verticale de Bollinger R.D. – photos vendredi, 8 juillet 2011

La réunion se tient au Jules Verne, restaurant du 2ème étage de la Tour Eiffel

vues de notre salle de dégustation

la machinerie de l’ascenseur

les vins à déguster et la salle de dégustation avec, debout à droite, Mathieu Kaufmann

la belle couleur du champagne Bollinger. Le « travail » commence.

les plats du déjeuner

le propriétaire de la marque James Bond parle et le Président de Bollinger, Jérôme Philipon est tout sourire

le meuble n° 007 offert à la famille propriétaire, avec dans chaque tiroir, l’un des douze millésimes que nous avons bus

dernière image, celle d’un beau Bollinger R.D. le 1997

somptueuse verticale du champagne Bollinger RD vendredi, 8 juillet 2011

Le champagne Bollinger organise un événement pour célébrer les cinquante ans du « R.D. », le « récemment dégorgé », inventé en 1961 par l’héritière Bollinger qui voulait que des millésimes anciens puissent s’exprimer avec une jeunesse conservée intacte par le vieillissement sur lies. Le premier millésime qui a donné lieu à un « R.D. » est le millésime 1952 qui a été fait en 1961. Le R.D. n’est pas fait toutes les années mais seulement quand on estime que le vin vieillira particulièrement bien.

Nous nous retrouvons plus de cinquante au pied de la Tour Eiffel, de multiples nationalités et le minuscule ascenseur du restaurant Jules Verne nous monte au deuxième étage de la Tour. Les trois quarts du restaurant exploité par Alain Ducasse ont été privatisés. De 10h45 à 12h00 environ, nous allons goûter douze millésimes du R.D., guidés par Mathieu Kaufmann le maître de chai. Il y a dans la salle les filiales internationales de Bollinger et beaucoup d’écrivains et journalistes du vin d’Allemagne, d’Espagne, du Japon, de Russie, de Chine, d’Australie et de beaucoup d’autres pays. J’ai la chance d’être assis à côté de Jérôme Philipon, président de Bollinger.

Une dégustation étant progressive, chaque étape est influencée par les étapes précédentes. Le récit qui va suivre est écrit en temps réel, comme mon palais ressent chaque vin. Un ordre différent aurait pu changer des appréciations, marginalement sans doute, mais un classement différent eut été possible.

Voyons ce qui s’est passé. Il y a forcément des redites, des doublons, car ce que je ressens est inscrit au fil de la plume. Tous les vins ont été dégorgés le 11 mars 2011, sauf le dernier vin. J’ai demandé à Matthieu avant l’exercice si quatre mois de dégorgement étaient suffisants pour exprimer l’âme de chaque vin. Il m’a affirmé que oui.

Champagne Bollinger R.D. 1997 : couleur très claire, nez très intense, profond, complexe, toasté. La bouche est épaisse, brioche et beurre. Le final est très gras, épais. Ce vin est extrêmement qualitatif. J’aime beaucoup et c’et plus solide et structuré que l’image que je me suis forgée de 1997. Il est gourmand et donne soif. Un très joli fruit rouge apparaît plus tard, en plus de du caramel, du beurre et de la brioche. Grand vin.

Champagne Bollinger R.D. 1996 : il est un peu plus doré que le 1997. Le nez est un peu moins tendu,, plus charmeur mais intense. Le vin est noble et joue plus sur son charme. Il y a beaucoup de citron et de fruits blancs. Il y a de la légèreté. On est plus dans le fruit et les fleurs que le 1997 qui est dans les brioches et viennoiseries. Le final est moins long que celui du 1997. Le 1996 est beaucoup plus complexe que le 1997 mais le 1997 semble dans un état de grâce que n’a pas ce 1996. Le final est poivré. Le vin devient de plus en plus grand, plus féminin que le 1997.

Champagne Bollinger R.D. 1995 : la couleur est belle, d’un or qui n’a aucun signe d’âge. Le nez est extrêmement discret, délicat et raffiné. L’attaque est belle, et ce 1995 est un R.D. classique. Il y a une légère amertume. Il évoque la groseille à maquereau, la groseille, les fruits blancs et jaunes, avec du poivre et une légère astringence. C’est le plus strict des trois mais il doit bien s’éveiller sur des plats qui le provoquent. Il s’épanouit dans le verre et son final est racé.

Champagne Bollinger R.D. 1990 : la couleur est un peu plus dorée, la bulle est fine. Le nez est minéral et explose de champignons comme la morille. Le goût est très toasté, beurre, croissant, fumé. Mais le champignon est beaucoup trop envahissant dans le goût et dans le final, ce qui limite le plaisir.

A ce stade, mon classement est : 97, 96, 95, 90, le 96 étant le plus complexe et le plus prometteur, mais le 97 étant d’un bel épanouissement à ce stade de sa vie.

Champagne Bollinger R.D. 1988 : son parfum, c’est l’état de grâce. C’est le nez parfait. La couleur est très jeune, sans signe d’âge. En bouche, on a le croissant, le beurre, les fruits confits. C’est un champagne parfait car en lui tout est équilibré. J’adore ce champagne épanoui et plein de charme au final glorieux. J’écris sur mon cahier de dégustation : « ça c’est du champagne ». Il est gourmand, plaisant. On ne se pose pas de question, on en jouit. L’acidité est parfaitement intégrée et la trace en bouche est parfaite.

Champagne Bollinger R.D. 1985 : le nez est d’une rare élégance, féminin. La couleur est très jeune. En bouche, quelle élégance ! On sent du fumé et un léger champignon comme avec le 1990, un peu de torréfaction et de café. Il est moins glorieux que le 88, mais il est bon.

Je classe à ce stade : 88, 97, 96, 85, 95, 90.

Champagne Bollinger R.D. 1979 : la couleur est aussi très jeune, sans signe d’âge. Le nez est fort, puissant, montrant son alcool. Mais il sait aussi être élégant et sans signe d’âge. En bouche, c’est la grâce ! On perçoit le pain toasté, la brioche. Il est à la fois élégant et gourmand. Il joue dans la même ligue que le 88. C’est un très grand champagne au final à la fois légèrement amer et gras. Matthieu suggère de la rhubarbe dans son goût. J’adore ce champagne.

Le 1985 amorçant un « come back » en perdant son champignon et en gagnant en élégance, je classe : 88, 79, 85, 97, 96, 95, 90.

Champagne Bollinger R.D. 1976 : l’or est clair et très joli. Le nez est très élégant, très champagne, c’est-à-dire qu’on sent le picotement de la bulle dans le parfum. Le goût est très équilibré. C’est un champagne magnifique d’élégance et de raffinement. C’est un grand champagne qui n’en fait pas trop. Il n’a pas besoin de montrer ses biscotos, il est élégant surtout. Son final est raffiné, c’est la classe. Les fruits blancs, le fumé léger, tout est suggéré en douceur. L’équilibre est parfait, le final est profond, long, plus lourd. C’est immense. Il est très grand.

Je classe : 88, 76, 79, 85, 97, 96, 95, 90. Les jeunets qui satisfaisaient joliment mes envies reculent dans le classement à chaque arrivée de merveilles.

Champagne Bollinger R.D. 1966 : la couleur est la première qui montre un signe de début d’évolution. L’or devient légèrement ambré. La couleur est très belle. Le nez évoque des fruits orangés. Il est très élégant mais fait un peu évolué. En bouche il est tout en retenue, élégant. Les fruits confits apparaissent. Le final est riche et gourmand. Il est hypersophistiqué et intéressant. C’est un champagne qui ne peut pas laisser indifférent. Il est très grand et j’aime l’explosion de sa complexité. Il est à la fois discret et émouvant. Il est très grand et je l’adore.

Champagne Bollinger R.D. 1961 : son bel or fait moins âgé que le 1966. La couleur est très jeune et la bulle est active. Le nez est discret mais sait être intense quand on respire à fond. Le vin est gourmand, équilibré, très bon, mais un peu simplifié. Il est toasté, brioche, chaleureux. Matthieu nous dit que c’est une bonne surprise. C’est le toast qui s’impose dans le goût. Il a un sacré charme.

Je classe : 88, 66, 76, 79, 61, 85, 97, 96, 95, 90.

Champagne Bollinger R.D. 1959 : le bel or est un peu plus strict. Le nez est de miel, puissant et intense. En bouche, c’est glorieux. C’est un immense champagne, d’un équilibre invraisemblable. Il a tout pour lui, très intégré. Il est toast, brioche et fruits jaunes. Le final est riche de miel. J’essaie un autre 1959 au goût de miel, encore meilleur au final plus précis.

Champagne Bollinger R.D. 1952 : celui-ci est le seul qui n’ait pas été dégorgé le 11 mars 2001, mais en 1961, l’année où il fut décidé de créer le R.D.. C’est donc le premier R.D. qui ait été jamais fait. La couleur est d’un or glorieux. Le nez est très minéral. C’est le premier des douze dont le nez a un petit aspect riesling de pierre à fusil. Il évolue ensuite vers le miel. Le vin est fantastique. Il est incroyablement gourmand. C’est la perfection de Bollinger, faite de miel et de gourmandise. Il a tout pour lui, le fruit, mais aussi la brioche, le chocolat et le café. C’est un petit-déjeuner à lui tout seul ! par rapport aux autres, il est plus doux, car il a probablement été plus dosé à cette époque que les 11 qui ont été en mars dosés à quatre grammes.

Mon classement final est : 1952, 1988, 1966, 1959, 1976, 1979, 1961, 1985, 1997, 1996, 1995, 1990.

C e classement ne rend pas justice aux plus jeunes, mais les plus anciens montrent un tel épanouissement qu’il est logique qu’ils soient en tête. Si Bollinger avait voulu faire la démonstration de la pertinence du concept de « récemment dégorgé », c’est réussi, puisque les anciens champagnes ont une vitalité extrême. Il faut donc qu’il y ait des R.D.. Mais comme c’est le 1952 qui gagne la compétition, cela démontre aussi que Bollinger vieillit bien, même quand il a été dégorgé il y a longtemps.

Ce qui m’a frappé aussi, c’est qu’il n’y a pas un style unique Bollinger. Il y a des tendances, certains allant vers la brioche quand d’autres vont vers les fruits. On a donc à chaque millésime un Bollinger nouveau. Mais la caractéristique de fond, c’est une extrême qualité du vin, une grande précision, un équilibre qui s’affine avec l’âge. On est dans le monde de l’élite du champagne.

Après cette « lourde épreuve » car elle fut studieuse, nous nous égayons au deuxième étage de la Tour Eiffel en rafraîchissant notre palais avec un Champagne Bollinger Spécial Cuvée magnum sans année qui glisse aimablement en bouche. A ce moment, il n’est plus question d’analyser, mais de profiter des délicieux canapés qui nous sont proposés à profusion.

Nous passons à table, et là où je suis, on voit Paris à perte de vue. Près de moi, un russe organisateur de voyages, un espagnol qui écrit sur le vin, une japonaise qui écrit sur le vin et la gastronomie comme un allemand aussi très proche. De quoi avons-nous bavardé ? De vin bien sûr.

Le menu conçu par le restaurant Jules verne est le suivant : langoustines rafraîchies au caviar / homard de nos côtes court-bouillonné, légumes primeurs acidulés / blanc de turbot doré en cocotte, artichauts violets et premières figues de Provence / pigeon en crapaudine cuit au sautoir, févettes et petits pois à la française / brie de Meaux, jeunes salades / vacherin citron-fraises des bois.

Le moins qu’on puisse die, c’est que je fus déçu. Car c’est très Ducasse, très politiquement correct, destiné à ne froisser aucun palais, alors ça reste d’un rare froideur. Le homard est anesthésié par les légumes trop acides, le turbot est inexpressif et le pigeon n’a pas d’âme. Autant le service est impeccable et attentionné, autant les sommeliers ont été remarquables d’efficacité, autant cette cuisine qui joue en dedans a raté sa cible à force de trop de prudence. Le potentiel existe. Mais il faut aussi savoir monter au filet.

Le Champagne Bollinger Spécial Cuvée magnum sans année est un très agréable champagne, joli compagnon de gastronomie. Le Champagne Bollinger Grande Année rosé 2002 ne parle pas beaucoup à mon cœur, mais je ne suis pas un grand fan des rosés. Le Champagne Bollinger R.D. 1997 confirme l’excellente impression qu’il m’avait donnée lors de la verticale et s’élargit lorsqu’il est confronté à de la nourriture. Présenté en vin surprise, le Champagne Bollinger R.D. 1975 qui est donc le 13ème R.D. de la journée est absolument immense et montre un saut gustatif énorme par rapport au 1997. Le R.D. est donc un champagne qu’il faut savoir laisser vieillir, car cela lui va bien. Le Champagne Bollinger rosé sans année ne m’a pas plus parlé que le rosé précédent.

Il se trouve que Bollinger est associé depuis quarante ans au nom de James Bond et si le 1975 a été servi à table, c’est un clin d’œil, car dans l’un des films, James Bond est dans ce lieu, au Jules Verne, et boit du Champagne Bollinger 1975. Les propriétaires de la marque James Bond sont présents, et Jérôme Philipon leur offre un meuble à tiroirs dessiné par un décorateur connu qui comporte les douze R.D. que nous avons bus. L’adjoint de Jérôme a fait réaliser en secret douze meubles identiques numérotés de 001 à 012. Avec une évidence plaisante, Jérôme a offert à la famille associée à Bollinger depuis quarante ans le meuble numéroté 007. Ces meubles se retrouveront très sûrement dans des ventes de charité.

La maison de champagne Bollinger a voulu célébrer 50 ans du R.D. et le montrer à des acheteurs et écrivains de très nombreux pays. La démonstration fut extrêmement convaincante. Bollinger est résolument un grand champagne à la diversité de goût que je n’imaginais pas aussi grande. Et vive les vieux !

site : zoomvino.fr mercredi, 29 juin 2011

Lino SAENZ m’a envoyé un message au sujet de « zoomvino », son site. Comme il me demande de parler de son site, je le fais, en toute neutralité puisque je n’ai pas fait une étude spécifique du site.

Il me dit :  » zoomvino est une nouvelle plateforme de communication en ligne entre vignerons et acheteurs de vins, qui répertorie les vignobles de plus de 50 pays, 250 régions et 1700 appellations. La plupart des vignerons actifs sur le plan commercial et vendant en bouteille y sont déjà présents, et leur nombre ne cesse d‘augmenter de jour en jour. La plateforme contient aussi un guide des vins du monde, zoomvino Buzz, pour tous ceux qui souhaitent acheter directement auprès des vignerons et faire des visites de caves ».

Voici un lien vers zoomvino: https://www.zoomvino.fr/

Bonne chance à ce site.

dîner d’amitié avec une grande Romanée Conti 1981 vendredi, 24 juin 2011

Luc est un ami de moyenne date, amoureux des nombres et des vins, à la culture œnologique quasi infinie. Il a un palais sûr et j’aime goûter avec lui. Pour ses cinquante ans, il nous avait traités au restaurant Taillevent avec une Romanée Conti 1981. Depuis, il s’est marié, ce qui a été le prétexte d’une fête grandiose. Aujourd’hui, pour fêter son premier enfant, un fils de cinq jours et sans nom pendant huit jours, selon la tradition de ses ancêtres, il décide de récidiver en nous invitant au restaurant Taillevent et une nouvelle fois avec une Romanée Conti 1981. En cours de repas, je lui ai suggéré de procréer encore dix fois, et si possible des jumeaux, pour que nous goûtions la Romanée Conti en magnum.

Nous sommes huit, tous amoureux du vin. Je suis le seul en smoking, car Luc ayant envoyé un SMS disant « tenue de soirée », j’ai imaginé qu’il était impossible qu’un mathématicien de son calibre ne soit pas précis sur les termes employés. Arrivé en avance, je vois un jeune homme poussant un lourd violoncelle qui s’annonce pour la table de Luc. Jean-Marie Ancher le regarde avec stupeur et lui dit « vous n’avez pas l’intention de jouer ce soir », d’un ton qui exclut la possibilité d’un choix. Les convives arrivent et tout à coup, alors que nous prenons le frais sur le trottoir, la mère arrive avec son poussinet de cinq jours que nous photographions en félicitant les parents. Etre ‘client’ de Taillevent à l’âge de cinq jours, cela tient du record. Mère et enfant nous quittent et nous fêtons parents et enfants en trinquant sur un Champagne Taittinger Collection Vasarely 1978 difficile à servir pour le sommelier puisqu’on ne voit pas le niveau dans la bouteille d’un or métallique. La couleur du vin est d’un bel or, montrant un discret signe d’évolution. En bouche, le vin est riche, d’un raisin précis et fruité. La puissance est forte et ce qui est curieux, c’est que l’explosion de fruits jaunes en bouche n’est pas suivie d’un long final. C’est un champagne racé et joyeux que nous dégustons sur des gougères données comme le pain et le beurre à profusion.

Le menu conçu par Alain Solivérès : épeautre du pays de Sault en risotto aux girolles / bar de ligne, crustacés en radis noir, crème de romaine au basilic / poulet fermier des Landes rôti en pipérade / mignon de veau au lait rôti, légumes primeurs à la marjolaine / tomme de brebis, marmelade d’abricot / fourme d’Ambert au pruneau / douceur de chocolat et de caramel au beurre salé.

Le Château Haut-Brion blanc 1981 a un nez de grande profondeur. En bouche ce vin est authentiquement Haut-Brion, avec un niveau très supérieur à ce que l’année 1981 suppose. Le vin est riche, complexe, kaléidoscopique, et forme avec les girolles à la mâche remarquable un accord plus que pertinent. J’ai trouvé que le plat d’épeautre, emblématique du restaurant, est plus précis dans son expression en bouche que le vin généreux.

Le Montrachet Bouchard Père & Fils 1985 est une énigme pour nous tous. Au début, j’ai cru à un nez de bouchon, mais ce sont en fait des herbes odorantes ou de la pivoine qui viennent marquer le parfum de ce montrachet qui est tout sauf orthodoxe. Par moment, on reconnaît le style Bouchard, mais pas le style d’un montrachet de Bouchard. Même si l’accord avec le bar se trouve, on ne peut pas dire que ce vin soit plaisant. C’est dommage, car ce Montrachet aurait dû être un sommet du repas.

Le Vega Sicilia Unico 1981 forme un contraste majeur avec le 1989 que j’ai bu il y a à peine trois jours. Le nez est discret et noble, et alors que j’avais en bouche une bombe de fruits, ce 1981 est d’un raffinement poli assez extraordinaire. Ce vin est élégant, d’une structure parfaite. Il est presque délicat tant il joue les gentlemen. J’adore quand ce vin qui peut être surpuissant joue sur un registre de distinction et d’élégance sur une structure harmonieuse. L’accord sur le poulet est cohérent, aussi bien sur la chair seule que sur la pipérade, mais il n’entraîne pas de véritable choc émotionnel.

Nous étions plusieurs à avoir déjà partagé une Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1981 avec Luc. Instantanément, nous savons que celle-ci est supérieure à celle que nous avons bue, qui était déjà émouvante. Luc trouve des pétales de roses dans le parfum de ce vin, mais ce n’est pas ce qui me frappe le plus. C’est l’intensité du message qui me subjugue. Ce parfum délicat, profond, complexe est comme l’assemblage le plus créatif d’un grand parfumeur. En bouche, deux choses s’imposent : la complexité et la longueur infinie. Mes amis s’extasient et commentent leurs plaisirs mais je préfère me taire, pour essayer de capter tout ce que je peux d’un message extraordinairement complexe. Une image qui me vient est celle d’un jeu d’orgues dans une cathédrale. Ces alignements de colonnes imposantes, c’est ce que je ressens. Ensuite, je perçois le sel qui est si caractéristique des vins de la Romanée Conti, même s’il est plus discret que sur d’autres Romanée Conti. Puis, au-delà de la minéralité, les feuilles et les branches, le végétal brun, se présentent comme des infusions raffinées. Puis, on chasse les images, et on se laisse embarquer dans un parcours en bouche qui tient du bobsleigh, avec un final quasi inextinguible. On aime ce vin parce qu’il transcende toute notion sur le vin. Il n’y a aucune recherche de charme, de séduction. C’est une grande complexité développée sur la rose, le sel, le poivre, les épices rares mais discrètes, et des infusions aux herbes inconnues. En un mot, c’est le bonheur total. Je suis ravi qu’il y ait un accord couleur sur couleur puisque le rose du mignon de veau d’une tendreté extrême est proche du rose de cette Romanée Conti, mais c’est un plaisir de voir que le vin s’allie aussi aux légumes nouveaux croquants.

Autour de la table, on sent comme une fébrilité, car nous tenons dans nos verres une grande Romanée Conti.

Le vin suivant, destiné au fromage est un Ermitage de l’Orée Chapoutier 1991. J’entends autour de moi que l’on vante les qualités de ce vin, mais je ne mords pas du tout. Il est aqueux en milieu de bouche, car il manque de consistance. Il est déroutant, nous emmenant sur les routes de tous les vignobles de France, tant il est indéfinissable. On dirait Château Grillet ou un vin oxydatif au fumé prononcé. Il faut dire qu’il n’est pas aidé par le fromage qui évoque irrésistiblement la Vache Qui Rit, et dont l’accompagnement à l’abricot est hors sujet. C’est objectivement un problème de fatigue excessive de la bouteille.

Luc pesant au trébuchet ses apports de vins quand il invite, il est peu envisageable de glisser un vin dans son programme. Aussi la question était-elle pour moi de choisir un vin qui ne se refuse pas et qui ne porte pas ombrage à ses vins et ne les trouble pas. C’est un vin acheté du jour que j’ai apporté : Château Rabaud Brossault & Co 1/2 bt 1896. Le niveau est superbe, la couleur est d’un or glorieux et quand le bouchon est tiré, il libère un parfum exceptionnel fait d’agrumes confits aux poivres. Jean-Marie Ancher nous a fait préparer en impromptu de la fourme d’Ambert flanquée d’un pruneau au banyuls qu’il sera opportun d’éviter. Le sauternes est sublime, n’ayons pas peur des mots. Il n’a pas d’âge, lui qui est plus que centenaire, tant il est fringuant. C’est un délice pur. Il a tout, équilibre, puissance, sensualité, final tonitruant. Tout le monde l’a adoré.

Le Porto Medieval Port 1900 est une curiosité. Le début de la bouteille est d’une couleur de terre rose, et la fin de la bouteille d’un noir riche. Le goût est objectivement de porto, sans doute enrichi à la mise en bouteille il y a environ soixante ans. Le vin est plaisant, mais l’alcool ressort trop. Le vin accompagne divinement bien le chocolat, mais avec le caramel beaucoup trop sucré, l’accord ne se fait pas.

Selon une tradition propre à Taillevent, Jean-Marie nous offre d’un Armagnac en pot de 3 litres 1947 absolument délicieux, riche et fort en alcool mais qui ne le montre pas tant il est accueillant.

Nous n’avons pas formellement voté, mais Jean-Philippe mettrait en 1 ex-æquo La Romanée Conti et le Château Rabaud, ce qui est un honneur que j’apprécie pour ce beau sauternes, puis Haut-Brion blanc et Vega Sicilia Unico. Il est rejoint par beaucoup d’amis sur le fait de classer Haut-Brion avant Vega Sicilia, mais ce n’est pas mon cas. Mon vote est 1 – Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1981, 2 – Château Rabaud Brossault & Co 1/2 bt 1896, 3 – Vega Sicilia Unico 1981, 4 – Château Haut-Brion blanc 1981, 5 – Champagne Taittinger Collection Vasarely 1978.

Les deux plus beaux plats sont : 1 – épeautre du pays de Sault en risotto aux girolles, 2 – mignon de veau au lait rôti, légumes primeurs à la marjolaine. Les autres plats ont créé moins d’émotion. Le grand moment fut évidemment de communier avec une grande Romanée Conti et de célébrer la naissance du fils d’un ami. Mais nous n’allions pas en rester là. Car l’ami qui avait apporté son violoncelle n’allait pas repartir comme cela. Avec l’autorisation de Jean-Marie Ancher il a joué de magnifiques pièces de Bach d’une grande sensibilité, ce qui prouve que notre consommation d’alcool ce soir est restée dans les limites des facultés artistiques des participants. Des personnes qui dînaient tranquillement au restaurant sont venues grossir le lot des spectateurs de ce mini-bœuf. La joie a accompagné tout du long un grand dîner d’amitié.

dîner au restaurant Taillevent vendredi, 24 juin 2011

les vins : Champagne Taittinger Collection Vasarely 1978

Château Haut-Brion blanc 1981

Montrachet Bouchard Père & Fils 1985

Vega Sicilia Unico 1981

Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1981

Ermitage de l’Orée Chapoutier 1991

Château Rabaud Brossault & Co 1/2 bt 1896

Porto Medieval Port 1900

Armagnac en pot de 3 litres 1947 (pas de photo)

Les plats

les vins en fin de repas

la joyeuse équipe

Luc près de ses vins

François qui a joué de beaux morceaux sur son violoncelle

chez Yvan Roux et chez moi – les vins lundi, 20 juin 2011

Champagne Krug Grande Cuvée

Chateau Laville Haut-Brion 1967

Champagne Roses de Jeanne Pinot Blanc La Bolorée Cédric Bouchard 2005

Chateau Rayas 1988

les autres vins du dîner chez Yvan Roux sont dans les photos de groupe. Les vins du lendemain chez moi : Champagne salon 1997

Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996

Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 1999

Côte Rôtie La Mouline Guigal 1996

Vega Sicilia Unico 1989

Single Cask Malt Whisky Karuizawa 1967

Sacrilège ! J’ai collé l’étiquette du camembert Jort sur la bouteille Pol Roger ! C’est parce que l’accord était parfait.

Chez Yvan Roux, photos lundi, 20 juin 2011

L’impressionnant apport de vins

d’autres photos de groupes

Yvan Roux veut absolument que la serviette de Michel Troisgros soit sur la photo

la table où nous dînerons

les bouchons du soir et du lendemain midi

les préparatifs et les plats

le lendemain midi

notre joyeux groupe du lendemain, sans Jonathan et sans Jeremy

dîner chez Yvan Roux et déjeuner dans le sud avec des vins emblématiques lundi, 20 juin 2011

Jonathan est un jeune amateur de vin qui est parti vivre en Australie. Quand il revient en France, c’est l’occasion de retrouvailles vineuses. L’idée avait été lancée que nous allions chez Yvan Roux, le magicien des poissons, pour dîner au solstice d’été, le jour le plus long de l’année. Nous agrégeons quelques fous de vins, les propositions de vins pour cet événement sont folles elles aussi, et largement surnuméraires.

Il fait beau, tous se regroupent devant la piscine de ma maison du sud et malgré un programme abondant, j’ouvre un vin qui n’avait pas été prévu, un Champagne Krug Grande Cuvée sans année d’environ vingt-cinq ans, car l’étiquette est d’une ancienne génération de l’étiquetage de ce vin. Le pschitt n’est pas très fort mais réel, la bulle est belle, et ce champagne un peu évolué est d’une noblesse particulière. Il est racé, tendu, précis, à la trace en bouche extrême.

Nous sommes neuf, dont deux femmes qui ne boivent pas, la mienne et celle de mon ami japonais, et nous arrivons chez Yvan pour contempler le paysage unique de la baie de Giens. J’aligne pour la photo quinze flacons dont un magnum, avec la ferme intention de n’en ouvrir qu’un nombre raisonnable, mais avec de tels lascars, la raison est bâillonnée.

Nous commençons par le Champagne Salon magnum 1995. Ce champagne est merveilleusement confortable. On chausse ses pantoufles, on s’effondre dans un lourd fauteuil et l’on est sur le nuage du monde de Salon. Ce 1995 est à un moment idéal de sa vie. Il est encore en pleine jeunesse, il n’a pas de signe d’évolution, et il est serein. Il n’en dit pas plus qu’il ne faut, car il joue comme Federer, sans donner l’impression de se presser. Je suis conquis par son équilibre.

Yvan nous a préparé ce menu : tempura de fleur de courgette, tempura de sauge, tempura de lotte / seiches en papillotes au chorizo de Pata Negra et confit d’échalotes déglacées au Martini Dry / chorizo en tranches / carpaccio de denti et suprêmes de pamplemousse / chapon à l’ail confit / langouste aux lardons / moelleux au chocolat, caramel au beurre salé et glace vanille.

Yvan a fait une cuisine très lisible, idéale pour créer de beaux accords.

Le Château Laville Haut-Brion 1967 est d’une couleur d’une folle jeunesse. Son parfum est précieux et en bouche, c’est un beau vin. Il n’est peut-être pas flamboyant, mais il est riche et précis. Nous l’adorons sur les seiches au gout prononcé. Le Puligny-Montrachet Louis Chevallier 1964 est bouchonné aussi est-il suivi par un vin grec qu’un ami a apporté pour contribuer à la réduction de la dette grecque : Ilios, vin blanc sec de Rhodes 1987. La réduction de la dette est pratiquement le seul avantage de ce vin qui ne nous a pas inspirés.

L’ Hermitage Chave blanc 1989 est d’une toute autre trempe. C’est un vin solide, carré, en pleine possession de ses moyens, avec un langage épuré comme savent l’avoir les vins du Rhône.

Il faut avoir la foi du charbonnier pour reconnaître qu’il s’agit d’un Hermitage Chave blanc 1983, car la bouteille lourdement empoussiérée est plus noire que la face d’un charbonnier. Elle a séjourné depuis son enfance dans la cave bourguignonne du domaine Dujac dans des conditions idéales. Et cela se traduit par un vin sublime, qui transcende le message du 1989. Ce vin a tout pour lui, avec un fruit extrême et une mâche délicieuse. C’est un vin de bonheur. Il sera mon préféré de ce soir.

Je ne connaissais pas l’existence du Champagne Roses de Jeanne Pinot Blanc La Bolorée Cédric Bouchard 2005, champagne ultra confidentiel. Ceux qui le connaissaient en attendaient beaucoup. Si j’ai aimé l’extrême précision de ce champagne, je ne peux pas dire que j’ai été gagné par une énorme émotion. Ce vin est grand, propre, racé, mais il manque de folie.

Nous allons passer maintenant à une confrontation de trois vins sur le chapon. A gauche, le Clos de la Roche domaine Dujac 1978 a un nez bourguignon tonitruant. En bouche, il est follement bourguignon, avec énormément de matière et de séduction, mais je ne le trouve pas assez précis, ce qui va un peu limiter le plaisir. Au centre, le Château Rayas rouge 1988 servi un peu chaud montre trop son alcool aussi ce vin est celui qui me rebute le plus au départ. Mais la soirée se rafraîchissant, le vin s’est transformé, prenant un charme exceptionnel. Il y a une intelligence dans ce vin au discours galant qui force le respect. C’est un vin de grande tenue, jeune, riche et avenant. La Côte Rôtie La Landonne Guigal 1979 complète bien la trilogie, car c’est une Landonne calme, relativement discrète. Elle a énormément de charme, et sa subtilité soutient la comparaison avec les deux autres vins. Jeremy avait apporté deux vins de Dujac aussi avons-nous, sur son insistance, bu le deuxième Clos de la Roche domaine Dujac 1978 au style très comparable au premier, certains d’entre nous préférant la première et d’autres la seconde bouteille. Après ces quatre vins de très grande qualité, mon choix est : 1 – Rayas, 2 – Landonne et 3 – les deux Dujac. Nous avons conscience d’avoir côtoyé de très grands vins, le Rayas en Chateauneuf-du-Pape très stylisé, équilibré et profond, la Landonne en charme et en équilibre aussi, et les deux Clos de la Roche, terriblement bourguignons, fous d’évocations brillantes mais à qui il a manqué un petit zest de squelette.

Deux rouges non ouverts seront pour demain et nous passons sur le dessert au Château Climens 1962 à l’or blond et toute la grâce de Climens. C’est un très grand Barsac, riche, fruité, intense, ravissant de fraîcheur.

Comme si nous n’étions pas rassasiés, nous avons ouvert un très rare whisky Single Cask Malt Whisky Karuizawa 1967 qui titre la bagatelle de 58,4°. Fruité, il ne donne pas l’impression d’alcool. Nous n’avons fait que tremper nos lèvres, car un déjeuner est prévu chez moi le lendemain.

Ce fut une fois de plus un beau repas chez Yvan Roux dans un cadre enchanteur dont nous avons profité en cette longue veillée. Les saveurs les plus belles ont été, à mon goût le tempura de lotte et le carpaccio de denti. Mais la vedette était aux vins, avec mon classement : 1 – Hermitage Chave blanc 1983, 2 – Rayas 1988, 3 – La landonne Guigal 1979, 4 – Salon magnum 1995, 5 – Climens 1962. Il aurait fallu inscrire aussi le Krug, mais il avait été bu en un autre lieu.

La nuit fut rude, car nous avions beaucoup bu. Les arrivées s’échelonnent et nous voilà repartis pour une folle équipée. Nous ne sommes plus que sept, dont cinq buveurs au déjeuner dans notre maison du sud. Au programme nous trouverons, boutargue, Cecina de Leon, Côtes de bœuf cuites à la plancha avec des pommes de terre en dés, cuites aux herbes du jardin, camembert Jort, Salers et petits chèvres, salade de fruit, cake japonais au thé vert et cerises, et petits fours.

Le Champagne Salon 1997 est délicieusement floral. Il est romantique, un peu puceau, et n’a pas l’assise tranquille du 1995 d’hier. Mais il est charmant dans sa grâce légère. Le contraste est très fort avec le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 plus dosé et plus affirmé que le Salon, au fruit lourd. C’est un champagne puissant, fonceur comme Churchill.

Il nous restait deux rouges du programme officiel, mais pour copier le schéma d’hier, j’ai rajouté un vin espagnol pour que la confrontation se fasse à trois vins.

Le Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 1999 est un grand vin subtil qui joue un peu dans la discrétion. Très fin et racé, il se boit bien, mais on aimerait qu’il appuie un peu sur l’accélérateur. La Côte Rôtie La Mouline Guigal 1996 est l’archétype du charme des vins de Guigal dans leur jeunesse. Il est rond, fruité, bien dans sa peau, sûr de lui. Son final très frais est mentholé.

Mais à côté des deux, le Vega Sicilia Unico 1989 est d’une insolente perfection. Si Robert Parker a influencé beaucoup de vignerons pour qu’ils fassent des vins boisés, très mûrs, directs et sans chichis, ce vin espagnol est la sublimation de l’idéal parkérien. Ce vin a tout pour lui, avec une précision horlogère. Le nez est riche avec un cassis subtil, la mâche est allègre, car la force se combine avec une étonnante fraîcheur. Le vin lourd et complexe glisse en bouche et dégage comme la Mouline une fraîcheur mentholée d’une rare élégance. On est dans l’excellence, et ce vin résolument moderne mais maîtrisé est mon gagnant sur ces deux jours. Mes amis sont étonnés que le Vega Sicilia aille aussi bien avec le camembert Jort délicieux. Ce fromage se marie aussi bien avec le Pol Roger.

Le classement des trois rouges est naturel : 1 – Vega Sicilia Unico 1989, 2 – Côte Rôtie La Mouline Guigal 1996, 3 – Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 1999.

Au cours de ces deux repas nous avons partagé des vins emblématiques de grande qualité. Ce parcours un peu fou nous a réjouis. Nous avons décidé d’institutionnaliser le dîner du 20 juin, pour profiter lors d’un long soir de joyaux de nos caves.

les cinquante ans de ma promotion jeudi, 16 juin 2011

Peu de jours plus tard, je reviens à Paris pour célébrer avec mes labadens le cinquantième anniversaire de ma promotion de Polytechnique. Exprimé ainsi, cela fait un peu ancêtre pré-néanderthalien ! Nous déjeunons au siège de l’école à Palaiseau, dont les bâtiments sont sales, mal entretenus, impersonnels et froids. Le général commandant l’école nous fait un discours assez déprimant qui montre que les hauts objectifs de l’école voulue par Napoléon vont se dissoudre dans un magma universitaire « Paris Saclay », ce qui n’est pas pour nous plaire. Lors du déjeuner, beaucoup d’amis qui savent vaguement que j’ai un rapport avec le vin me demandent si j’ai apporté des vins pour cette fête.

Le dîner est prévu à « notre » école Polytechnique sur la Montagne Sainte-Geneviève. Arrivant en avance, je passe devant la cave de « de vinis illustribus » qui était, du temps où j’étais à l’école, la célèbre cave de Monsieur Besse, une figure de la profession, avec des trésors de vins anciens. Jamais je n’avais à cette époque jeté un œil sur cette boutique car le vin n’était pas dans mes centres d’intérêt. J’entre dans la boutique et je demande à Lionel Michelin s’il a des vins de 1961. Il me montre quelques bouteilles, et je jette mon dévolu sur un sauternes à la belle couleur dorée sans étiquette, mais au millésime et au nom bien lisibles sur le bouchon. Lors du repas, j’ai partagé le Château Brassens Guiteronde Sauternes 1961 avec des camarades dont certains n’imaginaient pas qu’un vin de cet âge puisse être aussi bon, avec des fruits comme la mangue confite ou l’abricot. Nous nous sommes donné rendez-vous pour les cent ans de la promotion, en espérant tricher et nous retrouver bien avant.

ne jamais boire seul ! samedi, 11 juin 2011

Le repas au restaurant Ledoyen avec six magnums de Lafite à peine terminé, je m’envole vers le sud pour un repos bien mérité. L’année scolaire se termine pour moi, avec des brassées d’événements plus riches et inattendus les uns que les autres. Ma femme me rejoindra plus tard. Le lendemain, seul, un peu âme en peine, je décide d’ouvrir une bouteille, ce que je ne fais jamais quand je suis seul. Un Champagne Veuve Clicquot Ponsardin Brut 1979 me fait de l’œil. Je l’ouvre et le bouchon très chevillé sort trop facilement. Pas de pschitt chiraquien, pas de bulle visible, mais un parfum prometteur annonçant un joli fruit. La première gorgée, malgré une légère amertume, délivre une belle complexité. La vibration sur Cecina de Leon, cette viande de bœuf fumée délicieuse est annonciatrice des plaisirs de l’été.

Est-ce parce que je suis seul, je ne sais, mais je ne vois que les défauts du champagne, qui tiennent au fait que le bouchon trop resserré n’assurait plus l’hermétisme indispensable. Rien n’est plus ennuyeux que de boire seul. Cette expérience ne se reproduira pas.

Cecina de Leon