Les vins du 84ème dîner du 22 mars 2007 jeudi, 22 mars 2007

 

 

 

L’année du Joseph Drouhin est nettement lisible : 1947.

Yquem 1938 n’a pas d’étiquette, mais a un énorme avantage : son bouchon est d’origine et sa couleur splendide

 

A ces vins, j’ai rajouté Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1980, du fait d’un nombre de convives plus important que prévu.

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Alain Senderens, quel talent ! jeudi, 22 mars 2007

Le jour du 84ème dîner de wine-dinners, des amis belges, solides compagnons de table, vont déjeuner chez Alain Senderens. Après avoir dit non, pour me ménager, je les rejoins. Etant en avance, j’ai le temps de bavarder avec Madame Senderens radieuse et de choisir des  pistes pour les vins que nous partagerons. Mon choix est adopté et même amélioré, car j’avais choisi pour le rouge un millésime plus modeste. L’heure était à l’audace.

Nous commençons par un Champagne Clos des Goisses Philipponnat 1989 sur « asperges vertes de Lauris « crues et cuites », tagliatelle de seiche à l’huile épicée ». A noter que sur la carte il est écrit « crûtes et cuites ». L’eusse tu cru ? Le champagne a une belle couleur dorée, une bulle discrète, et son goût intense évoque le miel, la brioche, le soleil. Sur l’asperge croquante, c’est un régal. Le Clos des Goisses a une longueur et une présence exemplaires qui nous réjouissent. Il nous a séduits.

Le Riesling Clos Sainte Hune Trimbach 1981 accompagne un « foie gras de canard poché, dans un bouillon à la chinoise ». La divine chair du foie, aérienne de subtilité, se fond dans ce Riesling extraordinaire. L’âge l’a assemblé comme une montre suisse. Il est précis, chaleureux, profond, intense, joyeux. Il a toutes les qualités.

Les « suprêmes de pigeon rôtis, cuisses en pastilla et navets caramélisés à la cannelle » profitent avec bonheur de la présence du Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape Hommage à Jacques Perrin 1990, vin extraordinaire. Dès la première gorgée, on sait que l’on est dans la perfection absolue. Déviation de l’époque, alors que je ne note jamais les vins, je me mets à penser : « ça, c’est un 100 points Parker ». Mais cette idée est vaine. A quoi sert de résumer ainsi une impression ? Ce qui compte, c’est que ce vin est du plaisir pur en bouche, avec un bois intelligent, avec un fruit joyeux, une mâche généreuse et un bonheur de vivre au-delà de tout.

Par gourmandise, je me suis pâmé sur un « macaron à la rose et au litchi » à se damner tant c’est subtil. Disons le sans détour, Alain Senderens, c’est l’anti Canada Dry : ça n’a pas l’aspect d’un trois étoiles, puisque c’est la voie qu’a choisie le chef,  mais c’est du trois étoiles. Car cette démonstration absolument brillante d’une cuisine simplifiée et magistrale, il n’y qu’Alain pour l’avoir réussie avec ce talent. Trois étoiles à nouveau, ce serait un caprice d’un raffinement rare.

L’heure passant, il était temps de courir chez Patrick Pignol pour ouvrir les bouteilles d’un nouveau dîner merveilleux.

Le millefeuille qui est ici en photo a été choisi par un de mes amis bleges.

Comme c’est l’une des icônes de la cuisine d’Alain Senderens, je me devais de faire figurer cette photo.

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déjeuner de conscrits avec de beaux 1986 mercredi, 21 mars 2007

Tous les deux mois, notre petit groupe de conscrits se retrouve dans un grand cercle parisien. Le Moët & Chandon non millésimé qui a une bonne quinzaine d’années confirme une fois de plus que ces champagnes sont faits pour respirer longtemps l’atmosphère des caves. L’âge leur va bien. Un champagne Laurent Perrier non millésimé beaucoup plus jeune a de l’agrément, mais moins d’expressivité, ce qui est lié à un manque de maturité.

Le Château La Conseillante 1986 est un pomerol accompli. Le nez est serein, et en bouche, tout est assemblé d’une intelligente façon. On se sent bien avec un tel vin. C’est d’un remarquable confort si l’on pense à des vins plus jeunes qui ne peuvent l’offrir. Le Château Lafite-Rothschild 1986 a un nez très boisé. En bouche, le bois est rude, assèche toute expression entrave la sérénité et la rondeur que l’on trouvait avec le pomerol. Mais le vin avait été ouvert au dernier moment. Quand il a eu son oxygène indispensable, il s’est mis à chatoyer comme il doit le faire. Et l’on perçoit alors la richesse de la trame de ce vin précieux. Un Pommery sans année conclut un déjeuner animé où, comme il est d’usage, nous reconstruisons un monde qui n’attendait que nous.

Graves Royal Sec lundi, 19 mars 2007

Le vin de 1912 que nous boirons à Yquem est un "grand vin de château d’Yquem", et sur la capsule est marqué : "Graves Royal Sec", exactement comme sur cette étiquette d’un vin de la même période.

Enigme à creuser …

Un oeil sur Latour dimanche, 18 mars 2007

De la salle de conférences où sont exposées de belles pièces de verre modernes, on peut voir Chateau Latour, le prestigieux voisin.

 J’ai trouvé amusant de montrer la tour de Chateau Latour à travers cette très jolie sculpture en verre d’Ales Vasicek, créateur tchèque intitulée : " L’Oval Totas" 1998.

une bien délicate attention samedi, 17 mars 2007

Lors de la visite du Chateau Pichon Longueville Comtesse de Lalande, nous errons dans les différents sites où sont exposées de belles bouteilles. Un des conférenciers de la veille me dit : "j’ai vu votre nom dans une vitrine". Et je constate avec un infini plaisir que le Maury La Coume du Roy 1925 que j’avais offert à May Eliane de Lencquesaing pour ses 80 ans, car c’est un vin de son année, a été bu en famille, puisque figurent sur l’étiquette de nombreuses signatures. l’avoir rappelé ainsi est une attention fort délicate.

conférences (jour 3) au Chateau de Pichon Comtesse samedi, 17 mars 2007

Pour le troisième jour du colloque nous sommes accueillis par May Eliane de Lencquesaing au château de Pichon Longueville Comtesse de Lalande. Elle avait poussé la gentillesse de suivre les conférences des deux premiers jours et m’avait fait l’honneur de m’expliquer, en aparté amical, les raisons de la vente de son domaine aux propriétaires des champagnes Roederer. Elle va continuer avec son dynamisme à gérer avec Gildas d’Ollone son domaine et à diriger son musée du verre, qui est le prétexte de notre présence. De brillantes conférences donnent des indications sur les caves des riches bourgeois des 18ème et 19ème siècles à Bordeaux et Paris. Je constate que comme dans ma cave la part des vins doux de Chypre, se Sicile, du Cap et autre contrées est fort significative. Il s’agissait donc de caves éclectiques. Le colloque se termine dans la joie, par un buffet debout, après la visite du musée, sur un Pichon Longueville Comtesse de Lalande 1993 servi en magnum, vin d’une petite année qui a maintenant acquis un bel équilibre et une éloquente intégration qui modifient sensiblement l’analyse de ce millésime, car on le boit avec plaisir.

J’ai rencontré des gens charmants, comme ce spécialiste en radioactivité qui ausculte les bouteilles antiques pour les authentifier, comme tous ces universitaires, chercheurs, professeurs, recteurs, directeurs, ravis de parler avec d’autres qu’eux-mêmes. Grâce à la générosité des sponsors, dont Yquem et Pichon Comtesse, nous avons été royalement traités. Un soleil printanier comme il n’en existe qu’à Bordeaux a mis la touche complémentaire pour faire de ce court séjour studieux un souvenir durable.

Yquem for beginners – cellars of rich people in the 18th century samedi, 17 mars 2007

Yquem for beginners – cellars of rich people in the 18th century

There was a conference held in Bordeaux University whose subject was “usage of glass for wine from the 17th century to the 21st century”.

Some 40 speakers talked for three days in two groups and made very interesting contributions. I was one of them and I talked about the “restoration of the patrimony of very old wines with the help of gastronomy”. The speakers and attendants were mainly people from University and it was interesting to see how the knowledge of some speakers was intellectual, with few base on reality. But I have learnt a lot and I would like to pick some brief comments on what I have learnt.

The bottle for wine for storage appeared only in 1690. Previously the bottles were only used to pour the wine taken from barrels in the cellars.

The cellars were mainly constituted of barrels and bottles in cellars appeared really at the middle of the first half of the 19th century. And even then, the inventories of cellars which were made mentioned : 60 bottles of wine from Beaune, or 80 bottles of Meursault, or 40 bottles of Lafite. No indication of years and no indication of domain for the Burgundies. Two studies concerned thousands and thousands of inventories computed, and when I heard that the richest cellar in Bordeaux in 1820 had 4,000 bottles, I thought I would have been an emperor (private joke).

What is interesting is that people had an extremely significant number of sweet wines coming from many origins : Cyprus, South Africa, Syracuse, Madeira, Canaries Islands, Alicante, Portugal, Hungary. So, the common knowledge that the wine went where the natural transportation was cheaper (Bordeaux goes to London and Flemish regions, Burgundy goes to Paris, and Wallonia regions), could have hidden the fact that some precious wines travelled where people could afford them. In this respect, it is very significant for me that I have had the same process as my cellar has a very huge volume of sweet wines of every world region, contrarily to red and whites for which France is 95% of my wines. My collection of Cyprus wines from the first half of the 19th century is very similar to what happened then.

What is also interesting for me is that before 1850 no one cared about keeping wines for a long storage. This is due to the fact that people stored mainly barrels (small ones from various sizes). So, I can imagine that the one who had barrels of Lafite, served the barrel in service, and did not vary the millesimes for varied dinners. And it tells me too that labels with years were completely unusual. So labels for wines before 1850 have surely been made afterwards. And for me it is very sound news, as I have some very old bottles with handwritten labels. It is certainly truer than labels printed one century later.

Another remark is if people have only constituted cellars with vintages to age after 1850, I am completely in time with them, I am not late, as my cellar covers all these years. That makes me happy. But of course I learned many things that I do not relate to my case.

One very amusing detail. I was very proud to have experienced how champagne and oysters work so well together. One speaker talked about the representation of glasses and bottles in paintings of the 17th century. And one painting made in 1720 shows rich people drinking champagne (put in ice) and eating oysters (stored on a bed of ice). This shows that wisdom was already extreme at that time.

Just an information for some huge wine geeks : on the painting they are 6 people at the table, and on the floor there are already 23 empty bottles of champagne. And for the serious eaters, there are hundreds and hundreds oysters all around. People knew how to behave at that time. We have invented nothing.

Many other contributions and speeches were passionating. As such an international event (speakers from Austria, Portugal, Poland, Germany,…) required sponsoring, we had the advantage that Yquem offered a dinner for the speakers in the castle, and that May Eliane de Lencquesaing offered a visit of her museum of glass and a party.

In Chateau d’Yquem, for some people working for the University, it was a dream to be there for the first time. At my table of ten, five people had never drunk Yquem. So, I became for once the teacher, to explain how it is possible to enjoy better Yquem for the first time. I made many suggestions, and people appreciated a lot better their discovery.

We had a champagne Veuve Clicquot rosé NV which was necessary after so many intellectual efforts, and at the tables organised in the great sitting room of the castle, we had Y 2000 which I found better than previous tries, as it has expanded and gained width. We had Yquem 2002 which pleased a lot as it is a bunch of flowers and tropical fruits. Of course it is new and it is not one of the icons of Yquem, but I liked it. I showed to my partners of table that it worked magnificently with the meat sauce (made of a soft red wine !). The Yquem 1996 is in a very uncomfortable phase, exactly as the 1986 was ten years ago. Closed, torrefied, it had not great charm.

I made an experiment with my lovely neighbour : we had ordered a vervain. And with it, the 2002 was oriented towards tastes of tea and gained a wonderful length. On the contrary, the 1996 reacted as crunched paper.

Despite the sponsoring of LVMH we had “only” a XO Hennessy not very convincing.

We went by May Eliane de Lencquesaing about whom I will make a pleasant comment. She attended every conference, even if she was not obliged to, and we sat together. At a pause, she told me : “you must have been surprised by the sale of Pichon”. I said yes. “Why did not you call me?” I said “I did not want to bother you”. She said that I should have done, and very freely and openly she explained many details including some very personal. When we visited her museum, and the other rooms where glass is shown, one attendee told me : “your name is there”. I looked, and I saw a bottle that I had offered to May Eliane for her 80th birthday. It was a Maury 1925 from her birth year, and the empty bottle was there, signed by all her grandchildren, so drunk in family, and there was a mention of my name. I found that particularly friendly and emotional.

May Eliane, whose dynamism seems super natural, talked about her collection of glasses. She offered us Bernadotte 1999 that I did not drink as there was Pichon Comtesse 1993 in magnum that I found absolutely charming as this weak year has sufficiently expanded to deliver a charming message.

I have spent three nice days, talked with very expert people whose subjects of research were interesting. The possibility to visit once again Yquem and Pichon did the rest. I was happy.

conférences à l’université (jour 2) et dîner à Yquem vendredi, 16 mars 2007

Des conférences passionnantes sur l’histoire du vin et de son contenant se succèdent pendant toute la seconde journée et le point culminant fort attendu, c’est le dîner au château d’Yquem. Au soleil couchant, nous nous promenons autour de ce château emblématique, puis nous visitons les chais, guidés par les explications très claires de Francis Mayeur.

L’apéritif au château est un champagne Veuve Clicquot rosé non millésimé. Il tombe à point nommé après cette journée studieuse. Il y a quelques habitués d’Yquem, qui étudient l’histoire du vin et des vignobles mais aussi beaucoup de nouveaux, qui vont boire ce soir leur premier Yquem. Six belles tables ont été installées dans le grand salon du château, et à la mienne, je vais expliquer à mes voisins novices comment profiter de cette première expérience.

Le menu conçu par Marc Demund, qui avait cuisiné l’année dernière pour le dîner que j’avais organisé à Yquem autour d’Yquem 1861 avec l’amical soutien de Pierre Lurton, est le suivant : noix de Saint-jacques rôties aux pistaches et jus de betterave / mignon de veau aux pétales de roses confits / fromages / blanc-manger aux pommes vertes et cristallines. Nous commençons par « Y » d’Yquem 2000 au nez très riche, auquel l’âge commence à apporter une belle ampleur. Sa complexité est bien agencée. Il est agréablement joyeux en bouche.

Le Château d’Yquem 2002 se place d’emblée à un niveau supérieur au souvenir et à l’image que j’en avais. Le nez est intense, de coing, d’ananas et d’agrume. En bouche, c’est comme un bouquet de fleurs et de fruits qui vous tend les bras. Je suggère à mes compagnons de table de prendre un peu de sauce seule sur le plat du couteau pour constater que l’accord se fait merveilleusement bien entre la sauce du mignon de veau et ce délicat Yquem. Le Château d’Yquem 1996 est coincé, fermé, comme cuit ou torréfié et me rappelle le 1986 qui était il y a dix ans dans cette même phase transitoire ingrate. Le 1996 s’associe bien au roquefort malgré une force excessive du fromage. Le dessert au coulis trop sucré ne lui convient pas. Je fais avec ma voisine une constatation fort intéressante : sur une infusion de verveine assez légère, l’Yquem 2002 prend des accents de thé et conserve une très belle longueur. Le Yquem 1996 sur la même infusion se coince, refuse la cohabitation et devient comme du papier mâché, ce qui corrobore son passage par une période ingrate. Le Cognac XO Hennessy est pâle (je suis sans doute devenu exigeant), ce qui conduit à en user avec modération.