191ème dîner de wine-dinners au restaurant Paloma de Mougins vendredi, 18 septembre 2015

Le 191ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Paloma de Mougins dont le chef Nicolas Decherchi fut doté d’une étoile au guide Michelin en un temps record. J’étais venu il y a quelques mois étudier la cuisine du chef pour qu’elle corresponde aux vins anciens choisis pour le dîner. Des ajustements se sont faits par mail et par téléphone, mais par acquit de conscience, je déjeune au restaurant Paloma, le jour du 191ème dîner, pour vérifier une fois encore l’adaptation des recettes aux vins anciens. Par précaution, le déjeuner sera à l’eau. Les petits amuse-bouche me semblent un peu copieux lorsque l’on sait ce qui suivra ce soir et, tenant compte de cette remarque, le chef adaptera avec bonheur le poids des éléments de sa trilogie. La langoustine au caviar est exactement ce que je recherche avec une cuisson parfaite. Le turbot a une cohérence qui me plait et un fumé un peu insistant. Ne voulant pas exagérer lors du déjeuner, j’arrête à ce stade mais Yannick, le très compétent maître d’hôtel me convainc de prendre un soufflé à la mangue extrêmement goûteux.

Après une sieste salutaire, je reviens vers 16h30 au restaurant Paloma pour ouvrir les bouteilles du dîner. Florent, qui deviendra dans quelques jours le chef sommelier du Paloma mais n’est pas encore en poste sera entièrement affecté ce soir à notre table, attention de Nicolas Decherchi que j’apprécie beaucoup. Pendant la séance des ouvertures, deux bouchons sont tellement collés au verre du goulot que tirer le tirebouchon ne ramènerait que des miettes. Aussi est-ce pour la première fois dans un de mes dîners que j’utilise le tirebouchon Durand, efficace mais qui a l’inconvénient de blesser les bouchons. Il s’agit du Ausone 1979 et de l’Yquem 1960 dont les bouchons, si je n’avais pas utilisé cet ustensile, seraient venus en charpie. Les odeurs les plus belles sont celles du Haut-Brion 1950, du Chambertin 1964 et de l’Yquem.

Avant le dîner je vais me promener dans la ville haute de Mougins où sont installés des dizaines de stands offrant des produits de gastronomie. Il y a en effet sur trois jours les Etoiles de Mougins un grand festival de gastronomie internationale où se rendent des dizaines et des dizaines de chefs et de pâtissiers qui expliquent et exécutent leurs recettes devant des amateurs. C’est à l’occasion du dixième anniversaire des Etoiles de Mougins que l’on m’a proposé de faire un dîner. Pour coller à ce chiffre anniversaire, ce dîner sera de dix personnes et de dix vins.

A 20 heures précises nous sommes au complet. Il y a six femmes pour quatre hommes ce qui doit plaire à la journaliste présente qui fut la première femme à écrire sur les femmes du vin et à s’en faire l’ambassadrice. Il y a cinq habitués de mes dîners dont deux américaines qui sont venues des USA uniquement pour ce dîner ! Il y a quatre nouveaux à qui je fais les recommandations d’usage.

Le menu composé par le chef est : trilogie gourmande, barbe à papa et toast de Pata Negra / émietté de tourteau à l’estragon, mousseline de chou-fleur et espuma de jus de coquillage / belles langoustines rôties au beurre demi-sel et caviar de Sologne / turbot de ligne aux cèpes cuit et servi en brioche, cèpes rôtis, polenta crémeuse et brunoise fraîche / canon d’agneau de lait d’Orient, filet cuit en kadaïf et citron confit, pastilla de boulgour aux épices douces et menthe fraîche / Stilton / Transparence de pomelos rose et macaron Américano / mangue en texture surmontée d’un petit gâteau mascarpone brioché / délicatesses.

On voit à l’exposé des plats que le chef n’a pas toujours réussi à lutter contre son envie de complexifier les plats par des saveurs qui peuvent être difficiles pour les vins anciens. Mais il faut noter qu’il a fait des efforts louables dans ce sens.

Dans le calme frais du soir nous prenons le Champagne Salon 1997 sur la terrasse de l’hôtel d’où l’on voit la mer et les belles montagnes à perte de vue. Le champagne est droit, précis, vineux, mais il est très jeune. La barbe à papa est un clin d’œil amusant aux plaisirs de l’enfance. Le toast au Pata Negra est ce qui convient le mieux au délicieux champagne à la longueur sensible.

Nous passons à table et sur l’amuse-bouche Florent nous sert le Champagne Lanson Red Label 1961. Le parfum de ce champagne est irréellement envoûtant. Un convive bizut préférera le parfum au vin lui-même, ce qui n’est pas mon cas. C’est en bouche que tout se joue, le champagne délivrant des complexités inimaginables et changeant à chaque gorgée. Tout y est, fruits rouges, caramel, beurre. On pourrait à chaque gorgée penser à une saveur et on la trouverait. Je trouve ce champagne parfait et mon vote final en portera témoignage.

Sur les plats qui suivent nous aurons à chaque fois deux vins. La langoustine est une merveille de précision de cuisson. Le Château Laville Haut-brion 1976 a une couleur d’un jaune à peine doré, d’une grande jeunesse. Ce vin est à un stade de sa vie où on ne lui voit aucune trace d’âge. Il est épanoui, cohérent, équilibré, avec une acidité dosée parfaitement. Ce vin est un régal.

A côté de lui, le Montrachet Roland Thévenin 1947 envahit nos narines d’un parfum de truffe blanche. C’est fou. En bouche on pourrait craindre le pire mais en fait, même si le vin est un peu fatigué et joue de la godille en milieu de bouche, son finale est droit dans ses bottes et signe un grand vin. Les vins anciens offrant toujours des surprises, quelques minutes plus tard, l’odeur de truffe blanche a complètement disparu, le vin devenant de plus en plus civilisé. Fatigué certes, mais offrant du plaisir.

J’avais signalé au déjeuner que le turbot était un peu fumé. Il l’est encore ce soir. Le Château Ausone 1979 est comme le dit un ami « très Ausone », c’est-à-dire le bon élève de la classe. On ne pourrait trouver aucun défaut à ce vin, mais on pourrait lui reprocher d’être trop dans la ligne du parti, et de manquer de canaillerie. Curieusement le vin est un peu trouble ce qui ne le handicape pas.

Le Château Haut-Brion rouge 1950 qui avait à l’ouverture un nez époustouflant a perdu un peu de sa vivacité. Un ami le trouve très rive droite, proche de Lafleur, plus que dans la ligne historique de Haut-Brion. J’ai suffisamment de points de repère de ce 1950 que j’ai bu et adoré de nombreuses fois pour que je ressente le plaisir de me trouver en face d’un grand Haut-Brion, riche, truffé, presque charbonné, et de laisser de côté deux ou trois petites imperfections. On dit que l’amour est aveugle. Il l’est dans mon cas face à ce 1950 que je vénère.

L’agneau traité de façon orientale avec des mâches diverses est trop compliqué pour des bourgognes subtils, mais ne boudons pas notre plaisir. Le Mazis-Chambertin Bouchard Père & Fils 1959 a une magnifique couleur d’un rubis clair. Le Chambertin Clos-de-Bèze Pierre Damoy 1964 est comme l’Ausone curieusement trouble, ce qui ne gêne pas non plus. Est-ce qu’un jour de repos dans la cave du Paloma aurait été insuffisant ? C’est inhabituel. Les deux vins sont très proches, au sommet de l’art de la Bourgogne. C’est très rare que je mette deux vins aussi proches car j’aime bien ouvrir sur un même plat deux vins peu comparables. On remarque nettement que le Mazis-Chambertin profite de l’effet de son millésime superbe et que le Chambertin Clos de Bèze, d’une année moins bénie, profite de sa structure plus riche. Lorsque l’on passe de l’un à l’autre on serait bien en peine de dire lequel on préfère. J’ai finalement choisi le 1959 du fait du caractère joyeux de son finale, même si le parfum du 1964 est plus authentiquement bourguignon.

Le Château Lafaurie-Peyraguey 1971 est un sauternes qui est toujours au rendez-vous, riche, profond, facile à vivre et sans histoire. Avec lui on est bien. Il forme avec le stilton un accord archétypal. Une des charmantes serveuses m’avait vanté les mérites d’un bleu qu’elle connaît et préfère, le Blue di Buffala. Je l’ai essayé sur le sauternes. Il est bon et forme un accord possible mais il est trop salé.

La bouteille du Château d’Yquem 1960 est magnifique, au niveau dans le goulot et à la couleur incroyablement foncée du vin. Cet Yquem est langoureux, dosant ses complexités comme dans une danse des sept voiles. C’est un très beau et grand Yquem, qui n’a pas été aidé par une interprétation trop compliquée de la mangue. Mais il est tellement grand qu’il se suffit à lui-même.

Nicolas Decherchi a fait un repas de haute qualité. Il a parfois, malgré mes recommandations, privilégié la réalisation d’un plat plutôt que celle d’un goût. Mais au vu de la joie des convives, il est clair que cette remarque est à la marge et que le résultat a été atteint. Je suis sûr que si nous recommençons cet exercice, nous atteindrons de nouveaux sommets. Le plat magique fut la langoustine, un vrai bonheur.

Il est temps de voter. Les votes sont très difficiles et j’ai eu à affronter une opposition au principe du vote qui est probablement la plus rude de tous mes dîners. Les vins étant très différents, l’une des convives s’est opposée à l’idée de classer des vins pour lesquels elle ne voyait aucun critère objectif. Mais c’est justement la liberté de choix qui permet à chacun de s’exprimer, ce qui s’est fait de façon constante dans la quasi-totalité de mes dîners. La sagesse ayant fini par triompher, nous avons tous voté, dix votants pour dix vins.

Comme toujours, la diversité des votes est surprenante, montrant que les goûts sont très différents d’une personne à l’autre. Six vins sur dix ont eu l’honneur d’être nommés premiers. Le Mazis-Chambertin 1959 a reçu quatre votes de premier, le Haut-Brion 1950 deux votes de premier et le Champagne Lanson 1961, Le Laville Haut-Brion 1976, le Chambertin Clos-de-Bèze 1964 et l’Yquem 1960 ont reçu chacun un vote de premier. Six vins sur dix ayant été le meilleur pour au moins un convive, c’est une grande surprise, mais c’est assez fréquent dans ces dîners, alors qu’une telle diversité heurte le bon sens : qui attendrait que six vins sur dix puissent prétendre à la première place ? Huit vins sur dix ont figuré sur les bulletins de vote.

Le vote du consensus serait : 1 – Mazis-Chambertin Bouchard Père & Fils 1959 , 2 – Château Haut-Brion rouge 1950 , 3 – Château d’Yquem 1960, 4 – Chambertin Clos-de-Bèze Pierre Damoy 1964, 5 – Château Laville Haut-brion 1976.

Mon vote est : 1 – Champagne Lanson Red Label 1961, 2 – Château Haut-Brion rouge 1950 , 3 – Château d’Yquem 1960, 4 – Château Laville Haut-brion 1976.

Ce fut un vrai plaisir de réaliser un dîner à Mougins dans le cadre des Etoiles de Mougins. Il convient de signaler l’engagement et la motivation de toute l’équipe du Paloma et le service impeccable. Vite, revenons à Mougins pour créer un nouvel événement avec cette équipe motivée.

—————————————

la journée a commencé par le festival pour les enfants :

2015-09-18 11.48.38 2015-09-18 11.48.47 2015-09-18 11.50.27 2015-09-18 11.50.34 2015-09-18 11.52.00

dès qu’on prend un gâteau, on fait une faute d’orthographe, brisant le texte écrit par le pâtissier. Une vue de la ville haute

DSC02626

ces montagnes de macarons m’évoquent des temples tibétains…

2015-09-18 11.54.31

ma conférence du lendemain est annoncée

DSC02628

le déjeuner au Paloma pour vérifier quelques plats

2015-09-18 12.14.13

????

2015-09-18 12.36.49

????

????

????

????

Les vins du dîner

DSC01552 DSC01553

DSC01555 DSC01554

DSC01556 DSC01557

DSC01558 DSC01559

DSC01560 DSC01561

DSC01572 DSC01573

DSC01569

DSC01566 DSC01567

DSC01564 DSC01565

DSC01562 DSC01563

DSC01551

l’ouverture des vins

DSC02617

dans l’ordre, les deux blancs, les deux bordeaux, les deux bourgognes et les deux liquoreux

DSC02623 DSC02625 DSC02624 DSC02622

DSC02621

le repas

DSC02634 DSC02636 DSC02638 DSC02639 DSC02641 DSC02642 DSC02644 DSC02645 DSC02647

dîner sur une nappe noire

DSC02649 DSC02650

MENU 191è DINER 150918 001

une autre version du même menu

menu-paloma-150918-001

votes 191è dîner 150918 001

 

Isabelle Forêt qui participait à ce dîner en a fait un  compte-rendu   ICI

https://femivin.com/2015/mon-diner-avec-le-pape-des-vins-anciens/

Dîner à l’hôtel de Mougins vendredi, 18 septembre 2015

Les Etoiles de Mougins sont un grand festival de la gastronomie internationale. L’un des organisateurs m’a demandé, à l’occasion du dixième anniversaire de ce festival d’organiser l’un de mes dîners à Mougins. Ce sera au restaurant Paloma (rappelons-nous que la ville a logé pendant de nombreuses années Pablo, père de…) dont le chef a une étoile. J’étais venu il y a plusieurs mois en reconnaissance pour étudier la cuisine du chef et mettre au point le menu de ce qui sera le 191ème de mes dîners.

J’arrive la veille pour livrer les vins au restaurant afin qu’ils se reposent, verticaux, un jour complet avant d’être ouverts. Je loge à l’hôtel de Mougins, qui, sur la carte, paraît proche du Paloma, mais les sites sont si vallonnés et tortueux qu’il faut se méfier des distances à vol d’oiseau que l’on multiplie en fait de nombreuses fois. Deux américaines qui avaient assisté à l’un de mes dîners et qui avaient été conquises, se sont inscrites. L’une vient de Miami exprès pour ce dîner, ce qui montre son enthousiasme. Elles logent toutes deux au même hôtel et nous décidons de dîner ensemble.

Lorsque j’arrive au bar, elles ont déjà bu une coupe de champagne dont elles ne connaissent pas le nom et qui ne leur a fait aucun effet et me proposent de trinquer. Je commande non pas un verre mais une bouteille et l’on me dit que le seul champagne disponible est un Champagne Pommery Brut sans année. Faute de grive c’est lui que nous boirons. C’est du champagne, mais sans véritable émotion. Le fait que ce soit une carte forcée joue peut-être dans notre appréciation.

Nous montons au premier étage pour dîner. Il y a un écart majeur entre le service et le repas. J’ai pris des fleurs de courgettes fourrées à une sorte de brandade de cabillaud puis un saint-pierre aux artichauts et ces deux plats se sont révélés goûteux et précis.

Le service en revanche est assez surprenant. On a l’impression d’avoir à faire à des novices. Le pompon a été qu’en pleine discussion en fin de repas, on nous a demandé de descendre au rez-de-chaussée, au bar. Pourquoi nous chasser ? Nous avons voulu partager la note et ce n’était pas possible car elle était déjà affectée à une seule chambre. Tout cela est agaçant comme le fait que dans ma chambre la climatisation est en panne alors qu’il fait un temps lourd, humide et orageux.

La carte des vins est étique. Et il n’y a pas d’ « h » à rajouter à ce qualificatif. J’ai choisi un Domaine de Trévallon rouge 2001 qui a le mérite de nous faire oublier les imperfections du service. Ce vin a un nez très expressif et profond évoquant des fruits noirs subtils. En bouche ce qui frappe, c’est le velours. Ce vin qui respire gentiment la garrigue est tout en douceur et en subtilité, tout en ayant une grande force de caractère, mais maîtrisée. Ses 14 ans lui vont à ravir. Nous avons longuement bavardé, en haut puis en bas, rejoints par un ami fidèle qui sera du dîner de demain.

Mougins est en effervescence, car les nombreux stands s’installent partout. Une bonne nuit s’impose pour être d’attaque pour le grand jour.

DSC02612 DSC02611

DSC02610

DSC02606 DSC02608 DSC02614 DSC02615

Dîner au restaurant Pages, avec un petit miracle mercredi, 16 septembre 2015

Au restaurant Pages, je vais dîner avec mon fils et ma fille cadette. Ayant le privilège de pouvoir apporter du vin je choisis en cave un vin blanc qui me faisait de l’œil. Passant dans l’allée où se situe ce vin, je regarde dans une case voisine un vin qui fait partie des légendes. Je le prends en main et je constate que le niveau est si bas que l’on est sous l’épaule. Le vin est très probablement mort. Plaçant la bouteille au-dessus de moi dans la direction d’une lumière, je constate que la couleur est belle. Perdu pour perdu, autant l’apporter au restaurant.

Arrivé en avance, j’ouvre mes deux bouteilles. Le parfum du blanc est annonciateur de merveilles. Le haut du goulot de la bouteille du vin rouge est recouvert de poussière noire. Le bouchon est sain et beau, ce qui n’explique pas la baisse de niveau. La première odeur qui émane du goulot est d’une grande pureté. Le vin semble ne souffrir d’aucun défaut. Je le fais sentir au chef Teshi qui partage mon étonnement.

Mes enfants arrivent et je leur demande si un blanc et un rouge seront suffisants pour un dîner gastronomique. Des sourires me répondent. Je passe donc commande d’un Champagne Dom Pérignon 2004 qui est décidément d’un charme particulier. D’emblée ce champagne offre son confort comme le fait un canapé moelleux. Tout en lui est franc, direct, agréable à boire, vif et plein. C’est un champagne de bonheur.

Nous grignotons des chips de légumes et le champagne va accompagner le début du repas dont voici le menu : dauphine de veau / Céviche de lieu jaune / chinchard fumé au foin / caviar de Sologne et ciboulette / homard breton et cèpes / Cromesquis de foie gras fumé au Bincho, crème de maïs grillé / encornet en deux façons, tartare et saisi, sabayon au pistou / lotte de Noirmoutier, extrait de coquillages, tomates d’Annie Bertin / poulette de Pâtis de Pascal Cosnet, jaune d’œuf, cébette / quatre approches du bœuf : Simmenthal et Galice 60 jours et 50 jours de maturation, Galice Rubia Galega 230 jours, et Ozaki, grillés au Bincho / déclinaison de riz noir / butternut, cardamome, romarin, ananas / chocolat blanc de figues / déclinaison de verveine / guimauve à la pistache / mi- cuit au caramel et à la cannelle / éclair au caramel.

Après trois mois de coupure dans le sud, je pouvais me demander si le charme de la cuisine de Teshi agirait toujours. La réponse est définitive, je suis conquis par le style de ce chef inventif, subtil, créatif, qui traite de magnifiques produits. Ainsi le bœuf de Galice maturé 230 jours est une merveille. L’est aussi l’Ozaki bien gras et fondant. Le plat de poulet qui représente l’univers de la vie du poulet est délicieux. Le homard aux cèpes et d’une précision de cuisson inégalable. Tous les plats sont remarquablement exécutés et élégants.

Le Chevalier-Montrachet Bouchard Père & Fils 1985 a une couleur très jeune mais légèrement dorée. Le parfum du vin est capiteux. Le vin est servi un peu froid aussi faut-il attendre qu’il prenne de l’épaisseur. Il est grand, noble, d’un fruit bien large et épanoui. C’est un Grand Cru dans la pleine possession de ses moyens. C’est avec les cèpes et leur bouillon qu’il a atteint son plus beau développement.

Le Château Palmer Margaux 1959 a un nez de truffe intense, et n’annonce aucun défaut ni aucune fatigue qui résulterait de son bas niveau. Je ne cesse de répéter « c’est un miracle ». Car c’est bien un miracle que de boire un vin aussi parfait. J’ai plusieurs fois bu Palmer 1959 et l’ai comparé avec le 1961, les deux vins étant des réussites incomparables de Palmer. Ce 1959 est conforme à la légende ou au mythe de ce grand vin dans ce grand millésime. La truffe domine mais il y a aussi du fruit. Ce qui frappe c’est l’équilibre, la solidité et la richesse de ce vin au final inextinguible. On le boit, on le mâche presque, et il dégage des ondes de bonheur. Avec les quatre expressions de bœuf, ce vin très rond est impérial.

Vincent, le nouveau sommelier vient nous proposer trois absinthes sauvages de Stéphane Meyer : Ucenni du massif des écrins, Ceutrons du massif de la Vanoise et Séquane du massif du Jura. Je n’ai pas été particulièrement convaincu par ces alcools qui « arrachent », ceux de la Vanoise et du Jura me semblant manquer de précision.

Il y aura eu trois causes de bonheur ce soir, le miracle d’un Palmer 1959 que tout condamnait, la cuisine d’un chef d’un talent rare, et la chaleur d’un dîner avec mes enfants. C’est beaucoup pour un dîner !

DSC02599

DSC02564 DSC02565 DSC02568

DSC02562 DSC02566 DSC02572

les cuisiniers veulent photographier mes bouteilles. On voit le niveau bas du Palmer 1959

DSC02561

la préparation du boeuf Ozaki

DSC02576

DSC02577 DSC02578 DSC02579 DSC02580 DSC02582 DSC02583 DSC02586 DSC02587 DSC02588 DSC02590 DSC02591 DSC02592 DSC02594 DSC02595 DSC02596 DSC02597 DSC02598 DSC02600

DSC02601 DSC02602 DSC02603

DSC02604

menu Pages 150915 001

Déjeuner au restaurant La Cagouille mardi, 15 septembre 2015

Un ami me suggère que nous déjeunions au restaurant La Cagouille. Cette idée me convient car la carte des vins regorge de bonnes pioches et André Robert, le truculent propriétaire des lieux est un hôte exquis. Il vient nous saluer à notre table avec un grand sourire. Selon l’habitude des déjeuners avec cet ami, il offre les repas, j’offre les vins et ce partage n’est pas à mon avantage. Qu’importe si l’on boit bien.

Nous commençons par une coupe de Champagne Laurent-Perrier extra-brut, vif, tranchant, adouci par les délicieuses coques qui sont le signe de bienvenue de ce restaurant. On s’accommode très bien de l’absence de dosage.

Le Chablis Grand Cru Valmur domaine François Raveneau 2008 est d’une forte acidité et d’une grande minéralité mais il éclate d’un fruit généreux ce qui le rend agréable, surtout lorsqu’il se réchauffe dans le verre. Sur les huîtres fines de claire numéro trois que j’ai prises, c’est le champagne qui est plus à son aise. Sur le pavé de cabillaud à la sauce aillée qui vient ensuite, le chablis trouve son envol, gagnant en gras et en rondeur. Une halte à la Cagouille, c’est comme si le temps s’arrêtait pour (comme on dit aujourd’hui) une pause-bonheur.

DSC02554 DSC02555

reliefs de coques

DSC02553 DSC02557 DSC02559

Présentation Salon Delamotte, cocktail inaugural au Bistrot 116, dîner à la maison lundi, 14 septembre 2015

Salon et Delamotte reçoivent à l’Hôtel de l’Industrie situé face à l’église de Saint-Germain des Prés et jouxtant le café des deux Magots. L’immeuble est superbe et l’institution a été fondée en 1801 sous Napoléon pour favoriser le développement de l’industrie. La salle où nous sommes reçus est de volume imposant. On peut goûter de beaux champagnes.

Le Champagne Delamotte brut sans année est un beau champagne, précis, assez opulent et de grand plaisir. Le Champagne Delamotte 2007 est d’une rare vivacité. Il claque sur la langue et me semble promis à un bel avenir. A côté de lui, le Champagne Delamotte 1999 est plus calme, jouant sur un équilibre discret et délicat.

On monte quelques marches pour accéder à une petite salle où l’on peut goûter le Champagne Salon 2002 qui, dans ce contexte, paraît jouer un peu en dedans, alors que le Champagne Salon 1997 est plus épanoui, plus plein, de forte empreinte. Qui eût dit que le 1997 coifferait au poteau le 2002 ? Je ne l’aurais pas parié.

Ryuji Teshima dit Teshi est le chef du restaurant Pages. Il a repris un bistrot bar à vins, le 116, qui est dans le prolongement de son restaurant. Il a confié la direction du site à Vincent, son fidèle bras droit. On fête ce soir le lancement de ce bar à vins. La foule est nombreuse, et le trottoir, voire même la rue, est envahi d’une foule d’habitués et d’amis des propriétaires, à majorité japonaise. Il y a beaucoup de jeunes et l’atmosphère est souriante.

On peut grignoter des préparations de Teshi et boire les vins bios découverts par le sommelier. Je m’en tiens à des bières, car après le champagne Salon, la transition serait trop rude. Je suis venu à cette inauguration avec mon fils par sympathie pour l’équipe de Pages.

Nous rentrons à la maison car il y a beaucoup de victuailles à finir du déjeuner de la veille. Et il reste du Château de Beaucastel Châteauneuf-du-Pape 1994. La première impression qui vient est celle de velours. Et c’est le privilège des années discrètes que d’offrir du velours lorsque le vin s’est assagi. Nous grignotons avec modération, car demain, nous irons dîner, mais où ça ? Au restaurant Pages bien sûr, car il est plaisant que les événements s’enchaînent comme si une logique les imposait.

Déjeuner de famille au champagne dimanche, 13 septembre 2015

Dimanche midi, mes trois enfants et quatre de mes petits enfants viennent déjeuner chez moi. Ma femme est dans le sud. Mon fils a organisé le repas. L’apéritif se prend avec un Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1999. Ce champagne est très précis, net, droit, vineux, équilibré. Il se boit avec plaisir. Il est racé. Il n’a pas l’ampleur et le charme du Cristal Roederer 1983 de la veille, mais son élégance et sa vivacité en font un grand champagne. Il y a du saucisson poivré, du Pata Negra, de petites saucisses d’apéritif, de la poutargue. Tout convient au champagne, ma préférence allant au saucisson.

A table nous avons des œufs de saumon, du tarama à l’oursin, deux saumons fumés de deux pays distincts, une anguille fumée. Il est difficile d’envisager autre chose que du champagne. Le Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en mars 2007 est un peu déroutant à la première gorgée et je ressens des notes lactées. Mais il fallait qu’il s’aère, et il prend alors son envol, vin vif, tranchant comme un couteau, racé, extrême comme on l’aime. Les huit ans depuis le dégorgement lui donnent une belle maturité et un équilibre rare. Il est à peine fumé, et se comporte bien avec toutes les saveurs variées de ce repas nordique. Sa persistance aromatique est forte.

Après des petites boules meringuées appelées « merveilleux », nous concluons ce repas avec les dernières gouttes d’une jolie bouteille de Bénédictine D.O.M. A. Legrand aîné très ancienne, au verre de couleur bleue. L’aération ancienne dans la bouteille fait que l’on ressent surtout le sucre, mais les herbes sont encore présentes pour nous charmer.

DSC02533 DSC02534 DSC02535

DSC02540 DSC02542 DSC02543

Ma fille aînée a bu un Beaucastel 1994 que je n’ai pas goûté

DSC02531 DSC02532

DSC02537 DSC02538 DSC02539 DSC02544 DSC02545

la Bénédictine

DSC02546 DSC02547 DSC02548 DSC02550 DSC02551

Autre dîner au champagne avec mon fils dimanche, 13 septembre 2015

Le lendemain, nous sommes à nouveau tous les deux, mon fils et moi, pour dîner chez moi car ma femme a préféré profiter de l’été indien dans le sud. Demain nous recevrons mes deux autres filles et leurs enfants, aussi mon fils est allé faire des courses pour ces deux repas. Pour nous deux, il a fait fort ! Des œufs en gelée avec des écrevisses, caviar d’Aquitaine, foie gras en terrine. S’y ajoutent un céleri rémoulade dont je raffole et un Kouign-amann pour le dessert.

Le Champagne Cristal Roederer 1983 a été conservé au réfrigérateur, fermé par son bouchon. En l’ôtant, le pschitt est fort. La bulle est d’une vivacité rare et nous nous regardons mon fils et moi : le champagne a fait un saut qualitatif presque incroyable. Il a gagné en opulence, en noblesse, en fruit. Il emplit la bouche glorieusement. C’est fou ce qu’il s’est élargi pour notre plus grand plaisir. C’est avec l’œuf aux écrevisses que l’accord est le plus pertinent. Le champagne n’est pas très tenté par le caviar pourtant délicieux. Le manger avec blinis et crème ou baguette et beurre ou sans accompagnant, c’est de loin la troisième solution qui est la meilleure.

J’ouvre un Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982. Le bouchon est si serré qu’il se casse en deux lorsque l’on fait des efforts pour le tourner et il faut l’extirper au tirebouchon. Il est curieux que de tels problèmes arrivent souvent avec des 1982 de plusieurs maisons dont Krug et Salon. C’est bien difficile pour ce 1982 d’arriver juste après le Cristal Roederer, car il est moins ample, moins fruité, moins vif. Mais l’aération va jouer son rôle pour lui comme pour le 1983 et au fur et à mesure de son épanouissement, il va prendre de plus belles couleurs, avec une belle acidité, un fruit mesuré, une râpe agréable et un picotement rafraîchissant. Sans avoir l’ampleur du Cristal 1983, il se montre grand.

Ce qui est intéressant de constater c’est que ces deux champagnes, de 32 et 33 ans, n’ont pas perdu un gramme de leurs bulles, et n’ont pas le moindre signe de vieillissement. Vive le champagne !

DSC02522 DSC02523 DSC02524 DSC02527 DSC02529

DSC02517 DSC02518 DSC02519 DSC02520 DSC02521 DSC02530

Beau dîner avec mon fils samedi, 12 septembre 2015

Mon fils vivant à Miami gère les sociétés que j’ai dû ne plus gérer lorsque j’ai pris ma retraite. Il arrive à Paris. Nous dînerons tous les deux seuls à la maison. J’ai envie d’ouvrir un vin du domaine de La Romanée Conti et je jette mon dévolu sur un Grands Echézeaux 1983. Au début du repas ou plutôt du grignotage, nous avons le choix entre quatre champagnes mis au frais. Ce sera un Dom Pérignon 1996.

Le Champagne Dom Pérignon 1996 a un superbe bouchon de grande qualité. La bulle est active. La couleur n’a pas de signe d’âge. Le nez est tellement actif qu’il plante le décor : on est dans la noblesse et l’intensité. Et la bouche confirme. La première impression est celle d’une race immense. Le vin est vif, avec des fruits romantiques et une jolie intensité qui fait claquer le champagne en bouche. C’est un grand champagne totalement assumé : il joue juste et il le sait.

Comme nous sommes deux sans cuisiner, on n’opposera au champagne que du jambon italien en fines tranches, du foie gras et un saucisson sec. Mais en fait, l’accord se trouve sur du pain avec du beurre, car le gras du beurre excite le pétillant du champagne.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1983 me surprend car jamais je n’aurais attendu autant de fruit dans le parfum de ce vin. Alors que 1983 n’est pas une année puissante, ce vin est tonitruant, ce que je n’attendais pas. Je retrouve dans ce parfum le côté salin que j’aime tant dans les vins du domaine de la Romanée Conti.

En bouche, tout est parcheminé. Il y a des évocations d’armoires anciennes, qui inondent les narines dès qu’on ouvre la porte, mais il y a aussi de la puissance, une force vinique rare, et un côté patiné plein du charme des vins anciens. Boire ce vin, c’est voyager dans l’irréel, dans les sensations rares où les bois exotiques abondent. Jamais je n’aurais vu ce 1983 aussi expressif. Il est essayé avec des fromages de chèvres, de brebis et de vaches, mais c’est vraiment seul qu’il délivre la beauté de son message fait d’énigmes en couches successives tant il joue sur des registres inatteignables de bois exotiques et de salinités subtiles. Encore une fois, jamais je n’aurais imaginé ce vin à ce niveau de complexité.

Nos discussions n’en finissent pas aussi fait-il un peu soif. J’ouvre un Champagne Cristal Roederer 1983, de l’année du Grands Echézeaux. C’est amusant qu’il y ait des synonymies entre les deux 1983. Car il y a des aspects de bois flottés dans le Cristal. C’est un grand champagne, beaucoup moins charmeur et flatteur que le Dom Pérignon 1996, mais très racé, claquant en bouche, avec des évocations de bois marins. C’est un champagne vif. Grignoter ainsi avec mon fils en recréant le monde, que demander de mieux ?

2015-09-11 20.13.35

2015-09-11 20.25.28 2015-09-11 20.34.03

2015-09-11 23.38.26 2015-09-11 23.38.33 2015-09-11 23.44.06 2015-09-11 23.46.39 2015-09-11 23.44.16

2015-09-11 23.39.30

2015-09-11 20.32.11 2015-09-11 21.03.04

Verticale de 20 ans de Clos de Tart et dîner en l’honneur de Sylvain Pitiot samedi, 12 septembre 2015

Sylvain Pitiot, le directeur du prestigieux Clos de Tart a pris sa retraite cette année. Avec son successeur Jacques Devauges, avec les propriétaires du Clos, de la famille Mommessin, il a invité une trentaine d’amis, de distributeurs et agents et de journalistes pour célébrer ses vingt années à la tête du domaine. Sylvain m’avait demandé d’apporter un vin pour la fin de repas, aussi dès mon arrivée j’ouvre quatre bouteilles car il y aura quatre tables au dîner.

A 18h30 nous nous présentons dans la cour du Clos et peu de temps après nous commençons la dégustation des vingt millésimes faits sous la responsabilité de Sylvain. Sur des tonneaux redressés sont posées des bouteilles de trois ou quatre millésimes. On a appelé ces stands des « stations » et je peux affirmer que cette dégustation est tout sauf un chemin de croix.

Les premières stations sont dans un chais. Les autres sont dans l’une des magnifiques caves ancestrales du Clos de Tart. Nous sommes debout, ayant en main le verre de dégustation, le carnet de notes et un stylo. Il n’y a aucun pupitre, aussi la prise de notes est épique. Elle sera donc succincte.

Le Clos de Tart 2014 a une attaque très franche. Il a déjà une belle plénitude. Il est riche et épais. C’est une belle surprise de le voir si buvable.

Le Clos de Tart 2013 a un nez plus serré que le 2014. Il est plus fluide et plus frais. Il a un très joli caractère et un finale très noble.

Le Clos de Tart 2012 a un nez très minéral, d’ardoise. Il est plus fermé que les 2013 et 2014. Il est dans un stade de fermeture qui limite son charme. A attendre avant de juger.

Le Clos de Tart 2011 a un nez très frais. Le vin est romantique. Je ressens une petite amertume. Le finale est très racé mais le vin manque un peu d’opulence à mon goût.

Le Clos de Tart 2010 est plus gourmand et plus joyeux. Il a une belle plénitude et un bel équilibre. C’est un grand vin de belle râpe dans le finale.

Le Clos de Tart 2009 a un nez fruité. Le vin est très large. Il est à la fois frais et riche. C’est un grand vin.

Le Clos de Tart 2008 a un nez plus discret mais il a une belle attaque de fruit. C’est un vin frais, riche, au finale poivré. C’est un très grand vin, très généreux.

Le Clos de Tart 2007 se boit bien. Il est frais, léger, très agréable. Il a des similitudes avec les vins anciens d’années discrètes dont il partage l’élégance et la subtilité. Il a un très beau fruit. C’est l’expression élégante du Clos de Tart dans une année moins riche.

Le Clos de Tart 2006 est très différent. Il a une belle matière, de la fraîcheur et des fruits presque confits. Il est plus assis que les autres tant il est riche. C’est un grand vin.

Le Clos de Tart 2005 a une attaque de velours et de charme. Il a beaucoup de fruits et de plaisir. C’est un vin très précis. Le finale est un peu rêche, mais c’est agréable. Ce vin est de fruit et de fraîcheur.

Le Clos de Tart 2004 a un nez très fort et intense et paradoxalement on ne le retrouve pas en bouche car le vin est fermé, âpre, limité.

Le Clos de Tart 2003 a une couleur très noire. Il y a un peu de café dans son parfum. On ressent un peu de sucrosité. Ce vin d’une incroyable richesse ne me semble pas dans la ligne traditionnelle du Clos de Tart.

Nous changeons de salle de dégustation et les odeurs très fortes qui règnent dans la cave vont influencer la perception des parfums des vins.

Le Clos de Tart 2002 a un beau fruit très équilibré. Ce n’est pas un vin tonitruant, mais il est très agréable à boire. Son finale est gourmand.

Le Clos de Tart 2001 a beaucoup de fraîcheur et un fruit agréable mais un peu court. C’est un vin qui demanderait d’être en situation de gastronomie car je le trouve un peu fermé, au sucre perceptible dans le final.

Le Clos de Tart 2000 a un nez intense. Le vin est plutôt léger. C’est un vin qui se cherche. Son finale est très agréable et me pousse à l’aimer.

Le Clos de Tart 1999 est un vin qui me donne l’impression de ne pas être encore épanoui. On sent qu’il faut l’attendre encore plusieurs années afin d’en saisir toutes les qualités.

Le Clos de Tart 1998 est le premier vin de ceux que j’ai dégustés qui donne des notes animales dans son parfum. La bouche est fraîche et le vin est agréable, ne faisant pas partie des plus belles personnalités.

Le Clos de Tart 1997 est tout en velours et en douceur. Il a une belle matière mais joue surtout sur l’élégance. J’adore ce vin qui comme le 2007 a des intonations de vin ancien.

Le Clos de Tart 1996 a une très belle couleur d’un rouge glorieux. Le vin est d’un équilibre rare. C’est le plus plaisant à boire car il est plus mûr que tous les autres. Le finale n’est pas assez structuré pour mon goût mais c’est déjà un grand vin.

Ce qui est intéressant dans cette dégustation, au-delà de la constatation de la noblesse de ce vin béni des dieux, c’est que les petites années ou supposées petites sont les plus agréables à ce stade de leur jeunesse. Ainsi, 2007 et 1997 sont de très belles surprises. Le 2008 est un vrai bonheur et montre de grandes qualités. Les grandes années dépasseront les petites années, mais dans vingt ans sans doute.

Après cet exercice nous remontons dans la cour pour trinquer avec les autres participants. C’est un Champagne Pol Roger magnum 2002 qui nous est servi. C’est une remarquable réussite de l’année 2002, vin de charme mais de forte imprégnation. On le boit avec un infini bonheur.

Le dîner est placé. Je suis à côté de Didier Depond, président de Salon-Delamotte et à côté d’une jeune femme vivant en Suisse qui est Master of Wine. Le Grand Maître de la Confrérie des Chevaliers du Tastevin est aussi à notre table ainsi que des américains et anglais, l’épouse d’un célèbre vigneron bordelais et un célèbre vigneron bourguignon.

Sylvain Pitiot fait un court discours sur l’histoire du Clos de Tart, protégé par la Vierge de Tart depuis 1141 quand il fut fondé par les moniales de l’Abbaye de Tart, dépendant de celle de Cîteaux. Jacques Devauges fait lui aussi un court discours de remerciement à Sylvain et souhaite poursuivre son œuvre.

Le menu préparé par Thomas Le Courbe est : escalope de foie gras de canard poêlé au cassis, craquant de pain d’épices / pavé de thon sauce vin rouge, carottes glacées, jeunes pommes de terre / demi pigeonneau farci basse température, jus simple / Cîteaux, Epoisses, Comté / mignardises.

Le Clos de Tart 2007 est un vin superbe, d’une fraîcheur rare et d’un beau fruité mais surtout, il est magnifié par un accord que je n’aurais sans doute jamais osé. La sauce au fort cassis est vineuse et propulse le vin à des hauteurs rares, lui donnant équilibre et un fruité magnifique.

Le Clos de Tart magnum 2005 a un nez superbe. Le vin est noble et racé. Son acidité est belle ainsi que sa matière. Le fruit un peu râpeux est puissant. Le 2005 a plus de structure que le 2007 mais c’est aujourd’hui le 2007 qui montre plus de charme et de velours. En fait il faudrait attendre vingt ans pour que le 2005 délivre tout ce qu’il a en devenir. On en a une idée grâce au poisson car le 2005 devient grandiose, strict mais grandiose. Michel Bettane dit que c’est grâce au 2005 que le Clos de Tart est remonté tout en haut de la hiérarchie des vins de Bourgogne.

Le Clos de Tart 2002 est difficile à caractériser. Il est très vineux, très fort mais manque un peu d’ampleur. Servi d’une deuxième bouteille, je suis face à un vin beaucoup plus plaisant, vin gracieux avec des petites notes de café.

Le Clos de Tart 1996 a une couleur très foncée, plus que celle du 1996 bu en cave. Il me donne une impression de vin âgé. C’est un grand vin de structure riche, évoquant la truffe noire. Il est fort, puissant, très racé, claquant en bouche et imprégnant. Il a fraîcheur et puissance, à l’aise sur l’excellent pigeon.

Le vin mystère peut difficilement cacher qu’il est Clos de Tart. C’est donc l’année qu’il faut trouver. Autour de la table, les candidats possibles sont 1985 et 1978. Quand je hasarde 1976, le vigneron bourguignon me répond : « non, pas 1976 ». Je n’insiste pas car c’était une hypothèse parmi d’autres. Sylvain nous demande si nous avons trouvé le Clos de Tart 1976, vin frais, fluide et très beau dans son épanouissement calme et mesuré.

Le vin que j’ai apporté est un Niersteiner Konigskerze Rheinhessen Bansa & Sohn 1959. Il est doux mais non sucré, aqueux, herbacé tendance artichaut, évoquant un peu la Suze. C’est un vin curieux, déroutant mais intéressant, qui a été diversement apprécié selon les tables car ce vin fait un peu du hors-piste et les quatre bouteilles avaient à l’ouverture des parfums dissemblables. Je voulais mettre un vin qui ne soit pas archi-connu de ces grands dégustateurs. Je suis peut-être allé trop loin dans l’inconnu.

Le menu remarquablement conçu avec des accords pertinents et dont l’audace a été couronnée de succès a parfaitement convenu aux vins. L’ambiance amicale et chaleureuse a permis à chacun de se réjouir de cette communion avec Sylvain Pitiot, qui a permis au Clos de Tart de rejoindre les étoiles du firmament bourguignon.

2015-09-10 19.50.16 2015-09-10 19.49.58

2015-09-10 19.49.38 2015-09-10 19.49.47

Jacky Rigaux et Sylvain Pitiot

2015-09-10 19.53.13

les tables du dîner dans la salle du pressoir qui date de 1514

2015-09-10 20.23.46 2015-09-10 20.23.57 2015-09-10 20.24.03

le menu

dîner Clos de Tart 150910 001 dîner Clos de Tart 150910 002 dîner Clos de Tart 150910 003

trois expressions caractéristiques de Sylvain Pitiot

DSC02508 DSC02509 DSC02510

un peu de retard pour photographier le foie gras poêlé !

DSC02511 DSC02513 DSC02515 DSC02516

le vin allemand 1959 que j’ai apporté

DSC01578 2015-09-10 17.12.54

Dîner au restaurant de l’hôtel Shangri-La avec des vins de la famille Hugel mardi, 8 septembre 2015

(lire le récit du déjeuner ci-dessous)

J’arrive vers vingt heures au restaurant chinois de l’hôtel Shangri-La qui a organisé un menu dégustation à six ou huit plats agrémentés de vins de la famille Hugel. Les inscrits ne se mélangent pas et sont répartis à des tables en fonction de leurs réservations. Les représentants de la famille Hugel, Etienne, son fils et son neveu, passeront de table en table pour commenter tel ou tel vin. Serge Dubs fera de même et j’irai aussi saluer ceux qui se sont inscrits à la suite de mon mail annonçant ce dîner. Avant cela, l’apéritif se prend debout avec le Gentil Hugel 2014 qui confirme mon impression du midi, d’un vin franc, simple, frais et de belle soif.

Le dîner dégustation autour des vins de la famille Hugel est ainsi conçu : effiloché de poulet en salade, sauce façon sichuanaise / Ha Kao Siu Mai (qui comprend des beignets de crevette, du crabe et du porc) / ravioli de crabe au bouillon / langouste croustillante aux flocons d’avoine / porc à la sauce aigre-douce / riz sauté à la façon du chef / lait de coco aux céréales, boules moelleuses à la crème montée et fruits frais.

Le Gewurztraminer Estate Hugel 2012 a un petit côté déstructuré que je n’aime pas beaucoup dans les jeunes gewurztraminers. Son alcool est fort, presque trop fort. C’est un chien fou talentueux qui se domestiquera avec l’âge, ce que le plat de poulet réussit dans l’instant, révélant café, caramel mais aussi son caractère floral. Le vin est très à l’aise avec ce plat épicé, mais il serait sage d’attendre encore avant d’en profiter.

Le Riesling Grossi Laüe Hugel 2010 et le Rieling Jubilee Hugel 2009 sont les mêmes que ce midi. Je retrouve les mêmes impressions mais les plats épicés n’arrangent pas tellement ces vins.

Le Pinot Gris Jubilee Hugel 2009 est d’une rare élégance. Il est magnifique, magique et je suis conquis par ce vin.

Le Riesling Classic Hugel 2014 est peut-être grand, mais il est trop jeune pour mon palais. Le Riesling Schoelhammer Hugel 2007 est magnifique, d’une grande perfection comme ce midi. Il vibre, il est généreux. C’est un très grand vin.

Le Pinot Gris Vendanges Tardives Hugel 2008 est sublime, magique sur le porc aigre-doux, dans une association diabolique de plaisir. Il révèle de l’ananas.

Le Pinot Noir Jubilee Hugel 2013 est trop jeune pour moi, montrant trop son acidité et son amertume.

Le Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles « S » Hugel 2007 est magnifiquement confortable. Il a la pourpre cardinalice, l’aisance et la facilité des seigneurs.

L’esprit est à la joie et surtout à la générosité. La cuisine chinoise est de grande qualité. Certains plats sont déroutants, comme les desserts, d’autres sont d’un charme rare comme le porc aigre-doux qui a créé un accord de première grandeur. L’hôtel est luxueux, le service est très attentif et efficace, dont Cédric, sommelier très à l’aise au milieu de cette débauche de grands vins.

La famille Hugel fait des vins de haute qualité, dont certains me sont apparus de très haut niveau, couronnés qu’ils sont par les meilleures notes dans les guides. Ce fut un plaisir de rencontrer trois générations d’Hugel. Les alsaciens savent recevoir. Je suis sûr que Jean Hugel, avec qui je fus d’une grande complicité, doit être fier, là-haut, du travail effectué par sa famille.

DSC02505 DSC02504 DSC02503

DSC02498

Etienne Hugel m’a photographié avec Cédric qui avait aligné les bouteilles de tous les vins bus ce soir

IMG_5653

DSC02488 DSC02489 DSC02491 DSC02494 DSC02495 DSC02497