Chine 2 – arrivée à Pékin et premier jour lundi, 9 mars 2009

L’avion traverse des régions enneigées et désertiques. Il arrive à Pékin par un temps ensoleillé. Les valises tournent sur un carrousel et jamais je n’aurais soupçonné qu’il en eût tant. Le suspense de l’attente des valises est quasi insoutenable et je me rends compte que je ne suis pas fait pour ce stress. Un homme apparemment responsable annonce que toutes les valises ont été déchargées. Je m’inquiète. Quelqu’un me demande mon nom et me dit qu’il figure sur le tableau des bagages perdus. Comment peut-il être déjà inscrit ? J’apprends que la valise n’est jamais partie de Paris, ce qui fait que Pékin a été prévenu. Le responsable des objets perdus m’indique que ma valise sera livrée demain. C’est celle qui contient tous mes vêtements.

Le fils d’un autre ami d’enfance, consultant d’entreprises à Pékin m’a dépêché un chauffeur pour me conduire à l’hôtel, attention que j’apprécie. Lorsque je vois l’affichette à mon nom, j’ai envie de m’épancher sur la perte de ma valise mais le chauffeur ne parle que le chinois. Il me dépose à l’hôtel et lorsque je me présente, on me dit qu’il n’existe aucune réservation à mon nom. Pour prouver l’erreur de la réceptionniste, il me faut ouvrir mon ordinateur portable. Et c’est là qu’il choisit de s’ouvrir deux fois en mode erreur, rendant la tension au comptoir encore plus piquante. Lorsque le mail de confirmation s’affiche, la jolie jeune fille me dit que mon hôtel se situe dans le building d’à côté. Je pense immédiatement à ma valise, car si elle apportée elle aussi au mauvais endroit, je vais passer ma semaine avec des sous-vêtements couleur isabelle.

Un bloc plus loin, une fois les formalités faites, je rentre dans ma chambre. Il y fait une chaleur de sauna. Mon ordinateur se branche sur la connexion câblée de l’hôtel et je constate que si je reçois bien des mails, il n’est pas possible de leur répondre. Au bout de quelques minutes, ma chambre ressemble à la Gare de Lyon un jours de congés d’hiver car on compte : deux informaticiens pour ma connexion internet, un spécialiste du chauffage qui se révélera aussi inefficace que les informaticiens, et une charmante jeune fille apparemment peu farouche puisque l’ayant appelée pour donner au pressing le seul linge que je porte, elle n’éprouve aucun besoin de faire semblant de ne pas regarder lorsque je lui donne les seuls accessoires vestimentaires que j’avais.

En attendant le retour du pressing, je prends une douche, car le trajet en avion en a décuplé l’envie. La pomme de douche est aussi large qu’un parasol, ce qui exclut de jouer les planqués pour passer entre les premières gouttes froides. Par un caprice de la nature, il faut cinq minutes pour que l’eau commence à se réchauffer, l’immeuble n’ayant sans doute pas de circulateur d’eau chaude. Ce moment d’éternité fait réfléchir à la condition humaine. Quand le corps est humide et que l’on se prépare à se savonner virilement, il est normal d’arrêter le jet de la douche. L’inventeur des pommes de douche trop larges devrait être écartelé par quatre chevaux Place de Grèves pour avoir inventé cette torture diabolique. Car une fois l’eau coupée, la pomme distille des gouttes qui font « floc floc » sur le crâne. De fidèles lecteurs pourraient penser que je fais une fixation sur les douches et ce n’est pas faux. Car dans les hôtels, on donne de la place en fonction du tarif choisi, mais l’espace réservé à la douche est riquiqui et l’appareillage, pour faire moderne, devient contraire au confort. Ce moment rare où l’on peut se croire l’égal d’un Caruso ou d’un Pavarotti devrait faire l’objet de tous les soins. Il semble géré plus comme une contrainte que comme un luxe. Combien de fois se pose-t-on la question de savoir où poser sa serviette pour qu’on puisse la saisir sans transformer la place en en une piscine ?

Mon linge revient, mais la jeune fille n’a pas fait laver mes sous-vêtements (je n’invente pas). Aussi vais-je acheter quelques chemises et sous-vêtements en attendant ma valise. La réception de l’hôtel me fait guider par un jeune groom de haute taille. Il est malin, car il me fait acheter avec des rabais que jamais je n’aurais envisagé de demander et il m’amuse car il essaie en permanence de me faire croire que tout me va. Il mémorise ostensiblement les chiffres secrets de ma carte bleue et plonge les yeux et les mains dans ma sacoche.

Je viens reprendre mes aventures informatiques. Celui qui s’annonce comme « l’ingénieur informatique » de l’hôtel m’a gentiment détérioré les fonctions de mon ordinateur ce que j’accueille avec une remarquable zen-attitude. Il est temps de rencontrer une femme chinoise chef d’entreprise et très entreprenante, accompagnée de deux de ses adjoints. Ses sociétés agissent dans le high-tech, mais elle a aussi formé un groupe de vente de vins rares au moyen de caves réparties sur Pékin et Shanghai. Le lien avait été créé par un ami banquier parisien qui travaille avec la Chine. Cette femme respire la volonté de gagner et commente la crise mondiale avec une hauteur de vue bien éloignée des analyses parisiennes où tout est vécu dans des atmosphères de guerres picrocholines. Nous avons envisagé ce qui pourrait créer des liens entre nos activités. Raisonner à l’échelle de la Chine bouleverse toutes les perspectives.

Remonté dans ma chambre, je constate que les rapetassages informatiques vont dans le sens du pire. Aussi bien pour la température dans ma chambre que pour l’informatique ou le débit de l’eau chaude, la bonne volonté de chacun est évidente. Le sourire est sur toutes les lèvres et l’envie de régler les problèmes. Mais l’envie, est-ce suffisant ? Une jeune réceptionniste venue rejoindre ma chambre, puisque c’est le théâtre des opérations sur une grande échelle, m’accompagne pour me faire choisir le restaurant de mon dîner. Mon choix se porte sur un restaurant japonais où mon repas frugal est accompagné d’une bière sèche. 

Quand je remonte dans ma chambre, un appareil de climatisation d’appoint fait le même bruit que les avions de ligne d’avant-guerre et, comme un discours fumeux, il brasse de l’air sans refroidir l’atmosphère.

L’accumulation de ces pépins annonce-t-elle un séjour de grand bonheur ? Je me plonge sous les draps sur cette interrogation.

La seule bonne surprise du lendemain matin : le petit déjeuner

 

Chine 1 – origines du projet et départ dimanche, 8 mars 2009

Les messages qui vont venir concernent un événement qui, je l’espère, va compter dans ma vie : aller faire des dîners de wine-dinners en Chine. Comme dans les films nous allons commencer par un flash back. Un de mes amis balladuriens, c’est-à-dire ami de trente ans, a plusieurs enfants dont un fils qui a mené dans mon entreprise des opérations de conseil. Travaillant à mes côtés, il voit les bulletins qui sortent de l’imprimante, et cela déclenche une forte envie de participer à ces dîners sur lesquels je dithyrambe. Nous faisons volontiers quelques accords de troc : je l’invite à certains de mes dîners ou bien il me commande des repas pour faire plaisir à ses amis ou à ses clients. Il travaille avec une société de conseil internationale et décide d’inviter des associés de ce grand cabinet. Les épouses participent, ce qui donne un caractère amical à la soirée où Eric Fréchon avait réservé pour nous seuls l’ensemble du restaurant d’été de l’hôtel Bristol.

L’événement a plu aux consultants invités puisque peu de mois plus tard ils me demandent de faire un dîner pour honorer l’un de leurs clients chinois. N’étant jamais allé en Chine, l’image du chinois pour moi est très directement liée à Tintin au Tibet et plus encore au Lotus Bleu d’Hergé. Il est assez probable que cette vision date. Quelle n’est pas ma surprise de voir un homme de haute taille, probablement autour d’un mètre quatre-vingt-dix, souriant, n’ayant probablement pas atteint la quarantaine, qui a l’aisance que confère la fréquentation des plus prestigieuses universités américaines ? Le dîner à la Grande Cascade se passe merveilleusement bien, comme si nous étions des amis de toujours, et Desmond, puisqu’il s’appelle ainsi, me demande d’organiser deux dîners pour lui à Pékin.

La gestation de ces événements fut particulièrement laborieuse. Avant mon départ, j’ai bien échangé plus d’un demi-millier de mails pour la mise au point, avec cette caractéristique étrange que le temps de réponse à mes mails fut aussi long que si un coursier marathonien avait porté chaque missive. On n’imagine pas comme la logistique de repas devient dix fois plus complexe lorsque personne ne répond. Rajoutons un décalage horaire de six ou sept heures, et l’on voit que rien n’est simple.

Desmond est un grand amateur de vins, qu’il achète notamment par l’entremise d’un courtier de Hong-Kong. Par précaution, Desmond lui a soumis les vins que j’avais choisi de lui proposer. Comme il fallait s’y attendre, Desmond venait de me fabriquer un adversaire, qui évidemment critiqua mes choix. Y voyait-il une possibilité de concurrence, je ne sais. Entre gens intelligents, les divergences se gommèrent très vite.

Desmond me demanda de faire appel aux services de Daniel Boulud, l’un des tout premiers chefs new-yorkais, qui vient d’installer une Maison Boulud à Pékin. L’idée était particulièrement séduisante et le contact s’est créé entre Daniel Boulud, son chef de Pékin Brian Reimer et moi. J’ai apprécié l’extrême ouverture d’esprit de ce grand chef avec lequel le dialogue fut immédiatement coopératif. Après plusieurs heures d’échanges téléphoniques, il me semble que nous tenons de beaux menus.

Plus que toute autre chose, c’est l’absence de réponse à mes questions qui me stressait. Aussi, pour mon plus grand malheur, ma femme décida de ne pas m’accompagner à Pékin, souhaitant que les plâtres soient essuyés, alors que j’attendais que nous découvrions ensemble ce monde fascinant d’une culture largement plus ancienne que l’européenne.

Toutes les pièces du puzzle s’assemblent petit à petit et me voici partant à Roissy pour Pékin. Pénétrer dans le salon d’attente des voyageurs de première classe ou de business class a un côté délicieusement Ancien Régime. On se sent faire partie d’une caste. Tout le monde est souriant, attentionné, et les belles résolutions de sagesse alimentaire tombent instantanément. Le buffet tend les bras et un champagne Deutz fort agréable est trouvé encore meilleur puisqu’il est bu dans des circonstances d’un élitisme assumé. Monsieur le bourreau, laissez moi encore une coupe !

Mais la tentation de pécher ne vient pas que de l’appartenance supposée à une classe. Car dans l’avion me trouvant assis non pas à côté de ma femme mais d’un quadragénaire habitué des voyages transcontinentaux, les conversations se nouent au point qu’il sera difficile de savoir lequel est le plus bavard des deux. Car mon voisin aime le vin et a vendu du vin dans une partie de sa carrière. Alors, quand il prend un whisky, je prends un whisky, et quand il prend du vin, je prends une bière, car à l’impossible nul n’est tenu : les vins d’Air France ne sont pas ma tasse de thé. Il prend un armagnac et je prends un cognac, croyant soigner un rhume sévère dans la débauche la plus folle.

Air France souhaite la bienvenue, sauf à ma valise. L’un des plats passe-partout du repas Air France

casual Friday au restaurant de Gérard Besson vendredi, 6 mars 2009

Le casual Friday devient une institution. La formule est simple : un groupe d’amis se réunit et apporte des bouteilles pour un déjeuner prolongé. C’est un des plus fidèles qui organise cette fois-ci. La table est retenue au restaurant de Gérard Besson, qui a fait un menu d’une délicatesse remarquée, avec un sens des vins anciens que peu de chefs ont en France. Voici son menu : andouillette varoise / oreille de veau farcie / bar de ligne / feuilleté de lapin de garenne / veau truffé / pigeon bécasse / comté 2005 / tarte, confit d’agrumes.

Nous commençons par le champagne Laurent Perrier Grand Siècle d’une trentaine d’années. Le champagne est d’un or foncé, avec le mûrissement des champagnes âgés. Il nécessite une petite gougère et sa gelée truffée pour qu’on l’apprécie vraiment. C’est un champagne au dosage mesuré, tout en douceur, qui se boit avec plaisir.

Le Juliénas caves Nicolas 1929 est une bien agréable surprise. Car qui penserait qu’un Juliénas de 1929 aurait cette tenue ? Précis, expressif même si le message est simple, il est vraiment convaincant. Sur l’andouillette, c’est un plaisir. Nous allons grimper de plusieurs étages aussi bien avec le plat qu’avec le vin. Car l’oreille de veau farcie est d’un goût envoûtant de chaleur conviviale, et le Côtes du Jura rouge, Bourdy 1945 est tout simplement parfait. Sa couleur est d’un rubis d’une folle jeunesse, et en bouche, le vin est incroyablement précis. Ce n’est pas un vin opulent, c’est un vin direct, droit, net, qui fait plaisir par sa sagesse. En le buvant, je me remémorais le sublime 1947 de la même maison et je pensais qu’il faudrait beaucoup plus souvent boire ces vins rouges du Jura aux émotions inhabituelles. L’accord est très brillant.

Le Corton, Clos des Cortons Faiveley, J. Faiveley 1926 est un vin charmeur et doucereux. L’ami organisateur qui a apporté tous les rouges lance cette phrase : « je n’ai jamais eu de déception avec tous les 1926 que j’ai bus ». Il s’est rendu compte de lui-même du côté légèrement élitiste de son propos. Mais il a raison car 1926 est une année superbe, et ce vin délicat est un petit chef d’œuvre. L’accord avec le bar est certainement un exemple que l’on devrait enseigner dans les écoles de cuisine. Car Gérard Besson a adapté la sauce (il a bu tous les vins, ce qui lui a permis d’ajuster toutes les sauces, pour notre plus grand bonheur), et la continuité gustative entre la sauce et le vin est un miracle.

Le Chambertin Héritiers Latour 1935 se présentait assez fatigué, trouble, d’une vilaine couleur. Il s’est épanoui et mon ami l’aime d’autant plus qu’il était incertain. Le vin est bon et chaleureux mais n’a pas éliminé sa petite fatigue. Le feuilleté de lapin joue le rôle du kinésithérapeute pour les sportifs de haut niveau : il sait effacer les fatigues. Le Vin du Jura Château d’Arlay rouge 1929 est une belle curiosité mais pas beaucoup plus. Car le vin n’évoque plus le Jura et sa fatigue légèrement métallique n’est pas très agréable.

L’Hermitage rouge Jean Louis Chave 1979 est manifestement un grand vin. C’est fou ce qu’il fait bourgogne. Car en s’assagissant, il a trouvé la sérénité bourguignonne. Bien sûr, il n’a pas perdu son ADN régional, mais il a de ces langueurs que l’on ne trouve que dans la Côte de Nuits. La chair du veau truffé m’aura moins tenté que d’autres au cours de ce repas de grande valeur.

La Côte Rôtie La Turque Guigal 1994 a un parcours en bouche que je trouve plutôt calme. Il n’y a aucune volonté d’invasion, il ne veut pas passer en force. Et tout-à-coup, le final claque comme un coup de fouet. C’est un jet de fruits rouges et noirs qui envahit le fond du palais. Quel panache final ! Le traitement de l’oiseau est particulièrement viril. Chez Gérard Besson, le gibier, c’est du gibier.

On nous sert maintenant le champagne Perrier Jouët Brut 1966. Quel trésor. Ce champagne a un charme invraisemblable. Evidemment tout le monde se moque de moi car j’encense plus qu’il ne faudrait le vin que j’ai apporté. La couleur est délicatement ambrée et l’accord avec le comté est tout simplement grandiose. Cette combinaison est de loin la plus belle du repas.

Nous nous sommes interrogés longtemps sur  l’audace d’ouvrir le magnum de Château de Fargues 1961. Car cette bouteille est imposante après le parcours que nous venons d’accomplir. Mais l’autre ami fidèle qui a apporté les liquoreux insiste pour qu’on le boive. Sa couleur est majestueuse de sensualité. Et curieusement pour son âge, le sauternes a déjà mangé une partie de son sucre et se montre discret mais fémininement délicat. La tarte façon grand-mère est une douceur avec le Fargues.

Les mignardises arrivent, mais nous nous concentrons surtout sur les cédrats confits qui accompagnent divinement le Château Climens 1948 extrêmement foncé et d’une noblesse imposante. Ce vin est onctueux, caressant, envoûtant.

Tous les vins ont eu des votes sauf le premier champagne qui n’a pas démérité mais dont la mémoire n’est plus vivace après tant d’heures de bonheur et le vin du Jura de 1929. Six vins ont les honneurs d’avoir été nommés premiers. Le Perrier-Jouët trois fois, le Fargues deux fois, et une fois pour le Climens, La Turque, le Chambertin et le Côtes du Jura. C’est un vote particulièrement dispersé, ce qui montre la qualité des vins.

Le vote du consensus serait : 1 – champagne Perrier Jouët Brut 1966, 2 – Château Climens 1948, 3 – Château de Fargues 1961, 4 – Côtes du Jura rouge, Bourdy 1945.

Mon vote est : 1 – Champagne Perrier Jouët Brut 1966, 2 – Château Climens 1948, 3 – Côtes du Jura rouge, Bourdy 1945, 4 – L’Hermitage rouge Jean Louis Chave 1979.

Gérard Besson a fait un travail de préparation et de cuisine de très haut niveau, car il sait ce que sont les vins anciens. Gilles, un revenant, sommelier de naguère au même endroit, a fait un service des vins attentionné et précis. Nous avons exploré le monde des vins anciens avec de très beaux témoignages. L’école était buissonnière, gentiment dissipée mais amicale et affectueuse. Ce fut un grand moment de communion et de grandes émotions gastronomiques.

L’ami qui a pris le pouvoir pour organiser ce casual Friday a fait un coup de maître. Tout fut parfait.  

déjeuner chez Gérard Besson – les photos vendredi, 6 mars 2009

Les vins apportés par plusieurs amis :

Champagne Laurent Perrier Grand Siècle d’une trentaine d’années

Juliénas caves Nicolas 1929

Côtes du Jura rouge, Bourdy 1945

Corton, Clos des Cortons Faiveley, J. Faiveley 1926

Chambertin Héritiers Latour 1935 (on voit la couleur peu engageante du vin dans le verre, trois heures avant que le vin ne soit bu)

Vin du Château d’Arlay rouge 1929

Hermitage rouge Jean Louis Chave 1979

Côte Rôtie La Turque Guigal 1994

Champagne Perrier Jouët Brut 1966

Magnum de Château de Fargues 1961

Château Climens 1948

L’ami qui a apporté les deux sauternes, sachant que je pars en Chine, m’a offert cette jolie robe (avec chapeau s’il vous plait !) qui s’utilise pour servir le vin à l’aveugle. Ici, elle couvre le Juliénas.

Les plats préparés par Gérard Besson :

Amuse-bouche : gelée truffée et gougère

Andouillette varoise

Oreille de veau farcie

bar de ligne

Feuilleté de lapin de garenne

Veau truffé

Pigeon bécasse

Comté 2005

Tarte, confit d’agrumes

 

Gérard Besson est le prince des sauces.

Meeting with American wine lovers jeudi, 5 mars 2009

Samantha and Trevor Sheehan report on the forum of Robert Parker about wines which sometimes are of a great rarity. I have always been very surprised that so young persons talk with such a maturity about wines which are the dreams of many wine lovers.

When I learned that Samantha and Trevor would visit France, the idea that we meet was formed after exchanging some messages. Trevor makes wine in California and Samantha sells wines in Dallas.

We should meet in the bar of Hotel de Crillon, a place which is nice and also very easy to reach as it is on Place de la Concorde.

I was waiting in the bar, looking at the entrance, and when I saw a very nice young woman, I knew immediately that she should be Samantha. Young and dynamic she comes to shake hand with a very lovely smile.

She has an accent and it is not so easy to understand her as she talks very rapidly. She explains something which I find very confused about her brother who has missed his plane, so she is alone to meet me.

Instantly, I become afraid. Should I be anxious for my virtue and my innocence if I sit there alone with a nice young woman who has certainly invented this story to be alone with me? I tried to behave (1)

The waiter of the bar puts on the table an ice bucket and shows the wine to Samantha. It is a Dom Pérignon 1966. Samantha asks me : “do they keep such a wine in their bar?”. And I must confess that I had brought this bottle with me. The colour of the wine is nearly orange pink. The taste is delicious and I am happy that Samantha likes such a particular taste, so far from the one of a young champagne. When she tells me that she prefers largely old champagnes, I am happy.

We talked and talked, finding so many wines that both of us we have tasted and so many people that we have met. I am impressed by the knowledge of such a young wine lover.

We talked and talked. We have examined how to create possibilities to drink very rare wines together.

What happened next? Morality commands that I don’t talk any more (1).

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(1) every allusion is purely invented.

I was happy to meet a very charming person. Do I regret that Trevor was not with us? May I confess that the answer is “no”.

liquoreux de prestige à Toulouse le 25 avril jeudi, 5 mars 2009

Michel Fauveau est un scientifique ami d’Yquem, que j’ai rencontré plusieurs fois au château d’Yquem.

Il organise une magnifique dégustation des plus grands liquoreux du monde en présence de ceux qui les font.

Il y aura les vins de Kracher, d’Yquem, de Fargues d’Egon Muller, un Tokaji de Hongrie et un Klein Constantia.

Les prospectus donnent des indications sur le programme, les prix et la façon de s’inscrire.

Pour les obtenir, envoyer un mail à : club oenophile du midi [Club.oeno.midi@orange.fr]

Je n’irai pas parce que je suis engagé à ce moment.

Michel Fauveau m’ayant demandé de signaler cet événement, je le fais bien volontiers.

Dessirier mercredi, 4 mars 2009

Dessirier était un restaurant de poissons où l’on mangeait de très bons fruits de mer. La décoration était particulièrement triste, comme dans 99% des restaurants de poisson, car une araignée de mer, un hublot, une tête de scaphandrier, un filet de pêche et un phare, voire une pagaie, ça n’a jamais vraiment été le must en matière d’art.

Depuis la reprise par Michel Rostang, la décoration passe un peu mieux. Elle est suffisamment discrète pour avoir l’intelligence de se faire oublier.

J’étais seul, peu motivé de déjeuner sur le pouce dans mon bureau, aussi ai-je fait une halte en cet endroit. La carte des vins n’est pas stupide du tout et j’ai repéré une ou deux pépites que j’ai l’intention d’aller assécher. Mais aujourd’hui, c’était Saint-Géron, eau minérale que j’ai beaucoup appréciée.

Au cas où je n’aurais pas compris que c’est la saison de la truffe, tout ici est fait pour me le rappeler. Alors, forcément, on cède. J’ai pris des œufs brouillés aux truffes. C’est goûteux, c’est attendu mais c’est bon. Ensuite, c’est une grosse tranche de cabillaud avec des tranches de truffe généreuses, et une purée de pommes de terre truffée. J’adore le cabillaud. Et ce qui est intéressant de constater, c’est que le plus bel accord de la truffe est avec la chair de cabillaud. Car la salinité naturelle du poisson excite parfaitement la truffe.

Le restaurant est assez cher, truffe oblige. Mais c’est une table où je me sens bien.  

Gourmandise dimanche, 1 mars 2009

La gourmandise.

Je suis invité au déjeuner d’un club dont je ne suis pas membre, où l’on vient pour écouter plus que pour manger puisque l’hôte d’honneur est un ministre de la République. C’est au restaurant du Fouquet’s et le chef doit penser qu’il s’agit d’un club d’affamés du Sahel, car les portions sont gargantuesques. Nul, même le plus courageux, ne dépassera la moitié de sa portion d’osso-buco. Le ministre captive, et l’on nous sert en fin de repas un baba au rhum. Ce coussinet de forme torique, fourré en son centre d’une crème légère, fait trempette dans une eau à peine baptisée. Imaginons-le comme une montre dont on suit la course de l’aiguille des minutes. Si j’en mange un quart d’heure, c’est convenable, je n’abuse pas. Je marque une pause, contemplant la forme dissymétrique de l’anneau sectionné d’un quart. Si je m’arrêtais là, j’aurais fait preuve de volonté. Mais esthétiquement parlant, vingt minutes aurait plus de beauté dans l’assiette. Le ministre est passionnant, j’observe mon dessert dont il reste quarante minutes et je décide avec un mâle courage que je ne dépasserai pas la moitié, soit trente minutes de cette horloge en danger. Les trente minutes sont vite atteintes et le ministre parle toujours. Par un geste machinal, comme lorsque l’on balaie d’un revers slicé les miettes sur la nappe, j’entame la deuxième partie du dessert. Je me morigène. Comme lors d’un accident de voiture ou d’un uppercut du droit bien asséné, il arrive que l’on ne se souvienne plus de rien. J’ai cru m’entrapercevoir lorsque je franchissais la ligne des 45 minutes, et puis plus rien. L’assiette est vide. Je n’ai aucun souvenir de ma dernière lâcheté. C’est sans doute que le ministre fut convaincant.

La gourmandise se nourrit aussi de culpabilité.