De beaux vins dans le sud, coup d’envoi des vacances samedi, 6 juillet 2013

Nous sommes quasiment au complet avec nos six petits-enfants et leurs parents. Seuls manquent mon fils et son épouse. Il faut fêter cette chance d’être ensemble. D’emblée le Champagne Krug 1996 attaque très fort, avec une acidité qui paraît non domptée, mais qui s’organise. C’est un bulldozer de puissance. Sur un saucisson au jambon ibérique, il prend des saveurs d’agrumes et d’oranges confites. Sur une tapenade aux arômes de truffes il est rectiligne, sénateur. Sur un Jabugo peu gras, il affiche une grande longueur. Sur la poutargue il est plus simplifié. C’est un grand champagne mais qui – à mon sens – manque encore de quelques années pour atteindre la rondeur qu’il promet.

Le Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1992 est servi après un Krug 1996 et ce n’est pas un service à lui rendre. Il apparaît gracile, mais assez rapidement, il montre qu’il en a sous le pied. On est un peu perdu pour le situer, puis les choses s’assemblent. Il est très vineux, complexe, voire énigmatique. On sent qu’il a beaucoup de potentiel, mais – c’est mon erreur – il ne faudrait jamais le servir après un Krug 1996. La puissance du Krug affaiblit le message d’un champagne qui aurait beaucoup à dire et que je pense plus gastronomique que le Krug.

J’avais goûté le Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 1998 avec Jean-Pierre Perrin au moment où il sortait dans le commerce et je l’avais trouvé fabuleux. Il tient les promesses qu’il offrait alors, il y a environ 13 ans. Son attaque est forte, avec un nez de garrigue et des senteurs d’un sud ensoleillé. La bouche est puissante, envahissante, d’une richesse extrême. Opulent, on pourrait le classer dans les vins riches. Mais le petit miracle, c’est cette sensation de fenouil qui lui donne une fraîcheur rare. C’est un vin qui fonce, qui trace la route, mais qui présente aussi une belle complexité. Je l’adore.

Le Rimauresq rouge Cotes de Provence 1992 est servi à la suite du Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 1998. Il apparaît tellement fluet qu’on est un peu perdu. Mais il faut lui laisser le temps de s’exprimer. Et quand arrivent les évocations d’olive noire et de romarin, alors, on retrouve ce grand vin, subtil, qui chante avec les cigales, mais qui est dans l’ombre du Chateauneuf-du-Pape d’une puissance sans équivalent. Comme le Clos des Goisses, il aurait gagné à être bu seul.

Un poulet cuit à basse température à la plancha, fondant à souhait, était idéal pour révéler les complexités de deux beaux et grands vins rouges.

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I was born on a 4th of July jeudi, 4 juillet 2013

Pour mon anniversaire, amis et parents m’ont offert une fiche de présentation sur Wikipédia. Comme les plus fins limiers des services secrets, ils ont fouillé dans mon passé. Le comité de lecture de wiki a fait de même. Et le bébé est né le 4 juillet :

FICHE WIKI

Beau repas au restaurant Garance mardi, 2 juillet 2013

Obligé de rentrer à Paris pour un rendez-vous, je trouve mon réfrigérateur bien vide. L’idée de dîner seul à la maison me déplait. Je réserve au restaurant Garance où je me présente nanti d’une bouteille de vin. C’est un Chateauneuf-du-Pape Emile Costes négociant 1947. Ce vin ne peut se comprendre que si l’on a envie de l’écouter. Plus d’un amateur de vin n’en aurait pas le courage. Or en fait, il est passionnant dans son originalité. Il change souvent de facettes, presque à chaque plat conçu par Guillaume Iskandar. Ce qui domine, c’est la truffe, le graphite, les fruits noirs. On ne peut pas dire que c’est un grand vin. C’est un vin dont l’intérêt est lié à son adaptabilité à une cuisine variée. Il ne laisse pas indifférent et va même jusqu’à donner de belles émotions.

La cuisine du chef est de plus en plus épanouie: ravioli en un bouillon /homard / les dernières asperges / lotte merveilleuse / travers de porc /dessert au fruits rouges. J’avais été accueilli par un verre de Champagne Billecart Salmon Cuvée Nicolas François Billecart 2000, beau champagne bien frais et de belle soif. Qui penserait que c’est sur la lotte que le Châteauneuf a créé les plus belles vibrations ? La cuisine du Garance évolue on ne peut mieux vers une plus grande cohérence. Ce fut un beau repas.

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Jacques Maximin au Bistrot de la Marine dimanche, 30 juin 2013

Avec Jean-Philippe nous prenons la direction de Cagnes-sur-Mer pour rendre visite à Jacques Maximin au Bistrot de la Marine. Sur un front de mer qui s’étend à l’infini, les restaurants se succèdent, alignés à touche-touche. Les passants savent-ils que ce bistrot qui propose un opulent menu à 25 € est tenu par un des plus grands cuisiniers de l’époque ? L’endroit est simple mais charmant, face à la mer. Mais l’espace en plein air est en contrebas de la route, ce qui fait que l’on respire dix fois plus de gaz d’échappement que de brise marine.

Le tartare de poissons est élégant et de grande fraîcheur et le bar de belle taille, avec sa sauce et ses pommes de terre est un plat d’une justesse d’école de cuisine. Car l’exécution de ce plat simple est parfaite. C’est une grande leçon de cuisine. Le millefeuille est un petit bijou.

Après des hauts et des bas, Jacques Maximin a choisi de mettre son talent au service d’une cuisine de bistrot. C’est une pépite. On ne peut qu’approuver ce choix que madame Maximin plébiscite, me confiant : « nous aurions dû faire ce choix il y a vingt ans ».

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Deux grands vins dans ma maison du sud dimanche, 30 juin 2013

Nous reprenons la route vers ma maison du sud où mon épouse a préparé un grenadin de veau aux fines tranches de pommes de terre. Avant cela, nous grignotons de l’anguille fumée, de la poutargue et du jambon Jabugo autour d’un Champagne Salon 1996. Ce champagne, ce n’est pas la force tranquille, c’est la complexité tranquille. Car il ne fait aucun effort pour se pousser du col. Il est brillant, complexe, vineux mais aussi floral, et déroule toutes ses complexités sans jamais insister. On pourrait dire que c’est un Roger Federer du champagne. C’est avec le Jabugo qu’il est le plus brillant, puis avec la poutargue, l’anguille étant moins opportune. La rémanence en bouche de ce champagne mêle le vineux avec un extrait de fruit confit et quelques fleurs blanches jetées de-ci-de-là. Longtemps en bouche, on a son empreinte au léger poivre, picotant la langue.

Pour le plat, j’ai choisi Vega Sicilia Unico 1989. C’est mon favori actuel des Vega Sicilia. Si je devais faire un choix, je plébisciterais la décennie 60, avec de sublimes 1965 et des Reserva Especial d’une plénitude considérable sur cette période, puis ce 1989 exceptionnel de jeunesse. Le nez du vin est envahissant. Il annonce déjà toutes les complexités du vin. Le parfum est opulent, avec des évocations de feuilles de cassis, feuilles de menthe et de végétal. En bouche, si l’intensité est extrême, la fraîcheur l’est tout autant. Le vin déborde de générosité, avec des fruits rouges et noirs savamment dosés, et une fraîcheur mentholée qui claque comme un coup de fouet. On ne se lasse pas de ce vin qui pourrait sembler lourd et moderne mais qui, de fait, décline toutes ses composantes avec un dosage savant qui donne de la légèreté, de l’élégance et de la complexité.

Nous avons même essayé le vin avec un camembert Jort. Sur le papier, l’expérience est perdue d’avance. Mais si l’on sait manger le Jort, calmer son palais, puis boire le vin avec de minuscules lampées, le râpeux du fromage donne une tension au vin qui prolonge sa longueur.

Par un soir venté à la brise de chaleur, ce qui est une première pour cette année, ces deux vins ont enchanté notre soirée.

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Déjeuner à l’Enchanteleur dimanche, 30 juin 2013

Une amie annonce qu’elle vient déjeuner chez nous avec l’une de ses amies. J’ouvre un Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1996. Pour l’accompagner, il y a de fines tranches de betterave rose et blanche, dont le goût terreux bride un peu le champagne. Il s’épanouit sur un tajine de poulet aux dattes goûteux, mais qui n’arrive pas à donner un coup de fouet suffisant à ce champagne que j’adore. Il faudra en ouvrir un autre prochainement, pour vérifier qu’il a toujours cette vibration que j’apprécie particulièrement.

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Après match à l’hostellerie Jérôme de La Turbie dimanche, 30 juin 2013

Nous avions été conquis, Jean-Philippe et moi, par la cuisine de Bruno Cirino à l’hostellerie Jérôme de La Turbie. Comme les assassins reviennent sur les lieux de leurs crimes, nous nous présentons le lendemain matin au même endroit pour saluer nos hôtes. Marion Cirino a déjà lu sur mon blog le récit du dîner de la veille et me remercie pour les mots aimables que j’ai eus. Nous bavardons sur la terrasse autour d’un café, et la camionnette de Bruno se gare. Il vient de faire la tournée de ses fournisseurs, et fait une halte avant d’aller en visiter d’autres. Alors qu’il est pressé, nous allons discuter pendant près de deux heures de produits, d’approvisionnements et de visions sur les tendances culinaires. Cet échange est extrêmement fécond et nous fait entrer dans l’intimité créatrice d’un chef amoureux des produits qu’il travaille selon des recettes des années 50 et 60, époque où les grands chefs ont préparé la cuisine d’aujourd’hui. Bruno est passionné d’authenticité culinaire, Marion est passionnée de vin et de service. Entendre Bruno parler des pois chiches verts et de leurs vertus est un régal. Ce dialogue fut un plaisir de plus.

Beau dîner à l’hostellerie Jérôme à La Turbie vendredi, 28 juin 2013

Jean-Philippe est descendu dans la région de Nice pour explorer la cuisine locale. Il m’envoie un message, me demandant de le rejoindre à l’Hostellerie Jérôme à La Turbie, ville romaine qui surplombe Monaco. N’écoutant que mon courage, je le rejoins à l’hôtel Napoléon, situé le long de la Nationale, en plein centre ville. Nous allons prendre un verre dans un bistrot sur la Nationale sous un agréable soleil après des ondées, et nos poumons font leur plein de pollution pour l’année, tant les véhicules crachent leur venin sous nos narines.

L’heure est venue de nous rendre à l’Hostellerie Jérôme. Bruno Cirino arrose les abords de son établissement. Nous le saluons et nous nous présentons sur l’autre façade où Marion Cirino nous dit : « attendez, je vais mettre une veste pour vous recevoir ». On nous propose de dîner sur la terrasse qui surplombe un panorama méditerranéen, mais de peur d’ondées sournoises, nous choisissons la jolie salle à manger aux voûtes gracieuses d’un ancien cloître.

La carte des vins est tentatrice et à ma grande surprise, Marion Cirino me dit qui je suis, car, dit-elle, elle aime suivre ce qui s’écrit sur le vin. Nous hésitons longtemps, car la carte est très engageante, et nous jetons notre dévolu sur un champagne et un vin blanc. Jean-Philippe décide que nous prendrons le menu dégustation et je le suis sans même regarder son contenu.

Le menu est : un « bâtonnet » d’espadon mi-cuit en salade / calamars grillés, composition d’une courgette en fleur / homard d’Irlande grillé à la Rossini aux figues noires et citron confit /scampis puce à la vapeur servis décortiqués, mangue, citronnelle, jasmin / asperges violettes de bord de mer à l’émulsion de comté truffé / Gamberoni il violetto di Oneglia aux pêches blanches et cristallines de verveine / la grosse langoustine rôtie sur une croûte d’amandes vertes à la verveine du jardin / le mérou à la marseillaise / rouget de roche grillé aux pousses de fenouil sauvage, pistou de légumes / aile de pigeonneau rôtie à la réduction d’olives noires au vin de Bandol / fraises des bois, angélique de montagne, croquettes, sorbet au lait de bufflonne / pur chocolat Taïnori, les cerises marasque et le sorbet à l’eau-de-vie.

Le Champagne Pol Roger Sir Winston Churchill 1999 est plein de surprises. Il est étonnamment fruité et généreux. Beaucoup plus que son millésime. Ce qui frappe, c’est l’intensité de son finale et le prolongement en bouche de saveurs lourdes. Son épanouissement est remarquable. En le buvant, je me demande si je le reconnaîtrais dans une semaine si on me le servait à l’aveugle. Et je pense que je n’y arriverais pas. Car ce champagne est parfait sur tous les compartiments du jeu, mais n’a pas d’aspérité que l’on mémoriserait. C’est un champagne de grande classe et de grande harmonie, avec une matière vineuse de première grandeur, mais ce n’est pas le loulou de banlieue que l’on reconnaît à sa danse chaloupée. Pour moi, c’est la persistance aromatique qui est le signe absolu de sa grandeur. Il va accompagner une bonne partie du repas avec pertinence.

Le Bienvenues Bâtard Montrachet Domaine Leflaive 2001 est une merveille de vin bourguignon. Il a une force vineuse certaine, mais bien contrôlée. Il est puissant mais sait se révéler délicat. Ce qui me fascine, c’est qu’au moment où l’on déglutit, on est au milieu d’une motte de beurre, tant cette impression beurrée est dominante. C’est un immense vin au sommet de son art, dans la jeunesse.

La cuisine de Bruno Cirino est généreuse, fondée sur des produits de haute qualité et cuits à la perfection. Dans un dîner de tant de plats, tout ne se vaut pas, mais la qualité globale vaut les deux étoiles du guide. Je n’ai pas vibré avec l’espadon, l’épinard et la mûre qui jouxtaient la sublime langoustine, le rouget, manquant un peu de peps et le chocolat délicieux, mais qui arrivait au-delà de nos limites de raison. Tous les autres plats m’ont enchanté. Il en est même un qui m’a procuré un véritable orgasme culinaire. Je frissonnais à chaque bouchée. C’est le pigeon, démoniaque de perfection, à la sauce inouïe. Sinon, la crevette d’amuse-bouche, le calamar, le magique mérou et les prodigieux Gamberoni ont signé un repas de grand art. Mes chouchous : le pigeon, le mérou et la crevette du début. Les vins se sont bien adaptés à la cuisine, même si elle force un peu sur le citron.

Une mention spéciale ira vers Marion Cirino. Son intelligence des situations, son sens du service, son humour et sa compétence ont illuminé ce repas. Elle est chaleureuse, sachant jusqu’où elle peut aller, et si nous avons passé une magnifique soirée, c’est bien sûr grâce au talent de son mari. Mais elle tient une part importante dans ce succès. Voilà une table généreuse où il faut aller.

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