Week-end du 15 août – déjeuner chez des amis lundi, 14 août 2017

Le week-end du 15 août est une institution. Sont présents deux amis gastronomes parisiens, un couple d’amis locaux, ma fille cadette ma femme et moi. Ce midi, nous allons déjeuner chez nos amis locaux sur leur terrasse qui surplombe la mer, les îles d’or et les salins d’Hyères. Les vins proviennent de tous les participants.

L’apéritif est tellement copieux qu’il pourrait nourrir un honnête chrétien – ce qui n’est ni un pléonasme ni un oxymore – pendant plus d’un an. Il me faudrait plus d’un bulletin pour nommer tout ce que notre amie a conçu, allant de crevettes, tapas de poulpe, foie gras poêlé au poivre de Madagascar jusqu’à toasts à la truffe d’automne, Lomo, coquilles Saint-Jacques, olives vertes, tapenade à l’intense romarin, purée de pois chiche et tout ce qui se croque ou se grignote.

Le Champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle ouvert il y a plus de deux heures est d’une largeur et d’une opulence qui se comparent volontiers à celles du Comtes de Champagne 2005 de la veille. Ce champagne, c’est le gendre idéal, prêt à rendre service à tout le monde. Il est consensuel comme peu de champagnes. J’ai voulu que l’on goûte ensuite un Champagne Lanson Noble Cuvée 1988. Après le champagne si accueillant, il faut s’habituer à la typicité de ce champagne vif, cinglant, et intense. Son nez est d’une grande noblesse, complexe et profond. Ma fille suggère une parenté de goût entre ce champagne et Krug et c’est vrai qu’il est vif et racé dans la ligne de Krug. Immédiatement je pense à Krug 1996 que ce beau Lanson évoque. Sur les toasts au foie gras, c’est une merveille. Un troisième champagne avait été envisagé mais il est raisonnable de l’écarter car la suite sera longue.

Notre amie a réalisé un bar cru façon gravlax à l’avocat qui est une œuvre d’art tant les fleurs comestibles sont jolies et colorées. C’est un Silex Blanc Fumé de Pouilly par Louis-Benjamin Dagueneau 2014 apporté par ma fille qui l’accompagne. La chair du bar est divine. Le vin est agréable mais il n’a pas la tension que j’attendrais d’un Silex. Il lui manque sans doute quatre à cinq ans. L’accord est naturel et pertinent. Nous nous régalons avec ce vin cristallin et cette chair si pure.

Notre hôtesse, notre amie, aime cuisiner selon les recettes de chefs aussi est-ce difficile de lui demander de simplifier ses recettes au profit du vin. Aujourd’hui, elle nous fait une démonstration brillante de sa capacité à s’adapter aux grands vins. Le pigeon est présenté en filets et pastillas pour les ailes et abats, avec une purée façon Robuchon. C’est simple, clair, lisible et goûteux.

Le Château Mouton-Rothschild 1985 a été ouvert à 10 heures. Il est tout en douceur, charme et séduction. Il est de belle structure et glisse en bouche avec délectation. J’ai voulu lui associer un Château Palmer Margaux 1990 que j’ai ouvert à 11 heures. Le niveau était dans le goulot. Sa couleur est plus foncée que celle du Mouton, son goût est plus intense, plus profond, noir de truffe. Ce sont deux vins très opposés, le Mouton dans le charme et la séduction et le Palmer guerrier dans l’affirmation. Le Palmer est plus riche, plus structuré, plus intense et je le préfère nettement mais ma fille préférera le Mouton. Ces deux vins sont très grands et l’accord est d’une grande exactitude, le Mouton plus sur les filets et le Palmer plus sur la pastilla.

Pour les fromages, camembert Jort, chèvre, mais pas pour le gorgonzola nous buvons un Trévallon Vin de Pays des Bouches-du-Rhône rouge 2005 qui est d’une invraisemblable douceur, accompli comme un cercle parfait, rond, équilibré, d’une facilité incroyable tout en étant gourmand. S’il n’y avait pas eu les deux bordeaux auparavant, on se pâmerait devant ce vin accompli. On s’en régale bien sûr.

Le dessert est un « Megève », une meringue au chocolat. C’est un Porto Colheita Krohn 1966 qui l’accompagne. Sa couleur est tuilée, terreuse, indiquant que le vin a sans doute vieilli un peu vite. Son parfum enivre de pruneaux, prunes et café. En bouche il est fort, charmeur, intense de pruneaux et de café.

Notre amie a réalisé une cuisine de très haut niveau qui lui permettrait sans nul doute d’ouvrir un restaurant si elle le désirait. Les vins sont pour moi dans l’ordre suivant : Palmer 1990, Lanson 1988, Mouton 1985 et sur un étage différent et tous ex-aequo, Trévallon 2005, Grand Siècle, Silex 2014 et Porto Krohn 1966. On pourra bien sûr penser que je ne suis pas objectif puisque les deux premiers sont mes vins, mais on dira que je le suis si j’ajoute que ce fut un très grand repas.

Week-end du 15 août, diner au restaurant La Promesse dimanche, 13 août 2017

Nous arrivons au domaine de Terrebrune dont les bâtiments et le restaurant sont situés au milieu des vignes, quand la nuit n’est pas tombée. Le restaurant La Promesse est niché dans ce paysage qui sent bon la Provence.

Jean-Marc nous accueille. Il a déjà ouvert trois vins que nous avons choisis, le champagne à 19 heures et deux vins rouges à 16h30. Je regarde les bouchons et celui du Terrebrune est peu engageant. La partie centrale du bouchon est noire et rétrécie. Nous nous installons et Jean-Marc nous annonce que Valérie Costa, du fait de notre réservation de vins, a conçu un menu « Aventure » en fonction de ceux-ci. Nous allons donc nous laisser guider.

L’apéritif est rituel, gressins, jambon italien tranché sur l’instant pour nous, petites olives dénoyautées très goûteuses. Le Champagne Bollinger Grande Année 2005 a un parfum très noble, plus noble que celui du Comtes de Champagne 2005 bu ce midi. En bouche le vin est expressif et grand mais il est loin d’atteindre la largeur du vin du déjeuner. Il est droit, un peu strict et manque un peu de longueur. Et ce qui m’étonne c’est que je le trouve moins glorieux que le même Bollinger bu il y a peu dans ce même restaurant. Il est évident cependant que ce champagne est agréable et grand mais pas au niveau dont j’avais la mémoire.

L’entrée est un corail d’oursin et des dés d’esturgeon fumés à l’huile d’orange. Je n’imaginais pas que la chair d’esturgeon puisse être aussi agréable.

Nous sommes proches de la fin du champagne aussi pour le plat suivant de seiches et Vongole carbonara, Jean-Marc propose de nous offrir un vin blanc dont il nous dira plus tard qu’il est cher au cœur de Valérie et de lui-même, un Saint Aubin Les Murgers des Dents de Chien Françoise et Denis Clair 2009. Ce vin dans cette année est en effet le premier vin qui a été commandé par le premier client à l’ouverture du restaurant. Et la bouteille que nous allons boire est la dernière qui reste en cave de ce millésime. C’est un cadeau de haute valeur sentimentale. Le plat est délicieux. La mâche des fines tranches de seiche cuites comme des pâtes est superbe et les petites coques excitent bien le goût. Le vin est d’une adéquation parfaite au plat. Il est ample, large, gourmand et aussi profond. C’est sur les coques que je ressens la plus belle résonance. Merci Jean-Marc pour cette proposition et ce cadeau.

Le foie gras poêlé, mogettes et noisettes du Piémont est d’une qualité exceptionnelle. Il est d’une douceur rare. Il est d’une subtilité qui correspond à celle du Chambertin Grand Cru Jean & Jean-Louis Trapet 1999. Je suis définitivement amoureux de ce vin délicat, complexe et distillant ses charmes en strates raffinées. C’est un vin féminin, au velours exquis. Un bonheur et une longueur infinie.

Le morceau de cochon du sud-ouest croule sous la truffe d’été très odorante, accompagnée d’un risotto. Je goûte en premier le Domaine de Terrebrune Bandol 1994 et après le raffinement du bourgogne, je lance : « ça c’est le loulou de banlieue qui joue de ses biscottos ». Mes amis et ma fille le trouvent beaucoup plus racé que ce que suggère mon expression et c’est ma fille qui très vite nous alerte sur l’extinction invraisemblablement rapide de ce vin. C’est alors seulement que je prends en main et sens le bouchon dont la partie basse sent le suri. Et le vin exhale maintenant ces impressions de suri, de vin qui a tourné. Et cela va s’amplifier au fil du temps. Jean-Marc nous propose de changer la bouteille mais nous avons un tel programme devant nous que nous déclinons cette aimable proposition.

Cochons et risotto sont gourmands et j’ai envie de goûter la viande de porc avec le Saint-Aubin et l’accord est plus grand encore avec ce vin blanc qu’avec le chambertin.

Je décide de faire l’impasse sur le dessert qui est un chocolat moelleux en feuillantine au poivre de Sichuan, mais Jean-Marc me harcèle gentiment en me disant que Valérie n’apprécierait pas que je quitte le lieu sans dessert aussi en impromptu réalise-t-elle une tombée de pêches de vigne au calisson. Je céderai des parts du calisson à mes voisins.

Le fait que pour notre quatrième visite à ce restaurant l’enthousiasme ne s’émousse pas est un signe qui ne trompe pas. Les moments forts sont le foie gras, les seiches, le chambertin et ce diable de Saint-Aubin si bon et inattendu. Le week-end du 15 août est lancé mais en fait il ne démarre officiellement que demain, chez nos amis locaux.

Le Terrebrune 1994 a un gros problème de bouchon

Le week-end du 15 août – début samedi, 12 août 2017

Le week-end du 15 août est un des points culminants de l’été. Nous recevons des amis gastronomes et avec des amis locaux nous organisons deux repas, l’un chez eux, l’autre chez moi. Les amis de Paris arrivent par avion et nous déballons les vins qu’ils ont apportés. La tradition était de fêter leur bienvenue avec un magnum de champagne Salon, mais comme pour toutes les traditions il y a un jour un 1789 qui se déclenche. J’ouvre un Champagne Comtes de Champagne Taittinger 2005 et mon intuition est de le boire sur deux formes d’olives grecques Kalamata, l’une étant à l’huile et l’autre au vinaigre avec des olives bio dénoyautées. Le champagne est généreux, chaleureux, ouvert, ensoleillé, avec une belle maturité et une plénitude de bon aloi. Au début, les olives bio au vinaigre me plaisent plus que les autres mais au fil du temps, les olives vinaigrées deviennent plus acides alors que les olives à l’huile s’épanouissent et deviennent meilleures avec le champagne. On constate ainsi que l’aération joue aussi pour des olives.

Le champagne, s’il fallait un mot pour le définir, ce serait « chaleureux ». Comme la bouteille est vite finie, j’ouvre un Champagne Dom Pérignon 2004. Il apparaît sans même essayer que les olives ne conviendront pas à ce champagne tout en finesse, plus en suggestion qu’en affirmation. Aussi irons-nous vers du Jabugo Pata Negra à la chair assez ferme et qui n’a aucune trace de noix. Le champagne s’affirme alors, romantique, évoquant les fleurs blanches. Ma fille cadette trouve au nez des évocations de sel. Il est évident qu’il aurait fallu inverser l’ordre des champagnes, mais sur des tempuras d’oignons et de fleurs de courgettes, le Dom Pérignon est un possible compagnon.

Après le repas de salades diverses qui ne sont pas les amies de vins, une sieste s’impose, car nos amis parisiens nous invitent à dîner au restaurant La Promesse.

les grignotages

Déjeuner avec des cousins de passage mardi, 8 août 2017

Des cousins viennent nous rendre visite pour la journée. Au déjeuner, nous ferons des côtelettes d’agneau aux herbes de Provence sur la plancha, car nous avions aimé le premier essai que nous avions fait. Pour l’apéritif, j’ouvre un Champagne Dom Pérignon 1998. J’ai suivi ce champagne depuis son arrivée sur le marché et j’avais un peu moins d’enthousiasme que Richard Geoffroy, l’homme qui « fait » Dom Pérignon. Depuis quelque temps, je constate que ce champagne prend pleinement sa place dans la lignée des beaux Dom Pérignon. Celui-ci a un nez extrêmement expressif et en bouche c’est un champagne gourmand, joyeux, qui fait ami-ami avec mon palais. Le boire réjouit. C’est sur de la poutargue que nous en profitons.

Pour la délicieuse viande extrêmement gourmande elle aussi, j’ouvre un Clos de Vougeot Domaine Méo-Camuzet 2001. Le niveau est à trois millimètre sous le bouchon. La couleur est encore noire de jeunesse et le nez est très intense et profond. Ce sont des fruits noirs qui apparaissent au nez, ainsi que des bois tropicaux.

En bouche ce bourgogne est noble, délicat et raffiné, jouant de façon parfaitement juste ses complexités. S’il fallait un mot pour qualifier ce vin, ce serait « élégant ». J’adore son raffinement et l’accord se trouve merveilleusement avec la viande au goût très lisible. Une salade de brugnons a conclu ce beau repas.

Le lendemain il reste un fond de chacun des deux vins. Le Dom Pérignon 1998 évolue vers des notes plus citronnées, gardant toujours autant de charme. Et le Clos de Vougeot 2001 est beaucoup plus floral, avec des évocations d’anis, de menthe et en arrière-plan de cassis. Ces deux vins ne sont que du plaisir.

Article dans le Magazine « M » du Monde du 5 août 2017 samedi, 5 août 2017

Courez vite acheter ce magazine car il y a en page 25 un intéressant article d’Alexandre Duyck sur le vin et les collectionneurs de vins rares et anciens. Il y a des choses très intéressantes et qui méritent la lecture, mais je réagis que quelques points :

Je n’ai aucune compétition avec Michel Chasseuil ni recherche de titre. Nous avons deux conceptions très différentes de la collection de vins anciens. Je respecte la démarche de Michel Chasseuil qui a trouvé des pépites exceptionnelles mais il a la volonté d’amasser alors que j’ai la volonté de boire les trophées que j’ai acquis.

L’idée que j’ignorerais « férocement » Michel Chasseuil est sans fondement. J’ai envie au contraire de le rencontrer mille fois s’il le faut pour le convaincre de partager les flacons de sa cave.

L’argument cité par Chasseuil selon lequel ayant bu déjà tous les grands vins il peut se permettre de laisser mourir ceux qui restent est absolument stupide. Rien ne justifie de laisser mourir des trésors gustatifs.

Heureusement nous partageons la même passion, par des chemins différents.

Enfin, Chasseuil parle tout le temps d’argent et se montre fier d’avoir refusé une offre stratosphérique. Lorsqu’on collectionne du vin pour le boire, on détruit de la valeur puisqu’un vin bu vaut zéro euro. Alors, à quoi sert de parler de la valeur qu’il avait eue ?

Plusieurs repas de famille avec de beaux vins vendredi, 4 août 2017

Comme au théâtre de boulevard, les enfants et petits-enfants se succèdent, partent et reviennent dans la maison du sud où nous les accueillons. Chaque mouvement d’arrivée est le prétexte à fêter les nouveaux venus. Ce soir, j’ouvre un Champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle magnum Brut sans année qui n’est pas très ancien. Ce qui me surprend très favorablement, c’est que ce champagne ne me fait pas penser qu’il devrait avoir quelques années de plus. Il a déjà une sérénité extrêmement plaisante. Généreux, épanoui, avec une acidité bien contrôlée, ce champagne est à la fois grand mais aussi de soif. Il accepte toutes les saveurs auxquelles on l’associe, anchois légers, anchoïade crémeuse, poutargue et olives noires.

Il est suivi par un Champagne Dom Pérignon 2002. Ce champagne est agréablement romantique, mais force est de constater qu’après le Grand Siècle épanoui, il a du mal à s’imposer tant il joue sur un registre de discrétion gracile. Inutile de dire qu’on s’en régale, mais le passage dans cet ordre n’est pas à son avantage.

Deux jours plus tard, il est question de Pata Negra aussi me semble-t-il nécessaire d’ouvrir un Champagne Salon 1996 qui soutiendra le choc de cette viande puissante. Le Salon est glorieux, un peu dans le même esprit que le Grand Siècle, mais avec encore plus d’amplitude. Ce champagne est parfait, aux fruits citronnés et à la douceur combinée à une affirmation de soi. Tout en ce champagne me plait.

Il est tentant alors d’ouvrir un Champagne Krug 1996. Le champagne combine des évocations florales et un fruit rouge très affirmé. La complexité de ce champagne est extrême. Mais une petite acidité en fait un champagne tendu et non charmeur. A l’évidence les deux champagnes sont radicalement opposés. Mon cœur ira vers le Salon, moins complexe mais plus serein. Il est à noter que la couleur du Salon est très claire alors que celle du Krug est déjà s’un ambre marqué.

Sur deux viandes, l’une de charolais l’autre d’Angus, j’ai ouvert un Grange des Pères 2007, ce vin de l’Hérault qui jouit d’une cote d’amour chez les afficionados du vin. Et j’avoue que je ne mords pas à ce vin. Le nez est très pénétrant, de cassis et de bois et en bouche c’est – à mon goût – monolithique et flatteur. Je cherche la finesse et la race et je ne trouve que de la séduction. C’est un vin qui se boit, bien sûr, mais qui n’est pas dans mes recherches. Le charolais est d’une chair intense mais d’une mâche dure. L’Angus est chaleureux et goûteux. Ce soir, le Salon 1996 est mon vainqueur.

La famille va très vite se raréfier aussi ai-je envie de faire plaisir. L’apéritif se fera avec le Champagne Dom Pérignon 1973. Le bouchon vient facilement et le pschitt est très faible. Le champagne a une couleur très ambrée, d’un bel ambre doré. Le niveau en bouteille est quasiment parfait. Le nez évoque de beaux fruits d’été et en bouche, ce sont des fruits comme l’abricot et la pêche qui dominent sur un fond de miel. Nous commençons à gouter de petites sardines et des olives noires mais la douceur du champagne me semble appeler un foie gras. L’accord du foie gras de canard entier mi cuit avec le champagne est absolument divin. Le champagne en sort grandi, opulent, majestueux.

Des côtelettes d’agneau préparées avec des herbes de Provence sur la plancha, accompagnées de petites pommes de terre aux aulx et traces de tomates du jardin, sont associées à une Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986. Le niveau dans la bouteille est à moins de cinq millimètres sous le goulot, ce qui est rare pour un vin de 31 ans, et je prends bien garde en extirpant le bouchon de ne pas tirer trop fort, car avec si peu d’air entre vin et bouchon, le risque est que le vin ne jaillisse de la bouteille lors de la dépression. Le nez du vin est une merveille, évoquant la garrigue. Le vin est noble, royal, d’une jeunesse qu’on ne pourrait imaginer. Large en bouche il trouve dans les herbes de Provence des côtelettes un écho de première grandeur. C’est un pur régal.

Ayant en mémoire le récent Grange des Pères, mes réserves sur le vin de l’Hérault sont confirmées, un monde séparant ces deux vins. Le vin de Guigal dégage une émotion qui le place très haut dans l’échelle des plaisirs.

Un grand champagne mature mais fruité avec un délicieux foie gras et des côtelettes aux herbes avec une brillantissime Mouline ont donné à ce repas des accords qui en font un des plus beaux repas de cet été.

Le livre de l’été dimanche, 30 juillet 2017

L’été est souvent l’occasion de s’occuper de soi, de prendre de bonnes résolutions et de mettre en œuvre des conseils avisés.

Savoir remettre en cause son alimentation, non seulement ça fait du bien mais c’est gratifiant.

Le livre « Faites-vous du bien ! » est aux éditions Hachette Cuisine.

Tiens, comme c’est bizarre, l’auteur s’appelle Agathe Audouze. Y aurait-il un rapport ? Oui, c’est ma fille cadette, propriétaire des restaurants Pinson à Paris.

Déjeuner au restaurant de l’hôtel BOR dimanche, 30 juillet 2017

Le lendemain nous retournons au restaurant de l’hôtel BOR situé directement en aplomb de l’eau, non loin du port d’Hyères. Le menu sera soit de poisson, soit de camerones, servies avec un très goûteux risotto. Mes filles et moi prenons chacun des vins au verre. Pour ma fille aînée ce sera un Côtes de Provence rouge Sainte-Marguerite 2016. Ce vin a un parfum explosif fait de cassis exubérant et de copeaux de bois. Je ne l’ai pas goûté, juste senti. Ma fille cadette a pris un Côtes de Provence blanc Domaine de Porquerolles 2016 et j’ai pris un Côtes de Provence Clos Mireille Domaine d’Ott blanc 2016. Lorsque le vin est servi froid, l’avantage est au Clos Mireille. Lorsque le vin s’est réchauffé dans le verre, le vin de l’île se montre plus généreux.

Mais je dois dire pour ces trois vins qu’il me paraît assez invraisemblable que l’on commercialise des vins si jeunes, qui habituent les consommateurs à des amers abrupts alors que l’on sait qu’avec cinq ans de plus on a des vins beaucoup plus soyeux et agréables à boire.

La terrasse sur la mer est très agréable, mêlant vacanciers en transats et clients du restaurant. La cuisine simple est de bonne réalisation. On se sent bien dans ce restaurant de bord de mer.

Le soir, ma fille cadette a soif alors que les tomates du jardin, crues ou cuites, ne sont pas de grandes amies des vins. J’ouvre un Côtes de Provence Château la Tulipe Noire 2016 pour elle. Le nez de ce vin est très expressif. En bouche il a beaucoup de qualités et la présence de Tibouren se ressent, lui donnant une belle personnalité. A lui aussi quelques années ne feraient pas de mal.

le soir :

La famille se réunit dans le sud samedi, 29 juillet 2017

Ma fille aînée arrive par avion juste à l’heure du dîner. Ma femme voulait faire des salades, des tomates et des melons et je lui avais dit : « je te parie que lorsque notre fille se présentera, elle dira : qu’est-ce qu’on boit ». Aussi le menu fut transformé en un poulet aux oignons. Ce qui devait arriver arriva et j’aurais dû parier. J’ouvre un Château de Pibarnon Bandol rouge 2001. Au premier nez, c’est une explosion de garrigue. En bouche, on se sent envoûté par cette garrigue. Le vin respire la garrigue. 2001 est une année de grande réussite pour Pibarnon et je me suis demandé si un vin plus jeune ne serait pas plus excitant car avec ses seize ans la perte de vivacité du fruit limite un peu la richesse de sa palette aromatique. C’est un grand vin, idéal sur le poulet et aussi sur un camembert bien affiné, mais qui ne gagnera plus grand-chose au vieillissement.

Ma fille cadette arrive à minuit après avoir conduit en voiture depuis Paris. Pour la réconforter, je lui sers un verre du Pibarnon qu’elle apprécie et sirote doucement en regardant les étoiles lors d’une nuit particulièrement étoilée.

Déjeuner au restaurant La Promesse à Ollioules samedi, 29 juillet 2017

Une amie voulait inviter ma femme et moi dans un restaurant qu’elle aurait aimé nous faire découvrir. Hélas, si l’on peut dire, nous avions déjà profité de l’excellente cuisine de Valérie Costa, du restaurant La Promesse à Ollioules, situé au cœur du vignoble du domaine de Terrebrune. Nous arrivons tous les trois pour déjeuner et le lieu est plus charmant et champêtre à la lumière du jour que de nuit.

Jean-Marc, le mari de Valérie, qui fait office de directeur de salle et de sommelier, m’annonce avoir reçu des Bollinger Grande Année 2005 qu’il préfère au 2004. Nous allons donc prendre l’apéritif avec le Champagne Bollinger Grande Année 2005 qui est infiniment plus passionnant que le 2004. Il a une richesse, une plénitude et une émotion qui le placent très haut dans la hiérarchie de ce champagne Grande Année. Le jambon ibérique est toujours aussi intensément goûteux, les petites olives dénoyautées se mangent comme des bonbons et les gressins sont frais et légers. Tout commence parfaitement.

Un petit amuse-bouche n’ajoute pas grand-chose à notre plaisir. Les langoustines crues au caviar sont magiques et donnent une résonnance au champagne qui est un supplément d’âme.

Valérie nous fait le plaisir d’ajouter au menu des petites portions de poulpes à la truffe d’été, un régal.

Le veau aux petites pommes de terre et à l’escalope de foie gras va accompagner un Terrebrune Bandol rouge 1985. Au premier nez j’ai tout de suite senti des accents de café et de torréfaction mais j’ai validé la bouteille. Au second nez j’ai cru à un soupçon de bouchon qui ne s’est pas confirmé par la suite. Bu seul le vin donne un petit signe de légère fatigue. Mais dès que le délicieux plat entre en scène, le vin devient vif et fringant et fait oublier la torréfaction. Notre amie n’imaginait pas qu’un Bandol de 32 ans pouvait avoir cette vivacité. Le vin est très plaisant. Pour le finir, Jean-Marc nous sert le reste du saint-nectaire que nous avions entamé lors de notre dernière visite en ce lieu. Après nous, il n’y en aura plus. Le fromage flatte bien le vin qui devient plus droit et précis. Le champagne est moins son camarade.

Lorsque les assiettes sont enlevées, le torréfié réapparaît montrant un vin qui a dépassé les limites de sa vivacité, même s’il a été très pertinent sur le plat de veau très cohérent, avec un foie gras de grande qualité. La cuisine de Valérie Costa est fondée sur de bons produits et une recherche de cohérence que j’apprécie.