Comme cela arrive souvent, nous avons fait, mon fils et moi, vœu de chasteté vinique pour un soir et ma femme en tient compte dans son menu : soupe aux lentilles et lard / omelette / salade verte. Jusque-là, tout va bien. Mais très vite le besoin d’un champagne éclot et mon choix se porte sur un Champagne Krug 1995. Contrairement au Dom Pérignon de la veille, le bouchon résiste au point que je suis obligé de prendre un casse-noix pour pouvoir faire tourner le bouchon collé au verre. Le pschitt est fort. La bulle est très active. La couleur est délicatement dorée. Ce champagne est noble et s’installe dès la première gorgée dans les hautes sphères de la hiérarchie. Il est racé, élégant et tout sauf canaille. Car il est rigoriste et archétypal. Il est plus gentleman anglais que crooner américain. C’est un très noble champagne qui va s’épanouir si on le laisse tranquille pendant une bonne décennie. Les fromages sont venus à la rescousse pour qu’un accord se crée. Une fois de plus c’est un plaisir de partager des vins avec mon fils.
Champagne avec ma fille mercredi, 8 février 2017
Ma fille cadette vient dîner de façon impromptue. Ma femme a prévu des coquilles Saint-Jacques avec des traces de safran du jardin puis de simples poireaux passés à la poêle. J’ouvre un Champagne Dom Pérignon 1988. A ma grande surprise il n’y a aucun pschitt. La couleur est belle, déjà dorée. La bulle est rare mais le pétillant est sensible. C’est un 1988 calme, expressif, mais qui n’a pas la vivacité que j’attendrais d’un 1988. C’est probablement lié à la perméabilité du bouchon.
Le champagne est grand et agréable avec des notes lactées et pâtissières. Il est agréable sur les coquilles, difficile sur les coraux, très adapté aux goûts sucrés des poireaux, solide sur les fromages et très élégant sur la tarte aux pommes. Le bilan est largement positif car ce Dom Pérignon est un solide champagne qui a juste manqué d’un epsilon de vibration.
Déjeuner au restaurant Le Petit Verdot mardi, 7 février 2017
J’invite deux amis pour le plaisir d’être avec eux. L’un est informaticien et vigneron, l’autre peintre. Nous allons au restaurant Le Petit Verdot. Je suis arrivé en avance pour ouvrir mes vins. Le bouchon du chablis, très poreux et friable vient en plusieurs morceaux, mais tout est extrait.
Nous trinquons avec un Champagne Delamotte Blanc de Blancs brut sans année qui est délicieux. C’est un champagne réconfortant, racé, fin, de grand plaisir. Les plats que je prendrai sont : coquilles Saint-Jacques poêlées / terrine de sanglier / échine de porc. Nous avons demandé à Hidé, le si agréable propriétaire des lieux, de simplifier les plats pour les vins, ce qu’il a fait de bonne grâce. Ainsi les coquilles étaient prévues dans une soupe. Nous l’avons écartée. Et la terrine devait être accompagnée d’une compote que nous avons refusée.
Le Chablis Grand Cru Blanchot Domaine Vocoret & Fils 1988 a une belle couleur dorée. Au début et surtout avant de manger, il est un peu serré et plus le temps va passer, plus il va prendre de l’ampleur. Sa minéralité est très affirmée mais l’âge lui donne une belle rondeur. Il devient de plus en plus gourmand et c’est sur les fromages très crémeux qu’il va se montrer idéal. C’est un grand chablis généreux et avenant.
L’Hermitage Chave rouge 2000, c’est George Clooney. Tout en lui correspond à une définition mesurée mais parfaite du vin. Il est riche sans être lourd, il est complexe sans être compliqué, il est fluide toute en étant puissant. C’est le gendre idéal. Il converse bien avec les coraux des coquilles, il est idéal avec l’échine de porc et avec le fromage de chèvre de l’Ariège en crème, il tout simplement envoûtant. Cet Hermitage va encore s’épanouir dans les années à venir, mais dans sa vivacité actuelle, il est glorieux. Quoi d’autre ? (en français dans le texte).
Nous étions tellement heureux de profiter des mets et des vins que nous avons englouti tout le plateau de fromages car Hidé a eu l’imprudente idée de nous dire de nous servir à volonté.
L’accueil d’Hidé est parfait. Ce restaurant est une halte pour esthètes gourmands.
Dîner avec Vega Sicilia 1991 mardi, 7 février 2017
Le lendemain, ma femme a prévu pour le dîner un poulet fermier légèrement anisé et un gratin dauphinois puis une tarte aux pommes. Nous allons mettre un terme à la série des champagnes car j’ouvre un Vega Sicilia Unico 1991. J’ai la naïveté de croire que mon tirebouchon limonadier pourra lever le bouchon entier car c’est un vin jeune mais en fait le bouchon humecté dans sa partie inférieure se brise laissant environ un tiers dans le haut du goulot. Je m’apprête à utiliser la longue mèche qui me sert pour les vins anciens et soudain j’entends un bruit de succion. Le bouchon, happé par la dépression créée par la montée du bouchon, tombe en bas du goulot. Il est irrécupérable.
Instantanément je verse le vin en carafe, ce que n’aime pas faire. Le parfum envoûtant du vin que l’on verse nous enivre. Le vin est noir de jeunesse. Le parfum est profond et riche. En bouche c’est le fruit qui explose, généreux. Le vin va beaucoup évoluer. Ce qui va dominer, c’est son velours. Ce vin serein est vif, riche, avec des notes de fruits noirs. Il n’y a pas la fraîcheur mentholée habituelle dans le finale mais plutôt une signature de tabac. Je ne retrouverai le fenouil et l’anis que dans le parfum du vin en fin de parcours. Le velours est la vraie signature de ce magnifique vin à la jeunesse flamboyante. Il n’y a pas eu de multiplication dans l’accord, juste un bout de chemin en commun. Ce fut un agréable dîner de famille.
Dîner avec un beau champagne de 1973 dimanche, 5 février 2017
Le lendemain ma femme a prévu pour dîner du boudin aux pommes de terre et pommes, avec des oignons frits. Mon choix de champagne avait été fait sans connaître ce menu. J’ouvre un Champagne Comtes de Champagne Taittinger Blanc de Blancs 1973. La bouteille est belle, le niveau est dans le goulot. Le bouchon vient facilement car il est anormalement court mais le pschitt est bien marqué. La couleur du champagne est assez claire, très jolie. Le nez est expressif et évoque des notes de miel. En bouche, c’est une grande surprise. Car le vin est d’une douceur extrême tout en n’étant pas excessivement dosé. Et ce qui est surprenant, c’est l’évocation de fruits rouges délicats. On a l’impression de boire un champagne rosé alors qu’il a la vivacité des champagnes blancs. C’est le côté fruit rouge qui fait penser au rosé. Ce champagne joyeux, doux mais affirmé est de très grande qualité. Par rapport aux deux champagnes précédents il fait beaucoup plus son âge et apparaît plus vieux que le Dom Pérignon 1964. Mais il apporte autant de plaisir. Le champagne est à l’aise avec notre repas mais l’accord n’est pas l’objet particulier de notre intérêt.
Two fantastic champagnes of more than 40 years samedi, 4 février 2017
The rite is always the same. When my son comes from Miami to manage every month the industrial company that I own, the dinner proceeds from the same ritual: Pata Negra ham, egg in jelly, foie gras, rillettes, cheese and meringue ball with chocolate chips. Sometimes there are variations, but it’s a bit like our way of putting the French baguette under the arm and the Basque beret to make France sing and give regrets to our son. Only the Marseillaise is missing. I open a Champagne Heidsieck Monopole cuvée Diamant Bleu 1964. The bottle is beautiful, in the shape of a ribbed keel, the label is blue, black and gold. The cork comes fairly easily but the bubbly is there. The color is amber and what is very curious is that this color will clear up more and more throughout the meal. A cellar master would have to explain this phenomenon to me. The bubble is discreet, small and lively. The nose is refined. The wine is of a grace made of pretty yellow fruits, and all is balance, grace and precision of tone. What fascinates me is that this champagne has absolutely no signs of aging. It has no age, not a wrinkle, not a defect, and if it were said that it is a 1985, it would not be wrong to say so. The champagne is a bit sweet but barely and it evokes for me the map of Tender and courtly love. Everything in him is graceful. The final image that is appropriate is this faculty to have no age. It is a wonderful surprise.
I open a Champagne Veuve Clicquot brut no vintage which must date from the beginning of the Seventies because its cork presents itself with the same aspect as that of the Blue Diamond 1964. I expected a testimony marked by the age but also there, what a surprise. The bubble is very active and bigger than that of the Heidsieck. The color is lighter, nicely young and the nose is as expressive and of high purity, as for the 1964. In the mouth the wine is sharper, sharper than the 1964 but I did not expect it at all at this level of nobility. Very clever would be the one who could declare which is the best. I find the liveliness of Veuve Clicquot very exciting, with a beautiful expression. I love the grace of the Blue Diamond, very Audrey Hepburn. If it is necessary to choose, it will be the Veuve Clicquot Brut because of its extremely lively youth.
For this meal, two champagnes were at the top of their art and the remark that I made on the Krug Grande Cuvée that are wonderful when they have more than twenty years also applies to the champagne with the yellow label: none Veuve Clicquot, less than ten years old, would approach near or far the glorious serenity of this champagne of forty years.
Dîner avec deux superbes champagnes samedi, 4 février 2017
Le rite est toujours le même. Lorsque mon fils vient gérer chaque mois la société industrielle que je possède, le dîner procède du même rituel : jambon Pata Negra, œuf en gelée, foie gras, rillettes, fromage et boule de meringue aux pépites de chocolat. Il y a parfois des variantes, mais c’est un peu notre façon de mettre la baguette sous le bras et le béret basque pour faire chanter la France et donner des regrets à notre fils. Il ne manque plus que la Marseillaise. J’ouvre un Champagne Heidsieck Monopole cuvée Diamant Bleu 1964. La bouteille est belle, en forme de quille ventrue, l’étiquette est bleue, noire et or. Le bouchon vient assez facilement mais le pétillant est là. La couleur est ambrée et ce qui est très curieux, c’est que cette couleur va s’éclaircir de plus en plus au long du repas. Il faudrait qu’un maître de chai m’explique ce phénomène. La bulle est discrète, petite et vive. Le nez est raffiné. Le vin est d’une grâce faite de jolis fruits jaunes, et tout est équilibre, grâce et justesse de ton. Ce qui me fascine, c’est que ce champagne n’a absolument aucun signe de vieillissement. Il n’a pas d’âge, pas une ride, pas un défaut, et si l’on disait qu’il est de 1985, on n’aurait pas tort de le dire. Le champagne est un peu doucereux mais à peine et il évoque pour moi la carte du Tendre et l’amour courtois. Tout en lui est gracieux. L’image finale qui s’impose est cette faculté à ne pas avoir d’âge. C’est une magnifique surprise.
J’ouvre ensuite un Champagne Veuve Clicquot brut sans année qui doit dater du début des années 70 car son bouchon se présente avec le même aspect que celui du Diamant Bleu 1964. Je m’attendais à un témoignage marqué par l’âge mais là aussi, quelle surprise. La bulle est très active et plus grosse que celle du Heidsieck. La couleur est plus claire, joliment jeune et le nez est aussi expressif et de grande pureté, comme pour le 1964. En bouche le vin est plus vif, plus tranchant que le 1964 mais je ne l’attendais pas du tout à ce niveau de noblesse. Bien malin celui qui pourrait lequel est le meilleur. Je trouve la vivacité du Veuve Clicquot très entraînante, avec une belle expression. J’aime la grâce du Diamant Bleu, très Audrey Hepburn. S’il faut choisir, ce sera le Veuve Clicquot brut sans année à cause de son extrêmement vive jeunesse.
Pour ce repas, deux champagnes se sont montrés au sommet de leur art et la remarque que j’avais faite sur les Krug Grande Cuvée qui s’expriment quand ils ont plus de vingt ans vaut aussi pour le champagne à l’étiquette jaune : aucun Veuve Clicquot brut de moins de dix ans n’approcherait de près ou de loin la sérénité glorieuse de ce champagne de quarante ans.
Visite de la maison de cognac Hennessy et dégustations jeudi, 2 février 2017
La maison de cognac Hennessy invite une quinzaine de personnes à visiter ses installations et goûter ses cognacs lors d’un programme étalé sur deux jours. Notre groupe est très cosmopolite. De France les invités viennent d’Amiens, de Paris et de Charente. S’ajoutent des indiens, des écossais, un suisse, un malaisien et une singapourienne. Nous nous retrouvons à plusieurs dans le même TGV de Paris à Angoulême et les discussions vont bon train.
Nous sommes conduits dans la distillerie des cognacs Hennessy, distillerie du Peu, du nom du lieu-dit, accueillis par un apéritif à base de cognac V.S. « on the rocks », avec des feuilles de menthe et des kumquats. Un sirop donne une saveur sucrée qui évoque un peu les bourbons. Ce breuvage qui se boit bien est traître, car il a une belle charge d’alcool. Les petits fours sont absolument délicieux.
Après les explications qui nous sont données sur les alambics et les processus de distillation nous déjeunons dans la grande salle des alambics. Le menu élaboré par le chef David Fransoret, chef du château de Bagnolet, propriété d’Hennessy est : Saint-Jacques poêlées, fumet au beurre noisette, mousseline de chou-fleur / pavé de cabillaud, Tatin de panais et potimarron, sauce cassis / Linzer agrumes meringué.
Le déjeuner est accompagné d’un Puligny-Montrachet 1er Cru Les Louves Domaine des Lambrays 2012 joyeux, fruité, très agréable, qui s’accorde bien aux noix de Saint-Jacques. J’ai la chance d’être assis à côté de Maurice Hennessy, qui est de la huitième génération de la famille des fondateurs en 1765 de cette célèbre maison, comme Yann Fillioux, maître de chai, représente la septième génération de sa famille à occuper depuis 1802 cette fonction de maître de chai. Le dessert est accompagné d’un Cognac X.O. Hennessy très expressif.
Nous nous rendons ensuite à la Sarrazine, la tonnellerie de réparation des tonneaux de Hennessy pour assister à une démonstration de confection d’un tonneau. Cet atelier est crucial car la maison Hennessy a un stock de 380.000 tonneaux et en utilise 20.000 par an. Ces chiffres donnent le vertige.
Nous sommes ensuite conduits au « cellier du fondateur » acquis en 1774 qui est l’un des celliers où dorment des fûts de tous âges. Au-delà d’un siècle environ le chêne n’apporterait plus rien à l’alcool aussi les plus anciens cognacs sont en dame-jeanne, les plus vieilles étant de 1800. Nous avons l’insigne honneur de goûter sur fût un Cognac Hennessy 1910 Petite Champagne Hennessy Divers que je trouve d’une fraîcheur confondante, fluide, romantique émouvant, au finale gracieux. Nous goûtons ensuite un Cognac Hennessy 1908 Petite Champagne Hennessy Divers plus viril, plus rêche et plus court et à ma grande surprise une majorité des membres de notre groupe préfèrent le 1908 alors que je trouve le 1910 infiniment plus vibrant. Des goûts et des couleurs…. Je dis à Stanislas, notre cornac, que le 1910 à lui seul, valorise et justifie le voyage que nous faisons.
Olivier Paultes, le maître des lieux, directeur des distilleries, nous parle avec émotion de ce stock spectaculaire sur lequel il règne, qui permet de concevoir les cognacs les plus rares, le Paradis Impérial étant, par exemple, l’assemblage de plus d’une centaine des alcools qui dorment ici et dans les nombreux autres celliers.
Nous nous rendons au siège de la maison Hennessy et visitons la salle du comité de dégustation qui comprend six membres plus deux stagiaires qui n’ont pas le droit de s’exprimer et seront en stage pendant dix ans. Olivier qui fait partie de ce comité qui se réunit tous les jours boit de l’ordre de 10.000 cognacs par an. Le rôle du comité est de préparer les assemblages pour les cognacs à commercialiser mais aussi à détecter les jeunes eaux-de-vie qui composeront les cognacs les plus prestigieux dans un demi-siècle. Le comité travaille pour l’immédiat et pour le futur.
Dans la salle de dégustation pour les invités, nous avons devant nous sept cognacs dont quatre numérotés 1, 2, 3, 4, dont deux numérotés A et B et le dernier n’ayant pas de numéro, qui est le Paradis Impérial.
Le cognac n° 1 est une nouvelle eau de vie transparente dont Olivier nous dit qu’au nez, elle sent la fleur de vigne. Pour moi elle sent plus l’alcool pur, sans trace de bois. En bouche il y a du fruit, du bonbon anglais, de la mirabelle et de la colle à l’amande.
Le cognac n° 2 est un Cognac Hennessy 2005 vieilli dans un fût de plus de huit ans et le n° 3 est aussi de 2005, vieilli dans un fût neuf. C’est le 3 qui est le plus foncé. Le 2 a un nez très doux, de vanille. En bouche il est très sec. Le 3 a un nez aussi très doux, plus boisé. En bouche il est très doux. Le 2 est très équilibré mais à ce stade de leurs vies je préfère le 3.
Le cognac n° 4 est un Cognac Hennessy 1996. Il n’est pas encore prêt pour entrer dans un assemblage nous dit Olivier. Il a un nez qui est déjà agréable, fort. La bouche est un peu lactée.
Les qualités des cognacs sont dans l’ordre décroissant : grande champagne, petite champagne, borderie, fins bois, bons bois et bois ordinaires. Les quatre que nous venons de boire sont des fins bois et le cognac A que nous goûtons maintenant est un Cognac Hennessy Grande Champagne 1996 de la même année que le 4, mais en grande champagne. Olivier nous dit que le « A » a le potentiel pour entrer dans la composition du Paradis Impérial. Pour que nous comprenions ce que cela représente, il nous dit que sur 10.000 alcools testés sur une années, dix seulement seront jugés aptes à entrer dans la composition du Paradis Impérial.
Le cognac B est une Cognac Hennessy Grande Champagne 1965. Olivier Paultes nous dit que cet alcool mériterait d’être à lui tout seul un Paradis Impérial, mais ce n’est pas possible car cet alcool doit obligatoirement être le produit d’un assemblage. Cela veut dire qu’Olivier considère ce 1965 comme étant au plus haut niveau de qualité. En le buvant, je lui trouve un superbe équilibre. Je ressens des fruits blancs et du muguet. Il est beau et romantique un peu comme le 1910 bu dans le cellier. Le « B » est facile à boire, de belle longueur et délicat. Il est très charmeur. Olivier dit qu’il mérite dès maintenant d’entrer dans le Paradis Impérial, car il n’a pas besoin d’un vieillissement supplémentaire.
Je trouve que le parfum du A est plus cognac que le parfum du B. Mais en bouche c’est le B qui est d’un raffinement total. Il est temps de goûter le 7ème cognac présenté, le Cognac Hennessy Paradis Impérial. Sa couleur est superbement ambrée. Le nez est magnifique, superbe et expressif, un peu fumé et délicat. En bouche on sent à quel point il est complexe. Les évocations sont innombrables, zestes d’orange, tarte Tatin, etc. Le finale est grand et le cognac fait de plus d’une centaines d’eaux-de-vie est relativement calme. Le concept de Paradis Impérial date de 2010 alors que le concept de Paradis est plus ancien.
Les cognacs s’épanouissent en cours de dégustation, devenant beaucoup plus accueillants et ouverts et le nez du B que je trouvais moins cognac que le A s’épanouit grandement. Le Paradis Impérial distribue généreusement fragrances et arômes. C’est un cognac subtil.
Après cette dégustation, nous rendons au château de Bagnolet, demeure de réception de la maison Hennessy. C’est une très jolie maison bourgeoise décorée à l’ancienne. Après un court assoupissement bien nécessaire nous nous retrouvons dans le jardin d’hiver aux plantes tropicales pour l’apéritif nommé Hennessy X.O. Ice. Ce cognac sur glaçons est très agréable mais un peu monotone après quelques gorgées. Fort heureusement les petits amuse-bouche dont une anguille très typée excitent très bien le cognac glacé.
C’est Olivier Paultes qui est notre hôte à la belle table du château. Le dîner se fera au cognac, sur un menu « Précision » créé par le chef Guy Martin du Grand Véfour pour le cognac Paradis Impérial et exécuté par le chef du château David Fransoret : magret de canard Tataki, petits légumes croquants / pot au feu, jeunes légumes glacés / consommé, tartine de moelle à la truffe / mangue, papaye, fruits de la passion, biscuit aux amandes.
Je suis un peu sur la défensive en pensant que nous allons faire tout le repas au même Cognac Paradis Impérial. Le premier plat confirme mes craintes car, même si le cognac est servi frais, il est beaucoup trop puissant pour le gras du magret. Il étouffe le plat. Mes craintes vont s’estomper car le pot-au-feu délicieux colle parfaitement au cognac, qui s’adapte aussi bien à la chair délicieuse de la viande qu’au bouillon. On tient là un accord très bien conçu.
Il en est de même de l’accord du cognac avec le consommé très réduit et concentré et de l’accord avec le toast à la truffe. Ces deux plats valident la création de Guy Martin. Le dessert est aussi en harmonie avec le cognac. Le Paradis Impérial est d’une grande longueur, en évocations subtiles et non agressives. Si l’expérience montre que c’est possible, la démonstration n’est pas faite que l’on ait envie de recommencer ou de la faire chez soi. Car le même cognac tout au long d’un repas est monotone, et les accords, même s’ils se montrent pertinents, seraient surpassés par d’autres, avec des vins ou des champagnes. Ce repas que j’approuve dans son envie de convaincre, conforte plutôt l’idée que le cognac doit garder sa place en fin de repas, comme un point d’orgue, du moins dans la conception européenne ou française des repas. Les chinois et les asiatiques prouvent que le cognac peut être présent partout, comme en ce repas. Je leur laisse bien volontiers ce choix.
Après le repas on nous sert dans le jardin d’hiver le Cognac Hennessy Paradis, beaucoup plus foncé, plus rustique et de plus faible longueur. C’est évidemment un grand cognac mais la saturation existe, sauf pour certains fumeurs qui ont continué tard dans la nuit à rendre hommage aux cognacs de la maison Hennessy.
Après une nuit courte nous prenons le petit-déjeuner dans la belle salle à manger. Les groupes se séparent. Du fait du retard d’un des convives au départ de la navette, ceux qui comme moi repartaient vers Paris ont dû courir sur les quais, le train étant sur le point de partir.
L’accueil de la maison Hennessy est généreux et le service au château est exemplaire, tout le monde étant attentif à nos désirs. Si l’expérience d’un repas au cognac est intelligemment réussie, cela reste malgré tout un exercice de style qui sera difficile à reproduire. Mais le Paradis Impérial, élégant cognac, me donne envie de le mettre plus souvent à sa place attitrée, selon mes critères, celle du point d’orgue d’un repas de gastronomie.
En réfléchissant à cet exercice de style et en prenant en compte ma vision des repas, je verrais bien un dîner en l’honneur du cognac avec un cognac glacé en apéritif, un plat qui convienne à un riche vin blanc, un peu comme nous l’avons fait à la distillerie, puis un plat comme le toast à la moelle et à la truffe pour le cognac Paradis Impérial, puis un plat pour un riche vin rouge, un dessert préparé pour aller aussi bien avec un champagne rosé qu’avec un cognac, l’après dessert revenant au cognac seul. Cette forme de repas serait à l’honneur du cognac en trois reprises, plus facile à appréhender qu’un repas dévoué en totalité au cognac. Je serais heureux d’en faire l’expérience.
1- à la distillerie :
avec M. Hennessy
2 – à la tonnellerie
3 – le cellier du fondateur
4 – le siège de la maison Hennessy et la salle du comité de dégustation
5 – la dégustation
6 – le dîner au château de Bagnolet
Dîner de la Fédération française pour la recherche sur l’épilepsie mercredi, 1 février 2017
La Fédération française pour la recherche sur l’épilepsie (FFRE) organise chaque année un dîner caritatif avec une vente aux enchères. Le dîner se tient dans un grand salon de l’hôtel Hilton Paris Opéra où je me rends pour la première fois. Les salles sont belles, hautes de plafond et le Grand Salon qui sert de bar a des décorations magnifiques avec des fresques qui sont classées. Ayant livré les lots que j’offre avec beaucoup d’avance, j’ai le temps de prendre un apéritif au bar.
L’accueil des invités se fait avec une coupe de Champagne Ayala. J’avoue que je suis plutôt déçu par ce champagne trop classique qui dégage peu d’émotion. On discute longuement avec des convives de tous horizons, médecine, recherche, sport, affaires et des donateurs.
Le menu du repas est : œuf parfait, fricassée de champignons, émulsion de parmesan / quasi de veau, jus court, légumes acidulés / Panacotta aux fruits de la passion. Le repas m’a agréablement surpris par sa qualité. Les serveurs proposent un vin blanc ou un vin rouge du même domaine. J’ai pris le vin rouge, Mas de la Tour Languedoc Roussillon 2015. Comme pour le repas j’ai eu une bonne surprise avec ce vin du Pays d’Oc bien équilibré qui ne surjoue pas et se montre très agréable dans sa simplicité.
Les conversations allaient bon train, la vente caritative fut animée, ce qui m’a fait retrouver mon lit bien tard dans la nuit. Mais c’était pour une bonne cause.
le plafond de la salle du Hilton en Baccarat
Dîner impromptu à la maison samedi, 28 janvier 2017
Dîner impromptu avec ma fille cadette et trois de nos petits-enfants. Le plat sera simple, pâtes avec un fromage à la truffe. L’apéritif commence avec un Pata Negra très frais sur un Champagne Charles Heidsieck Brut 1985. Le bouchon vient facilement mais la bulle est active. La couleur est très ambrée, d’un bel or. Le nez est expressif. Et la première gorgée est une explosion de blé doré, de fruits gorgés de soleil. Ce champagne est doté d’une maturité de rêve. C’est le fruit qui s’impose. Décidément 1985 est une année au sommet de son art en ce moment, toutes régions confondues. Il y a un confort et une sérénité dans ce champagne qui me fait penser à la Cuvée des Enchanteleurs d’Henriot.
Le champagne est d’un grand plaisir et se montre très gastronomique. Sur des fromages dont un camembert un peu trop fermier, il réagit bien. Le dessert est au chocolat aussi ai-je l’idée d’extirper de l’armoire aux alcools un Saint-Raphaël Quinquina de 18° qui doit être des années 50. La bouteille a dû être ouverte il y a plus de dix ans et intouchée depuis. J’ai peur que le vin ne se soit évaporé mais en fait ce rancio est expressif sur le chocolat. Il est doux et joyeux. Continuant mon exploration dans cette armoire que j’ouvre peu, je verse une Bénédictine D.O.M. qui doit être elle aussi des années 50. Mais son niveau très bas a provoqué une évaporation qui a tué cette liqueur. Elle a fait son temps, tant pis.