chapoutier qui confirme que dans le Rhône 1949 est une grande année, hélas plus difficile à trouver que dans d’autres régions.