Déjeuner au restaurant l’Ecu de France avec Pétrus 1975 jeudi, 26 octobre 2017

Le restaurant l’Ecu de France a pratiqué depuis des décennies la stratégie de gestion de cave que j’aimerais trouver en beaucoup plus de restaurants. Depuis toujours les dirigeants ont des relations de confiance avec des domaines qui comptent et ils appliquent des prix qui ne tiennent pas compte de la folie du  »marché gris », le marché des reventes entre particuliers par le biais des salles de vente ou des négociants. On trouve donc sur leur carte des vins que l’on serait incapable de trouver à ces prix sur le marché. Mon œil a été attiré récemment par Pétrus 1975. Chaque fois que j’ai bu ce vin, j’ai été conquis. Il fait partie des vins de forte mémoire comme le jour où mon fils rentrait du Brésil où il venait de passer près de deux ans. Il nous rejoint dans notre maison du sud et là, face à la mer, j’ai ouvert Pétrus 1975 que nous avons bu, mon fils et moi, bercés par la bruit des vagues qui s’écrasent sur les rochers en contrebas et heureux des retrouvailles rythmées par ce vin.

Il se trouve par ailleurs que mon ami Tomo est né en 1975. Je l’appelle en lui demandant s’il est d’accord que nous partagions ce vin lors d’un déjeuner. Je lui annonce le prix de la carte des vins et la décision est prise immédiatement.

A 11h20 je viens au restaurant ouvrir le Pétrus 1975. J’apprends que c’est la dernière bouteille de la cave et je me félicite que nous en soyons les heureux bénéficiaires. Le niveau est presque dans le goulot, la bouteille est saine et belle. Le bouchon est de très belle qualité, très long, ce qui fait qu’il se déchire sans se briser. Le nez est superbe. Je vais voir le chef haïtien qui connait mes désirs. Il est donc prêt à mettre une sourdine à son exubérance généreuse pour simplifier sa cuisine. Pour le Pétrus ce sera du pigeon que le chef Peter Delaboss me montre et que j’approuve.

J’attends l’arrivée de Tomo pour commander le vin qui va précéder et les plats qui l’accompagneront. Très vite en consultant la carte nous nous mettons d’accord pour commander un Hermitage Jean-Louis Chave blanc 2005. Nous commencerons par un velouté de champignons puis des coquilles Saint-Jacques pour passer ensuite aux pigeons.

L’Hermitage Jean-Louis Chave blanc 2005 est ouvert au dernier moment. Le nez est encore imprécis mais je vais faire confiance à ce vin. Tomo le trouve un peu oxydé mais se ravise car le vin s’ouvre progressivement. On nous apporte à chacun une tranche de foie gras qui élargit un peu le vin. Le velouté l’élargit encore plus. En fait c’est sur les coquilles Saint-Jacques que le vin blanc va devenir vraiment un Chave car enfin nous reconnaissons ce qui fait la noblesse des blancs de cette grande maison, avec du gras, de l’épais, du fumé, mais avec une vivacité et une plénitude rare. Il est donc démontré qu’un tel blanc doit s’ouvrir au moins trois heures avant le repas.

Le chef Peter a bien respecté mes désirs puisque le velouté très cohérent et riche est d’une lisibilité totale. Les coquilles sont belles mais comme souvent légèrement trop cuites, car les chefs n’osent pas risquer qu’on leur dise qu’elles ne sont pas assez cuites. Si le Chave n’a été vraiment lui-même que sur un tiers de la bouteille, ce tiers justifiait pleinement notre choix.

Le pigeon est excellent, de grande qualité de chair. Une cuisson un peu moins prononcée eut été encore meilleure pour le même motif que les coquilles. Peter a préparé les foies de façon magistrale. Ils sont goûteux tout en étant d’une rare légèreté. Paradoxalement, c’est avec la purée que le Pétrus 1975 se sent le mieux car sa neutralité révèle toutes les complexités. Le vin est presque noir tant il est de couleur vive, et le nez est d’une richesse incroyable. Pour mon goût le nez est plus impressionnant que la bouche. Il évoque tellement de complexités sur fond de truffe.

Bien qu’ouvert tôt et déjà brillant, le vin ne va jamais cesser de s’améliorer. Je retrouve tout ce qui fait la grandeur de ce 1975. L’intensité, la complexité et la force de la truffe construisent un vin conquérant, qui pianote la gamme de ses saveurs en un message très long. C’est un vin d’affirmation, mais qui sait aussi suggérer, car rien n’est définitif dans le message. Les images sont noires comme la truffe. Je suis plus à l’aise avec ce vin que Tomo qui n’a pas les mêmes repères. Plus le temps passe et plus le Pétrus montre sa richesse et sa longueur. Aucun des fromages du restaurant ne pourrait aller avec le vin que nous finissons tranquillement, le humant avec gourmandise. Les dernières gouttes sont d’une richesse rare.

Bravo au restaurant l’Ecu de France d’avoir cette politique intelligente de gestion de cave, bravo au chef que nous avons complimenté d’avoir su mettre en avant les produits purs pour que les vins s’épanouissent sur leurs discours lisibles. Nous avons bâti avec Tomo de nouveaux plans de folie. L’aventure des vins anciens nous entraîne sur de beaux sentiers.

Déjeuner au restaurant L’Ami Jean mercredi, 25 octobre 2017

Les voies du Seigneur sont impénétrables et celles du web aussi. On me demande d’envisager de faire un dîner au restaurant L’Ami Jean. J’avais déjà déjeuné en ce restaurant à la cuisine généreuse qui convient plus à des profils de rugbymen qu’à des petits rats de l’Opéra. Une table est réservée à mon nom et il est prévu un rendez-vous de travail après le déjeuner avec Stéphane Jégo le chef propriétaire du lieu.

Lorsque j’entre dans le restaurant, les petites tables carrées sans nappe où les clients se touchent les coudes me semblent peu compatibles avec les dîners que j’ai l’habitude d’organiser mais la vie m’a appris à savoir attendre avant d’entériner tout jugement. La jolie Amandine me conduit à ma table qui pourrait accueillir quatre personnes ou six mais ne sera que pour moi. C’est la table proche de la cuisine ouverte où le chef officie ce qui permettra que nous échangions quelques remarques en cours de repas.

Au moment de m’asseoir j’entends « bonjour Monsieur Audouze ». A la table voisine il y a quatre hommes dont un caviste parisien qui a participé à des séances de l’académie des vins anciens. Ce sont des habitués du lieu, grand mangeurs, grands buveurs et généreux. Etant seul, je vais pouvoir partager avec eux discussions et aussi quelques vins.

A peine assis, on m’apporte une terrine de sanglier avec des cornichons, ainsi qu’un verre de Crozes-Hermitage « La fille dont j’ai rêvé » domaine Gaylord Machon 2016. Pour l’instant je suis la route que l’on m’a tracée . Le vin est simple, franc et généreux. Il a une belle vivacité et ne fait pas du tout « vin jeune ». Il a déjà un bel équilibre et se montre très agréable.

J’apprends que je vais suivre le même menu que la table voisine de solide mangeurs. Stéphane Jégo m’a gentiment écrit le menu en fin de repas : terrine de sanglier / velouté de veau et parmesan / encornets sautés, poitrine de cochon Ospital, oreille de porc / poitrine de caille et anguille / Saint-Jacques et racines / poisson Tombe brûlade d’origan / lièvre à la royale / riz au lait de grand-mère / citron réglisse.

Sur le velouté délicieux j’ai envie de voir si un vin rouge pourrait exister et je fais confiance au responsable des vins. Il m’apporte un verre de Chinon Vieilles Vignes domaine Philippe Alliet 2015. L’attaque du vin rend l’accord possible, mais comme pour le blanc, le velouté raccourcit les vins, ce qui n’empêche pas ce plat d’être gourmand.

Le Chinon a une attaque franche mais il est vraiment très court. Il va nettement mieux avec l’encornet et le lard. Il devient doucereux. Le plat est superbe et va mieux avec le rouge qu’avec le blanc.

La poitrine de caille et l’anguille se marient plaisamment. Le Côtes du Vivarois domaine Gallety 2012 a une attaque généreuse mais le finale n’est pas assez net. En matière de vins dans ce déjeuner, je fais du hors-piste car ces régions et ces années me sont peu familières. Les coquilles Saint-Jacques sont remarquablement cuites mais la petite sauce qui accompagne les racines, trop acidulée, comme vinaigrée, serait l’ennemie des vins anciens.

Le plat de poisson, de « tombe », est surmonté d’herbes et brindilles aromatiques qui sont brûlées au chalumeau juste avant d’être servies. Le plat est superbe et s’accommoderait de très grands vins. Le lièvre à la royale est très gibier, beaucoup plus que celui de Michel Rostang et se marierait sans doute difficilement avec des vins anciens. Mais le caviste de la table voisine avait dans sa musette un Corton domaine Pavelot 1971 tout en douceur et gracieux qui supporte très bien le choc du lièvre. Un retour aux vins anciens, ça fait du bien !

La suite va être plus confuse car les vins s’échangent, les plats s’amoncèlent, et je commence à travailler avec le chef. Les desserts sont gourmands, évoquant des souvenirs d’enfance. J’ai offert à la table voisine un Champagne Drappier Brut 2012 pour que nous trinquions. Il est vif, précis et très agréable et demanderait de la gastronomie pour bien s’exprimer. En échange de bons procédés mes voisins ont commandé une Roussette de Savoie Marestel Altesse domaine Dupasquier 2011 qui confirme son excellence absolue. Dès le nez on sait qu’on est en présence d’un grand vin. Il y a du miel, de la richesse et une noblesse qui montre à quel point les vins précédents n’étaient pas du même niveau, champagne et le 1971 mis à part.

Dès le service fini, j’ai travaillé avec Stéphane Jégo sur la façon d’organiser en ce lieu l’un de mes dîners. Nous avons défini tout ce qui concerne le service et nous avons ébauché une façon d’approcher la cuisine pour qu’elle s’adapte aux vins anciens. J’ai senti en ce chef une recherche d’excellence et une ouverture d’esprit qui sont extrêmement motivantes. L’idée d’un grand dîner prend corps. Celui pour qui le dîner se prépare, qui veut fêter un événement familial avec des amis, est venu me rendre visite pendant le repas. Il est un intime du chef qu’il embrasse amicalement. Toutes les conditions sont remplies pour un futur succès.

Lorsque je rentre à la maison où nous accueillons une nièce de ma femme, on m’annonce fièrement anguilles et coquilles Saint-Jacques alors que je venais d’en manger au déjeuner. Les préparations étant différentes, cela n’est pas gênant. J’ouvre un Champagne Krug Grande Cuvée qui doit avoir plus de 25 ans. Toujours superbe, rond, construit, c’est un véritable plaisir qui me conforte dans l’idée que si la formule « in vino veritas » a de la pertinence, la vérité est dans les vins anciens.

la terrine d’accueil

ça chauffe avec le chef ! au chalumeau même

le soir à la maison :

Réponses à l’énigme du 24 octobre (il y a une bonne réponse) mardi, 24 octobre 2017

Jacques Martin dans l’école des fans, disait « les enfants sont formidables ». Eh bien, les lecteurs de mon bulletin sont formidables !

Il y a des réponses tellement belles ou tellement poétiques que j’ai eu envie de montrer les plus belles.

La réponse a été trouvée et ce qui a encore plus de sel c’est que celui qui a trouvé a énoncé la réponse pour l’écarter aussi vite. Je vous avoue que je jubile.

Lisez toutes ces réponses car il y a une imagination et une culture qui sont spectaculaires et seulement enfin allez à la fin de cet article où figure la réponse.

mar. 24/10/2017 22:19 – je pense voir un parallèle entre le mode de découverte de la Venus de Milo et sa « non-restauration » d’une part, et votre expérience avec les bouchons, et la qualité des vins d’autre part. En effet : – la vénus de Milo a été sortie de terre et mise au jour difficilement, et était fortement endommagée (pas de bras, nez endommagé…), ce qui fait penser à l’extraction de vos bouchons : extraction difficile, bouchons particulièrement endommagés/cassés… – malgré un projet de restauration complète (ajout de bras et d’autres éléments…), elle a finalement été conservée en l’état, ce qui permet d’apprécier sa beauté antique et authentique. C’est également le cas des vins que vous avez évoqué, notamment le Musigny, qui semblait mal parti, et qui pourtant a su exprimer sa beauté de vin ancien, en laissant simplement faire l’oxygénation, sans agir d’aucune sorte. Ces parallèles sont par ailleurs renforcés par vos propres métaphores féminines (Sissi impératrice, Gene Kelly, ballerine), qui rappellent la déesse Aphrodite, que la Vénus de Milo est censée représenter. Et à 22h25 une suite : En y repensant, j’ajoute un autre parallèle : – nez et bouche de la Vénus de Milo étaient en partie endommagés, et on finalement été restaurés / – nez et bouche du Musigny étaient en partie endommagés au départ, et se sont finalement restaurés…tout seuls

mar. 24/10/2017 18:38 – je te propose: devant un tel repas et de tels vins je peux dire comme « la Venus de Milo »: « les bras m’en tombent » ! Je ne suis pas sûr que ce soit l’explication que tu attends, je vais étudier la question d’un peu plus près et la serrer à bras-le-corps… Bonne Soirée, François !

mar. 24/10/2017 17:14 – J’ai beau connaître la logique de tes énigmes, je ne trouve pas du tout !!! L’avenue de Millau, la veine eu deux mille hauts, ils sont venus de Millau,… rien qui fait le lien avec le repas de Rostang… je vais essayer encore

mar. 24/10/2017 17:13 – Bonjour et tout d’abord bravo pour votre blog et vos récits. Je me permets de proposer une solution concernant l’énigme de la Vénus de Milo : Vénus est la déesse de l’amour, de la séduction et de la beauté dans la mythologie romaine. Son étymologie classique est le verbe latin vincire (lier, enchaîner). Elle unirait d’après Varron le feu mâle à l’eau femelle, ce qui donne la vie. Ainsi lors de ce dîner la liaison entre les plats et les vins serait le symbole de la vie, de la renaissance,tel le phénix qui renaît de ses cendres ou la résurrection de Vénus qui par ses pièces éparpillées et le génie de passionnés donnera l’une des plus grandes sculptures. L’un sans l’autre ne pourrait produire ce moment magique. La symbiose, le lien des vins et des plats de ce dîner formant un grand moment représentant la vie donné par Vénus

mar. 24/10/2017 16:47ma réponse au mail de 16/38 . Vous avez gagné mais vous ne savez pas pourquoi. Attendez la réponse et vous verrez.

mar. 24/10/2017 16:38  – Pardonnez ma témérité mais la perspective de partager un vin ancien en votre compagnie étant une motivation solide, je récidive en proposant une dernière interprétation plus terre à terre. Dans votre carnet de route (votre blog), vous faites trois fois mention de la Vénus de Milo si l’on exclut l’énigme de ce jour. D’abord en rapport avec une Côte Rôtie La Landonne Guigal 1991. Je vous cite « Ce vin, c’est la Vénus de Milo avec des bras. C’est Grace Kelly, Gisele Bundchen, ou toute autre symbolisation de la beauté parfaite. Le nez est un parfum pur, enivrant, qui donne l’image de la perfection. » Ensuite, lors d’un dîner au Carré des Feuillants, le restaurant du chef Alain Dutournier où « Lorsque l’on descend aux toilettes (mesdames, ne lisez pas plus loin), il n’existe qu’un urinoir. Et lorsque l’on est devant la vasque pour satisfaire un besoin traditionnellement qualifié de naturel, une Vénus de Milo nous regarde. Elle semble impressionnée par la vision qu’offre l’entrebâillement de notre pantalon, et son sourire en dit long. Elle est tellement impressionnée que les bras lui tombent. On se rebraguette avec un regain de masculinité. » Puis enfin en rapport avec un Château d’Yquem 1949 bût au restaurant Laurent sur lequel vous disiez « C’est précis comme la Vénus de Milo, attirant comme le sourire de Laetitia Casta, et solennel comme le couronnement de Napoléon 1er. » Ayant déjà proposé une réponse avec comme thèse la beauté féminine, j’ai immédiatement pensé à la présence possible d’une réplique de la Vénus de Milo dans le restaurant de Michel Rostang mais voilà une intuition que même Sherlok Holmes ne pourrait soutenir sans une enquête sur place. J’ai ensuite pensé à un lien géographique car en traçant une ligne droite depuis le restaurant de Michel Rostang jusqu’au musée du Louvre, le tracé passe presque parfaitement par le Carré des Feuillants où une seconde Vénus de Milo trône dans les toilettes… Mais cette hypothèse de solution est sans doute un peu trop ésotérique et davantage digne du Da Vinci Code. J’ai ensuite regardé la photo d’alignement des bouteilles au restaurant (dans le récit de votre 217ème diner) et l’on aperçoit la tête d’une jeune femme qui ressemble étonnamment à la Vénus de Milo… Mais j’imagine que mon désir ardent de trouver la solution à votre énigme me fait prendre des vessies pour des lanternes… J’ai donc décidé de revenir aux fondamentaux. D’abord la Vénus de Milo, sculpture incomplète mais néanmoins icône de la beauté féminine, découverte au XIXème siècle (1820) et fièrement exposée au Louvre grâce au don de Louis XVIII l’ayant lui-même reçu en don du Comte de Rivière en 1821. Ensuite le 217ème dîner au restaurant Michel Rostang, un dîner d’émotions et de résurrection, avec comme point culminant un vin du XIXème siècle, le Sigalas Rabaud 1896. Alors peut-être que le XIXème siècle est le point commun que je recherche, faisant également référence à l’une des originalités de votre 217ème diner puisque vous avez choisi de positionner un foie gras poché durant le repas à une place qu’il occupait dans les menus au XIXème siècle. Peut-être que le Sigalas Rabaud possède les qualités que vous associez à la Vénus de Milo, tout comme le Château Yquem 1949 au restaurant Laurent incarnait ces qualités également. Et peut-être que votre passion des vins anciens trouve une émotion particulière dans les vins du XIXème. Enfin, peut-être que je me trompe entièrement (c’est fort probable d’ailleurs) mais j’aurai au moins le plaisir de vous avoir diverti par cette lecture, tout comme je m’enrichis à chaque fois que je lis vos écrits. Au plaisir de vous revoir pour de nouvelles aventures.

mar. 24/10/2017 16:07  – Je tente ma chance à votre énigme… La cave du restaurant Michel Rostang possède une belle collection de chartreuses. Or, il s’avère que le massif de la chartreuse « détient » une des plus importantes concentrations de sabots de Vénus d’Europe (Cypripedium calceolus L.). Il s’agit d’une des fleurs les plus rare de France. J’ai trouvé sur Internet que : « La légende raconte, qu’un jour d’été, Vénus fût surprise par l’orage. En errant dans les bois, elle perdit l’un de ses brodequins orné d’or et de pourpre. Le lendemain, une jeune bergère, qui se rendait à la montagne avec son troupeau de moutons, passait par le bois et vit le beau petit soulier. Très émue, elle voulut le ramasser, mais le trésor disparut et à sa place elle ne trouva qu’une fleur ayant la forme d’un petit sabot ». « Cette orchidée montagnarde  se sert de son impressionnant labelle jaune pour piéger les insectes pollinisateurs. Attirés par la couleur vive du sabot de Vénus, ils entrent dans le labelle à la recherche de nectar. En vain, car il n’y en a pas ! » Quoique n’étant pas des insectes pollinisateurs, certains êtres humains sont également à la recherche de (divin) nectar ! Voici peut-être une piste…

mar. 24/10/2017 14:04  – Merci de votre reconnaissance à travers la diffusion sur votre blog de ma première proposition. Je ne m’avoue toutefois pas vaincu et je désirerais vous soumettre une nouvelle interprétation de votre énigme, davantage philosophique… Du point de vue philosophique (et pardonnez-moi si je vais un peu loin…), la Vénus de Milo nous permet de réfléchir sur le statue de l’œuvre en tant qu’œuvre vivante d’émotions et symbole de beauté alors que partiellement détruite car amputée de ses deux bras. Une question paradoxale qui pose la problématique de l’amputation ou de la destruction d’une chose pour mieux la rendre vivante. Votre 217ème dîner a amputé votre cave de plusieurs paires. Une paire de Champagne (le Mumm cuvée René Lalou et le Dom Pérignon), une paire de prestigieux Bourgogne (le Bâtard-Montrachet et la Romanée Saint-Vivant), une paire de prestigieux Bordeaux (le Château Mouton Rothschild et le Château Haut-Brion), une paire de Musigny (autre paire de prestigieux Bourgognes) et une paire de Sauternes (le Château Yquem et le Château Sigalas Rabaud). Pour autant, cette amputation n’est pas un mal car elle fait vivre votre passion et celle d’autres amateurs. De plus, votre récit de la dégustation de ces vins (dégustation qui peut s’apparenter à une forme de destruction) est une belle preuve vivante que la passion des vins anciens est une source forte d’émotions (le Sigalas Rabaud 1896 en est l’illustre exemple). Au même titre que la Vénus de Milo est une œuvre incroyablement vivante émotionnellement car amputée de ses deux bras, votre collection et votre passion sont d’autant plus vivantes à mesure que vous les amputez régulièrement de vos précieux flacons. Comme le disait M. Philippe Bourguignon (du restaurant Laurent) dans un numéro de la Revue des Vins de France « Le vin est la seule collection qu’il faut savoir sacrifier pour la faire vivre ». Votre 217ème dîner pourrait donc représenter ce paradoxe philosophique qui veut que l’on détruise l’existant pour finalement faire vivre ce qu’il représente. Ceci en opposition avec d’autres approches comme par exemple celle de M. Michel Chasseuil, qui préfère figer une collection qui finira par mourir d’elle-même… Est-là la réponse à votre énigme ? Je l’ignore. Mais j’ai la satisfaction d’avoir aimablement philosophé sur la question =).

mar. 24/10/2017 13:26  – je ne me sens aucunement légitime pour m’adresser à vous mais je ne résiste pas à la tentation de tenter ma chance. Je goute parfois certains vieux vins et j’ai pu admirer cette statue. Aussi vais-je exprimer ce qui selon ma sensibilité peut rapprocher ces deux expression de l’art… A mon sens vous pouvez faire référence à une forme d’épanouissement partagé par le corps et le cœur. Un sentiment magnifique de joie profonde et pure, hors du temps, hors du monde… De même que se sentir tellement chanceux de pouvoir vivre ces moments intellectuels et pourtant si proches du corps… Votre énigme me fait fichtrement penser à l' »esthétique » de Hegel. Merci de partager votre passion.

mar. 24/10/2017 12:35  – Après recherche, il apparaît que la plupart des millésimes ouverts lors de ce dîner ont également été des millésimes de « réinterprétation » de la fameuse Vénus de Milos.  Pour preuve: Vénus de Milo hystérique par Salvador Dali, 1983 – Romanée Saint Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983, / Vénus de Milo aux tiroirs par Salvador Dali, 1971 – Château Mouton Rothschild 1971, / Venus de Milo, titre de Miles Davis, enregistré le 22 1949 – Musigny Duvergey-Taboureau 1949, / … ou encore l’année 1966 qui a vu la naissance de l’artiste français Richard Orlinski ayant sculpté en 2015 la Vénus de Milo bleue!

mar. 24/10/2017 12:11  – Bonjour, la rapport entre votre rapport du 217 ème dinner et la Vénus de milo ne serait pas tous les bouchons cassés, et émiettés, semblables au bras de la fameuse Vénus qui sont eux aussi cassé?

mar. 24/10/2017 11:11  – J’espère avoir décrypté votre énigme selon votre pensée. Selon moi, la Vénus de Milo s’incarne dans le récit de votre 217ème dîner à travers la référence à la célèbre actrice Danielle Darrieux, qui s’est éteinte à l’âge de 100 ans et qui se définissait comme « une amoureuse », l’archétype de la beauté féminine d’avant-guerre, égérie d’Henri Decoin qui l’a filmé dans une demi-douzaine de films. Dès lors, la Vénus de Milo, censée représenter la déesse Aphrodite, la déesse de l’amour, est le symbole de la beauté féminine selon la culture Grec. De plus, au même titre que Madame Danielle Darrieux a rejoint il y a quelques jours son créateur, la Vénus de Milo pourrait faire de même puisque la Grèce revendique désormais cette œuvre d’art car des élus de l’île Grec de Milos ont lancé une campagne pour orchestrer son possible retour au source et donc au pays de son créateur. Enfin, le récit de votre dîner fait référence à plusieurs icônes féminines célèbres (Gene Kelly, Sisi Impératrice, la ballerine à l’Opéra et Danielle Darrieux). Ainsi, il semble clair que votre dîner fût placé sous le sceau de la beauté, à la fois de ces femmes que vous avez cité mais également des vins que vous avez présenté et dégusté et qui furent splendides.

mar. 24/10/2017 10:48 – la Vénus de Milo est visible au musée du Louvre, aussi nommé la Pyramide du Louvre. La Pyramide est aussi le nom du restaurant du célèbre chef de Vienne en Isère Fernand Point, époux de Madame Point à laquelle fait référence la petite étiquette du Champagne Mumm Cuvée René Lalou

mar. 24/10/2017 05:51 – Voici le lien selon moi entre votre dîner #217 et la Vénus de Milo : Il s’agit du Château d’Audour de la commune de Dompierre les Ormes où la vénus de milo a fait un séjour au début des années 1820. La commune est en Bourgogne du sud comme certains vins servis lors de ce repas.

mar. 24/10/2017 02:22 – Tout d’abord, il existe une version « à tiroir » de la Vénus de Milo, conçue par Dali, exposée au musée Dali de Beaune. – Bien sûr plusieurs vins de votre 217e dîner sont originaires des côtes de Beaune. – Mais surtout, l’étrange hommage à Mme Point pourrait faire référence à Mme Jeanne Marie Point dont le négoce, géré maintenant par ses descendants, est installé à Beaune, « résidence » de la fameuse Venus de Milo à tiroirs. En espérant toucher du clavier la vérité, je vous remercie pour les agréables lectures que votre blog propose.

mar. 24/10/2017 01:40 – À l’instar de l’ouverture des vins anciens, où rien n’est joué d’avance (tout comme ces bouchons successivement brisés lors de votre dîner!), la Vénus de Milo démontre par sa singularité et son histoire que les aspérités de la découverte ne ternissent jamais la beauté enfouie.

mar. 24/10/2017 01:08 – J’aurais pu dire que le rapport entre le compte-rendu du dîner et la Vénus de Milo se trouvait entre le magnifique Dom Pérignon dégusté et la « sculpture » qu’avait faite Jeff Koons pour ladite marque, nommée « Balloon Venus » et inspirée de la Vénus de Milo. Mais je penche quand même davantage pour une explication plus poétique qui est celle de tous ces bouchons brisés en mille morceaux et cette Vénus malheureusement brisée elle aussi. Sans oublier que Vénus (Aphrodite pour être précis) fut l’amante de Dionysos, dieu de la vigne et du vin.

mar. 24/10/2017 01:04 – je ne peux, pour répondre à l’énigme, qu’imaginer comparer l’émiettement et la fragilité des bouchons (dont nombre d’entre eux, vous le dites, étaient abîmés) à la fragilité de la Vénus. Mais en même temps, que de grâce, que de merveilles, sous la terre d’où elle a été extraite… Puissé-je avoir quelque chance d’avoir été l’archéologue de votre secret…

mar. 24/10/2017 00:45 – Comme la Vénus de Milo, mais dans des circonstances très différentes, les bras vous en tombèrent à la première gorgée de Dom Pérignon 1966…

LA RÉPONSE A L’ÉNIGME

Lorsque j’ai mis les photos sur le blog qui accompagnent le récit du 217ème dîner, j’ai ajouté cette photo :

Et j’ai été immédiatement frappé par le fait qu’entre le Haut-Btion 1926 et le Musigny de Voguë 1978 il y a une jeune personne qui travaille en cuisine dont la tête m’imposa un flash : c’est la Vénus de Milo.

et je vous avais donné un indice que vous n’avez pas saisi : si je parle de la Vénus de Milo, j’ai une photothèque pléthorique utilisable où on la voit splendide et nue, avec ses bras manquants. Or je n’ai mis dans l’énigme que la photo de la tête. Je ne mettais donc pas en valeur ce qui fait la spécificité de la Vénus de Milo, mais seulement sa tête, qui est la tête de cette cuisinière.

Et je suis particulièrement heureux, car on m’attendait sur une énigme hyper sophistiquée, alors qu’il s’agissait surtout de cette coïncidence incroyable qu’une cuisinière saisie sur ma photo ait, un court instant, le visage de cette si divine beauté.

Au vu des premières réponses, j’ai pensé que vous partiez sur des fausses pistes. Le fait que le vainqueur ait trouvé la réponse pour la réfuter est une jouissance de plus pour moi. Je vous raconterai mon repas avec lui autour d’un Haut-Brion 1970.

Merci à tous.

cognac Louis XIII de Rémy Martin mardi, 24 octobre 2017

Je suis invité à l’hôtel Royal Monceau en vue de déguster le cognac Louis XIII de Rémy Martin. Cet hôtel a créé un espace privé en forme de club où les membres peuvent déguster des alcools qu’ils conservent sur place et peuvent fumer des cigares en toute tranquillité. Il faut un passe pour accéder et une clé pour sa réserve personnelle. Je m’installe dans les fauteuils en cuir profond et mon hôte ouvre la belle bouteille de Louis XIII faite par Baccarat gravée du chiffre 1976 dont on me dit que ce n’est qu’un code et pas un millésime. Mon hôte avine les verres avec moult précautions et je suis prêt pour la dégustation qui commence bien évidemment par les parfums.

Dans mon verre le liquide a une robe très belle, d’un acajou doré. Le mot qui me vient pour le nez est « abouti ». L’alcool est doucereux, suave, mais surtout abouti. La deuxième image qui me vient, comme une évidence est « années 40 » et cette image correspond, pour mon palais à une moyenne car je perçois des eaux-de-vie centenaires en même temps que des jeunes, mais « abouties », cohérentes, équilibrées. Il y a dans ce cognac des signes de jeunesse mais aussi un velours qui n’apparaît qu’avec des alcools antiques.

La bouche est très différente du nez. Elle est plus jeune et plus tendue. A la place du velours du nez il y a une amertume agréable et un finale très beau et sans concession. L’alcool est pur, vif et très long. C’est un alcool qui claque, sans le sucré que suggérait le parfum.

Des tranches de jambon Pata Negra nous sont présentées et le jambon donne plus de hauteur en milieu de bouche au Louis XIII qui devient plus costaud. Le jambon donne de l’ampleur. Le cognac devient de plus en plus convivial et grand. C’est en conclusion le plaisir qui domine.

Enigme du 24 octobre 2017 lundi, 23 octobre 2017

L’énigme est la suivante : quel est le rapport entre la Vénus de Milo et le compte-rendu du 217ème dîner au restaurant Michel Rostang ?

https://www.academiedesvinsanciens.org/217eme-diner-au-restaurant-michel-rostang/

Le gagnant le plus rapide, dont la réponse donnera une explication claire et qui correspond à ce que j’ai imaginé, partagera avec moi un des vins anciens de ma cave, un Château Haut-Brion 1970, dans des conditions à définir avec lui en fonction de sa situation géographique.

La réponse sera disponible sur le blog dès qu’il y aura un gagnant ou au plus tard le 6 novembre. La réponse a été trouvée le 24 octobre à 16h37. Voir sur l’article donnant les réponses les plus incroyables les unes que les autres.

217th dinner at the restaurant Michel Rostang samedi, 21 octobre 2017

The 217th dinner is held at the restaurant Michel Rostang. The development of the menu was made with the chef Nicolas Beaumann in a very pleasant atmosphere of mutual understanding. We looked for the consistency of the dishes, not to disturb with additions that would contradict the main message and we decided that the sauces, whenever possible, would be served separately, in a small container for each guest, to side of the dish plate.

The wines were delivered a week ago, reassembled at 17 hours for the opening of the wines. Baptiste, the intelligent and competent sommelier, accompanied me throughout this crucial operation. A phenomenon occurred that surprised me: almost all the corks were extremely difficult to remove, as if they were blistered by a climatic event such as, probably, a change in atmospheric pressure. An unusually high number of corks tore or crumbled on the ascent. I took a lot longer than usual to remove the corks. The odors of the wines are encouraging, the most beautiful being that of the 1961 Yquem, perfume of a rare sensuality, followed by that of a moving bottle to open because it is 121 years old, a Sigalas-Rabaud 1896. The only wine which worries me is the Musigny de Vogüé 1978. At the opening the nose is deliciously Burgundian, with a rough and earthy character. But feeling the bottleneck again, I wonder if there is not a risk of cork. I pour some wine in a glass and there is no cork nose but an imprecise nose. The wine I taste is bland and flat. I will have to monitor its evolution. All other wines do not bother me.

We are ten, including two women, and there is a professional relationship between all, the table having been formed at the initiative of a friend used to my dinners. Michel Rostang and his wife whom my friend Stéphane knows well welcome us with wide smiles.

We take the aperitif standing with a Champagne Mumm Cuvée Rene Lalou magnum 1973. The bottle is very beautiful and marked on a small golden label of the words « Tribute to Madame Point » the wife of the famous chef of Vienne in Isere . The opening made by Baptiste in cellar more than an hour ago had delivered no pschitt. The champagne has no bubble but the sparkling is there. The champagne is very round, welcoming, open and sweet. It is a champagne of pleasure, comfortable. Small canapes with sardines give it a spectacular length.

I give the usual instructions to enjoy the dinner and we go to the table. The Mumm continues to be drunk on other small preparations that do not have as much effect as sardines. The one that represents an onion soup in a cromesquis on the contrary shortens the champagne which is nevertheless very pleasant. It opens a pleasant door on the world of old wines by being reassuring and coherent.

The menu made by Nicolas Beaumann with his team that we see through the glass that separates our room from the kitchen is: Artichoke soup with white truffle flavor / Minced raw porcini and langoustines, Daurenki caviar and shellfish consommé / Selle of lamb’s breast, death trumpets and roasted artichokes / king hare (lièvre à la royale) / stilton cheese / pickled mango ‘lime vanilla’, almond shortbread and light foam opaline.

While in the program there are two champagnes, the first will be followed by white wine to ensure the consistency of the menu, because inverting the dishes would not have been possible. The Bâtard-Montrachet Chanson Father & Son 1959 is especially distinguished by an absolutely exemplary perfume. We could be content to smell this wine forever without drinking it. What begins to shake the certainty of many of the guests is that a white wine of 58 years old may seem so young. Storm under the skulls! The wine is merry, with a calm and serene fruit and a gourmand chew. It forms with the white truffle a very nice agreement. I found the white truffle a little earthy and relatively un-sunny, but the agreement is a great gastronomic pleasure with this wine full of plenitude.

I went to see Baptiste at around 7:30 pm when he was going to open in cellar Champagne Dom Pérignon Vintage 1966 and I clearly heard the strength of the bubble when it explodes when the cap releases it. It was a beautiful sign. When I am served, I am dazed. The 1966 that I have already drunk twenty times is for my taste one of the greatest Dom Pérignon and I’m in front of the biggest 1966 and probably one of the biggest Dom Pérignon I’ve been given to drink. He is simply extraordinary and carries an infinite emotion. Everything about him is perfect. He is vibrant, his bubble is conquering, he is charming but also a warrior, taking possession of the palate and taming it I cannot believe it and I lock myself in my bubble (dare I say) to enjoy it. The conjugation cepes and caviar gives champagne a glory that delights me. I have just experienced a great moment with a sharp champagne, scathing, infinite length.

The saddle of lamb accompanies the two Bordeaux very dissimilar. The Château Mouton Rothschild 1971 has a very pretty light red-blood color. All in this wine is graceful. His speech is a gourmet madrigal.

Beside, the Château Haut-Brion 1926 is almost black in color. On the palate, this conquering wine is heavy with truffles and charcoal. This wine is like a worker whose face became black, the proud worker working in his Coal mine. But the wine is also noble and profound. It is rich and full and here too the certainties fall because this wine of 91 years has an extreme liveliness. I have long considered 1926 as the greatest High-Brion. This one is part of this line of excellence but it is not the biggest 1926 of the seven that I had the opportunity to drink. He holds his rank as we will see in the votes.

The royal hare (lièvre à la royale) of Michel Rostang is an institution. It is eaten with a spoon and despite its strength it seems « light ». Before the arrival of the guests, I went to the cellar with a glass to taste once again the Red Musigny Comte Georges de Vogüé 1978 and I found it flat, almost as at the opening. I warned the guests. But at the moment of serving it, Baptiste tells me: « you will see » and the miracle occurs, the Musigny has found its grace, its delicious Burgundy message made of subtlety. It is a very beautiful elegant Musigny that we drink now, without the shadow of a defect. What always amazes me is that in case of return to life, the resurrection is most often total, that is to say that the miracle doctor which is slow oxygenation, plays its role at 100% .

The second Musigny of the dinner, the Musigny Duvergey-Taboureau 1949 is very different from the Vogüé. He is rich, round and greedy. One could say that it is a little less noble than the 1978, but the year 1949 is so generous that it gives a gluttony to this wine of négociant and a generosity which delight me. We are with a round and happy wine, happy to live.

I had already had the experience of putting a wine from the Romanée Conti estate at the end of the meal and pairing it with a poached foie gras to a place on the menu of the meal that it had in the 19th century. The agreement between the poached foie gras and the Romanée Saint-Vivant Domaine Romanée Conti 1983 is simply masterful. The agreement is with the liver alone but also with the liver and its broth. And I like that we have the opportunity to taste both versions. The wine of Romanée Conti has a distinction, charm and complexity that make it elegant and subtle. He is pure grace, like a ballerina walking on the stage of the Opera Garnier. The wine is long, Burgundian. Its color is nicely clear. The markers of the domain, the rose and the salt, are there but rather discreet. We are in the presence of a wine of grace.

The stilton is perfect, slightly salty, slightly unctuous. It’s exactly what’s needed for Château d’Yquem 1961. This wine is Fred Astaire, it’s Gene Kelly in « Singing in the Rain », it’s the ultimate talent of talent. It’s the absolute Yquem, without too much force or too much sweetness. This is the one we would invite to each dinner if we had the opportunity. It is so comfortable and so much above anything sweet. There are Yquem more typical, heavier, more percussive, but this one is a Yquem of happiness.

But my heart will lean towards an exceptional wine. The Château Sigalas Rabaud 1896 had its original cork on which was clearly read the year, as on the label very tired and attacked by time. The nose of this wine is deep and subtle. It is a rich but calm sauternes. In the mouth he is noble. It is Sissi Empress presenting herself at the ball with a dress with infinite crinolines. The length in the mouth is extreme, with fat and silky. There is an affirmation, followed immediately by grace and charm. The wine is very dark, mahogany brown, but it does not have any sign of fatigue or age. He is tall and the dessert with mango suits him perfectly highlighting its beautiful acidity. I concentrate and forget the external world to enjoy this wine as I did for Dom Pérignon and even more the day we just learned the death of Danielle Darrieux a French actress at 100 years of age. She was loved by everyone. To have in hand a wine of 121 years which has no age but on the contrary has all of a young handsome prima dona, it moves me.

We will now vote for four wines out of the ten of the meal. We are ten to vote. What is always a reward for me is that the ten wines had at least one vote. None were discarded. Even stronger, six of the ten wines were named first. Haut-Brion 1926 was nominated three times first, Romanée Saint-Vivant 1983 and Yquem 1961 were named twice first and Dom Pérignon 1966, Musigny 1949 and Sigalas Rabaud 1896 were named once first.

The consensus vote would be: 1 – Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanee Conti 1983, 2 – Château Haut-Brion 1926, 3 – Château d’Yquem 1961, 4 – Musigny Duvergey-Taboureau 1949, 5 – Château Mouton Rothschild 1971, 6 – Champagne Dom Pérignon Vintage 1966.

My vote, very different from the one that compiles the votes of all, is: 1 – Château Sigalas Rabaud 1896, 2 – Champagne Dom Pérignon Vintage 1966, 3 – Château Haut-Brion 1926, 4 – Musigny Duvergey-Taboureau 1949.

The cook has been remarkable, very readable, very adapted to the wines. The service of wines by Baptiste was perfect. The service of the dishes was discreet and airy. We even had the chance to taste, offered by the restaurant, a Green Chartreuse of the early 40s, masterful and very strong, with a degree of alcohol imposing the diabolic sweetness.

In a happy and laughing atmosphere, we had a remarkable dinner in every way.

217ème dîner au restaurant Michel Rostang jeudi, 19 octobre 2017

Le 217ème dîner se tient au restaurant Michel Rostang. La mise au point du menu s’est faite avec le chef Nicolas Beaumann dans une ambiance très agréable de compréhension mutuelle. Nous avons recherché la cohérence des plats, à ne pas troubler par des ajoutes qui contrediraient le message principal et nous avons décidé que les sauces, chaque fois qu’on le pourrait, seraient servies à part, dans un petit récipient pour chaque convive, à côté de l’assiette du plat.

Les vins ont été livrés il y a une semaine, remontés à 17 heures pour l’ouverture des vins. Baptiste, l’intelligent et compétent sommelier m’a accompagné tout au long de cette opération cruciale. Un phénomène s’est produit qui m’a étonné : presque tous les bouchons ont été extrêmement difficiles à retirer, comme s’ils étaient boursoufflés par un événement climatique tel que, probablement, une variation de pression atmosphérique. Un nombre anormalement élevé de bouchons se sont déchirés ou émiettés à la remontée. J’ai mis beaucoup plus de temps que d’habitude pour retirer les bouchons. Les odeurs des vins sont encourageantes, la plus belle étant celle de l’Yquem 1961, parfum d’une sensualité rare, suivie de celle d’une bouteille émouvante à ouvrir car elle a 121 ans, un Sigalas-Rabaud 1896. Le seul vin qui me préoccupe est le Musigny de Vogüé 1978. A l’ouverture le nez est délicieusement bourguignon, avec un caractère rêche et terrien. Mais en sentant de nouveau le goulot, je me demande s’il n’y a pas un risque de bouchon. Je verse un peu de vin dans un verre et il n’y a pas de nez de bouchon mais un nez imprécis. Le vin que je goûte est fade et plat. Il faudra que je surveille son évolution. Tous les autres vins ne me soucient pas.

Nous sommes dix dont deux femmes, et il existe un lien professionnel entre tous, la table ayant été constituée à l’initiative d’un ami habitué de mes dîners. Michel Rostang et son épouse que mon ami Stéphane connaît bien nous accueillent avec de larges sourires.

Nous prenons l’apéritif debout avec un Champagne Mumm Cuvée René Lalou magnum 1973. La bouteille est d’une grande beauté et marquée sur une petite étiquette dorée de la mention « Hommage à Madame Point » l’épouse du célèbre chef de Vienne en Isère. L’ouverture faite par Baptiste en cave il y a plus d’une heure n’avait délivré aucun pschitt. Le champagne n’a pas de bulle mais le pétillant est bien là. Le champagne est très rond, accueillant, ouvert et doux. C’est un champagne de plaisir, confortable. Des petits canapés à la sardine lui donnent une longueur spectaculaire.

Je donne les consignes habituelles pour bien profiter du dîner et nous passons à table. Le Mumm continue d’être bu sur d’autres petites préparations qui n’ont pas autant d’effet que la sardine. Celle qui représente une soupe à l’oignon en un cromesquis au contraire raccourcit le champagne qui est malgré tout très plaisant. Il ouvre une porte agréable sur le monde des vins anciens en étant rassurant et cohérent.

Le menu réalisé par Nicolas Beaumann avec son équipe que nous voyons à travers la vitre qui sépare notre salle de la cuisine est : Soupe d’artichaut parfum truffe blanche / Emincé de cèpes et langoustines à cru, caviar Daurenki et consommé de crustacés / Selle d’agneau « allaiton », trompettes de la mort et artichauts rôtis / Lièvre à la royale / Fromage stilton / Mangue marinée « vanille citron vert », sablé aux amandes et opaline mousse légère.

Alors que dans le programme il y a deux champagnes, le premier sera suivi du vin blanc pour assurer la cohérence du menu, car inverser les plats n’aurait pas été possible. Le Bâtard-Montrachet Chanson Père & Fils 1959 se signale surtout par un parfum absolument exemplaire. On pourrait se contenter de sentir ce vin éternellement sans le boire. Ce qui commence à bousculer les certitudes de plusieurs des convives, c’est qu’un vin blanc de de 58 ans puisse paraître aussi jeune. Tempête sous les crânes ! Le vin est joyeux, d’un fruit calme et serein et d’une mâche gourmande. Il forme avec la truffe blanche un très bel accord. J’ai trouvé la truffe blanche un peu terrienne et relativement peu ensoleillée, mais l’accord est un accord de grand plaisir gastronomique avec ce vin de belle plénitude.

J’étais allé voir Baptiste vers 19h30 au moment où il allait ouvrir en cave le Champagne Dom Pérignon Vintage 1966 et j’avais nettement entendu la force de la bulle au moment où elle explose lorsque le bouchon la libère. C’était un beau signe. Quand on me sert, je suis hébété. Le 1966 que j’ai déjà bu vingt fois est pour mon goût l’un des plus grands Dom Pérignon et je suis en face du plus grand 1966 et probablement de l’un des plus grands Dom Pérignon qu’il m’ait été donné de boire. Il est tout simplement extraordinaire et porteur d’une émotion infinie. Tout en lui est parfait. Il est vibrant, sa bulle est conquérante, il est charmeur mais aussi guerrier, prenant possession du palais et le domptant. Je n’en reviens pas et je m’enferme dans ma bulle (si j’ose dire) pour en jouir. La conjugaison cèpes et caviar donne au champagne une gloire qui me ravit. Je viens de vivre un très grand moment avec un champagne vif, cinglant, de longueur infinie.

La selle d’agneau accompagne les deux bordeaux très dissemblables. Le Château Mouton Rothschild 1971 a une très jolie couleur rouge-sang claire. Tout en ce vin est gracieux. Son discours est un madrigal gourmand.

A côté, le Château Haut- Brion 1926 est d’une couleur presque noire. En bouche, ce vin conquérant est lourd de truffe et de charbon. Ce vin est une « gueule noire », l’ouvrier fier de travailler dans sa mine. Mais le vin est aussi noble et profond. Il est riche et plein et là aussi les certitudes tombent puisque ce vin de 91 ans a une vivacité extrême. J’ai depuis longtemps considéré 1926 comme le plus grand Haut-Brion. Celui-ci s’inscrit dans cette ligne d’excellence mais ce n’est pas le plus grand 1926 des sept que j’ai eu l’occasion de boire. Il tient son rang comme on le verra dans les votes.

Le lièvre à la royale de Michel Rostang est une institution. Il se mange à la cuiller et malgré sa force il paraît « léger ». Avant l’arrivée des convives, j’étais allé en cave avec un verre pour goûter une nouvelle fois le Musigny rouge Comte Georges de Vogüé 1978 et je l’avais trouvé plat, presque comme à l’ouverture. J’en avais prévenu les convives. Mais au moment de le servir, Baptiste me dit : « vous allez voir » et le miracle se produit, le Musigny a retrouvé sa grâce, son délicieux message bourguignon fait de subtilité. C’est un très beau Musigny élégant que nous buvons maintenant, sans l’ombre d’un défaut. Ce qui me trouble toujours c’est qu’en cas de retour à la vie, la résurrection est le plus souvent totale, c’est-à-dire que le docteur miracle qui est l’oxygénation lente, joue son rôle à 100%.

Le deuxième Musigny du dîner, le Musigny Duvergey-Taboureau 1949 est très différent du Vogüé. Il est riche, rond et gourmand. On pourrait dire qu’il est un peu moins noble que le 1978, mais l’année 1949 est tellement généreuse qu’elle donne une gourmandise à ce vin de négoce et une générosité qui me ravissent. On est avec un vin rond et joyeux, heureux de vivre.

J’avais déjà fait l’expérience de mettre un vin du domaine de la Romanée Conti en fin de repas et de l’associer à un foie gras poché à une place dans le menu du repas qu’il avait au 19ème siècle. L’accord entre le foie gras poché et la Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983 est tout simplement magistral. L’accord se trouve avec le foie seul mais aussi avec le foie agrémenté de son bouillon. Et j’aime bien que l’on ait la possibilité de goûter les deux versions. Le vin de la Romanée Conti a une distinction, un charme et une complexité qui le rendent élégant et subtil. Il est d’une grâce pure, comme une ballerine qui marche sur la scène de l’Opéra Garnier. Le vin est long, bourguignon. Sa couleur est joliment claire. Les marqueurs du domaine, la rose et le sel, sont là mais plutôt discrets. On est en présence d’un vin de grâce.

Le stilton est parfait, légèrement salé, légèrement onctueux. Il est exactement ce qu’il faut pour le Château d’Yquem  1961. Ce vin, c’est Fred Astaire, c’est Gene Kelly dans « Chantons sous la Pluie », c’est la facilité du talent ultime. C’est l’Yquem absolu, sans trop de force ni trop de douceur. C’est celui qu’on inviterait à chaque dîner si on en avait le loisir. Il est tellement confortable et tellement au-dessus de tout ce qui se fait de liquoreux. Il y a des Yquem plus typés, plus lourds, plus percutants, mais celui-ci, c’est un Yquem de bonheur.

Mais mon cœur va pencher vers un vin exceptionnel. Le Château Sigalas Rabaud 1896 avait son bouchon d’origine sur lequel on lisait distinctement l’année, comme sur l’étiquette très fatiguée et attaquée par le temps. Le nez de ce vin est profond et subtil. C’est un sauternes riche mais contenu. En bouche il est noble. C’est Sissi Impératrice se présentant au bal avec une robe aux crinolines infinies. La longueur en bouche est extrême, avec du gras et du soyeux. Il y a une affirmation, tout de suite suivie par de la grâce et du charme. Le vin est très foncé, acajou brun, mais il n’a pas le moindre signe de fatigue ou d’âge. Il est grand et le dessert à la mangue lui convient à merveille mettant en valeur sa belle acidité. Je me  recueille pour boire ce vin comme je l’ai fait pour le Dom Pérignon et encore plus le jour où l’on vient d’apprendre le décès à cent ans de Danielle Darrieux. Avoir en main un vin de 121 ans qui n’a pas d’âge mais au contraire a tout d’un jeune premier, cela m’émeut.

Nous allons maintenant voter pour quatre vins sur les dix du repas. Nous sommes dix à voter. Ce qui est pour moi toujours une récompense, c’est que les dix vins ont eu au moins un vote. Aucun n’a été écarté des votes. Plus fort encore, six des dix vins ont été nommés premier. Le Haut-Brion 1926 a été nommé trois fois premier, la Romanée Saint-Vivant 1983 et l’Yquem 1961 ont été nommés deux fois premier et le Dom Pérignon 1966, le Musigny 1949 et le Sigalas Rabaud 1896 ont été nommés une fois premier.

Le vote du consensus serait : 1 – Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983, 2 – Château Haut- Brion 1926, 3 – Château d’Yquem  1961, 4 – Musigny Duvergey-Taboureau 1949, 5 – Château Mouton Rothschild 1971, 6 – Champagne Dom Pérignon Vintage 1966.

Mon vote, très différent de celui qui compile les votes de tous, est : 1 – Château Sigalas Rabaud 1896, 2 – Champagne Dom Pérignon Vintage 1966, 3 – Château Haut- Brion 1926, 4 – Musigny Duvergey-Taboureau 1949.

La cuisine a été remarquable, très lisible, très adaptée aux vins. Le service des vins par Baptiste a été parfait. Le service des plats a été discret et aérien. Nous avons même eu la chance de goûter, offerte par le restaurant, une Chartreuse Verte du début des années 40, magistrale et très forte, d’un degré d’alcool imposant au sucré diabolique.

Dans une ambiance joyeuse et riante, nous avons vécu un dîner remarquable en tous points.

Champagne Mumm Cuvée René Lalou magnum 1973 (avec une intéressante étiquette « Hommage à Madame Point »)

Champagne Dom Pérignon Vintage 1966

Bâtard-Montrachet Chanson Père & Fils 1959

Château Mouton Rothschild 1971

Château Haut- Brion 1926

Musigny rouge Comte Georges de Vogüé 1978

Musigny Duvergey-Taboureau 1949

Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983

Château d’Yquem 1961

Château Sigalas Rabaud 1896

lorsque j’ai ouvert les trois premiers vins, je me suis demandé pourquoi tant de bouchons brisés ?

il y a beaucoup de bouchons cassés ou brisés qui m’ont résisté

Les bouteilles alignées en cave et alignées au restaurant :

cadeau du restaurant :

les verres en fin de repas

Déjeuner au restaurant Les Magnolias au Perreux-sur-Marne mercredi, 18 octobre 2017

Trois fois par an chacun, de mon frère ma sœur et moi, invite les deux autres à déjeuner. C’est mon tour et c’est au restaurant Les Magnolias au Perreux-sur-Marne. La gestion a changé il y a trois ans et aujourd’hui le restaurant est géré par Jean Morel, un ancien du groupe Accor avec en cuisine son fils Pierre-Henri Morel. Lorsque nous entrons, le sommelier Mehdi me reconnaît car il a participé au service des vins dans plusieurs de mes dîners dans des restaurants qui comptent à Paris.

La décoration du lieu est avenante, la carte des vins est intelligente et nous allons prendre le menu découverte avec cinq plats pour avoir une idée sur la cuisine du chef. Le menu, que nous ne découvrirons que lorsque Jean Morel nous le remettra en fin de repas est : cromesquis au fromage de chèvre / fines de claire servies chaudes, persil, citron vert, émulsion champagne et vieille mimolette / saumon fumé maison, caviar pressé / lotte de chalut rôtie au lard de Colonata, miso, salsifis fondants et noisettes torréfiées / sorbet poivron au poivre d’Espelette, Manzana / agneau label rouge farci, parfum de café, sucrines acidulées / assortiment : brie, comté, pecorino à la truffe / topinambours en texture, chocolat blanc poivré, sorbet vanille / chocolat, inspiration amandes sous toutes ses formes / confit et sorbet de figue, mousse légère, feuille de figuier, sablé noisettes.

Je vais le confesser avec joie, il y a bien longtemps que je n’avais pas eu un menu dégustation où il n’y a eu aucune critique à faire. Tout est intelligent, dosé, mesuré, goûteux et à aucun moment on ne se demande si une autre préparation aurait été meilleure. Ce jeune chef a du talent et de la mesure. C’est un sans-faute. La palme revient à l’huître extraordinairement goûteuse et riche. Un régal.

Le Champagne Egly-Ouriet Blanc de Noirs Grand Cru dégorgé en juillet 2015 après un passage en cave de 72 mois est un champagne vif, incisif et profond. Je l’adore pour sa pureté et cette obstination à être droit, rectiligne. C’est l’Egly-Ouriet tel que je l’aime, dans son affirmation volontaire.

Le Château Rayas Châteauneuf-du-Pape blanc 2006 est une merveille. Il est puissant, fumé, riche et opulent. C’est un vin d’amplitude. La lotte lui convient à merveille et ce qui est amusant, c’est que le faux trou normand que constitue le sorbet poivron, pas du tout agressif, donne au vin blanc des saveurs poivrées extrêmement intéressantes. Ce Rayas blanc est une réussite.

Le Côtes du Roussillon Le Pilou vin de pays des côtes catalanes domaine Olivier Pithon 2011 est une suggestion du sommelier. Le vin est agréable et extrêmement doux. Il est même doucereux. Il se boit avec plaisir mais il lui manque un petit quelque chose pour faire un grand vin. Moins de douceur et plus de profondeur. Mais il se boit bien, car il a suffisamment de longueur et de personnalité.

Des trois vins c’est le Rayas blanc qui se montre le plus brillant, grand vin de gastronomie. Le service est de belle qualité, l’ambiance est agréable, la cuisine est de très haut niveau. Il faudrait que le guide rouge use de sa baguette magique pour donner une étoile à un restaurant qui la mérite.

Dinner in Château de Beaune with glorious old wines mercredi, 18 octobre 2017

Gilles de Larouzière, president of the group, which includes Henriot champagne and Bouchard Père & Fils, organizes a charity dinner at the Château de Beaune for the benefit of the Association for the Climats of the vineyards of Burgundy . Aubert de Villaine, who has carried out the classification of the Climates within the UNESCO World Heritage site, will be the guest of honor and Guillaume d’Angerville, the current president of the association, will welcome us with Gilles.
At 5:30 pm, several of the dinner guests come to visit the historic cellars of the Château de Beaune. Between these walls of 7 meters thick ages the most beautiful treasures of the 19th century of this famous house. We visit, we chatter, we stretch before these flasks full of history which I had the chance to taste the most beautiful florets. We then climb up the towers of the old castle of the 11th century to contemplate the city under a particularly beautiful light in this half of autumn.
We disperse, without having had the opportunity to drink a glass of wine or a glass of champagne, each having to go and prepare for the dinner at 8 pm. Thirsty, I go into the kitchen of the castle where Philippe Prost prepares the bottles of the dinner. He tastes each of them and puts back teh corks, which I do not do. Marie-Christine responsible for the kitchens and the service, which alas will retire at the beginning of next year, welcomes me with a broad smile. She prepares the bouquets of flowers but stops in order to give me a glass of Champagne Henriot Brut NV that I needed. It is very pleasant to drink. Gilles de Larouzière comes to inquire about the state of the prestigious bottles of the dinner. I go to my hotel to prepare.
Shortly before 8 pm our assembly is already almost complete. We are more than twenty, perhaps thirty, in the beautiful drawing-room of the chateau and we taste Champagne Henriot Cuve 38 « the perpetual reserve » Blanc de Blancs of magnum which is elaborated according to the technique of solera and comprises of sixteen to eighteen vintages incremented each year of the new vintage. The champagne is noble but I am not so convinced because it lacks both a bit width and a little depth. But of course it is drunk with pleasure in good company.
We go for dinner and in the orangery we have a large table rather than round tables. This allows our two guests, Gilles de Larouzière and Guillaume d’Angerville, to welcome us for this charity dinner and to explain what will be used for the funds to be raised by this dinner but also by the small charity sale that will be organized during meals.
The menu was designed by the managers of Bouchard and implemented by Philippe Augé the chef of the Hostellerie de Levernois. Appetizers: pressed with foie gras and braised cabbage, dual consumed, celery apples and condiments / carpaccio of Saint-Jacques, cake and caviar Daurenki Imperial, iodized / white turbot sauce with crayfish red legs, butternut and salsify, sauce cremant de Bourgogne / Chevreuil and hare royal style, braised cabbage, porcini mushrooms and autumn fruits, velvet sauce / fresh and refined cheeses / red fruit bar and candied rhubarb, Vanilla chantilly and strawberry sorbet.
The Chevalier-Montrachet La Cabotte Grand Cru Bouchard Père & Fils 2002 is one of the white wines of the house Bouchard that I prefer. This 2002 is an olfactory bomb. Alcohol appears strongly in my nostrils. In the mouth the first impression I have after power and energy is minerality. It’s like I’m sucking an oyster shell. But this impression will change as soon as the amuse-bouche is served, heavy and tasty, which does not cohabit so much with the wine. Philippe Prost will tell me that the appetizer had been designed to go with Champagne Cuve 38. The wine becomes wider, more civilized with the partridge and I like its strength, its fullness and its warlike character. It is a very great wine of conviction.
The Corton-Charlemagne Grand Cru Bouchard Père & Fils magnum 1955 is served before the dish. Because of this, it seems rather frail after the imposing Cabotte wine and I find that to follow the 2002 is not a service to render. But the wine will flourish on the Saint-Jacques dish, ideal for wine. The ingredients of the dish are a little too numerous to ensure a total coherence but the 1955 imposes its refinement and its noble complexities. It is a very great wine of balance and subtlety while knowing to assert itself. As much presence for a 62-year-old wine astonishes my neighbors of tables that are generally unfamiliar with wines of this age.

The dish that resembles a hare à la royale is a real success. It is coherent, powerful and perfectly suited to the Volnay Caillerets Premier Cru Bouchard Père & Fils 1934. What is curious is that the label as well as the menu do not indicate « old Cuvée Carnot » while the cork Philippe Prost shows me, original cork, clearly bears that mention. The wine has a beautiful red color without the shadow of a tiled trace. The wine is rich, powerful and it is necessary for the dish, and it is of perfect balance, percussion, pepper, rich with beautiful red and black fruits. Its finish is brilliant.
Jean Louis Bottigliero the owner of the Hostellerie de Levernois came to see if everything goes well and we reassure him readily because the chef’s cuisine is refined and expressive.
The Beaune Greves Vineyard of the Child Jesus First Cru Bouchard Père & Fils 1928 is presented in bottles of port and Philippe tells us that two vintages were bottled in bottles of porto, 1928 and 1976, I do not know why. The first glass served me seems imprecise in the final and Philippe, very nicely, handed me his glass that does not have this defect. We have with this wine everything that demonstrates the unusual character of the 1928 vintage. There is the charm and complexity of the Beaune Greves I love, but there is a vibration and a rhythm in this wine that puts it to exceptional levels. One feels the richness and the nobility of a wine that does not end and whose final is a blow of whip. The nobility of tone and the subtlety of this wine are rare.
If one compares 1934 to 1928, the youngest, Volnay, is resolutely merry, greedy, the great wine of pleasure while the 1928 is a wine of nobility, of which one must listen to all the nuances religiously. The Beaune Greves was served on relevant cheeses and a very flowing Epoisses, but it would probably have taken a more cooked and subtle dish. This remark is at the margin because this meal was a real success.
A present auctioneer will direct the sale of four bottles from the cellar of the ancient wines of Bouchard in favor of the association Climats of the vineyard of Burgundy. There are 1966, 1947, 1939 and 1937 proposed to the guests. I made the best bid for the Beaune Greves Vineyard of the Child Jesus First Cru Bouchard Père & Fils 1937. It is my modest contribution to the works of this association.
There was a crowd around the table different from that of the other dinners to which I was invited, where I met wine professionals or experienced amateurs. Tonight is more the world of finance and of the charity and some friends of the vine growers. Seeing the astonished eyes of my neighbors, observing that the wines of 1955, 1934 and 1928 can be as lively and expressive, is for me a pleasure of which I never get tired.
It would be impossible for me to classify the four wines of the meal as they have immense qualities in very different directions. It was a memorable meal in a friendly atmosphere.

Dîner de grands vins au château de Beaune dimanche, 15 octobre 2017

Gilles de Larouzière, président du groupe qui compte notamment le champagne Henriot et la maison Bouchard Père & Fils organise au château de Beaune un dîner caritatif au profit de l’association des Climats du vignoble de Bourgogne. Aubert de Villaine qui a mené à bien le classement des Climats au Patrimoine Immatériel de l’Humanité de l’UNESCO sera l’invité d’honneur et Guillaume d’Angerville, actuel président de l’association nous accueillera avec Gilles.

A la mi-octobre je pars en voiture vers Beaune par un soleil radieux et le thermomètre montera jusqu’à 24° ce qui est assez fou. Il fait chaud à Beaune, comme en été. Je m’arrête à mi-chemin pour une collation et je me demande ce qui se passe. Les toilettes sont propres et bien entretenues, la serveuse au bar est souriante, un client qui aurait dû se faire servir avant moi me cède son tour, le café crème est bon, la tarte au citron est mangeable et de bon appétit. Autour de moi je vois des sourires. Que se passe-t-il ? Est-ce un rêve ? Y aurait-il encore en France le sens du service ? Apparemment oui et c’est une bonne nouvelle. Et je vérifie chaque fois que lorsque l’on se sent concerné, impliqué dans son travail, on atteint l’excellence.

J’arrive à l’hôtel des Remparts qui est tout à côté du château de Beaune et je suis accueilli par Claude et Élyane Épailly les propriétaires de l’hôtel, qui semblent tout heureux de me voir. Il faut dire que je suis fidèle et que j’ai l’habitude de leur raconter les extravagances auxquelles je participe.

A 17h30 plusieurs des convives du dîner viennent visiter les caves historiques du château de Beaune. Entre ces murs de 7 mètres d’épaisseur vieillissent les plus beaux trésors du 19ème siècle de cette célèbre maison. Nous visitons, nous bavardons, nous nous extasions devant ces flacons chargés d’histoire dont j’ai eu la chance de goûter les plus beaux fleurons. Nous montons ensuite en haut des tours de l’ancien château-fort du XIème siècle pour contempler la ville sous une lumière particulièrement belle en cette moitié d’automne.

Nous nous dispersons, sans avoir eu l’occasion de boire un verre de vin ou une coupe de champagne, chacun devant aller se préparer pour le dîner de 20 heures. Ayant soif, je rentre dans la cuisine du château ou Philippe Prost prépare les bouteilles du dîner. Il goûte chacune d’elles et les rebouche. Marie-Christine responsable des cuisines et du service depuis toujours, qui hélas prendra sa retraite en début d’année prochaine, m’accueille avec un large sourire. Elle prépare les bouquets de fleurs mais s’arrête pour me donner un verre de Champagne Henriot Brut sans année dont j’avais bien besoin. Il est fort agréable à boire. Gilles de Larouzière vient s’enquérir de l’état des bouteilles prestigieuses du dîner. Je pars à mon hôtel me préparer.

Peu avant 20 heures notre assemblée est déjà presque complète. Nous sommes plus d’une vingtaine, peut-être trente, dans le beau salon du château et nous goûtons le Champagne Henriot Cuve 38 « la réserve perpétuelle » blanc de blancs magnum qui est élaboré selon la technique de la solera et comprend de seize à dix-huit millésimes incrémentés chaque année du nouveau millésime. Le champagne est noble mais je ne suis pas tellement convaincu car il lui manque à la fois un peu de largeur et un peu de profondeur. Mais bien sûr il se boit avec plaisir en bonne compagnie.

Nous passons à table pour le dîner et dans l’orangerie on a dressé une grande table plutôt que des tables rondes. Ceci permet à nos deux hôtes, Gilles de Larouzière et Guillaume d’Angerville de nous souhaiter la bienvenue pour ce dîner caritatif et d’expliquer à quoi seront utilisés les fonds qui seront récoltés par ce dîner mais aussi par la petite vente caritative qui sera organisée en cours de repas.

Le menu a été conçu par les responsables de Bouchard et mis en œuvre par Philippe Augé le chef de l’Hostellerie de Levernois. Amuse-bouche : pressé de perdreau au foie gras et chou braisé, consommé double, pommes céleri et condiments / carpaccio de Saint-Jacques, tourteau et caviar Daurenki Impériale, sauce iodée / blanc de turbot aux écrevisses pattes rouges, butternut et salsifis, sauce au crémant de Bourgogne / Chevreuil et lièvre façon royale, bonbon de chou braisé, cèpes et fruits d’automne, sauce velours / fromages frais et affinés / barre aux fruits rouges et rhubarbe confite, Chantilly vanillée et sorbet fraise.

Le Chevalier-Montrachet La Cabotte Grand Cru Bouchard Père & Fils 2002 est un des vins blancs de la maison Bouchard que je préfère. Ce 2002 est une bombe olfactive. L’alcool s’affiche puissamment dans mes narines. En bouche la première impression que j’ai après la puissance et l’énergie c’est la minéralité. C’est comme si je suçais une coquille d’huître. Mais cette impression va se modifier dès que l’amuse-bouche est servi, lourd et goûteux, qui ne cohabite pas tellement avec le vin. Philippe Prost me dira que l’amuse-bouche avait été conçu pour aller avec le champagne Cuve 38. Le vin devient plus large, plus civilisé avec le perdreau et j’aime sa force, sa plénitude et son caractère guerrier. C’est un très grand vin de conviction.

Le Corton-Charlemagne Grand Cru Bouchard Père & Fils magnum 1955 est servi avant le plat. De ce fait, il paraît assez frêle après l’imposant vin de la Cabotte et je trouve que de suivre le 2002 n’est pas un service à lui rendre. Mais le vin va s’épanouir sur le plat de Saint-Jacques, idéal pour le vin. Les ingrédients du plat sont un peu trop nombreux pour assurer une totale cohérence mais le 1955 impose son raffinement et ses complexités nobles. C’est un très grand vin d’équilibre et de subtilité tout en sachant s’affirmer. Autant de présence pour un vin de 62 ans étonne mes voisins de tables qui sont généralement peu familiers de vins de cet âge.

Le plat qui ressemble à un lièvre à la royale est une vraie réussite. Il est cohérent, puissant et convient parfaitement au Volnay Caillerets Premier Cru Bouchard Père & Fils 1934. Ce qui est curieux c’est que l’étiquette ainsi que le menu n’indiquent pas « ancienne cuvée Carnot » alors que le bouchon que Philippe Prost me montre, bouchon d’origine, porte clairement cette mention. Le vin a une couleur d’un beau rouge franc sans l’ombre d’une trace tuilée. Le vin est riche, puissant et il faut ça pour le plat, et il est d’un équilibre parfait, percutant, poivré, riche avec de beaux fruits rouges et noirs. Son finale est brillant.

Jean Louis Bottigliero le propriétaire de l’Hostellerie de Levernois est venu voir si tout se passe bien et nous le rassurons volontiers car la cuisine du chef est raffinée, et expressive.

Le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Premier Cru Bouchard Père & Fils 1928 est présenté dans des bouteilles de porto et Philippe nous dit que deux millésimes ont été embouteillés en bouteilles de porto, le 1928 et le 1976, je ne sais pour quelles raisons. Le premier verre qui m’est servi me semble imprécis dans le finale et Philippe, très gentiment, me tend son verre qui n’a pas ce défaut. On a avec ce vin tout ce qui démontre le caractère hors du commun du millésime 1928. Il y a le charme et les complexités propre au Beaune Grèves que j’adore, mais il y a une vibration et un rythme dans ce vin qui le met à des niveaux exceptionnels. On sent la richesse et la noblesse d’un vin qui n’en finit pas et dont le finale est en coup de fouet. La noblesse de ton et la subtilité de ce vin sont rares.

Si l’on compare le 1934 et le 1928, le plus jeune, le Volnay, est résolument joyeux, gourmand, le grand vin de plaisir alors que le 1928 est un vin de noblesse, dont il faut écouter toutes les nuances religieusement. Le Beaune Grèves a été servi sur des fromages pertinents et un Epoisses très coulant, mais il aurait sans doute fallu un plat plus cuisiné et subtil. Cette remarque est à la marge car ce repas a été une vraie réussite.

Un commissaire-priseur présent va diriger la vente de quatre flacons de la cave des vins antiques de Bouchard au profit de l’association des Climats du vignoble de Bourgogne. Il y a 1966, 1947, 1939 et 1937 proposés aux convives. J’ai fait la meilleure enchère pour le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Premier Cru Bouchard Père & Fils 1937. C’est ma modeste contribution aux œuvres de cette association.

Il y avait autour de la table un public différent de celui des autres dîners auxquels je fus convié, où je retrouvais des professionnels du vin ou des amateurs chevronnés. Ce soir c’est plus le monde de la finance et du caritatif et quelques amis des vignerons. Voir les yeux étonnés de mes voisins constatant que des vins de 1955, 1934 et 1928 peuvent être aussi vivants et expressifs est pour moi un plaisir dont je ne me lasse pas.

Il me serait impossible de classer les quatre vins du repas tant ils ont des qualités immenses dans des directions très différentes. Ce fut un repas mémorable dans une ambiance d’amitié.

la visite de la cave des vins anciens

même dans cette cave surveillée il y a des bouteilles qui s’évaporent !

dans les jardins en haut des tours et vue sur la ville. les lavandes sont grises et les buis odorants

vue de l’orangerie et du château

Gilles de Larouzière nous explique l’histoire

Dans l’arrière cuisine Philippe Prost ouvre les bouteilles pour le dîner et Marie-Christine est près de lui

le dîner