Yquem 1994 samedi, 25 février 2017

Depuis des années je conversais sur un forum puis par internet avec une femme professeur de lettres à Libourne et auteur d’un roman documenté sur le vin. Elle vient à Paris voir sa fille et me rend visite au restaurant Taillevent où se tiendra un dîner de vins anciens entre amis. Elle est accompagnée d’une pétulante femme de 86 printemps. J’ouvre pour elles une demi-bouteille de Château d’Yquem 1994. La couleur du vin est d’un or abricot. Le nez est plaisant, discret, très différent de la bouche qui a beaucoup plus de joie de vivre. Ce vin complexe lance des évocations dans des myriades de directions. Je vois des abricots mélangés à des abricots secs, des fruits exotiques frais ou confits, et des saveurs d’automne comme celles d’un mendiant avec des noix et noisettes. Le vin est glorieux et serein. C’est un bel Yquem qui est loin d’avoir atteint son apogée et vieillira bien. Pour la souriante octogénaire c’était son premier Yquem, ce qui ajoute au plaisir d’avoir partagé ce vin.

ne rêvons pas, ce n’est pas 1894

déjeuner au Yacht Club de France mercredi, 22 février 2017

Une fois de plus notre rencontre de conscrits se passe autour d’un déjeuner au Yacht Club de France. L’imagination débordante de Thierry Le Luc, le directeur de la restauration et du chef Benoît Fleury est sans limite y compris pour nos capacités d’absorption car l’apéritif fut un ballet incessant de mille merveilles. Charcuteries, poutargue, brochette de sole et citron confit, ris de veau et giroles, homard sur toast, d’autres encore et une invraisemblable mini-fondue où chacun trempe un petit bout de pain avec un petit stick en bois ont représenté l’équivalent d’un repas en un apéritif. Tout est d’une imagination certaine et cela me plait sauf peut-être la coquille Saint-Jacques enveloppée d’une tranche d’andouille, ou quelque chose d’approchant, où l’accord terre-mer ne fonctionne pas du tout.

Nous passons à table pour ce menu : assiette de fruits de mer / rôti de filet de bœuf charolais entier, pommes château, pommes farcies, haricots verts, asperges, jus de viande, sauce Choron / fromages d’Éric Lefebvre MOF / craquant au chocolat.

Nous commençons l’apéritif avec le Champagne Delamotte 2007 que tout le monde de notre groupe apprécie pour sa fluidité, sa vivacité et sa fraîcheur. C’est le champagne de belle soif par excellence.

Le Saint-Aubin Premier Cru les Cortons domaine Larue 2011 s’il est frais et fruité, ne va pas beaucoup plus loin. Il manque de longueur, d’épaisseur et de profondeur. Mais il se boit quand même sur le plateau copieux. Pour les huîtres, je redemande un peu de Delamotte.

Le Château Les Carmes Haut-Brion 2002 est joyeux, souriant, de belle mâche et de belle largeur. Sur la viande d’une tendreté exceptionnelle, goûteuse à souhait, il est parfaitement adapté, n’ayant pas la puissance d’une grande année mais une cordialité de bon aloi.

Le Château Smith-Haut-Lafitte 1998 est plus dense, plus profond, plus riche de sensations de truffes noires, mais il n’a pas le charme du Pessac-Léognan. Il est un peu trop strict même s’il est bon.

Le Champagne Ruinart rosé est agréable et se boit pour lui-même car l’accord avec le dessert au chocolat ne se trouve pas. Il rafraîchit agréablement nos palais après cette abondance de mets de grande qualité. Une fois de plus nous avons passé en ce lieu de marins un bien agréable déjeuner.

les amuse-bouche

le repas

Dictionnaire encyclopédique des cépages mercredi, 22 février 2017

Voici le message que j’ai reçu que je m’empresse de transférer à tous les amateurs de vin.

 

Sujet : Réédition du Dictionnaire encyclopédique des cépages et de leurs synonymes de Pierre Galet

 

 

Nous sommes l’éditeur du Dictionnaire encyclopédique de cépages de Pierre Galet. Peut-être ne l’avez-vous pas encore acquis ?

 

Cet ouvrage vient d’obtenir le Grand Prix de l’Organisation internationale de Ia vigne et du vin, le jury l’ayant reconnu comme une œuvre unique et indispensable à toute personne de la filière viticole.

 

Paru mi-2015, il a été très vite épuisé, et il nous a semblé primordial de le rééditer. Comme vous pouvez vous en douter, l’impression d’un tel ouvrage entraîne des frais très importants.

 

C’est pourquoi nous avons décidé de lancer une souscription vous permettant de l’acquérir à un prix très avantageux, soit 80,00 € au lieu de 98,00 €, et 70,00 € si vous en commandez 5 exemplaires ou plus. Ce qui une très bonne occasion de l’obtenir à des conditions exceptionnelles !

 

Voici notre annonce (https://libre-solidaire.fr/epages/e02491b5-ce3a-4c00-b187-dc9ff39194fc.sf/fr_FR/?ObjectPath=/Shops/e02491b5-ce3a-4c00-b187-dc9ff39194fc/Categories/Dictionnaire_encyclopedique_des_cepages_souscription … …)

 

Bien cordialement,

 

Les éditions Libre & Solidaire

 

Présentation des vins du groupe Vega Sicilia mardi, 21 février 2017

Comme chaque année la société Vins du Monde invite à venir déguster les derniers vins mis en bouteilles de la Bodega Vega Sicilia. Les vins seront présentés Gonzalo Itturiagga le nouveau directeur de l’œnologie des cinq domaines du groupe présidé par Pablo Alvarez, qui représente un volume de l’ordre de 1,5 million de bouteilles.

L’Oremus Dry Mandolas Hongrie 2015 fait de furmint a un nez de vin jeune où pointe le caramel. Il a une belle attaque de réglisse et fleurs blanches. Il est consistant et a un finale solide. Ce qui frappe c’est la solidité et la cohérence. Il a une belle fraîcheur qui combine les fleurs blanches et le caramel. Je connaissais déjà ce vin qui est une très agréable surprise à un prix très doux.

Le Macan Clasico Rioja 2013 a un nez chaud de raisins très mûrs. C’est un vin très accueillant et peu complexe. Dans le final il y a du fenouil et de l’artichaut ce qui le rend agréable, voire chaleureux. Il a un très bel équilibre et peu de complexité. Il a l’aspect sauvage de la jeunesse, de belle râpe. J’aime ce vin gourmand paysan.

Le Macan Rioja 2013 est à 100% en tempranillo. Il a un nez charmeur et doux. Il est sensuel et beaucoup plus consensuel. Le finale est de jus de cassis. Il raconte moins de choses que le Clasico. Fluide c’est un vin de table gratifiant, mais on trouverait de par le monde beaucoup de vins de ce calibre. Je préfère l’équilibre du Clasico.

Le Pintia Toro 2012 a un nez très élégant et profond. Il est très enjôleur et son parfum est prometteur. Il est servi frais et c’est volontaire car il est plutôt lourd en bouche, voire lourdaud, ce qui contraste totalement avec l’impression olfactive. Il est trop gourmand, pas assez fluide et je ne l’aime pas.

Le Alion Ribera del Duero 2013 a un nez plus ferme, noble et affirmé. C’est un vin raffiné, mis en valeur par le précédent. Il a de beaux fruits rouges et noirs et un finale très beau, de cassis et de fruits frais. Il claque en bouche. Il est très long et porte 14,5° d’alcool. Il est très fruité, tannique mais il sait ajouter de la fraîcheur, avec un peu d’anis dans le finale. Gonzalo nous dit qu’il aime travailler les vins des années fraîches comme 2013.

Le Valbuena 5° Ribeira del Duero 2012 a un nez riche et noble. Le nez accueillant donne envie. La bouche est douce, doucereuse et le finale a de la pâte de fruit, du poivre et de la framboise. Tout en ce vin est doucereux. Ce vin agréable qu’aime beaucoup Gonzalo manque de tension. On dirait un porto sec. On le sent gastronomique mais il faudra l’attendre au moins dix ans pour qu’il gagne en vivacité. L’année 2012 est la première où ce vin a été fait sans merlot, avec 100% de tempranillo. Dans le finale, il reste du poivre sur la langue.

Le Vega Sicilia Unico Ribera del Duero 2005 a un nez magique. Je reconnais ce vin que j’adore, l’emblème du groupe Vega Sicilia. Quel raffinement ! Il a la fraîcheur, la finesse, des petites baies fines de cassis que l’on croque. Quelle promesse ! Il est encore trop jeune et tout fou et l’on sent qu’il va se renfermer bientôt, mais quel bonheur. Il est fluide et ne donne aucune impression d’alcool. Il a une belle acidité et un finale frais et fluide. C’est un très grand vin qu’il faut attendre au moins dix ans. Il est follement sensuel, il donne soif ! On a envie d’en reprendre.

L’Oremus 3 Puttonyos Tokaji 2010 a un nez de citron et de pomelos. Il est très beau, avec un beau fruit sucré, du litchi. Le finale est sucré avec la belle acidité d’un bonbon acidulé. C’est un vin de belle fraîcheur qui dans sa jeunesse est gastronomique.

On sent que Gonzalo le nouveau directeur de l’œnologie est un passionné. Les vins sont intéressants mais mon cœur est sélectif. Si certains vins sont à 100% tempranillo, mon cœur est 100% Vega Sicilia Unico, vin exceptionnel.

Tasting at Krug, Krug lunch at the Crayères dimanche, 19 février 2017

1 – champagne tasting at Krug’s headquarters

For years I met Margareth Henriquez, the president of the Maison Krug, in various wine events and we promised to meet at the Krug headquarters to taste the champagnes of her prestigious house together. Finally, the opportunity presents itself. It is planned that I will go to the headquarters one Friday at 11 am and then we will have lunch at the restaurant of the hotel Les Crayères. The idea comes from extending the stay at the hotel with my wife. As she does not drink, she will not go to Krug’s house but will share the planned lunch with the president who is commonly known as Maggie.

On the appointed day, after taking my wife to the hotel, I was greeted at the headquarters of the Krug House by Maggie, Eric Lebel the oenology director and cellar master and by Olivier Krug who will not stay with us because he will be traveling. In the reception room we have a Champagne Krug Grande Cuvée 163rd edition which logically must have been marketed after a disgorgement in 2013. This champagne enjoys a nice acidity. He is round, noble and rich.

We then go into the tasting room, Maggie, Eric and me, to taste seven wines from a high level program. The list of wines is written in chalk on a board with their identification number, which first contains the number of the quarter of the year of disgorgement, then the two digits of the disgorgement year and finally three figures which are certainly representing a lot.

The Champagne Krug Clos d’Ambonnay Blanc of Noirs 2000 has for identification 4 13 063. It was therefore disgorged in the fourth quarter 2013. It has a very discrete nose. In the mouth I feel rather shy, but it will assert itself. It is of great finesse and a beautiful elegance, all in suggestion.

The Champagne Krug Clos du Mesnil Blanc de Blancs 2000 has for identification 2 13 033. I recognize myself much more in this wine of nice acidity and in the finale very surprising of red fruits. More used to the wines of the Côte des Blancs, I am more at ease with this superb champagne.

L’Ambonnay is an aesthetic wine, very subtle. It is difficult but great. Le Mesnil is very noble with charm. It has a nice salty side and a beautiful citrus signature.

The Champagne Krug 2000 has an identifier 1 14 009. The nose is superb. It combines minerality and a toasted side. Its complexity is extreme. It is wide. It is nice for me to taste without Maggie or Eric imposing what I have to find in each wine, which does not prevent discussion. Eric says of the Krug 2000 that it is characterized by balance and precision. Its breadth and width are more assertive than for the previous two 2000. He has everything for him. I love it.

What fascinates me is that the evocation of red fruits of the Clos du Mesnil is that of the raspberry that is sometimes found in very old burgundy of the 10s, of the 20th century of course. And even more curious, the glass of Eric does not have this evocation of red fruits. The fullness of the Krug 2000 is impressive.

Thanks to her phone, Maggie can order on the Krug website the music that accompanies each of the champagnes. The association music and wine is very subjective and personal but one can really feel when a music is in harmony with a champagne and when it is not, which occurs little since musicians worked with the winemakers to arrive at these musical suggestions. We compared our emotions with pleasure.

The Champagne Krug Grande Cuvée 156th edition has an identifier 4 06 001. It is made on the basis of champagnes of 2000 which makes its presence consistent with previous champagnes. It’s immense. It is very beautiful, accomplished with evocations pastry, It is very sharp.

The Champagne Krug Grande Cuvée 157th edition has an identifier 3 07 001. It has much less volume and width. I definitely prefer the 156th. If we are to compare them we could say that the 157th is romantic and the 156th is a warrior.

The Champagne Krug 2002 has a superb nose. It is a comfortable and brilliant champagne. It has a nice fluidity and a great ease. For this champagne I suggested a dance by Fred Astaire and Ginger Rogers. The musical accord was relevant.

The Champagne Krug Grande Cuvée 158th edition has an identifier 1 08 002. It is joyous, glorious. It evokes a bolero. Its fruit is superb, gilded. It is done on a 2002 basis.

My ranking of this brilliant series would be: 1 – Krug 2000, 2 – Clos du Mesnil 2000, 3 – Great Cuvée 158th and 4 – Krug 2002. But each champagne is a marvel.

I am very impressed with the way Krug’s president, who ran South American LVMH companies, appropriated the history and philosophy of Krug House. She bases her vision of the champagnes of her house on the principles erected by Joseph Krug more than a century and a half ago. Eric Lebel is also in this guideline and the champagnes I have tasted are located in the Champagne elite. There are undoubtedly more sensual champagnes but we are here in the aristocracy of Champagne.

Eric abandons us because he is busy with other programs. We go Maggie and I to the Hotel des Crayères for a lunch prepared by the house Krug and Philippe Jamesse, to which I will add some surprises of my cellar.

2 – lunch at the Crayères restaurant

After the tasting at Krug House we will have a lunch, Margareth Henriquez, President of Krug, and I at the restaurant of the Hotel Les Crayères. My wife will attend lunch, but she will not drink. I told Maggie I would bring some surprises but I had not specified anything. When I go to the table I see that a menu is printed and includes the following wines: Krug 2003, Krug Grande Cuvée 159th edition, Krug rosé and Krug Collection 1990.

It happens that this morning, before the visit to the headquarters of Krug, I had given my wines to Philippe Jamesse the sommelier of Les Crayères. Seeing them, he told me that with what was planned, it was going to cause problems. We are therefore faced with a choice between the four wines on the menu and the three that I brought, which are a Krug Grande Cuvée of the 90s, another Krug Grande Cuvée of the 80s and a very rare bottle, a Krug Private Cuvée vintage 1964.

Moreover, we brought from the tasting made at the headquarters, the bottle of Clos du Mesnil 2000 and that of the Krug 2000. Four and three make seven and two make nine. Nine wines for two is excluded. The choice is difficult. I suggest that we drink: Clos du Mesnil 2000, Krug 2000, Krug Collection 1990, the Krug Grande Cuvée of the 80s and the Krug Private Cuvée vintage 1964.

As we completely change the champagnes of a meal made for other wines, I suggest that the champagnes will all be served together, each of us choosing to drink those he wants and compare them as he pleases. The program is launched, Maggie having a little trouble imagining that we drink all the wines at the same time.

There is also the problem of glasses. Philippe Jamesse, sommelier but also creator of glasses has put on table his biggest glasses. Maggie and I would be more favorable to smaller glasses. At our convenience we can taste the champagnes in the two glasses. The Clos du Mesnil 2000 will be much better in the large glass, which reinforces the suggestion of Philippe Jamesse but for the Private Cuvée 1964 it is the small glass that suits the best.

The menu prepared for the initial list of wines is: tartare locust lobster, iodized caviar plum juices / black truffle squash risotto, shells gently grilled / salmon cod pickled in half-salt butter, mosaic Beets and truffles / pig’s back cooked gently on the grill, organic vegetables cooked in salt crust under the embers / crispy chestnuts, fresh grapefruit, brown emulsion and maple syrup.

It is an impressive menu, intended to show the gastronomic flexibility of champagne wines.

The Champagne Krug Clos du Mesnil Blanc de Blancs 2000 is much more lively and dynamic when it is drunk with dishes than when it was tasted in the tasting room. It is more fruity in the large glass than in the small one. It has a sovereign charm, magic on the langoustine tartare. Its aerial complexities give it a certain romanticism.

The Champagne Krug 2000 confirms the richness he delivered in the tasting room a short time ago. He is powerful, assertive, righteous and noble. It is solid as a rock.

The three other champagnes will bring us into the fascinating world of champagnes at maturity. The Champagne Krug Collection 1990 was disgorged two years ago. It is wonderful because it has a crazy youth combined with material of high maturity. His balance is splendid. It is fluid, its fruit is asserted. It twirls in the mouth like fireworks.

Philippe Jamesse opens my wines. He shows me the corks of rare beauty. The smooth, clean and healthy cylinders are a pleasure to see. The Champagne Krug Grande Cuvée of the early 80’s is miraculous. It has a charm and a chew that pianote exotic fruits that are confusing. Its fullness on the palate is spectacular. It was with this champagne that I wanted to convince Maggie, the president of Krug, of the necessity of letting the « Grande Cuvée » grow older than any standard for having sublime wines. The evidence is there, in our glasses. This Champagne is at the top of what Champagne can give.

When Philippe pours into my glass the first drops of the Champagne Krug Private Cuvée vintage 1964, I know that it is won. The color of the champagne is of a rare purity, magically gilded. In the mouth this wine fills me with ease and pride. Not that I have any responsibility in making this champagne, but I am glad that it allows me to show to the one who decides the future of Krug how well age makes successful champagnes. This joyful plenitude with its beautiful golden fruit is a consecration.

I have Philip taste the two champagnes I brought. For me, the 1964, because of its rarity and perfection, won the vote, with a generous and opulent fruitiness and extreme complexity. But like Philippe I am obliged to note that it is the Krug Grande Cuvée of the 80s which is the most glorious, the most sensual, the most joyfull champagne.

It is interesting to make some considerations about this meeting and this experience. I wanted to meet Margareth Henriquez to show her by example that the Krug house should make his Grande Cuvée grow old much longer to offer them to wine lovers in their fullness. The wines that I brought here are the brilliant demonstration. But I could see that the movement is moving. From the moment that Krug writes on the labels the order number of the edition of the Grande Cuvée, we will differentiate all the Grandes Cuvées and obviously the wine market will seize it. Prices will inevitably explode, as the 158th edition will be worth more than the 163rd, for example, but the amateur will be able to favor the editions that he wants to drink. The market will bubble with this revolution. Maggie will pursue a policy of stock retention which, paradoxically, was virtually non-existent. Beautiful days are expected for this champagne, except perhaps for our wallets. But taste will triumph.

There is another teaching in the opposite direction for me. I came to defend the thesis of the constitution of stocks of champagnes with disgorgement of origin, so that we keep the champagnes in the version of their first delivery to the market. I am in fact more favorable to the initial disgorgements than to the recent disgorgements. During this meal, the Champagne Krug Collection 1990, which was disgorged two years ago, showed a vivacity and vigor that justifies that Krug should also make these champagnes « Collection » which rejuvenate Champagnes preserved on lees. It is probably necessary in the long-term storage policy to encourage the storage of the two versions, in similar proportions.

During this meal we discussed a thousand things. My ranking would be: 1 – Grande Cuvée year #80, 2 – Private Cuvée 1964, 3 – Collection 1990, 4 – Clos du Mesnil 2000, 5 – Krug 2000. But I would gladly ex-aequo the first and the second because the 1964 is very dear to my heart, and ex aequo the fourth and fifth because Krug 2000 is a wonderful achievement.

The food is brilliant, the service is attentive and competent. Philippe Jamesse makes a perfect wine service. This meal with immense wines will be a very great memory.

3 – dinner at the Crayères

It was not necessary to pray for a long time so that I would take a nap after these feasts. At twenty o’clock precisely we went down my wife and I to dine in the beautiful dining room of the Hotel Les Crayères. The choice of the wines will be quite easy since it remains of almost all the champagnes of the lunch.

The menu says « royal lobster in tartare and black truffle, fritot and creamy truffle with walnut water », but my wife and I prefer as at lunch to see this dish treated with caviar. We then take the pigeon of Onjon Lacquered Coteaux Champenois, the second filet under a roast of filling au gratin.

The four wines that remain, since the Clos du Mesnil 2000 was finished at lunch, have grown in size and are still as dashing, but it is me who is less dashing so it seems to me more judicious than the team of Crayères takes advantage of what remains of these miraculous champagnes.

Of the two meals, the dish that emerges and undoubtedly deserves the status of three stars, is the pigeon, gourmand, firm, original and tasty. Philippe Mille has created a pigeon that deserves to be in the annals of gastronomy.

After a night filled with beautiful dreams and a breakfast of good food I still had beautiful bubbles of joy that sang in my head the memory of this communion with the champagnes of a great maison de champagne.

(pictures are in the article just below)

Dégustation chez Krug, déjeuner de Krug aux Crayères dimanche, 19 février 2017

1 – dégustation de champagnes au siège de Krug

Cela faisait des années que je rencontrais Margareth Henriquez, la présidente de la maison Krug, dans diverses manifestations du vin et nous nous promettions de nous retrouver au siège de Krug pour goûter ensemble les champagnes de sa prestigieuse maison. L’occasion se présente enfin. Il est prévu que je me rende au siège un vendredi à 11 heures et qu’ensuite nous déjeunions au restaurant de l’hôtel Les Crayères. L’idée me vient de prolonger le séjour à l’hôtel avec mon épouse. Comme elle ne boit pas, elle n’ira pas au siège de Krug mais partagera le déjeuner prévu avec celle que l’on surnomme communément Maggie.

Le jour dit, après avoir conduit mon épouse à l’hôtel, je suis accueilli au siège de la maison Krug par Maggie, Eric Lebel le directeur de l’œnologie et chef de cave et par Olivier Krug qui ne pourra rester avec nous car il part en voyage. Dans le salon de réception, nous trinquons avec un Champagne Krug Grande Cuvée 163ème édition qui doit logiquement avoir été commercialisé après un dégorgement en 2013. Ce champagne jouit d’une belle acidité. Il est rond, noble et riche.

Nous passons ensuite dans la salle de dégustation, Maggie, Eric et moi, pour goûter sept vins d’un programme de haut niveau. La liste des vins est écrite à la craie sur un tableau avec leur numéro d’identification qui comporte en premier le numéro du trimestre de l’année de dégorgement, puis les deux chiffres de l’année de dégorgement et enfin trois chiffres qui sont sans doute ceux d’un lot.

Le Champagne Krug Clos d’Ambonnay Blanc de Noirs 2000 a pour identifiant 4 13 063. Il a donc été dégorgé au quatrième trimestre 2013. Il a un nez très discret. En bouche je le ressens assez timide, mais il va s’affirmer. Il est d’une grande finesse et d’une belle élégance, tout en suggestion.

Le Champagne Krug Clos du Mesnil Blanc de Blancs 2000 a pour identifiant 2 13 033. Je me reconnais beaucoup plus en ce vin de belle acidité et au finale très étonnant de fruits rouges. Plus habitué aux vins de la Côte des Blancs, je suis plus à l’aise avec ce champagne superbe.

L’Ambonnay est un vin d’esthète, très subtil. Il est difficile mais grand. Le Mesnil est très noble avec un charme fou. Il a un joli côté salin et une belle signature d’agrumes.

Le Champagne Krug 2000 a un identifiant 1 14 009. Le nez est superbe. Il combine minéralité et un côté toasté. Sa complexité est extrême. Il est large. Il est agréable pour moi de déguster sans que ni Maggie ni Eric ne m’imposent ce que je dois trouver dans chaque vin, ce qui n’empêche pas de discuter. Eric dit du Krug 2000 qu’il se caractérise par équilibre et précision. Son ampleur et sa largeur sont plus affirmées que pour les deux 2000 précédents. Il a tout pour lui. Je l’adore.

Ce qui me fascine, c’est que l’évocation de fruits rouges du Clos du Mesnil est celle de la framboise que l’on trouve parfois dans de très vieux bourgognes des années 10, du 20ème siècle bien sûr. Et plus curieux encore, le verre d’Éric n’a pas cette évocation de fruits rouges. La plénitude du Krug 2000 est impressionnante.

Grâce à son téléphone, Maggie peut commander sur le site de Krug les musiques qui accompagnent chacun des champagnes. L’association musique et vins est très subjective et personnelle mais on peut vraiment sentir quand une musique est en harmonie avec un champagne et quand elle ne l’est pas, ce qui se produit peu puisque des musiciens ont travaillé avec les vignerons pour arriver à ces suggestions musicales. Nous avons comparé nos émotions avec plaisir.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 156ème édition a un identifiant 4 06 001. Il est fait sur la base de champagnes de 2000 ce qui rend sa présence cohérente avec les champagnes précédents. Il est immense. Il est très beau, accompli avec des évocations pâtissières, Il est très fin.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 157ème édition a un identifiant 3 07 001. Il a beaucoup moins d’ampleur. Je préfère nettement le 156ème. Si l’on doit les comparer on pourrait dire que le 157ème est romantique et le 156ème guerrier.

Le Champagne Krug 2002 a un nez superbe. C’est un champagne confortable et brillant. Il a une belle fluidité et une grande aisance. Pour ce champagne j’ai suggéré une danse de Fred Astaire et Ginger Rogers. L’accord musical s’est montré pertinent.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 158ème édition a un identifiant 1 08 002. Il est joyeux, glorieux. Il m’évoque un boléro Son fruit est superbe, doré. Il est fait sur une base de 2002.

Mon classement de cette série brillante serait : 1 – Krug 2000, 2 – Clos du Mesnil 2000, 3 – Grande Cuvée 158ème et 4 – Krug 2002. Mais chaque champagne est une merveille.

Je suis très impressionné par la façon dont la présidente de Krug, qui gérait des sociétés d’Amérique du Sud du groupe LVMH, s’est approprié l’histoire et la philosophie de la maison Krug. Elle fonde sa vision des champagnes de sa maison sur les principes érigés par Joseph Krug il y a plus d’un siècle et demi. Eric Lebel est lui aussi dans cette ligne directrice et les champagnes que j’ai goûtés se situent dans l’élite de la Champagne. Il y a sans doute des champagnes plus sensuels mais on est ici dans l’aristocratie de la Champagne.

Eric nous abandonne car il est occupé à d’autres programmes. Nous nous rendons Maggie et moi à l’hôtel des Crayères pour un déjeuner préparé par la maison Krug et Philippe Jamesse, auquel je vais ajouter quelques surprises de ma cave.

2 – déjeuner au restaurant des Crayères

Après la dégustation faite au siège de la maison Krug nous allons déjeuner, Margareth Henriquez, présidente de Krug, et moi au restaurant de l’hôtel les Crayères. Ma femme participera au déjeuner, mais elle ne boit pas. J’avais dit à Maggie que j’apporterais des surprises mais je n’avais rien précisé. En passant à table je vois qu’un menu est imprimé et prévoit les vins suivants : Krug 2003, Krug Grande Cuvée 159ème édition, Krug rosé et Krug Collection 1990.

Il se trouve que ce matin, avant la visite au siège de Krug, j’avais donné mes vins à Philippe Jamesse le sommelier des Crayères. Les voyant, il m’avait dit qu’avec ce qui était prévu, cela allait poser des problèmes. Nous sommes donc face à un choix entre les quatre vins prévus sur le menu et les trois que j’ai apportés, qui sont un Krug Grande Cuvée des années 90, un autre Krug Grande Cuvée des années 80 et une bouteille très rare, un Krug Private Cuvée millésimé 1964.

De plus, nous avons apporté de la dégustation faite au siège, la bouteille de Clos du Mesnil 2000 et celle du Krug 2000. Quatre et trois font sept et deux font neuf. Neuf vins pour deux, c’est exclu. Le choix est cornélien. Je suggère que nous buvions : Clos du Mesnil 2000, Krug 2000, Krug Collection 1990, le Krug Grande Cuvée des années 80 et le Krug Private Cuvée millésimé 1964. Comme nous changeons complètement les champagnes d’un repas fait pour d’autres vins, je suggère que les champagnes soient tous servis ensemble, chacun de nous choisissant de boire ceux qu’il veut et de les comparer à sa guise. Le programme est ainsi lancé, Maggie ayant un peu de mal à imaginer que l’on boive tous les vins en même temps.

Se pose aussi le problème des verres. Philippe Jamesse, sommelier mais aussi créateur de verres a fait poser sur table ses plus grands verres. Maggie et moi serions plus favorables à des verres plus petits. A notre convenance nous pourrons goûter les champagnes dans les deux verres. Le Clos du Mesnil 2000 sera nettement meilleur dans le grand verre, ce qui conforte la suggestion de Philippe Jamesse mais pour le Private Cuvée 1964 c’est le petit verre qui convient le mieux.

Le menu préparé pour la liste initiale des vins est : langoustine de casier en tartare, les sucs de pinces iodés de caviar / risotto de courge à la truffe noire, Saint-Jacques dorée au sautoir / cabillaud saisi au beurre demi-sel, mosaïque de betteraves et truffes / dos de cochon cuit doucement sur le grill, légumes bio cuits en croûte de sel sous la braise / croustillant à la châtaigne, fraîcheur de pamplemousse, émulsion de marron et sirop d’érable.

C’est un impressionnant menu, destiné à montrer la flexibilité gastronomique des vins de champagne.

Le Champagne Krug Clos du Mesnil Blanc de Blancs 2000 est très nettement plus vif et dynamique lorsqu’il est bu avec des mets que lorsqu’il a été dégusté en salle de dégustation. Il est plus fruité dans le grand verre que dans le petit. Il a un charme souverain, magique sur le tartare de langoustine. Ses complexités aériennes lui donnent un romantisme certain.

Le Champagne Krug 2000 confirme la richesse qu’il avait délivrée en salle il y a peu de temps. Il est puissant, affirmé, racé et noble. Il est solide comme un roc.

Les trois autres champagnes vont nous faire entrer dans le monde fascinant des champagnes à maturité. Le Champagne Krug Collection 1990 a été dégorgé il y a deux ans. Il est merveilleux car il a une folle jeunesse combinée à matière de haute maturité. Son équilibre est splendide. Il est fluide, son fruit est affirmé. Il virevolte en bouche comme un feu d’artifice.

Philippe Jamesse ouvre mes vins. Il me montre les bouchons d’une rare beauté. Les cylindres bien lisses, propres et sains sont un plaisir à voir. Le Champagne Krug Grande Cuvée du début des années 80 est miraculeux. Il a un charme et une mâche qui pianote des fruits exotiques qui sont confondants. Sa plénitude en bouche est spectaculaire. C’est avec ce champagne que je voulais convaincre Maggie, la présidente de Krug, de la nécessité qu’il y aurait à laisser vieillir les « Grande Cuvée » au-delà de toute norme pour avoir des vins sublimes. La preuve est là, dans nos verres. Ce Champagne est au sommet de ce que peut donner la Champagne.

Lorsque Philippe verse dans mon verre les premières gouttes du Champagne Krug Private Cuvée millésimé 1964, je sais que c’est gagné. La couleur du champagne est d’une pureté rare, magiquement dorée. En bouche ce vin me remplit d’aise et de fierté. Non pas que j’aie une quelconque responsabilité dans la confection de ce champagne, mais je suis heureux qu’il me permette de montrer à celle qui décide de l’avenir de Krug à quel point l’âge réussit aux champagnes bien faits. Cette plénitude joyeuse au beau fruit doré est une consécration.

Je fais goûter à Philippe les deux champagnes que j’ai apportés. Pour moi, le 1964, du fait de sa rareté et de sa perfection, emporte les suffrages, avec un fruité généreux et opulent et une complexité extrême. Mais comme Philippe je suis obligé de constater que c’est le Krug Grande Cuvée des années 80 qui est le champagne le plus glorieux, le plus sensuel, le plus joyeux.

Il est intéressant de faire quelques considérations sur cette rencontre et cette expérience. Je voulais rencontrer Margareth Henriquez pour lui montrer par l’exemple que la maison Krug devrait faire vieillir sa Grande Cuvée beaucoup plus longtemps pour offrir aux amateurs des vins dans leur plénitude. Les vins que j’ai apportés en sont la démonstration éclatante. Mais j’ai pu constater que le mouvement est en marche. A partir du moment où Krug écrit sur les étiquettes le numéro d’ordre de l’édition de la Grande Cuvée, on va différencier toutes les Grandes Cuvées et bien évidemment le marché du vin va s’en emparer. Les prix vont forcément exploser, car la 158ème édition vaudra beaucoup plus que la 163ème, par exemple, mais l’amateur saura privilégier les éditions qu’il a envie de boire. Le marché va bouillonner avec cette révolution. Maggie va mener une politique de rétention de stock qui, paradoxalement, était quasi inexistante. De beaux jours s’annoncent pour ce champagne, sauf peut-être pour nos portemonnaies. Mais c’est le goût qui triomphera.

Il y a un autre enseignement en sens inverse pour moi. Je venais défendre la thèse de la constitution de stocks de champagnes au dégorgement d’origine, pour que l’on garde les champagnes dans la version de leur commercialisation. Je suis en effet plus favorable aux dégorgements initiaux qu’aux dégorgements récents. Or au cours de ce repas, le Champagne Krug Collection 1990 qui a été dégorgé il y a deux ans s’est montré d’une vivacité et d’un vigueur qui justifient que l’on fasse aussi ces champagnes « Collection » qui rajeunissent des champagnes conservés sur lies. Il faut sans doute dans la politique de stockage à long terme encourager le stockage des deux versions, dans des proportions voisines.

Au cours de ce repas nous avons discuté de mille choses. Mon classement serait : 1 – Grande Cuvée année 80, 2 – Private Cuvée 1964, 3 – Collection 1990, 4 – Clos du Mesnil 2000, 5 – Krug 2000. Mais je mettrais volontiers ex-aequo le premier et le second car le 1964 est très cher à mon cœur, et ex-aequo le quatrième et cinquième car Krug 2000 est une magnifique réussite.

La cuisine est brillante, le service est attentionné et compétent. Philippe Jamesse fait un service du vin parfait. Ce repas avec des vins immenses sera un très grand souvenir.

3 – dîner aux Crayères

Il n’a pas fallu me prier longtemps pour que je fasse une sieste après ces agapes. A vingt heures précises nous descendons ma femme et moi pour dîner dans la belle salle du restaurant de l’hôtel les Crayères. Le choix des vins sera assez facile puisqu’il reste de presque tous les champagnes du déjeuner.

Le menu indique « langoustine royale en tartare et truffe noire, fritot et crémeux de truffe à l’eau de noix », mais ma femme et moi préférons comme au déjeuner de voir ce plat traité avec du caviar. Nous prenons ensuite le pigeon d’Onjon laqué de Coteaux Champenois, le deuxième filet sous une rôtie de farce à gratin.

Les quatre vins qui restent, puisque le Clos du Mesnil 2000 a été fini au déjeuner, ont pris de la largeur et sont toujours aussi fringants, mais c’est moi qui le suis moins aussi me paraît-il plus judicieux que l’équipe des Crayères profite de ce qui reste de ces champagnes miraculeux.

Des deux repas, le plat qui émerge et mérite sans aucun doute possible le statut de trois étoiles, c’est le pigeon, gourmand, ferme, original et savoureux. Philippe Mille a créé un pigeon qui mérite d’être dans les annales de la gastronomie.

Après une nuit peuplée de beaux rêves et un petit déjeuner de bonne gourmandise j’avais encore de belles bulles joyeuses qui chantaient dans ma tête le souvenir de cette communion avec les champagnes d’une grande maison.

Le carnet de Joseph Krug

le tableau donnant le programme (en anglais) qui ne sera pas suivi à la lettre

les verres dans la salle de dégustation

le Krug Grande Cuvée années 80

Le Krug Private Cuvée 1964

le repas initialement prévu

le repas que nous avons eu

le dîner

les vins du midi

le pigeon

le petit déjeuner du lendemain

déjeuner au restaurant Prunier mercredi, 15 février 2017

Un journaliste gastronomique qui a suivi mon parcours et m’a donné de-ci de-là de bons conseils me pousse à écrire un livre. Nous avions prévu d’en discuter avec un éditeur mais au dernier moment j’apprends que nous ne serons que tous les deux. Le déjeuner est maintenu au restaurant Prunier où ce journaliste est suffisamment connu pour que j’aie la possibilité d’apporter un vin. Nicolas m’avait vanté les mérites d’un plat de pâtes au caviar, goûteux et copieux.

J’arrive en avance et donne un champagne que j’avais dans ma musette à rafraîchir. Le lieu me plaît toujours autant, avec ses mosaïques noires et or et une décoration de boutique presque centenaire. Mon choix de menu sera : Pappardelles de Fernando Pensato au caviar Prunier (45 grammes ) / Brandade de morue « façon Prunier » / soufflé à la Chartreuse. Le caviar est vraiment copieux et les pâtes légèrement crémées sont délicieuses. Il vaut mieux manger les pâtes et le caviar en des bouchées séparées, pour profiter de la longueur du goût délicieusement salé du caviar. Inutile de dire que sur le caviar, le Champagne Salon 1997 est mis en valeur. Ce champagne a deux qualités : vivacité et douceur. Il a en effet une très belle énergie et en même temps il a le calme souverain d’un Teddy Riner. Il a presque vingt ans et se révèle d’une magnifique maturité. C’est un grand champagne.

J’avais demandé au chef Eric Coisel de viriliser un peu la brandade que par tradition on prive un peu d’ail pour ne pas indisposer l’entourage de ceux qui travaillent l’après-midi. La brandade ainsi dynamisée est d’un goût que j’adore. Le champagne ne crée aucun accord particulier avec la brandade. Il s’accorde beaucoup mieux avec le soufflé.

Nous avons bavardé avec le chef sympathique qui fait une cuisine fondée sur de beaux produits. Nicolas Barruyer, le directeur du restaurant est extrêmement sympathique lui aussi. Il y a en ce lieu que je pratique depuis plus de 45 ans une atmosphère qui me plait.

Salon 1996 mardi, 14 février 2017

Le lendemain, je suis de retour chez moi. Ma fille vient rechercher ses enfants qui ont séjourné quelques jours chez moi. elle a fortement envie que j’ouvre un vin. J’essaie de résister car le dîner de la veille était d’importance mais rien n’y fait. J’ouvre un Champagne Salon 1996 qui se situe très bien après les champagnes anciens de la veille. Il est vif, expressif avec une belle énergie, plus classique que les champagnes d’hier. Il se place très bien sur le repas léger du soir. Ma fille est contente. Je le suis aussi. Salon 1996 est une valeur sûre.

Dîner de champagnes à l’hôtel Les Crayères de Reims dimanche, 12 février 2017

Deux amis de l’académie des vins anciens qui vivent en Champagne ont décidé de créer un événement inspiré de l’académie. Ils l’ont intitulé « les Antiquaires du champagne ». Jérôme est vigneron à Chouilly et Pierre est entrepreneur et vend du vin. Ils ont formé une table de dix amateurs dont neuf hommes et la compagne de Pierre. Il y aura deux amateurs de champagne suédois, un écossais que je rencontre très souvent lorsque le champagne est le centre de l’intérêt, un autre vigneron de Champagne qui a quitté sa profession parisienne pour venir exploiter les vignes de la famille de sa femme, un autre ami de l’académie des vins anciens, un élu des Ardennes, Guillaume, et moi.

Le dîner se tiendra à l’hôtel Les Crayères de Reims, et on nous propose de faire la visite de la cathédrale de Reims commentée par Guillaume, le jeune élu des Ardennes. Guillaume est passionnant et nous décrit les motifs des nombreuses représentations sculpturales, qui racontent l’histoire de nos rois. Guillaume est passionnant mais il fait un tel froid, aussi bien devant la cathédrale que dans la nef que je suis obligé de supplier que l’on abrège ces vivants récits tant je me momifie. De retour à l’hôtel je me recroqueville dans mon lit pour essayer de retrouver un semblant de forme humaine tant je suis devenu un manchot non empereur.

A 19h30 nous nous retrouvons au salon du bar de l’hôtel autour d’un Champagne Legras et Haas Chouilly Grand Cru Blanc de Blancs non millésimé, très agréable, fluide, beau champagne d’une belle soif. Les tuiles au parmesan se marient bien avec ce champagne agréable.

Nous nous rendons dans un salon privé qui immédiatement fait resurgir des souvenirs professionnels lointains, lorsque, travaillant avec les sidérurgie belge et luxembourgeoise, nous choisissions de nous retrouver pour des repas de travail à mi-chemin. La salle est belle, bien décorée et de taille idéale pour notre groupe de dix.

Le menu mis au point par Philippe Mille le chef, Philippe Jamesse, l’excellent sommelier, Jérôme et Pierre, nos deux hôtes, est : tartare de gambas blanches au caviar, pommes céleri et agrumes / homard de casier de Montmartin au parfum d’estragon, lentillons de la Champagne et royale d’oignons doux / entrecôte de veau rôti au beurre demi-sel, pommes fondantes et champignons au palomino / brillat-savarin farci de truffe noire, dentelle de pain croustillante / dans l’esprit d’une tarte à l’orange, granité traditionnel et sablé agrumes.

Le Champagne José Michel ‘Spécial Club’ Vintage 1976 a été dégorgé en 1982. C’est un beau témoignage de la maison qui appartient à la famille du beau-père du vigneron ex-parisien. Un tel champagne doit lui donner envie de continuer dans cette belle voie car le champagne, sans être parfait, offre de belles évocations fruitées.

Le Champagne Louis Roederer ‘extra dry’ 1976 est beaucoup plus ambré et sombre que son conscrit. Il est manifestement madérisé mais sur une crème de topinambour, il va se reconstituer et offrir des lueurs plaisantes. Il devient même bon, dans cette forme trop évoluée pour son âge.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 que je connais particulièrement bien est grand mais un peu poussiéreux. Il a tout pour plaire mais manque un peu de séduction.

Ces trois champagnes ont accompagné la délicieuse entrée aux gambas et au caviar, plat qui aurait gagné à être plus copieux tant on l’adore. Une discussion est intervenue sur les verres. Philippe Jamesse a inventé une collection de verres pour les champagnes que je trouve exceptionnelle. Mais pour ces champagnes anciens il a choisi ses plus grands verres. Or ces verres, s’ils exhaussent les parfums et les arômes d’une belle façon, amplifient aussi les défauts lorsqu’il y en a et le vieillissement. Un des suédois avait demandé des verres plus petits et il était clair que les petits défauts du Roederer étaient largement atténués avec les verres plus petits.

Le Champagne Charles Heidsieck ‘La Royale’ 1975 est un vin absolument superbe, d’un équilibre absolu et très vif.

Le Champagne Charles Heidsieck 1973 à côté du 1975 apparaît très bon mais sans le côté brillant de la belle cuvée La Royale. Il fait un peu pataud à côté du cinglant 1975.

Le Champagne Pommery & Greno 1949 dont l’étiquette montre qu’il a été servi au mariage de Grace Kelly le 19 avril 1956 est absolument princier sur les lentilles. C’est un immense champagne.

Le Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1934 est aussi un grand champagne mais n’a pas la perfection du 1949. Le plat de homard est une merveille de gourmandise, surtout grâce aux intelligentes lentilles.

Le Sillery Rouge Pommery & Greno 1942 a un niveau bas qui n’amplifie pas ses défauts. Je le trouve intéressant.

Le Bouzy Rouge Pommery & Greno 1942 est superbe. C’est un très beau vin gourmand et de belle vivacité qui se marie bien à la tendreté du veau.

Le Bouzy Rouge Paul Sévès 1970 est agréable mais n’a pas le niveau du 1942. Ces trois vins rouges par leur côté salin rappellent un peu les bourgognes. Ils tiennent bien leur place dans ce repas.

Le Champagne Dom Pérignon 1964 est un de mes apports à ce repas. C’est un vin que j’adore et qui se présente bien, mais n’est pas au sommet que j’ai l’habitude de trouver en ce grand Dom Pérignon.

Il faut dire que le Champagne Dom Pérignon 1947 au niveau très bas dans sa bouteille est extraordinaire. Il est d’une précision inégalable et d’un charme tout en douceur. C’est un champagne de rêve.

J’avais apporté pour le cas où une deuxième bouteille. L’ambiance enjouée et amicale me pousse à demander qu’on l’ouvre. Le Champagne Lanson Red Label 1971 et superbe, à son optimum, très grand champagne expressif.

Mon quarté des champagnes de ce soir sera : 1 – Dom Pérignon 1947, 2 – Pommery & Greno 1949, 3 – Lanson red label 1971, 4 – Charles Heidsieck ‘La Royale’ 1975.

La cuisine a été de très haut niveau, la palme revenant au homard aux lentilles. Le service de l’équipe du restaurant est attentionné et compétent, rendant le diner encore plus agréable. Le dîner s’est tenu en français et en anglais, dans une ambiance amicale, joyeuse mais aussi attentive à découvrir les mille complexités de ces vins anciens originaux.

Pour une première des « Antiquaires du champagne » Jérôme et Pierre ont réussi un coup de maître.

Dernier dîner du séjour de mon fils jeudi, 9 février 2017

C’est le dernier soir de mon fils alors, j’ai une excuse pour ouvrir des vins chers à mon cœur. Ma femme a préparé une crème d’avocat adoucie par de la crème chantilly sur laquelle reposent de beaux grains de caviar. Le Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1983 a une couleur joliment dorée et un nez extrêmement marqué et expressif. La première gorgée est tellement enthousiasmante qu’il me vient à l’idée que ce pourrait être le meilleur champagne de tous ceux que nous avons ouverts avec mon fils pendant son séjour. Bien sûr, il y a toujours une prime au dernier arrivé, mais force est de constater qu’il est exceptionnel. Il est rond, fruité, de belle mâche et remplit le palais de soleil. Vif, racé, il a tout pour lui. Ma femme se demandait si la crème d’avocat et le caviar se comprendraient et tout montre que cet accord est superbe, le caviar d’Aquitaine devenant d’une vivacité et d’une profondeur qu’il n’aurait pas sans la crème. Nous poursuivons sur un fromage de tête qui va toujours très bien avec les champagnes et nous faisons suivre un camembert Réo affiné idéalement qui fait jouer le champagne sur une autre tessiture.

Le dessert est une sorte de pain au chocolat qui serait nappé d’une crème de noix. J’ouvre alors une demi-bouteille qui est d’une beauté qui m’émeut. C’est un Champagne Krug Private Cuvée ½ bouteille qui pourrait être des années 60 ou du tout début des années 70. Le bouchon vient difficilement car le disque de bas de bouchon sans doute calibré trop épais pour ce format colle au goulot et résiste. Le haut du bouchon vient seul et j’ai du mal à enfoncer le tirebouchon tant le liège inférieur est dense. Il n’y a pas de pschitt et le pétillant est là. Le nez indique un vin un peu fatigué. Mais en bouche, comme dirait Aimé Jacquet, les fondamentaux sont là. Le champagne est racé, noble, grand et impérial, mais objectivement, il reste une infime trace de trop vieux. Il a peut-être dix ans de trop mais il est grand et nous le dégustons avec plaisir sachant qu’aucune trace désagréable ne reste sur le palais. Je tenais à ce que nous terminions ce voyage d’une semaine par ce champagne. Nous avons goûté, mon fils et moi : Champagne Heidsieck Monopole cuvée Diamant Bleu 1964, Champagne Veuve Clicquot brut sans année du début des années 70, Champagne Comtes de Champagne Taittinger Blanc de Blancs 1973, Champagne Krug 1995, Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1983, Champagne Krug Private Cuvée des années 60. Il s’est ajouté un Vega Sicilia Unico 1991. Ce voyage en champagne avec des vins que j’aime est important pour moi, car je sais que mon fils s’en souviendra, lorsque je serai en train d’essayer de convaincre Saint-Pierre que le champagne ancien pourrait faire un très joli vin de messe.