Un Musigny de Vogüé éblouissant à la Tour d’Argent mercredi, 13 mars 2013

Sur la suggestion de mon épouse, nous retrouvons Tomo au restaurant La Tour d’Argent. Le groom dans l’ascenseur est sympathique, et en traversant une haie de serveurs au sourire agréable, nous rejoignons la table que je connais depuis plus de cinquante ans, quand mon père faisait partie des clients privilégiés de Monsieur Aimé. Tout ici est luxe et quiétude. L’eau minérale est servie dans des gobelets argentés. Le livre de cave est impossible à consulter en entier car il y a 11.000 références en cave. Il m’est impossible de le passer à Tomo et il faut qu’un sommelier le soulève et le transfère à sa place. Notre premier choix est un Champagne Krug Clos du Mesnil 1983. Au démarrage, il est marqué par une certaine acidité. On sent la complexité qu’il peut avoir et il va progressivement s’animer. Mais lorsque nous ferons le bilan après la dernière goutte, force est de constater que nous n’avons pas eu l’émotion que nous aurions dû avoir, même si quelques fulgurances nous ont rappelé qu’il peut être grandiose. Ce n’est pas un effet de cave mais plutôt que le vin ne s’est pas présenté au bon moment. Le menu des deux hommes est : quenelle de brochet sur un coulis de champignon de Paris et canard Tour d’Argent. Nous avons choisi l’emblématique de la maison puisque c’est la première fois que Tomo vient en cette maison. Autant aller aux fondamentaux. La quenelle est bonne, mais le champignon est trop fort et tue l’évocation de brochet. Le canard est divin et fait tinter tous les souvenirs immémoriaux que j’ai de ce plat.

Nous avons choisi un Musigny Comte de Vogüé 1978. Le nez est tout simplement renversant. En une seconde, on sait que l’on tient un prodige. On voudrait presque s’en tenir au nez, tant il apporte de contentement, et il faut presque se forcer pour porter le vin à ses lèvres. Et c’est alors qu’un sentiment de plénitude nous envahit. Ce vin est furieusement bourguignon, avec cette volonté de ne pas séduire, avec ce sel qui rappelle les vins de la Romanée Conti. Et il y a un velours qui n’appartient qu’à ce vin. Il accompagne merveilleusement le canard, surtout la deuxième partie à la chair plus tendue, mais il est en soi un chef d’œuvre. Il fait partie de ces vins que l’on a envie de protéger jalousement, pour conserver des arômes irréels jusqu’à l’infini de la nuit. Je frissonne encore à l’évocation de ce vin qui était parfait, le vin idéal au moment idéal.

Les desserts sont merveilleux, le mien à base de thé et de café. Ce qu’il convient de signaler, c’est le service qui est certainement le premier de Paris. Jamais nous n’avons manqué de vin alors que le sommelier ne rajoutait que de petites quantités dans nos verres. Les maîtres d’hôtel sont attentifs. La plus grande surprise, pour ceux qui ont l’habitude de me lire, c’est de tomber sur une espèce de maîtres d’hôtel en voie de disparition, ceux qui regardent ce qui se passe autour d’eux. Ce service fut un moment d’enchantement.

Nous avons fini par la visite des caves qui s’est dépouillée des sons et lumières d’antan. Tomo a pu parler japonais avec le gardien de ce temple impressionnant. Il y a eu deux vedettes lors de ce dîner : un Musigny de Vogüé éblouissant d’émotion et de plénitude, et un service de rêve. Au moment où s’élisait le Pape qui porte mon prénom, nous fumes sur un nuage de félicité.

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Je suis dans les 200 acteurs du vin selon la RVF !!! mercredi, 13 mars 2013

Jamais je n’aurais imaginé que je puisse figurer dans le classement des 200 acteurs qui comptent dans le monde du vin de la RVF !!!

Bon, je suis 191ème, donc, pas de quoi rouler des mécaniques. Mais jamais je n’y aurais pensé.

Je me bats pour qu’on ouvre les vins qui dorment dans les caves, mais ce secteur de consommation du vin, c’est epsilon !

Lors de ma visite à La Tour Blanche, j’ai posé la question suivante : « comment pourrait-on faire pour que les vins soient bus au moment le plus opportun, et ne soient pas bus trop tôt, quand ils ne représentent que moins d’un tiers du potentiel gustatif et émotionnel qu’ils ont ? ».
Ça paraît insoluble, mais ce serait si motivant si on arrivait à trouver les financements qui mettraient les vins à disposition des amateurs quand ils sont prêts à être bus !
Beaucoup de grands vignobles vendent à des prix qu’ils n’auraient jamais osé espérer il y a dix ans. S’ils mettaient une partie du bénéfice qu’ils n’espéraient pas dans le financement à moyen terme de leur vin, on aurait un progrès colossal dans l’image du grand vin auprès du public d’amateurs.
Voeu pieu ?

Pourquoi ne pas se battre pour ça ?

En tout cas, ça fait plaisir d’être cité.

LIEN RVF

un autre lien

 

un exemple à méditer mardi, 12 mars 2013

Lors de notre dégustation à Dijon, toutes les bouteilles de vins du domaine de la Romanée Conti ont été cassées à la fin de la dégustation. Aucun recyclage possible dans des faux.

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Dîner avec Vega Sicilia Unico 1989 dimanche, 10 mars 2013

Dîner chez des amis dans le sud. L’apéritif se prend sur des petits poissons fumés, une crème au petits pois et poivre rouge du Cambodge rapporté directement par mon ami, et de délicieux toasts aux oursins. C’est un Champagne Laurent Perrier sans année que je trouve très agréable jouant de façon juste sur une partition discrète faite de délicatesse.

Sur des huîtres puis une dorade cuite en papillote, le Champagne Cristal Roederer 2004 est merveilleux de complexité. Contrairement au Krug 2000 bu récemment dont on pense qu’on l’ouvre trop tôt, ce champagne plus jeune est d’une sérénité qui désarçonne. On ne se pose pas la question de savoir si on le boit trop tôt, car il est parfait tel qu’il est, épanoui et très complexe. C’est un grand champagne.

J’ai apporté aussi Vega Sicilia Unico 1989. Les amis se souviennent qu’ils ont un vin de 1989 et proposent de l’ouvrir. C’est Côtes de Provence Tibouren Clos Cibonne rouge 1989. Ce vin à la couleur déjà tuilée est passé. Il est dévié, l’alcool masquant un message non clair. Il n’y aura pas de compétition avec le sublime vin espagnol, à la couleur très foncée, au nez fort, qui donne en bouche un concert d’anis de fenouil, de menthe et de céleri. Le côté végétal est synonyme de fraîcheur et le lourd fruit noir apporte de la richesse. Je suis en admiration devant ce vin opulent, profond, intense et de grande fraîcheur. Il paraît indestructible.

Nous étions tellement heureux de nous revoir que les discussions ont continué tard dans la nuit.

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on note la face du bouchon qui est très inclinée par rapport à l’axe vertical

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Déjeuner au restaurant Michel Rostang jeudi, 7 mars 2013

Déjeuner au restaurant Michel Rostang. L’accueil est souriant et motivé. Je me sens en pays d’amitié. La carte des vins est imposante et riche. Avec Alain Ronzatti le sommelier, je discute des choix possibles. Mon choix final est approuvé. Lorsque mon invitée arrive, le vin est déjà ouvert et j’ai pu profiter de petits snacks à la sardine absolument délicieux. J’ai même fait le menu qu’elle approuve. Ce sera pommes de terre rattes chaudes à la truffe puis pigeon avec une purée à la truffe. La cuisine est chaleureuse et gourmande, on se sent bien. Le Chambertin Armand Rousseau 2007 joue sur la délicatesse et la subtilité. Comme il est bien fait, on en profite avec joie. Je savais qu’en prenant un 2007, tout allait se jouer en dentelle, j’étais prévenu. Mais j’ai quand même regretté un petit manque de corps. La remarque est à la marge, car boire un vin d’Armand Rousseau, avec une complexité et des arômes remarquables, c’est toujours un moment de grand bonheur. Le repas de qualité est un régal.

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La Dame de Pic à Paris mercredi, 6 mars 2013

Jonathan, ami français vivant en Australie est de passage en France. Nous le retrouvons, ma femme et moi au restaurant La Dame de Pic avec sa ravissante fiancée et une amie néozélandaise qui est cuisinière de son état. La décoration du lieu est très délicate et féminine. C’est très réussi. Les cartes des menus sont présentées comme des cartes à jouer, dame de pic oblige. Les menus sont conçus d’après des impressions olfactives que l’on peut figurer en sentant des petits cartons parfumés comme ceux que l’on trouve dans des parfumeries. J’avoue qu’en sentant ces cartons, ce n’est pas très convaincant. Nous sommes une majorité à prendre le menu de truffes, intitulé ainsi : les berlingots, chèvre frais, truffe noire, menthe et asperges vertes de Mallemort / les rougets de Méditerranée, safran, truffe, café Blue Mountain / la poularde de Bresse, fine farce à la truffe noire et foie gras légèrement fumé / le brie de Meaux truffé / la bière et le caramel, blanc mousseux à la truffe noire et cazette.

La carte des vins n’est pas facile d’emploi, car les cartes sont rivetées et doivent pivoter pour qu’on puisse les lire. Le choix est assez faible, avec une grande diversité de prix, parfois chers. Le Champagne Krug 2000 dont j’ai senti un court instant que le maître d’hôtel, qui a connu mes goûts en un autre endroit, voulait me déconseiller, est vraiment trop vert. C’est un Krug bien sûr, mais qui mange l’intérieur des joues. Il sera beaucoup plus rond sur la nourriture et notamment le délicieux et original plat de raviolis en berlingots.

L’Y d’Yquem 2008 est charmant. Il est lui aussi très vert, mais on lui pardonne, car il raconte des choses. Il est dans la jeunesse mais une jeunesse qui parle. Il est gastronomique. J’aime beaucoup sa sérénité aromatiques faite de citron vert et de fruits blancs.

Le vin phare du repas, c’est le Domaine de Trévallon 2009. Ce vin a tout pour lui, l’aisance, la joie de vivre, la plénitude d’un fruit magistral. Ce vin n’est que de plaisir et ne se pose pas de question, on en jouit. Le buvons nous trop tôt dans sa jeunesse, la question n’a pas d’intérêt car il est parfait comme cela. Il est délicieux avec le rouget, riche avec la poularde. C’est la vedette de ce dîner.

Que dire du restaurant ? J’avoue que je suis embarrassé pour exprimer un avis pertinent. Les menus se présentent de façon compliquée, comme les beurres que l’on peut tartiner sur des pains différents. Trop de complexité, c’est trop. Le service est prévenant, parfait lorsqu’on donne à choisir les verres pour le champagne, parfois pesant et parfois imparfait tant les serveurs sont capables de déambuler sans jamais regarder ce qui se passe autour d’eux. On peut cependant dire qu’il y a une grande motivation à bien faire. La cuisine est d’une grande dextérité et d’un haut niveau technique, mais ma poularde était trop lourde et saturante. Les deux plus beaux plats sont les raviolis très originaux et le dessert lui aussi original et bien exécuté. Si je suis embarrassé, c’est qu’il est difficile de juger un chef trois étoiles qui ne veut pas faire du trois étoiles. On est donc un peu en porte-à-faux. Ce restaurant est indéniablement agréable par son atmosphère, par la qualité d’exécution de la cuisine qui trouvera ses adeptes. Mais quand on connaît l’original, on a du mal à positionner la variante qui a visé plus bas. Ce que je recommande en tout cas, c’est d’en faire l’essai, car mon attitude vis-à-vis de ce restaurant est trop lié à l’admiration que je porte à Anne-Sophie Pic. J’ai eu beaucoup de mal à admettre quand Joël Robuchon ne faisait pas du Robuchon pur jus. J’ai aussi un peu de mal quand Anne-Sophie Pic ne fait pas du ASP pur jus. Ce sentiment n’appartient qu’à moi. D’autres gourmets n’auront pas les mêmes réactions. Qu’ils en fassent l’essai !

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13 millésimes de La Tour Blanche de 2012 à 1943 mercredi, 6 mars 2013

La Tour Blanche est un sauternes que j’apprécie pour son goût, mais aussi pour la fabuleuse histoire d’Osiris, mécène comme on n’en faisait qu’au 19ème siècle. Banquier, il a acquis La Tour Blanche en 1876 et en a fait don à l’Etat à la condition qu’on y construise une école de viticulture et de vinification. Elle accueille aujourd’hui 140 élèves par an. Osiris a créé l’ancêtre des restos du cœur, a été le plus généreux donateur de l’Institut Pasteur, a restauré pour en faire don à l’Etat la Malmaison. Bien sûr, il y avait dans cette générosité un intense besoin de reconnaissance, mais les dons sont concrets et d’une ampleur impressionnante. Alors, en buvant La Tour Blanche, je trinque à cet homme atypique, controversé peut-être, mais diablement généreux.

Didier Fréchinet responsable commercial, m’accueille à l’aéroport et me conduit au château La Tour Blanche. Nous faisons une petite visite du site de l’école d’où l’on a une vue qui s’étend à l’infini et surplombe le Ciron, le fameux cours d’eau qui est responsable de l’apparition du trésor du sauternais, la pourriture noble. Nous visitons les chais puis nous nous rendons dans une salle de dégustation très cosy où se regroupent Alex Barrau, directeur du château, Didier, Philippe Pélicano maître de chai qui travaille au château depuis 2001 et dont le premier millésime géré seul est le 2012. Se joint aussi Adeline, jeune stagiaire dont c’est le dernier jour de stage.

Château La Tour Blanche 2012 est un vin dont l’assemblage vient d’être fait hier, en vue de la semaine des primeurs du début avril. La couleur est d’un jaune vert et le vin est un peu trouble. Le nez est très pur, très frais, de très grand niveau. La bouche est lourde au sucre fort et dominant. Le vin est gourmand, mais il faudrait que le sucre se calme. Le goût qui reste en bouche, c’est le sucre. Aux experts de dire ce que ce bambin aux yeux à peine éveillés deviendra. Son nez est un signe positif de grandeur.

Château La Tour Blanche 2009 est fortement bouchonné. Elle est remplacée par une deuxième bouteille. Le nez est discret mais on sent un vin intense. La bouche est superbe, suave, d’un vin riche, sucré mais beau. Sa fraîcheur est invraisemblable et il est diablement bon. Quel dommage ! Car il est si goûteux que les amateurs vont le boire trop tôt, alors qu’avec quelques décennies de plus il sera immense. Tout est réuni pour faire un vin d’anthologie.

Château La Tour Blanche 2001 a un nez qui n’est pas parfait, d’iode, de camphre et si l’attaque est belle, le final est trop marqué. Aussi, Philippe va chercher une deuxième bouteille au nez un peu marqué, mais nettement meilleur. En bouche l’attaque est belle de caramel, de crème de lait et le final est sur les fruits confits. Il y a une belle fraîcheur mais je préfère le 2009. Ce 2001 n’est pas un vin de plaisir. Il faut le garder en cave pour qu’il trouve sa voie. Le 2009 donne une plus grande impression de fraîcheur. Et son final claque.

Château La Tour Blanche 1986 a une couleur claire, peu évoluée. Son nez a aussi une pointe de camphre. La bouche est très douce, raffinée, avec des fruits jaune clair. Le parcours en bouche est beau mais le final n’est pas assez précis, trop rêche.

Château La Tour Blanche 1983 a une couleur plus foncée, d’un bel or intense. Le nez a un soupçon d’animal et le pain d’épices est plus nettement marqué. Le vin est opulent, frais, de belle ampleur en bouche. Il est équilibré, au final un peu en dedans mais beau. Le 1986 s’améliore par l’aération, le 1983 est vaillant, solide sur ses jambes, au final court mais solide aussi. Il y a beaucoup de similitudes entre le 1986 et le 2001. Le 1983 devient nettement meilleur et son final s’allonge. Il convient de signaler que chacun des vins que nous buvons est ouvert au moment même. Il aurait beaucoup plus d’ampleur avec quelques heures d’aération lente.

Château La Tour Blanche 1967 a une couleur d’un ambre très clair. Le nez est frais, de fruits confits. Le vin est noble. Il est doux, élégant, au beau final. C’est un grand vin. Si son final est un peu sec, c’est à cause de sa minéralité. Alex évoque deux cailloux que l’on frotte. De ce vin de grande fluidité on aimerait ne garder que l’attaque pour oublier le final et ne rester que sur la première impression.

Château La Tour Blanche 1962 est plus sombre d’un très bel or foncé. Le nez est minéral. En bouche, c’est une merveille. Le sucre affleure, mais sur un nuage de bonheur. Riche, à la forte impression sucrée, à l’alcool marqué, il dégage une impression de luxure. Le final de ce vin voluptueux est beau. Le caramel et le zeste d’orange sont là, sur un alcool présent. Il y a dans le 1962 un infime côté liégeux que Philippe avait remarqué mais n’osait exprimer pour nous laisser libres de le découvrir. J’aime son côté atypique.

Château La Tour Blanche 1957 a un nez très Tour Blanche. Comme dirait Audiard, la bouche, elle cause. J’adore ce vin qui n’est pas orthodoxe. Il a un final magique. On sent les pomelos, le vin est légèrement acidulé, marqué par une forte tension. Son final rebondit sans cesse. Il est vivant, vibrant et claque comme un fouet. Ce vin de fraîcheur a le plus beau final.

Château La Tour Blanche 1950 a une couleur qui va plus vers le thé. Le nez est discret, retenu. Le vin est de grande pureté, très équilibré et très intégré. C’est un vin noble, serein, calme, avec un beau final. C’est le bon élève, droit dans la définition d’un sauternes accompli. Il a une très grande fraîcheur même si on sent un peu l’alcool. Le 2001 est nettement meilleur maintenant et devient ce que 2001 doit être.

Voici nos classements. Alex : 50 62 57 67 83 86 09 01 12. Didier : 62 83 50 57 67 86. Philippe : 57 62 83 67 50 86. Adeline : 62 50 83 57 67 86. Mon classement : 57 50 62 83 67 86 09 01 12.

Nous sommes unanimes pour mettre le 1986 en dernier des anciens, mais avant cela, nos préférences divergent. C’est le goût de chacun. Alors que nous avons adoré le 2009 si agréable à boire, lorsqu’on le boit après les 1957 et 1950, il paraît dénué de toute complexité ! L’avenir est au sauternes vieux. Ce devrait être un dogme.

Nous nous rendons au restaurant le Saprien à Sauternes, qui a changé de propriétaire depuis ma dernière visite. Le menu que nous sommes plusieurs à prendre est un duo de foies gras, puis un ris de veau et une variation sur le thème de fromages à pâte persillée.

Château La Tour Blanche 1990 est d’un équilibre rare. Il évoque le 1950 par son côté très archétypal. Il n’a pas l’ombre d’un défaut. C’est un splendide sauternes.

Château La Tour Blanche 1948 est d’un bel or. Le nez est d’orange amère. La bouche est éblouissante. C’est vraiment le plus grand de tous. C’est le seul à avoir un final mentholé. Le nez est de menthe et d’anis. Le vin est merveilleux. Il est beaucoup plus puissant que ce qu’on imaginerait d’une année qui souffre de sa proximité avec des années de légende. En fait il est magique d’équilibre et de sérénité. Il a beaucoup d’émotion et de plénitude. Il est orange confite, avec une grande pureté d’expression et beaucoup de cohérence.

Château La Tour Blanche 1947 est très café. Il a plus de fraîcheur mais aussi plus d’amertume. Il est très complexe et moins charmeur que le 1948. Le 1947 fait penser au 1957 et crée un accord magique avec le ris de veau.

Château La Tour Blanche 1943 a été ajouté parce que c’est le vin de mon anniversaire. J’apprécie cette délicate attention. Il est d’un bel or. Le nez est calme. Le vin est sec et j’explique à mes hôtes que je suis habitué aux sauternes qui ont mangé leur sucre et que j’apprécie leurs charmes particuliers. On sent que la « matière vineuse » de ce sauternes sec est magnifique. C’est un très grand vin noble.

Des quatre vins de ce déjeuner, ce sont les 1990 et 1948 qui sont les plus équilibrés. Le 1990 a des saveurs exotiques. Je classe les vins ainsi : 1948, 1990, 1947 et 1943. Et ces quatre vins se classeraient en tête, si l’on combinait les deux séries, le 1957 pouvant se situer presque à égalité avec le 1943.

Quels commentaires ajouter ? Nous avons rencontré sur quelques vins de la dégustation du matin des imperfections olfactives ou dans le final alors que les quatre vins du déjeuner frappent par leur absolue pureté. Dans chaque décennie, les écarts entre les vins présentés sont importants, sauf pour la décennie 40 où les vins sont beaucoup plus proches et cohérents. Les 1947 et 1948 sont deux vins magistraux et proches.

Cette verticale de treize vins de la Tour Blanche est un honneur pour moi dont je suis reconnaissant. Ce fut un exercice apprécié par mes hôtes car ce fut pour eux une belle occasion de revisiter l’histoire de leur grand vin. Ce grand moment a apporté de l’eau au moulin de mes convictions : plus un sauternes est ancien, meilleur il est. Longue vie à La Tour Blanche, un grand sauternes.

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le 2012 est dans un flacon de 2007, à gauche ci-dessus

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déjeuner au Saprien

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