La 25ème séance de l’académie des vins anciens se tient au restaurant Macéo. Nous serons quarante académiciens et il y aura 57 vins apportés par les membres. Nous serons répartis en trois tables, chacune goûtant de 18 à 20 vins.
Dès 15h30 je suis à pied d’œuvre au restaurant pour ouvrir les vins . Ils ont été rangés dans ma cave après la séance de photos et classés dans six caisses. J’ai apporté par ailleurs huit paniers de 16 verres, soit 128 verres Riedel pour compléter l’apport du restaurant et avoir suffisamment de verres sur table. Au moment où j’ai fini de déballer les vins et de les ranger sur le comptoir du bar dans leur ordre de service, un ami, qui m’avait prévenu, arrive pour m’aider, mais aussi pour soutenir le moral du travailleur. Il sort de son sac, devinez quoi, un Champagne Dom Pérignon 1959. Voilà de quoi décupler mon énergie.
La bouteille de niveau bas est à peu près à moitié pleine, le bouchon sort facilement et sent bon. La couleur du vin est sans défaut. Le nez est avenant et le vin commence par être amer. Marc Williamson, le propriétaire du restaurant à qui je fais goûter le vin, n’est pas très convaincu. Mais le vin s’aère, s’étend, et devient splendide. Quel bonheur de goûter ce champagne à la fois doux et vif, velouté et profond, à la forte trace aromatique. Il y a des fruits un peu compotés et charmants.
Un autre ami nous rejoint assez vite et lui aussi a apporté le réconfort du soldat. C’est un Vin de Savoie Abymes Domaine de Termont probablement de 1968 car la bouteille correspond à celle qui fut utilisée pour les Jeux Olympiques de 1968. Il est assez difficile pour ce vin d’apparaître après le si joli Dom Pérignon. Le vin est buvable mais assez plat. C’est plus une évocation de vin de Savoie qu’un vrai plaisir.
Quelques bouteilles n’avaient pas été livrées et arrivent au dernier moment, ce qui ne devrait pas se produire. Elles sont ouvertes. Au cours de ces opérations de débouchage il y a classiquement des bouchons qui se brisent en mille morceaux et quelques uns qui plongent dans le liquide au moment où le tirebouchon veut se piquer. Il faut alors carafer le vin et enlever le bouchon pour que le vin reprenne sa place dans la bouteille.
L’apéritif se prend debout. Une bouteille de Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997 n’a plus de bulle et le vin est passé. Deux autres sont superbes, leur vin agréable et fluide se buvant comme un vin de soif. Le Champagne François Giraux Brut sans Année est un peu plus dosé, plus carré. C’est un champagne sans histoire. A l’inverse, le Champagne Palmer & Cie Blanc de Blancs 1985 est d’un vivacité extrême. C’est un champagne qui exprime la joie de vivre, de belle facture.
Nous passons à table. La mienne est la table 1. Les vins sont listés ici, y compris les champagnes d’apéritif.
Groupe 1 : Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997, Champagne Legras et Haas Exigence n° 8 Grand Cru Vieilles Vignes base 2009, Champagne Dom Pérignon 1966, domaine de la Trappe de Staouëli Grande Réserve vin fin rosé Alger 1957, Côtes du Jura Fruitière Vinicole de Voiteur 1959, Frédéric Lung blanc Algérie 1947, Château La Mission Haut-Brion 1936, Château Ducru Beaucaillou 1934, Château Léoville Poyferré 1929, Morgon Namun de Marcy 1961, Bogeda Lagarde Cabernet Sauvignon Reserve , Mendoza Argentine 1974, F. Lung Frédéric Lung rouge Alger 1942, Vin d’Inde York Shiraz 2012, Vin d’Inde Grover Vineyard cabernet Shiraz 2011, Cérons 1919, Chateau du Breuil Coteaux du Layon 1953, Sauternes 1931, Maury Grenache Fruitière Vinicole de Maury 1960 #, Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948.
Groupe 2 : Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997, Champagne Legras et Haas Chouilly Grand Cru Blanc de Blancs ss A, Champagne Palmer & Cie Blanc de Blancs 1985, Muscadet Sèvre et Maine Marcel Sautejeau 1961, Château Carbonnieux blanc Léognan 1961, Y d’Yquem Graves blanc 1966, Château Du Breuil Haut Médoc 1967, Château Moulin De Biguey St Emilion 1961, Château Pichon Longueville Baron 1/2 bt 1956, Château Pichon Longueville Baron 1/2 bt 1956, Château La Louvière 1ères Graves Léognan Daniel Sanders 1937, Château Pichon Longueville Baron 1985, Châteauneuf-du-Pape Léonce Amouroux Neg. 1969, Châteauneuf du Pape Armand Girardin 1953, Châteauneuf-du-Pape Château Fortia Tête de Cru 1985, Château Vannières Bandol 1985, Château Mayne Bert Haut Barsac 1939, Château Suduiraut 1924, Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948.
Groupe 3 : Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997, Champagne François Giraux Brut ss A, Champagne Pol Roger Chardonnay 1996, Muscadet Sèvre et Maine Marcel Sautejeau 1961, Batard-Montrachet Alexis Lichine Neg. 1969, Château Lynch Bages 1948, Château Lynch Bages 1978, Château Léoville Poyferré 1966, Château Léoville Las Cases 1922, Château Figeac 1967, Château Pichon Longueville Baron 1985, Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande 1955, Domaine des Justices Bordeaux Supérieur René Médeville 1950, Monthélie 1er cru Roger Rossignol 1965, Clos vougeot Club français du Vin à Bordeaux année supposée 1949, Fleurie Albert Bichot 1949, Vouvray Moelleux Domaine Allias 1970, Château Climens 1973, Massandra 1945, Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948.
Le menu composé par le chef du Macéo est : tartare de Saint-Jacques / déclinaison de carottes et gingembre / pavé de bar nacré à l’ail doux / bœuf du Bourbonnais confit au jus, mousseline de pommes de terre et sauce Périgueux / fromages apportés par des membres / millefeuille au chocolat tendre / clémentines caramélisées en vacherin.
Devant m’occuper de l’organisation de cet événement et faire honneur à mes convives de table, je n’ai pris aucune note. Les impressions seront donc sommaires. Ces écrits essaieront de retracer mes émotions.
Le Champagne Legras et Haas Exigence n° 8 Grand Cru Vieilles Vignes base 2009 est fait de huit millésimes différents. Il a un nez étonnamment puissant. Il est rond, solide et très convaincant.
Le Champagne Dom Pérignon 1966 est un bonheur. Celui qui l’a apporté savait que j’adore ce champagne, l’un des plus expressifs et émouvants des Dom Pérignon. Il y a dans ce 1966 toute la noblesse de Dom Pérignon, avec un beau fruit, une belle empreinte, une jolie amertume et une grande persistance. Je suis aux anges.
Le Domaine de la Trappe de Staouëli Grande Réserve vin fin rosé Alger 1957 est appelé rosé à cause de sa couleur ambrée mais ce pourrait être un vin blanc car rien n’est indiqué sur l’étiquette. Nous sommes sans repère devant ce goût un peu torréfié, riche en alcool, un peu muscaté et doucereux, qui étonnamment se marie bien avec les dés de Saint-Jacques crues.
Le Côtes du Jura Fruitière Vinicole de Voiteur 1959 est glorieux. C’est un vin fantastique du fait de sa complexité et de la vigueur de sa vibration. Là aussi je suis aux anges.
Un ami m’avait demandé de le joindre, ce que j’ai fait, pour qu’il soit confronté au Frédéric Lung blanc Algérie 1947 d’une belle couleur claire. Le nez est imprégnant, le vin est carré, solide, indestructible. C’est un vin gratifiant qui est en dehors des repères habituels des blancs. La juxtaposition des deux vins algériens et du vin du Jura est un enchantement, du fait de leurs différences extrêmes. Il convient de signaler que deux académiciens, connaissant mon amour pour les vins d’Algérie des années quarante, se sont cotisés pour acheter ce vin, pour qu’il soit bu à l’académie. Quelle gentillesse !
J’avais annoncé que le Château La Mission Haut-Brion 1936 avait une odeur désagréable à l’ouverture et que son retour à la vie était improbable. Et je suis surpris qu’il ait amorcé un tel retour à la vie. Il est loin d’être parfait, mais loin de ce que j’avais imaginé. S’il n’y avait pas autant de vins, on se serait intéressé à lui, car un retour complet à la vie n’était plus exclu, mais la suite ne peut pas attendre.
Le Château Ducru Beaucaillou 1934 a une imprécision et une déviance qui limitent le plaisir alors qu’il a quasiment tout pour faire un grand vin. Il souffre d’un mauvais assemblage de ses saveurs.
Le Château Léoville Poyferré 1929 est une merveille absolue. Ce vin a atteint une forme de perfection. Ce qui me fascine, c’est son grain. La mâche de ce vin me ravit. De petites pointes de fruits noirs et de truffes sont exquises, mais c’est l’équilibre parfait du vin charnu qui emporte les suffrages.
Le Morgon Namun de Marcy 1961 venant après le 1929, je n’ai pas gardé de souvenir de ce vin.
Le Bogeda Lagarde Cabernet Sauvignon Reserve , Mendoza Argentine 1974 est une rareté. Comme pour le vin de la Trappe, nous n’avons pas de repère. Le vin est carré, peu expansif et peu vibrant, mais il est un beau témoignage d’une vinification sérieuse, sans excès. C’est un vin qui se boit avec plaisir. On aimerait que les vins argentins actuels aient cette pureté et cette intelligence.
On ne pourrait pas me faire plus de plaisir que d’apporter des vins comme ce F. Lung Frédéric Lung rouge Alger 1942. Il a de fortes traces de café qui sont la marque de fabrique de ces vins des côtes de Mascara. Le vin est fort, puissant, à l’alcool sensible, et dégage une sérénité que j’adore. Il est assez sec. Notre table est gâtée.
A notre table, une femme indienne que j’avais rencontrée à l’ambassade de l’Inde à Paris s’était inscrite pour l’académie. N’ayant aucun vin ancien elle m’a proposé deux vins indiens jeunes. On est complètement en dehors des critères de l’académie, mais j’ai accepté que les académiciens puissent découvrir ces vins.
Le Vin d’Inde York Shiraz 2012, et le Vin d’Inde Grover Vineyard cabernet Shiraz 2011 sont tellement hors du radar de l’académie que je ne leur ai pas porté l’attention que j’aurais dû, d’autant que j’étais abreuvé de vins des autres tables. Ces vins droits méritent de vieillir.
Le Cérons 1919 est pour moi un vin symbolique de l’académie. Aucun nom de domaine ne figure sur l’étiquette, la bouteille est splendide, au niveau superbe et à la couleur magiquement belle. Là où on attendrait d’un Cérons qu’il soit un peu frêle et plat, on se trompe, car la vigueur de ce Cérons si doux est surprenante. Le vin est vibrant, joyeux, séducteur, un régal. Anonymat et millésime mythique, c’est ce qu’on aime trouver à l’académie.
Comme pour le Mission 1936, j’avais annoncé la mort du Château du Breuil Coteaux du Layon 1953, surtout du fait de sa couleur passée. Mes prévisions sont déjouées, car ce vin, sans être flamboyant, a une belle rondeur et une sucrosité mesurée.
Comme le Cérons 1919 d’un académicien, le Sauternes 1931 de ma cave n’a aucune indication d’origine. Il est une divine surprise, car il a la grâce et la légèreté d’un sauternes bien fait. C’est un régal.
Un ami a ajouté à la liste des vins un Maury Grenache Fruitière Vinicole de Maury 1960 #
la datation se supposant grâce au graphisme de l’étiquette. C’est un beau Maury, avec de jolies évocations de pruneaux, mais il va y avoir mieux.
Le Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948 est superbe. J’ai vu le tonneau dont il est tiré. Il y a des pruneaux et des cerises au kirsch et tout est suggéré et assemblé de la plus délicate façon. Ce vin est velours, terriblement gourmand.
Au fil du repas, des verres sont venus jusqu’à moi avec cette invite : « goûte-moi ça ! ». Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour les analyser et mes impressions sont au lance-pierre de la dégustation.
Le Muscadet Sèvre et Maine Marcel Sautejeau 1961 est bien fluide et équilibré, beau vin sans signe d’âge.
Le Château Carbonnieux blanc Léognan 1961 est au sommet de sa gloire, un vin éblouissant.
L’Y d’Yquem Graves blanc 1966 a un soupçon de botrytis qui fait que l’on pense à Yquem en le goûtant, vin de belle mâche et de plaisir.
Le Château Du Breuil Haut Médoc 1967 est une belle surprise, vin inattendu à ce niveau.
Le Château La Louvière 1ères Graves Léognan Daniel Sanders 1937 est lui aussi une belle surprise. Tant d’équilibre et d’accomplissement est rare.
Le Château Léoville Poyferré 1966 est un bon vin, bien plein, mais se situe en dessous du 1929 qui m’a tant plu. On m’a dit qu’à sa table, certains l’ont préféré au 1929. Je maintiens ma position.
Le Fleurie Albert Bichot 1949 a le charme et la grâce des grands beaujolais de cette décennie. La sérénité de ce vin est fascinante.
Le Massandra 1945 est agréable, mais un peu trop modéré, car j’attendais un peu plus de coffre de ce vin.
Il convient de remarquer que la cuisine du Macéo a fait des prouesses ce soir. Le poisson et la viande ont été des plats très réussis. Le service est toujours attentionné et habitué aux exigences de ce type de dîner à plus de cinquante vins.
De ce que j’ai bu ce soir, je retiendrais, mais ce n’est pas limitatif, Le Léoville Poyferré 1929
exceptionnel, le Côtes du Jura 1959, le Dom Pérignon 1966, le Dom Pérignon 1959, Le Lung rouge 1942 et le Lung blanc 1947.
Au titre des curiosités, je retiendrais le vin de la Trappe 1957, le Cérons 1919 et le sauternes 1931.
Il y a eu tant de surprises et de bons vins que l’on pourrait classer cette 25ème séance de l’académie parmi les toutes premières, mais c’est surtout l’ambiance festive, les joies et les échanges entre personnalités de tous horizons et la générosité générale, qui ont fait de cette académie un moment de bonheur au souvenir impérissable et pour tous les participants une occasion unique de pouvoir accéder à des vins chargés d’histoire. Il est à noter qu’en 25 réunions, plus de 1.100 vins anciens ont été partagés. Cette réunion est un encouragement à poursuivre dans cette voie.
les vins dans ma cave, pour former les groupes
Champagne Dom Pérignon 1959 (on voit le niveau bas)
Vin de Savoie Abymes Domaine de Termont # 1968
VINS DU GROUPE 1
Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997
Champagne Legras et Haas Exigence n° 8 Grand Cru Vieilles Vignes base 2009
Champagne Dom Pérignon 1966
Domaine de la Trappe de Staouëli Grande Réserve vin fin rosé Alger 1957
Côtes du Jura Fruitière Vinicole de Voiteur 1959
Frédéric Lung blanc Algérie 1947
Château La Mission Haut-Brion 1936
Château Ducru Beaucaillou 1934
Château Léoville Poyferré 1929
Morgon Namun de Marcy 1961
Bogeda Lagarde Cabernet Sauvignon Reserve , Mendoza Argentine 1974
F. Lung Frédéric Lung rouge Alger 1942
Vin d’Inde York Shiraz 2012
Vin d’Inde Grover Vineyard cabernet Shiraz 2011
Cérons 1919
Château du Breuil Coteaux du Layon 1953
Sauternes 1931
Maury Grenache Fruitière Vinicole de Maury 1960 #
Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948
les vins du groupe 1
VINS DU GROUPE 2
Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997
Champagne Legras et Haas Chouilly Grand Cru Blanc de Blancs ss A
Champagne Palmer & Cie Blanc de Blancs 1985
Muscadet Sèvre et Maine Marcel Sautejeau 1961
Château Carbonnieux blanc Léognan 1961
Y d’Yquem Graves blanc 1966
Château Du Breuil Haut Medoc 1967
Château Moulin De Biguey St Emilion 1961
Château Pichon Longueville Baron 1/2 bt 1956 / Château Pichon Longueville Baron 1/2 bt 1956
Château La Louvière 1ères Graves Léognan Daniel Sanders 1937
Château Pichon Longueville Baron 1985
Chateauneuf-du-Pape Léonce Amouroux Neg. 1969
Châteauneuf du Pape Armand Girardin 1953
Chateauneuf-du-Pape Château Fortia Tête de Cru 1985
Château Vannières Bandol 1985
Château Mayne Bert Haut Barsac 1939
Château Suduiraut 1924
Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948
les vins du groupe 2
VINS DU GROUPE 3
Champagne Charles Heidsieck mis en cave en 1997
Champagne François Giraux Brut ss A
Champagne Pol Roger Chardonnay 1996
Muscadet Sèvre et Maine Marcel Sautejeau 1961
Batard-Montrachet Alexis Lichine Neg. 1969
Château Lynch Bages 1948
Château Lynch Bages 1978
Château Léoville Poyferré 1966
Château Léoville Las Cases 1922
Château Figeac 1967
Château Pichon Longueville Baron 1985
Château Pichon Longueville Baron 1955
Domaine des Justices Bx Supérieur René Médeville 1950
Monthelie 1er cru Roger Rossignol 1965
Clos Vougeot Club français du Vin à Bordeaux année supposée 1949
Fleurie Albert Bichot 1949
Vouvray Moelleux Domaine Allias 1970
Château Climens 1973
Massandra 1945
Maurydoré Paule de Volontat magnum 1948
les vins du groupe 3
j’apporte les vins au restaurant. Voici les papiers d’emballage !
les vins sont disposés sur le bar du 1er étage par groupe et dans l’ordre pour réaliser les ouvertures
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