déjeuner de famille avec deux vins de 90 ans dimanche, 20 octobre 2024

C’est un déjeuner de famille dans ma maison. Nous serons huit dont cinq qui boivent du vin. Ma dernière fille vient d’avoir cinquante ans. Un tel chiffre est important dans la vie de chacun et j’ai ressenti qu’elle y est sensible aussi j’ai eu l’idée de choisir deux Bourgognes de 1934, qui ont quarante ans de plus qu’elle, pour suggérer qu’elle a une longue vie devant elle et qu’il ne faut pas s’arrêter à un chiffre jalon.

J’ai ouvert les vins très tôt et j’ai voulu ouvrir le champagne en avance, car il s’agit d’un magnum. Lorsque j’ai tourné le bouchon du Veuve Clicquot 2008, j’ai senti une énorme pression sur mes doigts, et le pschitt explosif a fait le bruit d’un tir de canon. Buvant rarement des champagnes jeunes, j’ai été impressionné par ce bruit.

Le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 2008 en magnum promet d’être grand mais il est un peu trop jeune pour l’instant. Très élégant, avec une grande longueur, j’aurais aimé un peu plus de gras car il est strict. Mais il deviendra grand. C’est aujourd’hui un champagne sérieux.

Le Clos Vougeot Cave de la Reine Pédauque 1934 avait à l’ouverture il y a quatre heures une odeur qui n’était pas parfaite, un peu boueuse. Mais quand je le sers, il a effacé toute imperfection. Il est grand, un peu gras, et offre une personnalité généreuse.

Le Chambertin Charles Viénot 1934 est un vin que j’ai acheté il y a plus de 20 ans quand Pierre Cardin vendit aux enchères simultanément à New York et à Paris la cave du restaurant Maxim’s. Les prix étaient fous mais j’ai acheté une caisse de douze Chambertin 1934. Beaucoup ont souffert d’évaporation, certainement en raison des conditions de conservation dans la cave de Maxim’s.

Cette bouteille – pour une fois – a un bon niveau, et en l’ouvrant je savais que ce serait un grand vin. Ce vin a toutes les qualités d’un grand vieux Chambertin. Il est si impressionnant, dense, intense, frais. Un vin immense d’un très grand vigneron. Large et opulent c’est un vin de plaisir.

Ma fille aînée préfère le Clos Vougeot. Ma plus jeune fille comme moi préfère ce Chambertin d’une belle intensité.

Nous avons bu les vins avec du poulet et des pommes de terre, le plat le plus simple et parfait. Et avec un fromage Mont d’Or, le Chambertin est à se pâmer.

Ouvrir deux vins de 90 ans était un risque. Ce fut un succès.

286ème dîner au restaurant Pages jeudi, 17 octobre 2024

Le 286ème dîner se tient au restaurant Pages. Des amateurs américains de l’Idaho avaient participé au 240ème dîner et viennent de se marier hier en France, dans la Loire. Accompagnés d’amis de l’Idaho, ils m’avaient demandé d’organiser pour leur groupe de cinq un dîner qui se tiendrait le lendemain du mariage. Je leur ai proposé de compléter la table avec d’autres convives pour avoir un programme de vins beaucoup plus large. Nous serons donc dix ce soir avec une parité parfaite Idaho / France. Il y aura autour de la table un vigneron de la Napa Valley, des commerçants du monde du vin et des amateurs éclairés.

Un peu avant 16 heures je commence l’ouverture des vins. Je serai rejoint plus tard par un ami commerçant en vins et journaliste et par un journaliste. Nous aurons ainsi le temps d’échanger sur le vin et mes dîners.

Alors que le Domaine de Chevalier 1952 a un niveau mi-épaule et le Clos Fourtet 1960 a un niveau superbe, c’est le 1952 qui offre le plus beau parfum, le saint-émilion ayant un nez poussiéreux qui pourrait ne pas se dissiper. Le Clos de Vougeot 1961 a un beau bouchon et un parfum idéal.

Je bataille avec le bouchon du Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956 dont le sommet est couvert d’une pâte graisseuse et se retire en morceaux gras et noirs. Mes mains sont toutes noires. Fort heureusement le parfum est salin et typique des vins du domaine.

Le Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949 a un bouchon parfait et des senteurs riches de garrigue. Les trois liquoreux de 1929 ont des bouchons qui ne posent pas de problème et des parfums riches très différents. Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 offre un gentil pschitt qui signe une belle jeunesse et le Moët & Chandon Brut Impérial 1964 a un bouchon qui se brise puisque le bas du bouchon ne veut pas suivre la torsion du haut du bouchon. Il s’annonce impérial comme son nom.

Les convives sont tous à l’heure. Le menu a été conçu lors d’une conversation téléphonique entre Pierre-Alexandre le directeur, Ken le chef et moi. Nous nous connaissons si bien que ce fut facile. Un point d’interrogation existait sur le lièvre à la royale puisque Ken n’était pas sûr de pouvoir le faire à temps. Fort heureusement ce plat mythique sera servi ce soir.

Le menu est ainsi libellé : amuse-bouche : carotte, brocolis, jambon / anguille fumée, amanite des Césars / carpaccio de poisson blanc / noix de Saint-Jacques poêlées / daurade royale poêlée, sauce vin rouge / pigeon rôti, sauce salmis, pommes des terres poêlées / lièvre à la royale / tarte Tatin / chocolat.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 est d’une belle couleur claire et la bulle est encore présente. Ce champagne est vif et tranchant, prenant de la largeur avec le jambon ibérique. Sa noblesse est certaine. C’est le vin phare de la maison Mumm dans un millésime qui n’a pas la renommée qu’il devrait avoir. C’est le 21ème que je bois tant j’ai de sympathie pour ce grand Mumm.

Le Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964 est une belle surprise pour beaucoup tant il est joyeux et généreux. Il est même fruité et si la bulle n’est plus visible, le pétillant est entraînant. C’est un champagne gourmand. Alors que Dom Pérignon est d’une hiérarchie supérieure j’ai parfois plus de plaisir franc avec les Brut Impérial anciens qu’avec les Dom Pérignon des mêmes années.

Je suis un peu gêné par l’Y d’Yquem Graves blanc 1979 qui a un léger goût de bouchon, qui ne rebute aucun des convives. Ce vin a des traces de botrytis comme très souvent pour les Y. Il est ensoleillé. A l’inverse le Château Laville Haut Brion blanc 1978 est strict et tranchant, d’un caractère guerrier. Le Laville est le compagnon du carpaccio de poisson alors que l’Y est confortable avec les noix de Saint-Jacques. Les deux blancs de Bordeaux ont des styles différents et sont excellents.

Le Clos Fourtet Saint-Emilion 1960 n’a plus aucun défaut olfactif mais je ne le trouve pas aussi brillant qu’il pourrait l’être. On est loin du sublime 1947 qui fait partie de l’élite des bordeaux de 1947. En revanche le Domaine de Chevalier Léognan 1952 dont je n’étais pas sûr, du fait de son niveau, est riche et bien construit. Avec la daurade, il forme un très bel accord. Ce Chevalier est une agréable redécouverte.

Le Clos de Vougeot Bouchard Père & Fils 1961 est pour mon goût une gigantesque surprise. Il représente le bourgogne archétypal mais surtout il est absolument parfait, d’une construction idéale. C’est le bourgogne tel qu’on le rêverait. Alors que je chéris les vins du domaine de la Romanée Conti, c’est ce vin que je mettrai premier dans mon vote tant il est grand. L’accord avec le pigeon est classique mais si efficace.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956 a une couleur un peu terreuse, mais il a tous les marqueurs des vins du domaines, le sel et la rose auxquels s’ajoute un style parcheminé. Le millésime 1956 était faible et s’est révélé quelques années plus tard. Il y a des complexités impressionnantes. Il convaincra mes convives.

Le Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949, c’est l’ami de toujours, celui en qui on a une confiance totale. Il est tellement solide, construit et rassurant. Il est fait pour le lièvre à la royale dont il calme les ardeurs. Le vin est long, riche et d’un charme enthousiasmant.

J’ai voulu mettre dans ce repas trois liquoreux d’une année mythique, très différents. Le Château du Peyrat 1er cru Capian Langoiran 1929 est un Premières Côtes de Bordeaux qui m’avait surpris par la richesse de son parfum. Il n’a pas la puissance des sauternes mais sa vivacité est supérieure à ce que j’attendais.

Château Fihot est généralement un sauternes plus doux et discret qu’Yquem aussi suis-je surpris par l’intensité de ce Château Filhot Sauternes 1929. Quel vin riche et complexe. Un miracle de plaisir sur une tarte Tatin gourmande faite par Lucas, le pâtissier du restaurant.

Le Banyuls Grand Cru SIVIR 1929 a été embouteillé en l’an 2000. Il s’agit d’un Banyuls de coopérative qui a passé 71 ans en fût de chêne. Le parfum est d’une densité incroyable et malgré cela, le vin paraît plus léger et frais que ce que suggère sa pesanteur alcoolique.

Je suis content que l’on ait exploré ces trois liquoreux d’un même millésime. Chacun offre une grâce particulière que seuls les liquoreux anciens peuvent donner. J’aurais été tenté d’essayer le lièvre à la royale avec le Banyuls, mais mon assiette était vide. C’eût été plus original que le classique chocolat.

Mes convives ont été impressionnés par la cuisine épurée, simplifiée mais si efficace du chef Ken et de son équipe. Cette pureté et cette précision mettent en valeur les vins idéalement.

Les votes sont extrêmement intéressants. Les 12 vins présents ont tous reçu au moins un vote d’un des convives, ce qui est gratifiant pour mes vins. Encore plus plaisant est le fait que six vins ont été nommés premiers : le Richebourg trois fois, le Clos de Vougeot et le Moët deux fois et le Châteauneuf du Pape, le Domaine de Chevalier et le Laville Haut-Brion chacun une fois premier.

Le vote de l’ensemble de la table est : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956, 2 ex-aequo – Clos de Vougeot Bouchard Père & Fils 1961 et Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949, 4 – Château Filhot Sauternes 1929, 5 – Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964, 6 – Domaine de Chevalier Léognan 1952.

Mon classement est : 1 – Clos de Vougeot Bouchard Père & Fils 1961, 2 – Château Filhot Sauternes 1929, 3 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956, 4 – Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949, 5 – Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964.

J’ai gardé la plus belle surprise pour la fin de ce récit. Les cinq américains me suivent sur Instagram. On voit peu de photos de moi mais quand je suis pris en photo c’est souvent au restaurant et on me voit avec un pullover qui a la couleur bleu foncé qui est celle des mots que l’on voit ci-dessus. Les trois hommes sont venus au dîner avec des pullovers de cette couleur bleue. Quelle gentillesse folle !

Déjeuner au restaurant Marsan Hélène Darroze mercredi, 16 octobre 2024

Il y a quatre ans, un ami m’avait demandé de faire un dîner de vingt personnes au restaurant Marsan Hélène Darroze. Leur grande table au rez-de-chaussée se prête idéalement à réaliser un tel repas. L’ambiance avait été chaleureuse et enjouée, ce qui explique sans doute que l’ami me demande de faire un nouveau dîner pour ses amis au même endroit.

Mes interlocuteurs du restaurant sont tous différents de ceux avec qui j’avais organisé le 240ème diner. Je réserve une table pour faire connaissance avec la cuisine du chef de cuisine Paul Genthon et rencontrer le directeur Dimitri Auriant. Un ami fin gourmet se joint à moi pour cette expérience.

Nous sommes accueillis par de larges sourires. Je salue le chef et le directeur et nous prenons place dans la salle à manger. Nous préférons que le chef choisisse lui-même ce qu’il veut nous faire goûter.

Le chef sommelier me montre la carte des vins et je ne dépasserai pas la première page de son beau livre car j’ai vu un Champagne Charles Heidsieck Blanc des Millénaires 2006 qui me fait envie. Ce champagne est un blanc de blancs d’une belle personnalité. Il est solide et vieillira bien.

Le champagne est bon, mais dès que le premier plat est servi, à base de poisson cru, il se propulse à un niveau de complexité et d’émotion très supérieur. Il a vraiment un très grand potentiel, pour atteindre un jour la divine perfection du millésime 1985.

Le chef sommelier s’appelle Avishek Bhugaloo. Il était heureux que je choisisse le Blanc de Blancs des millénaires et c’est lui qui a suggéré le 2006 avec des arguments convaincants.

Devant lui, j’ouvre le vin que j’ai apporté, trouvé en me promenant dans ma cave. Il s’agit d’un Château Brane-Cantenac 1978 qui a une particularité : il a une étiquette d’un importateur argentin qui a stocké ce vin à Buenos-Aires et n’ayant sans doute pas eu de succès l’a revendu aux enchères en France. J’en ai acquis une bonne vingtaine, et l’idée m’est venue de vérifier si les voyages de ce vin l’ont affecté.

Le parfum à l’ouverture est riche et engageant. Le plat qui suit le poisson cru est à base de betteraves, or la betterave n’est pas l’amie des vins. On nous sert ensuite un plat de de champignons et dès la première bouchée, on sait que l’on est en face d’un plat parfait. On a la même impression qu’avec les plats légendaires de Guy Savoy. Ce plat peut devenir lui aussi une légende. Il n’y a pas un bouton de guêtre à changer. Il est parfait avec le champagne.

D’instinct, le homard doit accompagner le vin de Bordeaux et leur accord est sublime. Le Bordeaux est transcendant et cette perfection est due à l’âge. Le vin a 46 ans. Il est à l’idéal de sa maturité et je peux constater que les pérégrinations du vin n’ont en rien entamé sa prestance.

Les plats qui suivent sont tous intéressants. J’ai versé des verres du bordeaux pour que le chef et le sommelier ainsi que le directeur puissent ressentir l’intérêt des vins anciens.

Ce repas a été manifestement copieux et très épicé. Le champignon et le homard sont des plats exceptionnels. Le menu m’a été envoyé plus tard. Il est extrêmement détaillé et en voici un résumé : daurade royale marinée aux baies roses / mikado de betteraves rouges et crapaudine poudrée de roses de Damas / cèpe de Bordeaux, carpaccio au foie gras / homard bleu aux épices tandoori / pintade jaune des Landes / chocolat et cèpes de Bordeaux / le véritable baba, à l’armagnac Darroze. C’est une belle imprégnation dans le monde d’Hélène Darooze avec Paul Genthon.

Nous sommes descendus dans la salle où se tiendra le repas pour composer le menu. Juliette Le Floc’h, la pâtissière, s’est jointe à Paul Genthon et Dimitri Auriant. Nous sommes tous motivés pour réussir le dîner du mois prochain.

285ème dîner au restaurant Astrance samedi, 28 septembre 2024

Le 285ème dîner se tient au restaurant Astrance de Pascal Barbot et Christophe Rohat. J’étais venu avec un ami mettre au point le menu avec Pascal et Christophe, mais la veille du dîner on m’informe qu’il a été impossible de trouver du turbot. La séquence turbot / lieu jaune sera remplacée par la séquence lieu jaune / rouget.

Nous serons onze dont un seul convive a déjà participé à des dîners et les neuf autres viennent pour la première fois. C’est je crois une des premières fois où il y a un tel nombre de nouveaux. Il y a deux norvégiens, deux anglais vivant à Bordeaux, deux parisiens, deux ardéchois dont l’un est un des plus célèbres vignerons de France et un jeune amateur de Porto-Rico. L’ami fidèle est parisien. Les deux jeunes femmes sont placées à ma gauche et à ma droite.

Le menu préparé par le chef Pascal Barbot est : Amuse-bouches : tuile pois chiche, gribiche aux algues, gougère, sablé Comté et pomme verte / homard vapeur, consommé et huile de crustacé, biscotte à la confiture de crevette / émincé de lieu jaune, riz koshihikari fraîchement poli au naturel, beurre blanc, sauce soja / rouget vapeur, cèpe à la braise, sauce marchand de vin / pigeon doré sur coffre, cuisse et rôti d’abat / ris de veau cuit au sautoir, jus de cuisson / céleri Monarch, quelques noix fraîches & fondue de Comté / mangue au naturel / financier à la rose.

Arrivé un peu avant 16 heures, je vois que la table est déjà dressée, très belle, avec une forêt de verres, dont 160 que j’ai fournis, pour compléter le stock de verres du restaurant. Vers dix-sept heures, trois convives arrivent pour voir comment fonctionne l’ouverte des vins. Le jeune portoricain a apporté un Champagne Laurent Perrier millésime 1985 en magnum qu’il aurait aimé ajouter au dîner, ce qui n’est pas possible. C’est Lucas, le sommelier, qui ouvre la bouteille pendant que j’ouvre celles du repas. Le champagne n’a aucune bulle et on peut imaginer que ceci est dû au bouchon très resserré dans sa partie basse. Alors, quand on le goûte après avoir trinqué, on a l’impression de boire un champagne qui serait plus vieux d’au moins vingt ans. Il est bon, mais ressemble plus à un champagne autour de 1960. Par comparaison, le Comtes de Champagne 1966 a eu à l’ouverture un pschitt significatif avec des bulles qui s’échappent du goulot.

Le seul vin qui m’a inquiété lors de l’ouverture, c’est le Château Chalon 1945 qui a montré une légère odeur de bouchon. Les deux parfums profonds et envoûtants sont le Climens 1949 et le vin de Chypre 1869.

Les convives arrivant à des moments différents, nous nous sommes assis à nos places, et quand le dîner devait démarrer, nous sommes restés assis alors que le programme prévoyait que nous prenions le premier champagne debout. Je voulais présenter l’esprit de mes dîners debout, mais c’était possible aussi quand tout le monde est assis.

Le Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1988 a une belle couleur jeune et une belle bulle. Il est très intense et fonceur. Ce blanc de noirs est très convaincant, de force personnalité. La gougère met en valeur le champagne et lui donne de la largeur, alors que le sablé excite sa complexité par un accord de confrontation.

Le Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1966 est très différent. Il est plus ambré mais pas trop et se montre plus jeune que son âge. Il a un charme fou et une palette aromatique quasi infinie. Le homard est idéal pour mettre en valeur un champagne au sommet de son art., plein et joyeux.

Le lieu jaune accueille deux vins blancs très disparates. Le Château Laville Haut Brion 1978 a une couleur claire d’une folle jeunesse et c’est une caractéristique de ce vin de ne jamais devenir ambré. Il est d’une pureté saisissante et d’une grande fraîcheur. C’est un très grand vin blanc de Bordeaux, si frais à boire et fluide.

Le Châteauneuf-du-Pape Blanc Antonin Establet 1947 à la belle couleur ambrée est puissant, lourd et conquérant. Il offre une belle personnalité, d’une vivacité très grande, malgré ses 77 ans qu’il ne fait pas. Le plat de lieu jaune avec le riz est une perfection absolue. Le poisson est parfaitement cuit, doté d’une belle sauce et le riz est éblouissant tant il est léger. L’accord avec les deux vins est pour moi le plus bel accord du repas grâce à ce plat miraculeux.

Le Château Certan de May de Certan 1955 avait à l’ouverture un parfum lourd de pomerol. Il l’a encore et ce vin riche et lourd est sans doute un peu monolithique, aussi le Bonnes-Mares Clair-Daü 1961 d’une élégance et une fraîcheur parfaites lui fait de l’ombre. J’apprécie la légèreté de ce Bonnes-Mares élégant.

Alors que le rouget est fait pour le pomerol, le Bonnes-Mares lui vole la vedette et s’impose sur ce plat excellent mais qui n’a pas la fraîcheur du plat de lieu jaune.

J’ai une sympathie particulière pour les bouteilles comme celle du Grands Echézeaux Antonin Rodet 1934, qui sont opaques tant la terre ou la poussière ont rendu le vin invisible. Généralement pour les bourgognes, c’est le signe d’une conservation parfaite et c’est le cas pour ce 1934. Quel grand vin expressif.

Et le pigeon est le compagnon idéal mais le Grands Echézeaux ne peut pas gagner face au Beaune Clos du Roi Louis Affre 1928 qui tient son accomplissement de l’excellence de l’année 1928 si belle et si noble. Ce Beaune est parfait, serein, équilibré, idéal. Et le Beaune n’a pas une grande puissance, mais une subtilité charmante.

Sur le ris de veau cohérent et idéal, La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1956 est impressionnante de conviction. Son caractère salin est là, présent, marqueur des vins du domaine. Il est aérien. C’est une bouteille qui avait un niveau parfait comme d’ailleurs tous les vins du dîner. Le vin est plébiscité par tous tant sa splendeur est convaincante. C’est un grand moment d’une Tâche qui ne joue pas sur la puissance mais sur l’élégance.

J’avais fait part de mes doutes sur le Château Chalon Bourdy 1945 mais en fait le goût de bouchon a quasiment disparu. Le vin est buvable avec un goût de paille, mais n’est pas transcendant.

Imaginez que Rita Hayworth dans le rôle de Gilda apparaisse maintenant, l’effet qu’elle ferait, c’est celui du Château Climens Haut-Barsac 1949. Le nez est un parfum envoûtant et la bouche est tout en séduction. Et l’équilibre entre la force du vin et sa longueur donne un résultat entraînant. Certains convives ont dit que Barsac est supérieur à Sauternes, mais la diversité des goûts entre tous les domaines est telle qu’il faut les aimer tous. La mangue est un compagnon idéal des liquoreux bordelais, mais celui-ci manquait un peu de fermeté.

J’ai déjà bu le Vin de Chypre 1869 sept fois et cette huitième fois a créé un de ces chocs qui me renversent, quand j’ai l’impression de toucher la perfection. Bien sûr, c’est personnel puisque je serai le seul à noter ce vin premier. A l’ouverture, le parfum du vin était incroyable car à peine avais-je levé le bouchon de deux millimètres que sa senteur envahissait la pièce. Et là, cette puissance, ce charme, cet équilibre, m’émeuvent et le financier met en valeur la subtile évocation de rose du vin.

Les accords ont été brillants. Le homard avec le Taittinger 1966 était pertinent. Le lieu jaune avec un riz aérien est le plus beau plat qui a mis en valeur les deux blancs si différents. Le rouget que j’attendais avec le pomerol a brillé avec le Bonnes-Mares. Le pigeon est définitivement un plat parfait pour des bourgognes anciens. Le ris de veau a formé un accord plus classique avec La Tâche. De beaux accords d’une grande pureté.

Le vote est très intéressant parce que six vins sur douze ont été nommés premiers, La Tâche 1956 quatre fois, le Comtes de Champagne 1966 deux fois comme le Beaune Clos du Roi 1928 et le Climens 1949, le Chypre 1869 et Le Laville Haut-Brion 1978 ont eu chacun un vote de premier. Dix vins sur douze ont eu des votes.

Le vote du consensus est : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1956, 2 – Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1966, 3 – Château Climens Haut-Barsac 1949, 4 – Beaune Clos du Roi Louis Affre 1928, 5 – Vin de Chypre 1869, 6 – Bonnes-mares Clair-Daü 1961.

Mon vote est : 1 – Vin de Chypre 1869, 2 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1956, 3 – Château Climens Haut-Barsac 1949, 4 – Beaune Clos du Roi Louis Affre 1928, 5 – Châteauneuf-du-Pape Blanc Antonin Establet 1947.

Le service des vins a été parfait. Pascal Barbot est venu souvent nous présenter les plats et nous avons pu mesurer à quel point il s’est engagé dans cette aventure pour créer les meilleurs accords possibles.

Ce 285ème repas avec tant de nouveaux convives et si cosmopolite fut un très grand repas.

Règles : académie des vins anciens du 28 novembre 2024 lundi, 23 septembre 2024

Règles pour la 41ème séance de l’académie des vins anciens du 28 novembre 2024

Du fait des coûts liés aux vins que j’ajoute dans nos réunions, j’ai été conduit à augmenter les tarifs de 10 €.

1 – participants sans vin

Les confirmations d’inscriptions sont prises dans l’ordre des demandes. Le prix est de 300 € par personne, à payer avant le 25 octobre.

2 – participants avec vins

  • proposer un vin ancien et fournir tous éléments sur le vin, dont le niveau dans la bouteille (chaque photo ne devra pas dépasser 500 Ko et devra être lisible. Elle sera en pièce jointe et non pas dans le corps du texte)
  • Obtenir mon approbation pour la ou les bouteilles proposées
  • Respecter les critères d’âge :
  • Champagnes : avant 1997
  • Vins blancs : avant 1991
  • Vins rouges et liquoreux : avant 1972

Les modes de livraisons figurent ci-après.

Livraison des vins entre le 1er octobre et le 15 novembre.

Les confirmations d’inscriptions sont prises dans l’ordre des demandes. Le prix est de 190 € par personne, à payer avant le 25 octobre.

3 – lieu de la réunion

Le restaurant Macéo au 15 rue des Petits Champs 75001 PARIS

Rendez-vous à 19h. Fin de réunion à minuit.

4 – Mode de paiement

Paiement par virement à FRANCOIS AUDOUZE AVA

RIB / FR7630003030000005024474342

5 – mode de livraison

  1. – par envoi postal à François Audouze, société ACIPAR, 44 rue Andrei Sakharov, 93140 BONDY.
  2. – par livraison au 10 Place des Vosges 75004 Paris. Téléphoner à la concierge Madame PUREZA PEREIRA 07.64.88.30.66, prendre rendez-vous avec elle et l’appeler quand vous êtes arrivé, en donnant mon nom. Elle n’est pas joignable au téléphone entre 12h et 17h.

Respectez les dates limites, c’est fondamental.

284ème dîner au restaurant Pages à trois personnes dimanche, 22 septembre 2024

Un tour-opérateur m’a contacté il y a très longtemps soit pour des dîners dans l’esprit de mes dîners, soit pour des couples qui ont un long programme de visite de la France. La demande d’aujourd’hui est particulière puisque le couple a défini lui-même les vins qu’ils aimeraient boire. En 284 dîners, c’est la première fois que la demande est fondée sur des vins précis désignés par eux et non pas sur un programme que j’aurais conçu.

Les touristes américains que je vais rencontrer doivent être des lecteurs assidus de mes écrits, puisque chaque vin a un millésime qui fait partie des trois premiers millésimes que j’ai bus de ce vin : 1966 est le troisième Dom Pérignon que j’ai bu, derrière 1998 et 1996. Je l’ai bu 29 fois.

1967 est le deuxième Pétrus que j’ai bu derrière 1974 car ce sont les années de naissance de mes deux filles. Je l’ai bu 7 fois. Et 1988 est l’année d’Yquem que j’ai bue le plus avec 27 fois. Leur choix ne peut pas être que du hasard.

Lorsque leur demande et ma proposition se rejoignent, j’ajoute au programme une demi-bouteille d’Hermitage La Chapelle 1962, sans l’annoncer. Et 1962 est le troisième millésime que j’ai bu de ce vin, sept fois.

Le dîner se tient au restaurant Pages. Ce sera le 284ème de mes dîners. Nous serons trois. J’arrive à 16 heures pour ouvrir les vins et je sais que j’aurai beaucoup de temps libre puisqu’il n’y a que quatre vins à ouvrir.

J’avais annoncé les vins et quelques plats que je souhaite au chef Ken et au directeur Pierre-Alexandre. Celui-ci me montre sur le tableau du mur de la cuisine le menu envisagé qui est : 1 – amuse-bouche, 2 – carpaccio de poisson, 3 – rouget sauce vin rouge, 4 – homard sauce vin rouge, 5 – canard aux cèpes, vin rouge, 6 – Wagyu, 7 – tarte mangue. Et il me dit que ce menu va manquer de vin rouge pour son équilibre.

J’ai déjà ajouté l’Hermitage, je n’ai rien d’autre sous la main. Et l’idée qui me vient est de changer le programme en mettant le homard non pas avec un vin rouge mais avec l’Yquem et accompagné d’une sauce au vin jaune. Je fais ajouter des cèpes crus avec le champagne

Ce qui donne ce menu : amuse-bouche, cèpes crus, carpaccio de daurade, rouget sauce viande, canard de Challans aux cèpes, Wagyu, homard sauce vin jaune, tarte à la mangue.

L’ouverture des vins est sans histoire car les bouchons viennent entiers. Le Pétrus a un parfum fort et riche, l’Hermitage est plus discret. L’Yquem est tonitruant. Le Dom Pérignon a un bouchon qui s’est resserré dans la partie basse aussi mon effort pour lever le bouchon est très faible et je vois sortir du goulot de petites bulles qui montrent que le pétillant est intact.

Ayant fini très tôt je regarde ce qui se passe en cuisine et la préparation des plats. Je pars vers l’hôtel de Crillon où je dois rencontrer mes convives pour les mener jusqu’au restaurant Pages. J’arrive en avance et je demande au concierge d’appeler la chambre. Rien. A l’heure précise de notre contact, nouvel appel. Pas de réponse. Je fais envoyer quelqu’un sonner à la chambre. Personne. Le numéro de téléphone du mari ne répond pas et n’accepte pas de message. Celui de son épouse accepte un message. Puis rien. Je commence à m’inquiéter. Tout-à-coup je lis un message : « nous sommes sur le trottoir ». Ouf !

Nous nous rendons avec un chauffeur de limousine au restaurant Pages. Nous avons une belle table d’où nous pouvons voir ce qui se passe en cuisine. Je m’aperçois qu’ils avaient une idée assez imprécise de ce dîner. Mes explications leur plaisent. Le dîner démarre.

Le Champagne Dom Pérignon 1966 a une jolie couleur légèrement ambrée. Le champagne est majestueux et on sent immédiatement qu’il est grand. Il a des évocations discrètes de fruits et de miel. Le champagne est délicat, large et imposant tant il est riche de complexités. J’avais demandé des lamelles de cèpes crus qui font un joli accord en suggestions. Avec la daurade de carpaccio, l’accord est viril et noble, donnant une belle rigueur au champagne.

J’avais prévenu mes convives texans que la première fois que l’on boit Pétrus, on peut être déçu parce qu’on en attend trop. Il n’y aura pas de déception car ce Pétrus 1967 est particulièrement brillant. Solide, charpenté, avec des suggestions de truffe, il s’impose avec son équilibre parfait. Je n’aurais pas imaginé qu’un 1967 pourrait être aussi dense et puissant. C’est ma coquetterie d’associer Pétrus et rouget. L’accord est brillant mais les rougets sont de gros rougets. Je préfèrerais des plus petits, qui seraient plus vifs et plus marins.

L’accord avec le canard de Challans est beaucoup plus percutant. La chair expressive du canard fait briller le Pétrus.

J’explique que j’ai ajouté l’Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1962 en demi-bouteille pour que mes convives puissent goûter au Wagyu exceptionnel du restaurant. Et l’accord est magique. L’Hermitage bu après le Pétrus montre que l’on change de monde. Le Pétrus est un seigneur puissant, riche et imposant alors que le vin du Rhône est tout en charme et en séduction, vin confortable et gourmand.

Faire un dîner où le homard est servi après le Wagyu est assez peu commun mais j’adore ces choix. L’accord du homard avec le Château d’Yquem 1988 est divin. La pureté de la chair avec une sauce au vin jaune épouse la richesse de cet Yquem parfait.

L’Yquem est délicieux avec la tarte à la mangue, mais l’accord avec le homard est plus excitant. Cet Yquem 1988 riche et équilibré est l’archétype de l’Yquem totalement accompli.

Nous sommes d’accord pour classer les accords ainsi : 1 – Wagyu et Hermitage, 2 – canard et Pétrus, 3 – homard et Yquem.

Le classement des vins serait difficile car chacun a été parfait. Je mettrais 1 – Yquem, 2 – Pétrus, 3 – Hermitage et 4 – Dom Pérignon.

J’avais apporté une bouteille de Sherry du Cap 1862 que j’avais ouverte il y a quelque mois. Il n’a pas sa fraîcheur originale mais c’est une belle évocation de vins du 19ème siècle.

Mes convives vont faire un voyage en France pendant une douzaine de jours. Ils ont été ravis de ce repas qui leur a donné de nouvelles perspectives d’approche gastronomique. Ils comptent en parler à leurs amis amateurs de vins.

Déjeuner au restaurant Astrance dimanche, 22 septembre 2024

De retour à Paris, je vais déjeuner avec un ami au restaurant Astrance, pour préparer avec Pascal Barbot le chef et Christophe Rohat le directeur, le menu d’un dîner de wine-dinners qui se tiendra en ce lieu la semaine suivante.

Nous sommes accueillis avec de grands sourires par toute l’équipe très motivée. Je regarde dans la carte des vins qui pour les champagnes est très riche de vins d’une multitude de vignerons intéressants. Et quand je vois qu’il y a un 1996 d’un vigneron de Mesnil-sur-Oger, il n’y a pas l’ombre d’une hésitation et Lucas le sympathique sommelier valide mon choix.

Le Champagne Pascal Doquet Blanc de Blancs Grand Cru 1996 a une typicité de Mesnil-sur-Oger poussée à l’extrême. Champagne viril, salin, minéral, large et conquérant, il a un équilibre apporté par l’âge dans un millésime exceptionnel. Ce champagne expressif est convaincant et gastronomique.

J’ai apporté une Côte Rôtie La Turque Guigal 1987. Le niveau des vins de Guigal est toujours très proche du bouchon. Lucas ouvre la bouteille avec un limonadier classique et le bouchon se brise en deux car il est imbibé. Des miettes de bouchons flottent sur le vin. Je les enlève avec mes outils que j’avais dans ma sacoche.

Le parfum du vin est fascinant. J’ai l’impression d’être devant une cuve où les grappes récemment cueillies sont pressées. Il y a une vivacité et une jeunesse qui taquinent mes narines. La Turque est la plus puissante et riche des trois Côtes Rôties, mais celle-ci, si elle a une force naturelle, offre aussi un velours charmant. Le vin combine une belle maturité et une jeunesse encore sensible.

Ce vin qui n’a pas la puissance d’autres millésimes est charmant et lui aussi gastronomique.

Lorsque le repas est terminé, Pascal et Christophe arrivent à notre table pour préparer le menu du prochain dîner. C’est un véritable bonheur de travailler avec Pascal Barbot. Il est extrêmement motivé à créer des accords parfaits. Les discussions ont été animées et nous avons réussi à établir un menu pour les vins qui tiendra compte du talent du chef et des « exigences » des vins.

On peut penser qu’un grand repas nous attend.

Dernier repas de vins dans le sud mercredi, 4 septembre 2024

Le chirurgien qui a opéré mon genou est bourguignon et au fil des réunions que nous avons eues, nous avons parlé de vin. Je l’ai invité à venir dîner avec son épouse et j’ai voulu lui montrer le monde du vin tel que je l’aborde et le vis.

Le premier vin est Champagne Salon 2002. Je complimenterai la maison Salon pour un bouchon parfait. Il est exactement ce qu’il devrait être. Pour d’autres années, je dois lutter contre le bouchon. Ici, j’ai eu un effort normal, un joli pschitt, et un petit nuage créé par les bulles qui s’échappe de la bouteille.

J’ai ouvert le 2002 environ 10 heures avant le dîner et quand je verse dans les verres, les bulles sont présentes mais pas trop. Ce champagne est une pure élégance, alliant jeunesse et maturité.

Nous l’avons essayé avec différents composants de l’apéritif. Avec les rillettes le Salon s’agrandit, avec le pâté de tête à base de langue de bœuf, le champagne devient complexe, et je n’ai pas été convaincu par l’association avec le camembert contrairement aux expériences précédentes.

Ce qui est fascinant, c’est la longueur et la persistance du goût qui n’en finit pas. Ce champagne est un seigneur.

J’ai prévu ensuite un Bourgogne Aligoté Coche Dury 2014. Pour ce vin ma femme a préparé des coquilles Saint-Jacques crues avec des œufs de saumon nappés d’une sauce au Saké et d’une discrète crème froide. La combinaison est magique et je suis fier qu’avec ma femme nous ayons composé un plat idéal pour le vin.

J’avais ouvert le vin 10 heures avant le dîner et je l’avais maintenu à 15 degrés pour qu’il s’étoffe.

Le premier contact est impressionnant car le vin est précis, tellement distingué. Et l’accord est à se damner.

J’étais vraiment heureux de boire ce vin que je ne connaissais pas, mais ensuite j’ai réalisé que même s’il est parfaitement fait, il manque de complexité et un peu d’ampleur. J’ai adoré l’expérience mais ce vin est loin d’un Grand Cru.

Le vin suivant est Château Rayas rouge 2005, un vin mythique, que j’ai ouvert 10 heures avant le dîner. Ma femme a préparé du Wagyu avec de la purée de pommes de terre et de céleri.

A l’ouverture, le vin offre un grand parfum intense. Au service à table, le parfum est profond et la première gorgée est divine. C’est un vin parfait. Il est jeune, mais pas trop jeune parce qu’il atteint un niveau glorieux. C’est un vin que l’on peut garder plusieurs décennies, mais c’est aussi un plaisir complet aujourd’hui.

On dit généralement que Rayas est le plus bourguignon des Châteauneuf du Pape, et c’est vrai pour celui-ci. Elégant, charmeur, plein de gaieté, c’est un très grand vin, conforme à sa renommée.

Pour le dessert j’ai prévu un Vouvray J.M. Monmousseau 1959, ouvert lui aussi 10 heures avant le dîner. La première odeur était hésitante.

Le vin est servi avec une tarte aux mirabelles. Hélas, c’est un Vouvray sec. Et comme il n’est pas très précis et ne forme aucun accord, c’est un vin que je n’ai pas apprécié comme il aurait pu l’être si j’avais su qu’il était sec.

Pour le dîner, le classement des vins est : 1 – Rayas 2005 : absolument parfait, 2 – Salon 2002 d’une longueur impressionnante, 3 – Aligoté Coche Dury 2014 : une belle expérience, 4 – Vouvray 1959 : pas ce à quoi je m’attendais

Les meilleurs accords : 1 – Saint-Jacques crues à l’Aligoté, 2 – Wagyu avec Rayas, 3 – rillettes avec Salon.

Ce dîner a permis qu’avec ce couple charmant, nous découvrions que nous avons beaucoup de points communs. Je suis particulièrement heureux de ce repas qui – normalement – est le dernier des repas des presque trois mois passés dans le sud.

Deux vins de Curnonsky jeudi, 29 août 2024

J’ai fait la connaissance d’un industriel qui a acheté un Domaine de Côtes de Provence pour y faire du vin blanc et du rosé. Il est sympathique et de l’âge de mes enfants. Nous le recevons à déjeuner avec son épouse.

Une idée me vient d’ouvrir deux vins appartenant aux cinq meilleurs vins blancs de Curnonsky, pour lui faire connaître des vins qu’il n’a peut-être jamais bus. Curnonsky était le Prince des gastronomes et avait décidé que cinq blancs étaient les meilleurs du monde (je dirais de son monde) : le Montrachet, Yquem, Château Chalon, Coulée de Serrant et Château Grillet.

J’ai choisi d’ouvrir un Clos de la Coulée de Serrant Mme A. Joly 1976 et un Château Grillet 1986. J’ai ouvert les vins à 8h du matin et les bouchons sont venus entiers, offrant de prometteuses senteurs.

La Coulée de Serrant Mme A. Joly 1976 a été vinifiée par la mère de Nicolas Joly, le Prince de la biodynamie. Je préfère les vins élaborés par Mme Joly. Celui-ci est impressionnant. Au premier contact, il est astringent. Puis en bouche il devient plus large et plus gras, et la finale a une longueur incroyable et reste en bouche pour toujours. Je suis très impressionné par ce vin.

Lorsque j’ai commencé à boire du Château Grillet il y a quelques décennies, j’avais du mal à le comprendre. Je n’arrivais pas à entrer dans son monde. Dès la première gorgée aujourd’hui, je sais que je suis devant une merveille. Le Château Grillet 1986 explose en bouche, ample, convaincant, précis. Très long aussi. C’est un vin plein et parfait.

Je comprends maintenant pourquoi Curnonsky a choisi ce vin. Car c’est un monstre de bonheur.

Bien sûr, les choses ont changé en un siècle et aujourd’hui, le classement des meilleurs blancs serait différent en France et je mettrais certainement parmi eux le Corton Charlemagne de Coche Dury.

Mais aujourd’hui, nous buvons deux merveilles et je suis heureux d’avoir montré deux perles à cet ami nouveau vigneron.

Dîner d’amis lundi, 26 août 2024

Nous recevons des amis à dîner. Il a une cave impressionnante et a bu tout ce qui se fait de grand. Je vais donc essayer de trouver des vins assez originaux. Et la beauté des bouteilles va jouer un rôle dans mes choix.

Le Champagne Joseph Perrier Cuvée Joséphine 1982 a une bouteille d’une grande beauté, surchargée de couleurs scintillantes. C’est la meilleure Cuvée de la maison Joseph Perrier et 1982 est la première année pour cette Cuvée qui n’est pas élaborée tous les ans.

L’ouverture était difficile à cause d’un bouchon très serré dont la partie basse coincée dans le goulot est venue par le secours d’un tire-bouchon. Il y a eu un pschitt assez puissant qui a poussé ma main. C’est une surprise.

Composé de Chardonnay et de Pinot noir c’est un grand Champagne noble alliant maturité et jeunesse. Sa grandeur m’a beaucoup plu, sur des rillettes, sur un pâté de tête et sur diverses cochonnailles. La personnalité affirmée de ce champagne d’un or pâle est impressionnante.

Le Châteauneuf du Pape L. de Vallouit 1959 a un niveau assez bas. A l’ouverture cinq heures avant, j’ai pu constater que ce niveau n’a aucune influence sur la puissance et l’énergie de son parfum. A table on vérifie qu’il n’y a absolument aucune influence sur le goût.

Dès la première gorgée, je me suis senti sous le charme de ce Châteauneuf du Pape si élégant. Riche, intense, il possède une structure solide et est fait pour être aimé. Les anciens Châteauneuf du Pape sont toujours pleins de charme et de joie de vivre et 1959 est une grande année.

Comme nous bavardions, il est apparu que je devais ouvrir un autre vin rouge. Ce que j’aime dans le Vega Sicilia Unico 1999, c’est sa jeunesse impressionnante. J’adore les Vega Sicilia Unico des années 60 ou 70, mais je les aime aussi quand ils sont jeunes car la très longue finale a la fraîcheur de la menthe. Et ce 1999 a gardé sa fraîcheur bien qu’il ait 25 ans.

Ma femme avait acheté une tarte au citron meringuée. J’ai pensé que le meilleur accompagnement serait un champagne rosé. Il en est un dont je trouve la bouteille particulièrement élégante, c’est le Champagne Krug rosé. Le bouchon s’est cassé comme celui de la Cuvée Joséphine 1982 mais n’a donné aucun pschitt.

J’imagine que ce Krug a des vins des années 1980 / 1985, car il paraît contemporain du Cuvée Joséphine. La combinaison est parfaite. C’est un joli champagne, parfaitement réalisé et confortable. Un rosé qui est plus puissant que romantique, solide et intelligent.

Je rangerais volontiers en 1er la Cuvée Joséphine parce que je l’ai découverte lors de ce repas, puis le Châteauneuf-du-Pape 1959 du fait de sa richesse, le Krug rosé pour son charme puissant et en quatrième le vin espagnol non pas à cause de sa prestation qui est parfaite mais parce que je le connais trop bien.