déjeuner au Bistrot du sommelier mercredi, 26 septembre 2012

C’est la réunion de rentrée de notre club 2043, dont tous les membres veulent devenir centenaires en l’année affichée. Je me présente au Yacht Club de France et l’hôte d’accueil me reçoit d’un air dubitatif. L’information avait mal circulé, dans un sens ou dans un autre, car le rendez-vous est au Bistrot du Sommelier. Nous sommes cinq, les amis absents ayant tous de bonnes raisons pour ne pas être là. L’apéritif de bienvenue est un Champagne Lenoble Blanc de blancs grand Cru Chouilly sans année qui est frais à boire, mais n’est que cela. Son message est limité. Le second champagne montre un saut qualitatif certain, car c’est un Champagne Bollinger Spécial Cuvée sans année qui doit avoir plusieurs années de cave. Il est rond, charnu et fait plaisir à boire.

L’ami qui nous invite a choisi le menu dégustation avec des vins découvertes, que nous boirons à l’aveugle avec un succès de reconnaissance incertain. La terrine fermière s’apprécie avec le Bollinger. Sur une délicieuse soupe de coquillages le Cassis domaine de la Ferme Blanche 2010 est généreux, chatoyant, mais assez monolithique. L’accord est pertinent.

Sur une viande aux petits légumes, le E Prove domaine Maestracci Corse Calvi 2008 affiche un alcool soutenu. Il y a de la matière, une jolie complexité sympathique, et même si le vin est assez simple, il soutient bien le plat et crée un agréable plaisir.

Le dessert à la poire crée avec Les Trois Schistes Domaine de Montgilet Coteaux de l’Aubance 2010 charnu comme un muscat malgré ses 11° un accord merveilleux.

Philippe Faure Brac est venu rejoindre notre table au café et comme je lui explique le prétexte de notre déjeuner, instantanément, il appelle son sommelier qui revient avec un Château Gazin 1943 de niveau bas mais de couleur prometteuse. Le bouchon est extirpé avec élégance par Philippe. Il est noir d’encre. Le vin, un peu fatigué à l’ouverture s’assemble peu à peu. Son message est un peu faible, mais suffisamment loquace pour que nous en jouissions. Nous remercions Philippe de ce cadeau généreux qui a ensoleillé notre repas.

Comme il fait suite au voyage en Belgique, force est de constater qu’un homme aussi influent que Philippe Faure-Brac pourrait innover pour la cuisine comme il le fait si bien pour le vin. La Belgique bouge. Si Philippe, avec sa renommée faisait bouger les lignes de la solide cuisine à la française qu’il pratique, nul doute qu’avec son talent et son imagination, il y réussirait.

Déjeuner au restaurant In de Wulf dimanche, 23 septembre 2012

Nous arrivons en pleine campagne, entre des champs de maïs, à une jolie ferme ancienne construite en briques. A l’intérieur, la décoration se veut rustique, intensément rustique. Le restaurant In de Wulf a pour chef le jeune Kobe Desramaults qui nous offre l’occasion d’une nouvelle expérience de créativité culinaire.

Les amuse-bouche : Chips / Oignon croustillant / chou-rave, livèche / carotte fermentée, berce / betterave, yaourt, oseille / pain brûlé, maroilles. Le menu : maquereau brûlé, feuille de capucine / bulot, sauce petit lait, épinards, betterave de la mer / moule de bouchot, verveine, radis / crabe de la mer du Nord, courgette / escargots "gros gris" de Comines, pomme de terre, ail, herbe / homard d’Audresselles, "kerremelkstampers" / lotte, céleri, livèche, fenouil de la mer / céleri-rave cuit en croûte de sel, fromage à la crème fait maison / nuque de porc "ferme de Beau Pays" de Borre, légumes du jardin / concombre grillé, Keiemse witte / Cremet du CapBlanc-Nez / mûre sauvage, agastache / betterave rouge, fraise des bois, petit-lait, camomille / potiron, argousier.

Nous commençons par le Champagne Egly-Ouriet Brut Grand Cru 2002, qui a de belles notes de fruits jaunes et bruns. Très équilibré, il est gastronomique. Vanessa, la jeune sommelière, a composé une carte de vins nature, très tendance. Nous choisissons un vin du Jura, un En revenant du paradis, J.M. Brignot, Vin de France 2010, fait de chardonnay, savagnin et trousseau. Au premier abord, le vin servi très froid a tout pour me déplaire. C’est un vin de recherche, déstructuré, qui gêne par le fait que l’alcool semble étouffer le vin, avec un petit quelque chose d’une grappa. Mais ce qui est intéressant, c’est que le vin va montrer une aptitude gastronomique étonnante. Lorsqu’il est confronté à un plat viril, il caresse le plat et se fait civilisé. Et dès que le plat est parti, la déstructuration de son alcool le rend de nouveau gênant. Il suffit qu’il ait suscité de beaux accords pour que l’expérience se justifie. Avec le maquereau, avec le bulot et surtout sa crème de lait qui donne du fumé qui excite le caractère oxydatif du vin, avec les escargots au goût terrien, on trouve des accords de grande pertinence. L’Egly Ouriet est plus à l’aise avec des saveurs plus subtiles comme la moule délicieuse.

Le Pouilly-Fuissé Domaine Valette, Le Clos de Monsieur Noly 2001 est un vin fumé, à l’alcool très présent et fort, qui évoque une tisane de fruits bruns. La lotte se marie bien avec ce vin mais son alcool est trop fort. Le vin est superbe sur la raie et l’oignon.

Le chef ajoute pour nous au menu un canard sauvage avec une pâte de prunelle sauvage. C’est absolument délicieux. En définitive, je préfère le vin du Jura au Pouilly. Et je mets le champagne au dessus des vins. La cuisine du chef est d’une dextérité et d’une inventivité assez extraordinaire. On n’est pas encore au niveau de "L’Air du Temps", car il y a dans le restaurant d’hier une plus grande maturité. Mais c’est une étape qui est d’un très grand intérêt. Vanessa la sommelière est très compétente. Il faudra aussi qu’elle s’intéresse à d’autres vins que les vins nature.

Après quatre repas belges, le sentiment qui prévaut, c’est que ça bouge en Belgique. De même que Noma a entraîné à Copenhague une foule de restaurants d’avant-garde, en Belgique, la cuisine de recherche, travaillant des produits locaux et des herbes et légumes qui poussent dans le jardin du chef, conduit à une vivacité créative exemplaire. J’applaudis à deux mains cette recherche, cette profusion d’imagination créatrice, et ces goûts inouïs qui nous font dire : "où vont-ils chercher tout cela ?". En plus, c’est bon. Je classerai les quatre cuisines ainsi :1 – Air du Temps, 2 – In de Wulf, 3 – Couvert Couvert, 4 – de Pastorale. Et les quatre cartes de vins : 1 – Couvert Couvert, 2 – de Pastorale, 3 – Air du Temps, 4 – In de Wulf.

Nous avons pu commander des vins qui seraient inaccessibles sur les cartes de vin françaises dans des restaurant de même niveau. Ça bouge en Belgique, et la cuisine est très imaginative. Des jeunes se lancent en pleine nature pour créer de beaux restaurants. Un vent d’air frais souffle sur la Belgique. Tant mieux.

le chef prépare le céleri cuit au four

dîner au restaurant L’Air du temps avec un accord d’anthologie dimanche, 23 septembre 2012

Le dîner se tient au restaurant L’Air du temps, tenu par Sang-Hoon et Carine Degeimbre. San est un adepte du food pairing qui conduit à imaginer des accords saisissants sur la base de compatibilités génétiques des ingrédients. Le tout est revisité avec sa culture liée à ses origines coréenne et belge. Passionné par les plantes qu’il cultive et par les saveurs qu’il rapporte de ses voyages à travers le monde, il produit un cuisine inspirée, étonnante et le plus souvent passionnante, car il y ajoute sa connaissance des vins, ce qui apporte encore plus de pertinence à ses plats.

Voici ce que nous avons mangé : snacking : chips soufflé canard laqué /carotte laquée au vinaigre d’ail noir / escargot dans sa coquille / cigarette de pomme de terre, chocolat blanc, wasabi.

Bouchées : moules frites / œuf coque, mousse de saumon fumé, mouillette au fenouil.

Dégustation : homard breton en sushi décomposé / céviche, couteaux, courgettes jaunes, leche de tigre /jardin de Liernu : nos tomates, crevette de Zeebrugge, jus de crevettes, baume de Galaad / ferme de la Tour à Gismes : foie gras rôti au four, anguille fumée, ananas / volaille Oméga 3,coq des prés, rôtie, tendre avec un consommé acidulé, oignons / bœuf Wagyu, boulette de furikaké, carpaccio de bœuf, quinoa soufflé, jus de crabe, physalis, anchois / pigeonneau de Waret, crêpe de pomme de terre au fromage frais, pattes confites à l’orange et muscovadi, jus de pigeonneau, fève tonka / carottes pairing, purple haze confites à la citronnelle, gourmandises en lacets, sorbet à la violette / caramel au beurre salé, en sorbet, au café, à la vanille et potiron.

Le fourmillement inventif est spectaculaire. Nous commençons par un Champagne "les Carelles" Grand Cru de Mesnil-sur-Oger Jacques Selosse sans année. Il est d’une tension extrême. Sans concession, il claque sur la langue et nécessite des plats agressifs pour s’exprimer. Mon gendre n’aime pas. J’aime le côté rebelle qui est d’un grand intérêt. Nous poursuivons avec le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1998. Il est nettement plus confortable, rassurant par sa structure d’un grand équilibre. Carré, solide, il montre un dosage un peu fort par comparaison au Selosse. Il est très gastronomique, mais sur les tomates, c’est le Selosse qui est plus pertinent, alors que sur le jus de crevettes, c’est le Pol Roger.

Nous cherchions un vin blanc sur la carte et je demande à Maxime, le compétent sommelier, s’il n’a pas un vin caché, hors carte, de grand intérêt. Il nous présente un Riesling Grand Cru Brand Turckheim domaine Zind Humbrecht 1990 qui est une merveille absolue. Un vin d’une complexité incomparable avec des notes citronnées et de fruits jaunes, mais aussi d’épices innombrables. Il est lourd, imposant et entraînant. C’est alors que se produit avec le plat d’anguille et foie gras un accord qui nous laisse tous abasourdis. Nous tenons là un accord d’anthologie et plusieurs autour de la table répètent à l’envi : "c’est l’accord de l’année". Le fait est que la symbiose d’un plat incroyablement multiforme avec un vin qui l’est tout autant donne des variations gustatives d’une justesse infinie. C’est beau. Le vin est certainement le meilleur de notre voyage en Belgique. Sur le bœuf Wagyu, nous goûtons un Domaine de Trévallon Coteaux d’Aix 1990 qui d’emblée nous asphyxie par ses notes végétales à dominante de poivron mais aussi de fenouil. Le tout se domestique quand le vin s’ouvre, et c’est un vin de message simple, délicieusement goûteux, presque velouté, serein et apaisé. Il est aussi à l’aise sur le pigeon.

Cette table est d’une qualité de recherche exceptionnelle. San est venu discuter avec nous et nous a parlé de ce qui conduit ses recherches, expliquant le cheminement de quelques plats. On ne peut que recommander cette table de très haut niveau ou l’expérience gastronomique est exceptionnelle.

déjeuner au restaurant Couvert Couvert à Heverlee samedi, 22 septembre 2012

Nous déjeunons au restaurant Couvert Couvert à Heverlee, tenu par deux frères, Laurent et Vincent Folmer, ce qui explique peut-être la répétition du nom. L’entrée de l’édifice est sur la façade opposée à la route d’où l’on peut voir une grande trouée de verdure et des vaches qui viennent pâturer tout près du jardin potager du restaurant. La salle est d’une décoration très sobre, à la scandinave, avec un mobilier simple de beau design. L’accueil est souriant. L’examen de la carte des vins donne le sourire. Car il y a des pépites de première grandeur. Cette carte est intelligente (c’est la première fois que je vois qu’on indique la date de dégorgement des champagnes), et donne envie de dépenser, ce que devrait faire toute carte des vins.

Alors que nous avons un programme chargé de week-end, nous choisissons le menu à six plats ainsi composé : crabe tourteau, sarrasin et citron vert / sole de petit bateau, crevettes de Zeebrugge, tomates et estragon / homard breton, pêches et amandes fraîches / canard sauvage, betteraves et sureau noir / figues, glace aux feuilles de figues / chocolat, framboises et sapote.

Tout dans cette cuisine est raffiné, sensible, délicat. Les deux chefs étant des pâtissiers, ce que je ne savais pas, il devient normal que le plat que j’ai préfère soit celui de la figue. Le homard est tout petit mais très goûteux. La sole est très gastronomique. Ça respire l’intelligence, et contrairement à hier, tout met en valeur les vins. Les assiettes sont choisies avec pertinence pour faire de chaque plat un joli tableau. On se sent bien et heureux.

Le Corton Charlemagne Jean François Coche-Dury 2007 a un nez encore jeune où le soufre apparaît légèrement. En bouche, il n’est pas aussi tonitruant que certains Corton Charlemagne Coche-Dury plus anciens qui sont de vraies bombes, mais il est très expressif, solide, sa relative discrétion lui donnant beaucoup de charme. Il est terriblement gastronomique. Ses notes citronnées sont équilibrées et l’ensemble, très cohérent, est rassurant pour les plats.

Nous souhaitions nous en tenir à un vin compte tenu du programme qui reste à suivre, mais le vin s’asséchant très vite, nous avons commandé un La Grande Rue Grand Cru Monopole Domaine François Lamarche 2002. Le vin est d’une rare délicatesse. Au début, son message manque un peu d’expression, mais il faut le laisser s’ouvrir et il gagne en velouté et en délicatesse. Son final est un peu rêche. Il est à noter qu’aussi bien sur le homard (chair seule) que sur le canard, c’est le vin rouge qui s’exprime mieux que le vin blanc. S’il est discret, il est subtil, et le velouté s’impose de plus en plus.

Nous avons vécu un excellent déjeuner, joyeux, qui donne envie de revenir en ce restaurant au naturel plaisant.

dîner au restaurant de Pastorale samedi, 22 septembre 2012

Cap sur Bruxelles, non pas pour y planquer quelques lingots, mais pour s’immerger en gastronomie. L’hôtel Bloom à Bruxelles est jeune et moderne. Notre chambre avec mezzanine est d’une décoration plaisante. L’arrivée en terre belge impose une bière blonde de la Brasserie d’Achouffe. Un régal.

Nous partons vers la ville de Rumst au restaurant de Pastorale qu’il serait impossible d’atteindre sans un GPS. On se demande comment on pouvait y arriver quand cet outil n’existait pas. La façade du lieu est imposante mais égayée par une statue au revêtement doré brillant qui est prise d’un rire bruyant au moment où l’on passe devant elle, comme ces grenouilles de jardin qui coassent quand on les approche. La décoration intérieure est d’avant-garde. Elle est d’une grande sensibilité et réussie.

La carte des vins est très internationale et les prix paraissent accessibles. Mon choix porte sur le Champagne Krug 1988 qui est d’une maturité magnifique. Il n’a pas d’âge et nous éblouit de sa complexité épanouie. Les amuse-bouche sont nombreux, très bigarrés et les explications sont incompréhensibles. On n’en retient rien mais ce n’est pas grave. Une moule est particulièrement goûteuse. Le champagne est à son aise avec ces multiples saveurs.

J’ai choisi le cabillaud au fenouil et sureau et le bœuf Holstein de cinq ans d’âge, sélection unique, mûri cinquante jours. Le chef Bart de Pooter fait une cuisine dont la présentation est agréable à l’œil, dont les produits sont de qualité, mais dont la cohérence des plats est absente. Ce sont des patchworks de saveur sans véritable logique, sauf de les ajouter "comme ça". On le verra avec le plateau de fromages commandé pour accompagner le vin rouge : cinq fromages arrivent avec quatre sauces ou confitures de fruits, et c’est la java pour les papilles. Le vin méritait mieux que cela, car c’est Vega Sicilia Unico Reserva Especial fait de 1985, 1991 et 1996 mis en bouteilles en 2005. Le vin est impérial. Il est d’un velours distingué. On dirait un mannequin qui défile sur un nuage. Il est d’une grâce pure avec un beau fruit rouge mais surtout ce velours de grande noblesse marque le palais d’une trace profonde. C’est un vin magnifique.

Notre serveuse ou plutôt notre hôtesse a fait un service attentif et attentionné. Ce n’est pas le cas du sommelier Jon Stalmans qui paraissait aux abonnés absents, car nos verres étaient souvent vides. Alors, que dire ? Le lieu est beau, la cuisine n’est pas du tout adaptée aux vins. C’est une étape pour une expérience culinaire. Ce n’est pas une étape pour les amoureux du vin.

livre « L’Amer » d’Emmanuel Giraud vendredi, 21 septembre 2012

Pour le même jour, j’ai reçu une invitation pour le lancement du livre "L’Amer" d’Emmanuel Giraud qui m’avait, il y a quelques années interviewé pour France Culture. Il double ses talents de journaliste de ceux d’écrivain et d’artiste, et l’idée de parler d’amertume après avoir parlé de cuisine note à note m’excite. Dans l’appartement d’un collectionneur d’art, Emmanuel expose quelques croquis et nous fait goûter un spritz au Campari assorti d’olives de parmesan et de crackers au Cecina de Léon. C’est l’occasion pour moi de retrouver un ami gastronome que jamais je n’aurais imaginé croiser ici. Choc des saveurs, propos sur l’amertume, tout cela me plait car on y parle de goût. Comme le dit si bien Emmanuel, le mariage du ciel et de l’amer.

La cuisine note à note, livre d’Hervé This vendredi, 21 septembre 2012

Hervé This a écrit un nouveau livre : "la cuisine note à note". J’ai envie de me rendre à son invitation dans les locaux d’AgroParisTech. Les embarras de Paris et de mon emploi du temps font que j’arrive après la présentation. La table où il semble que l’on ait cuisiné ressortit plus d’un laboratoire de travaux pratiques de chimie que de travaux culinaires. J’ai le temps de profiter des bouchées « note à note » servies par des Chefs Toques Blanches Internationales qui se sont prêtés au jeu. Ces petits fours sont diablement intéressants, mais il ne faut surtout pas demander de quoi c’est issu ! Car la formule chimique prime. On sent que les goûts sont plus explorés que les mâches, parfois abruptes. Hervé est un professeur Nimbus de la cuisine, mais il faut des esprits bouillonnants comme le sien pour bousculer les lignes et créer des pistes à explorer. Oserais-je l’avouer, je donnerais le même conseil que pour le vin : "à consommer avec modération".

les petits fours, les chefs et les boissons

18ème séance de l’académie des vins anciens mercredi, 19 septembre 2012

La 18ème séance de l’académie des vins anciens se tient au restaurant Macéo. Vers 16h30, deux amis m’attendent déjà pour m’aider à ouvrir les vins. Il y a 36 flacons dont un jéroboam, pour 24 convives annoncés mais seulement 20 présents. Comme il faut s’y attendre, de nombreux bouchons posent des problèmes, mais nous arrivons à les résoudre tous, même lorsque le bouchon tombe dans le vin dès que l’on touche à la capsule. C’est arrivé deux fois et les vins n’offraient rien de bon à sentir. L’un des amis présents m’a montré une méthode que j’ignorais pour extraire le bouchon tombé quand la bouteille est vide : on insère un petit sac plastique. On renverse la bouteille pour que le bouchon soit près du goulot, posé sur le sac. Puis on souffle dans le sac qui se gonfle. On tire, et le bouchon vient avec le sac. D’autres amis arrivent « armés » d’un Champagne Dom Ruinart 1993 que nous buvons pour nous refaire des forces après l’effort physique d’une bonne trentaine de bouchons qui se déchirent. Le champagne est une heureuse surprise pour cette année jugée plutôt faible.

Le champagne de l’apéritif est un Champagne Charles Heidsieck Réserve Privée jéroboam mis en cave en 1987. Il est vraiment très agréable et brillant sur des gougères. C’est une série limitée de Charles Heidsieck au style franc, sans signe d’âge.

Le menu préparé par le chef du Macéo est : feuilleté d’escargots petits gris du Poitou / homard breton, caviar d’aubergine / aiguillettes de saint-pierre et houmous / caille sur rôties façon bécasse / carpaccio de figues, figues rôties au miel, framboise / pêche de vigne en crumble et émulsion.

Nous passons à table et voici les vins des deux groupes :

Les vins du groupe 1 : Champagne Mercier années 30/40, Meursault Veuve Genin 1961, Chablis 1er Cru les Vaucoupins Bichot 1988, Corton Blanc Les fils de M. Jacqueminot 1919, Château Haut-Bailly 1970, Château Lanessan 1970, Château Batailley 1964, Château Calon Segur 1949, Nuits Saint Georges « Les Vaucrains » 1961 , Beaune Clos des Couchereaux Grand Cru Jadot 1964, Bourgogne Bouchard 1937, Vacqueyras domaine de la Garrigue A. et L. Bernard et Fils 1970, Chateauneuf-du-Pape Château Maucoil domaine Pierre Quiot 1973, Chateauneuf-du-Pape Clos de Panisse Mme Prunis vers 1961, Chateauneuf-du-Pape Yves Chastan 1965, Monbazillac Theulet Marsalet 1970, Madère Cruz 1860.

Les vins du groupe 2 : Champagne Piper Heidsieck années 60 , Chassagne Montrachet tasteviné en 1951 Moillard Grivot 1947, Meursault Veuve Genin 1961, Chablis 1er Cru les Vaucoupins Bichot 1988, Château Haut-Batailley 1970 , Château Duhart-Milon 1970, Château Haut-Bailly 1970, Château La Gaffelière Naudes 1959, Chambolle-musigny Vignes du Château domaine Grivelet 1953 (basse), Vosne Romanée Chaumes Naigeon-Chauveau 1964, Lirac Cuvée Jean XXII caves des vins de cru de Lirac 1989, Gigondas domaine du Pesquier Bontière et Fils, ancien vignoble des Princes d’Orange 1979, Chateauneuf du Pape Mas Saint Louis 1977, Chateauneuf-du-Pape domaine de la petite Gardiole Charles Establet 1965, Valbuena Vega Sicila 1992, Monbazillac Theulet Marsalet 1970, Monbazillac Château de Monbazillac années 30, Château Rabaud Promis 1953.

Comme nous étions peu nombreux, les échanges entre groupes ont été fréquents. Les verres venaient à ma place de la gauche, de la droite, à un rythme effréné aussi était-ce impossible de tout mémoriser d’autant plus que parfois, je ne savais plus quel verre contenait quel vin. Je signalerai seulement les vins qui m’ont marqué. Le Champagne Mercier années 30 est sensiblement dosé mais excellent. Le Champagne Piper Heidsieck annoncé années 60 est en fait des années 30. Il est d’une grâce extrême. Le Meursault Veuve Genin 1961 est superbe de générosité. Le Corton Blanc Les fils de M. Jacqueminot 1919 au niveau parfait est d’une grande personnalité. Si les bordeaux de 1970 sont bons, le Château Calon Segur 1949 et le Château La Gaffelière Naudes 1959 sont de grands vins, surtout le 1949. Tous les Chateauneuf-du-Pape même s’ils sont ordinaires se sont bien comporté. Le Valbuena Vega Sicila 1992 a des accents de rose du meilleur effet. Le Monbazillac Château de Monbazillac années 30 est superbe. C’est probablement pour moi le vin de la soirée avec les deux bordeaux canoniques et le blanc de 1919.

Une fois de plus l’académie des vins anciens a permis de partager des bouteilles anciennes dans une ambiance enjouée et amicale. Nous referons une séance avant la fin de l’année, car il faut que les bouteilles qui dorment dans des caves remplissent leur mission : être bues en bonne compagnie.

Académie des vins anciens – les vins annoncés pour le 18 septembre mardi, 18 septembre 2012

Voici les vins qui on été bus à l’académie. J’ai ajouté une brochette de vins du Rhône pour le plaisir (les vins précédés d’une étoile sont mon apport) :

Apéritif :

Champagne Charles Heidsieck Réserve Privée jéroboam mise en cave 1987

Vins du groupe 1 :

Champagne Mercier années 30/40

*Meursault Veuve Genin 1961

*Chablis 1er Cru les Vaucoupins Bichot 1988

*Corton Blanc Les fils de M. Jacqueminot 1919

Château Haut-Bailly 1970

Château Lanessan 1970

Château Batailley 1964

Château Calon Segur 1949

Nuits Saint Georges « Les Vaucrains » 1961

Beaune Clos des Couchereaux Grand Cru Jadot 1964

Bourgogne Bouchard 1937

*Vacqueyras domaine de la Garrigue A. et L. Bernard et Fils 1970

*Chateauneuf-du-Pape Château Maucoil domaine Pierre Quiot 1973

*Chateauneuf-du-Pape Clos de Panisse Mme Prunis vers 1961

*Chateauneuf-du-Pape Yves Chastan 1965

*Monbazillac Theulet Marsalet 1970

Madère Cruz 1860

Vins du groupe 2 :

Champagne Piper Heidsieck années 60 (en fait, années 30)

*Chassagne Montrachet tasteviné en 1951 Moillard Grivot 1947

*Meursault Veuve Genin 1961

*Chablis 1er Cru les Vaucoupins Bichot 1988

Château Haut-Batailley 1970

Château Duhart-Milon 1970

Château Haut-Bailly 1970

Château La Gaffelière Naudes 1959

*Chambolle-musigny Vignes du Château domaine Grivelet 1953

Vosne Romanée Chaumes Naigeon-Chauveau 1964

*Lirac Cuvée Jean XXII caves des vins de cru de Lirac 1989

*Gigondas domaine du Pesquier Bontière et Fils, ancien vignoble des Princes d’Orange 1979

Chateauneuf du Pape Mas Saint Louis 1977

*Chateauneuf-du-Pape domaine de la petite Gardiole Charles Establet 1965

Valbuena Vega Sicila 1992

*Monbazillac Theulet Marsalet 1970

Monbazillac Château de Monbazillac années 30

Château Rabaud Promis 1953

Cinq vins de 1900 et deux de 1899 au Laurent mardi, 18 septembre 2012

Dîner avec des amis et des bouteilles rarissimes, c’est l’aboutissement de l’esprit de l’académie des vins anciens. Il y a des vins anciens dans les caves. L’académie veut provoquer des occasions pour que l’on sorte ces vins des caves et qu’on les partage. Ce soir, ce sera une séance toute particulière, à mi-chemin entre ce que l’on a appelé les "casual Fridays" et l’académie. Nous serons huit, avec un programme particulièrement musclé. C’est Frédéric un ami qui a lancé le premier hameçon : "j’aimerais pour thème 1900 et ce qui tourne autour". On échange des mails, certains amis n’ont rien dans cette période, mais l’amitié est la plus forte. Le programme s’assemble. Le lieu choisi est le restaurant Laurent et je mets au point le menu avec Philippe Bourguignon.

J’arrive à 17h30 pour ouvrir les vins. Frédéric m’attend déjà pour ouvrir lui aussi quelques vins. Parmi les quatre vins que j’ai apportés il y a un Lafite 1900 au niveau très bas, vraiment basse épaule, mais la couleur me paraissait en cave engageante. Je l’ouvre. Bingo ! Le parfum est si sensuel, de truffe, de velours et de coulis de fruits noirs que je faillis m’évanouir. Vite il faut mettre un bouchon pour renfermer ce parfum extraordinaire. Tiendra-t-il jusqu’au dîner, nous verrons. Le Clos de la Roche 1899 est follement expressivement bourguignon. Le Montrachet 1929 à la couleur légèrement ambrée a un nez très pur, sans trace de madérisation. A propos de Madère, le 1837 a un nez d’une force et d’une expression folle. Perfide, je suggère à Frédéric que nous devrions vérifier s’il est bon, alors que c’est une évidence. Nous buvons un élixir, à la force alcoolique rare, qui a un goût intemporel, taillé pour l’éternité. Le parfum du Blanc Vieux d’Arlay 1899 est soufré. Il est tentant de le goûter comme le Madère. C’est un vin franc qui lui non plus n’a pas d’âge, auquel on ne donnerait pas plus de trente à quarante ans. Le parfum de l’Yquem 1900 est une leçon de choses. Il n’y a apparemment aucune mauvaise surprise, mais il convient d’être prudent.

Il nous reste plus de deux heures à attendre puisque des amis lyonnais arriveront assez tard par le train. C’est alors que Frédéric sort de sa musette un Castellu di Baricci vin rosé de Sartène 2011 de la famille Quilichini qui titre 14,5°. Et Frédéric a raison, c’est un beau rosé charnu, puissant, de bonne mâche, qui semble fait pour la gastronomie. C’est amusant de créer cet intermède quand on sait le programme qui nous attend.

Des amis tardent à venir aussi commençons-nous à boire le Champagne Krug 1985 dans le beau jardin du restaurant, pour les faire venir. Ce champagne est exceptionnel et le vin corse que Frédéric a servi aux amis à leur arrivée met en valeur le fruit rouge de ce champagne, assez étonnant pour un Krug. Ce 1985 est déjà entré dans une phase d’évolution tout en conservant sa tension extrême. On dirait un arc bandé. Il est puissant, pénétrant et je l’aime énormément. Le champignon moutardé crée un accord brillant. Evolué et tendu comme un chien de chasse en arrêt, c’est un champagne de compétition.

Le menu mis au point par Philippe Bourguignon et Alain Pégouret est : tête de champignon cru, légèrement moutardée / bouillabaisse froide, pommes de terre et fenouil au basilic / tronçon de turbot nacré à l’huile d’olive, bardes et légumes verts dans une fleurette iodée / tarte aux cèpes / noix de ris de veau dorée au sautoir girolles poêlées et « grenobloise » / pigeon à peine fumé et rôti, pissaladière de jeunes légumes, sauce piquante / reblochon et vieux comté / jubilé de mirabelles / fondant de chocolat amer

Nous avons une belle table dans la grande salle et des tables voisines regardent avec curiosité les vins qui nous sont servis. Le Champagne Abel Lepitre 1957 a une très belle couleur dorée. La bulle est atténuée mais vivace. Le vin est significativement dosé, mais il est agréable. Il est de belle maturité sans trace de faiblesse. C’est une belle surprise, car cette année n’est pas restée dans les annales de la Champagne. A l’inverse, l’année du champagne qui suit est légendaire et le Champagne Krug Collection 1947 l’est aussi. D’une folle complexité, d’une longueur inouïe, ce champagne est un grand. Mais je trouve qu’il n’est pas flamboyant. Aussi, même si la complexité est du côté du 1947, j’ai un faible pour le 1985. Florent s’en amuse, car il sait que le 85 est mon vin et le 47 le sien. La gelée de la bouillabaisse se marie très bien avec l’Abel Lepitre. Nous venons de boire trois champagnes de haute volée.

L’association du turbot avec des légumes verts est très originale, car les petits pois notamment donnent une grande fraîcheur au plat et excitent le vin. Le Montrachet Comtes Lafon 1985 n’est pas un vin ancien. Il est même d’une jeunesse folle et son odeur de soufre pourrait faire de lui un gamin. Le vin est imposant, fort d’une palette aromatique infinie. Il a l’aisance et la prestance des montrachets. C’est un grand vin, un peu hors catégorie dans ce dîner de centenaires – je parle des vins évidemment.

Le Château Montrose 1898 provient d’une bouteille où tout l’habillage est manuel : étiquette minuscule et manuscrite, bouchon marqué du château mais peu ancien et une vilaine capsule en plastique. Mais Frédéric nous dit qu’il provient directement de la réserve de la famille Charmolüe, ancienne propriétaire de Montrose. Le vin est clairet, presque rose. S’il a des accents intéressants, et des évocations subtiles, il montre aussi une certaine fatigue et une curieuse odeur soufrée. Robert, qui a une belle expérience des vins anciens n’a aucun repère sur 1898. Ce vin est intéressant comme témoignage, mais seulement pour cela, alors qu’à côté de lui, ça bouge ! Le Château La Tour de Mons Margaux 1900 a une couleur de vin riche, dense et terrien. Sa mâche est belle. Il est profond. Il a de la truffe, du velouté. Il est grand et confirme que 1900 est une année solide. La tarte aux cèpes est une merveille pour les deux vins et donne un bénéfique coup de fouet au Montrose.

On nous sert en même temps deux vins mythiques et, comme il sont tous les deux exceptionnels, je demande aux amis, d’une façon presque solennelle, de se recueillir et de se concentrer, car cet instant est un privilège unique. Le Château Ausone 1900 est une merveille. Je l’ai déjà bu deux fois et jamais je n’avais eu le plaisir qu’il devrait donner. Or ici, il est d’un grâce exceptionnelle. Terriblement séduisant, voire féminin, il marie subtilité et charme avec une grande puissance. Sa trace est impressionnante. A côté de lui, le Château Lafite 1900 a un parfum lourdement capiteux. Comment est-ce possible que l’on sente ainsi un coulis de fruits noirs ? La truffe qu’il exsude est lourde. Ce vin emplit la bouche. Sa présence est extrême. Quel vin gigantesque. Et l’on voit que les deux 1900 sont totalement opposés comme le sont la rive droite et la rive gauche de la Garonne, l’un et l’autre étant le champion de sa rive. L’Ausone joue sur le charme et la persuasion par sa profondeur. Le Lafite s’affirme en occupant l’espace, glorieux, royal, impérial même et d’une sérénité absolue. On verra dans les votes que les préférences entre les deux seront partagées. Le ris de veau est idéal pour mettre en valeur deux vins absolument exceptionnels.

J’avais trouvé à l’ouverture le nez du Clos de La Roche Jules Régnier 1899 absolument authentiquement bourguignon. Il est maintenant tellement à l’aise ! Il est bourguignon, serein, facile à vivre, peut-être plus simple par rapport aux bordeaux, mais charmeur avec aisance. C’est un grand vin riche tout en étant léger, qui profite d’un merveilleux pigeon.

Ayant eu peur que le montrachet de 1985 ne fasse de l’ombre au Montrachet Guichard Potheret 1929, je l’ai placé à cet endroit du repas pour le fromage. Je n’avais décelé aucun signe de madérisation à l’ouverture, malgré la couleur légèrement ambrée et ce vin est d’une grande pureté, sans signe de vieillissement excessif. Nous aurions dû le goûter avec le 1985 car il n’y aurait pas eu de compétition, l’écart d’âge excluant le combat, et c’est un mauvais service à rendre à ce grand vin que de l’associer au reblochon avec lequel il est incapable de coopérer. Nous n’aurons pas profité comme nous aurions pu d’un montrachet complexe et subtil, sans doute trop discret après les immenses rouges précédents. En revanche, le Vin Blanc vieux d’Arlay Caves Bourdy 1899 dont aucun des convives n’avait l’expérience ne fait qu’entraîner des oh et de ah, tant il est riche d’énigmes. Ce vin fait entrer dans une planète de saveurs où les repères sont rares. Car ce vin est éternel. Si nous nous donnions rendez-vous dans cent ans, nous goûterions strictement le même vin. Il n’a pas d’âge, il est indatable, complexe, d’une rare tension. C’est un vin confondant, que le comté met en valeur. C’est un grand moment du repas.

Le Château d’Yquem 1900, c’est "respect" comme on dit aujourd’hui. Sa robe est tellement opaque que l’on a du mal à imaginer qu’il ait été blanc clair quand il a été fait. Alors que le nez était il y a six heures merveilleusement agrume, il est de venu caramel et café. Si mes amis se régalent, je suis un peu plus sur ma réserve car ce vin que j’ai bu de nombreuses fois peut être beaucoup plus fringant et éclectique. Alors bien sûr, c’est une merveille car on sent tout le poids de saveurs des grands Yquem. Mais sa palette est trop courte, puisqu’elle a gommé les agrumes pour ne garder que le torréfié. Inutile de dire que même ainsi c’est un vin immense.

Le Porto Borgès Irmao 1900 agit sur moi comme une madeleine de Proust. Ce goût là, je le connais. Et l’image qui me vient, c’est celle d’une cave voûtée séculaire, où je boirais un élixir. Mais l’image est fugitive, car je n’arrive pas à pousser plus loin le lien avec ma mémoire. Le contraste avec le Madère Vilante da Silva Grande Réserve 1837 est saisissant. Le madère est un vin intemporel, car on imagine qu’il avait à peu près ce goût lorsqu’il avait cinquante ans et qu’il l’aurait encore si on l’ouvrait à la fin de ce siècle. Alors que le goût du porto ne peut appartenir qu’à un vin de plus d’un siècle. Il est pour moi d’une autre planète, comme l’est le Blanc Vieux d’Arlay. Les deux vins sont d’une pureté extrême. Avec le madère on est en terrain de connaissance. Avec le porto on lève le voile pour entrer dans le monde fabuleux des portos séculaires.

Les amis se demandaient comment pouvoir classer ces vins et j’ai proposé que l’on utilise la méthode de vote en pratique dans mes dîners. Les votes se sont concentrés sur quatre vins qui seront les premiers du classement, et par les hasards du vote démocratique, deux amis ayant nommé troisième le Montrose, il devient le 5ème du vote global, alors qu’Yquem 1900, Krug 1947 ou le Montrachet 1985 mériteraient largement de le précéder.

Le Lafite 1900 et l’Ausone 1900 ont recueilli chacun trois votes de premier, le Clos de la Roche 1899 et l’Arlay 1899 recevant chacun un vote de premier.

Le vote du consensus est : 1 – Château Ausone 1900, 2 – Vin Blanc vieux d’Arlay Caves Bourdy 1899, 3 – Château Lafite 1900 , 4 – Clos de La Roche Jules Régnier 1899, 5 – Château Montrose 1898.

Mon vote est : 1 – Château Lafite 1900 , 2 – Clos de La Roche Jules Régnier 1899, 3 – Vin Blanc vieux d’Arlay Caves Bourdy 1899, 4 – Château Ausone 1900.

Que retenir de ce dîner ? Dans mon livre "carnets d’un collectionneur de vins anciens", j’avais écrit que 1900 est la plus grande année de l’histoire. Nous avons eu la démonstration de l’énorme réserve de puissance des trois rouges de 1900, La Tour de Mons, Ausone et Lafite, vins riches et incroyablement vivants. La deuxième constatation est que tous les vins de ce dîner ont été d’une présentation parfaite. Le Montrose est sans doute le plus fatigué, mais il avait encore des choses à nous dire, au point de figurer dans deux votes. La troisième remarque concerne les accords mets et vins qui ont été absolument remarquables. Alain Pégouret a fait un travail d’une extrême précision. La quatrième remarque est qu’il serait temps, enfin, que le guide Michelin corrige son appréciation et redonne au restaurant Laurent la deuxième étoile très méritée. La cinquième remarque concerne la générosité des participants du dîner. Quel plaisir quand l’envie de partager pousse à sortir des vins mythiques des caves. La dernière remarque est personnelle : quand on vit des dîners aussi mémorables qui montrent l’incroyable longévité des vins, quel bonheur d’être amateur de vins anciens !

bouchon du Krug 1947