restaurant « Le Bec Fin » à Dôle : y courir ! vendredi, 2 février 2007

Départ à la Percée du Vin Jaune où, pour une fois, ma femme et moi serons rejoints par notre fille cadette et son mari. L’hôtel où nous avons nos habitudes, le Château de Germigney à Port-Lesney a pris l’habitude fâcheuse de n’ouvrir que le soir de la Percée. Il nous faut donc nous loger la veille. L’internet nous suggère un hôtel à Dôle. Je réserve près du centre ville. La description parait convenable. La réalité est toute autre. Dans cette jolie ville touristique, j’imagine ce que des touristes étrangers peuvent penser de l’état de sous-développement de notre hôtellerie. Car pour ouvrir et fermer la porte des toilettes de ma chambre, je ne vois que des trapézistes du cirque Bouglione. Si l’on décide de rester debout, c’est le couvercle métallique du distributeur à papier qui vous sectionne les jambes quand on veut sortir. Si on décide de monter sur la lunette pour ouvrir la porte, à quel étage va-t-on tomber ? Et si l’équipement doit s’appeler décoration, il faut mettre au musée du Louvre les calendriers des pompiers et des postes, car ce sont des œuvres d’art. J’avoue avoir une certaine tendresse pour les paravents de douche qui transforment la salle de bain en une annexe des Niagara Falls.

La ville est sauvée par un restaurant où je vous conseille de courir au plus vite : Le Bec Fin, où Romuald Fassenet, meilleur ouvrier de France, a obtenu une étoile largement méritée, et où Catherine Fassenet, accueillante, a concocté une carte des vins intelligente.  Dans une rue piétonne où Pasteur a vu le jour, c’est une maison ancienne qui nous offre une salle agréable. Je commande un champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1988, champagne de grande qualité que je connais déjà. Je lui associe une noix de Saint-Jacques en croûte de noisette et curry, émincé fin de betterave rouge, vinaigrette au jambon cru du Doubs. L’association terre et mer est aussi un sujet pour Christian Le Squer de Ledoyen, et le champagne s’y complait. Il a une plénitude rassurante, une race évidente. Il fait partie des très grands champagnes de 1988, avec un charme envoûtant, ensoleillé.

L’heure étant de partager avec mon gendre quelques moments de folie, c’est sur un lièvre cuisiné à la royale, pulpe de châtaignes et mousseline de topinambours que nous voulons profiter de l’explosion de joie de la Côte Rôtie La Mouline Guigal 1999. Quel immense vin. C’est Roger Federer en bouteille. Montée au filet, passing-shot, on a tout cela en bouche. La plénitude gustative sur un fond de simplicité du discours est totale.

Sur un moelleux noisette de ma maman (c’est le titre), crème glacée vin jaune curry, un Marc du Chapitre  des Caves des Echansons offert par le chef est fort agréable, avec ce râpeux propre aux marcs virils. Romuald est venu bavarder avec nous. Il a les pieds sur terre, sait ce qu’il veut. Ce sera l’un des grands chefs de demain. Courez-y. Mais volez une tente Delanoë à un SDF. C’est plus sûr.

 

dégustation de Châteauneuf-du-Pape à Mechelen (Belgique) mardi, 30 janvier 2007

Voici les photos de l’un des participants de ce dîner :

https://www.pixagogo.be/7870934100

Voici mon compte rendu :

Un habitué du forum de Robert Parker lance l’idée d’un dîner avec de vieux Châteauneuf-du-Pape. L’idée m’excite. Nous échangeons des mails. Je sais que je vais rencontrer deux ou trois personnes qui assistaient au très agréable dîner organisé à Anvers où j’avais apporté un Chypre 1845. Les mails s’échangent. Je ne lis pas beaucoup toutes ces mises au point. Je capte au passage un mail où l’un des participants annonce un vin du 19ème siècle dont il ne veut pas dévoiler le nom. Tout cela sent bon.

En fait, la notion de « vieux » n’est pas la même pour tout le monde, et celui qui avait proposé une bouteille du 19ème siècle ne vint pas. La définition n’était plus la même. Ce qui n’empêcha pas que je passe une bien agréable soirée avec des passionnés.

Arrivant en avance, j’ouvre les vins dans le restaurant Folliez à Mechelen au nord de Bruxelles, restaurant à la délicieuse décoration comme seuls les belges savent le faire, et doté d’une étoile Michelin qui sera confirmée dans l’assiette intelligente.

Nous démarrons par le champagne Dom Pérignon 1998 qui est parfait, fait de fleurs et fruits frais. Le Condrieu La Bonnette Rostaing 2005 est fait d’épices, de bacon, de litchi et de légume vert sec comme l’artichaut. Le Condrieu Les Terrasses de l’Empire de Georges Vernay 2005 est plus souple, doté d’une fin poivrée. Il est très différent, et sent la fleur d’oranger. Le Rostaing est plus brutal, le Vernay plus fluide. Je préfère le plus brutal mais le fluide est joli. Le Vernay s’ouvre sur le thon presque cru, s’épanouit. Ce sont deux grands vins à qui un peu d’âge ira bien.

Nous avons ensuite des rouges par séries de trois. Un Châteauneuf-du-Pape Arthur Barolet négociant à Beaune 1979, un Châteauneuf-du-Pape Raymond Usseglio 1986 et un Châteauneuf-du-Pape Château de la Gardine 1973. Le 1986 a un nez de pétrole. Le 1979 fait bourguignon ancien, avec des pruneaux, des fruits rouges brûlés. Son alcool est fort. Le 1973 que j’ai apporté est déjà un vin ancien. Je l’aime beaucoup sur le flétan. Je classe en tête le 1979, puis le 1973 et enfin le 1986 dans cette série peu convaincante.

Viennent ensuite un Châteauneuf-du-Pape La Bernardine Chapoutier vers 1960 (année illisible), le Châteauneuf-du-Pape J. Mommessin 1933 que j’ai apporté (il s’agit de la maison bourguignonne fondée en 1865, célèbre pour son Clos de Tart) et un Châteauneuf-du-Pape Domaine de Beaucastel rouge 1954 dont la bouteille soufflée à la main et lourde est très ancienne. Le Chapoutier est très beau. Toute cette série est vraiment très belle. On attend très longtemps que le plat arrive, et le 1933 est éblouissant, nettement plus jeune que le 1954. Son niveau parfait et son bouchon remarquablement intact impressionnent mes convives.

Nous avons ensuite trois Châteauneuf-du-Pape Clos des Papes, le 1988, le 1983 et le 1985. Le 1988 est un peu strict, limité, sévère. Le 1983 est brillant. Le 1985 est entre les deux, puis me plait plus. Les trois sont assez âpres, au goût de poivre et de tabac. Ils représentent le Châteauneuf-du-Pape dans sa maturité.

Nous suivons avec trois Châteauneuf-du-Pape Domaine du Pégau Cuvée Laurence, le 1983, le 1995 et le 2001. Ce Châteauneuf-du-Pape est extrêmement célèbre et à la mode sur tous les forums. J’avais eu extrêmement de mal avec son da Capo 2003, vraiment loin de tout vin habituel. La densité du 1983 est superbe. C’est beau, dense, franc, fait de poivre, de cassis, de tabac et de bois. Le 1995 est strictement identique avec simplement un peu plus de fruit rouge. Le 2001 est une promesse de grand vin, mais pour mon palais, c’est encore trop jeune. Le 1983 est éblouissant sur la viande de veau.

La dernière série est : Châteauneuf-du-Pape Bonneau 1996, Châteauneuf-du-Pape Beaucastel 1989 et Châteauneuf-du-Pape Clos du Caillou 1998. Le 1996 est un peu coincé, le 1989 n’est pas encore ouvert et le 1998 est magnifique, d’une structure précise. C’est un beau vin. Quand le 1989 s’ouvre, il prend le pas sur les deux autres. Je fais mon classement et l’un des convives demande qu’on fasse notre tiercé.

Le 1933 Mommessin obtient 3 places de premier, 2 places de second et 2 places de troisième. Le 2001 Pegau emporte 3 places de premier et 1 place de troisième. Le 1983 Pégau reçoit 1 place de premier, 2 places de second et 2 places de troisième. Le 1989 Beaucastel gagne 1 place de premier, 1 place de second et 1 place de troisième. Le classement final des huit convives dont deux britanniques, cinq belges et un français est : Mommessin 1933, 2001 Pégau et 1983 Pégau. Je suis assez content que mon vin, le plus ancien de la soirée, ait été apprécié par des palais plus enclins à boire des vins jeunes, et placé en vainqueur. Le plus ancien et le plus jeune ont été couronnés. Une belle prestation de vins de Châteauneuf-du-Pape de grand talent qui démentrent qu’ils savent braver le temps. On était loinde ma définition des vins « vieux ». L’ambiance fut amicale, décontractée, sans étalage d’érudition. Une soirée épuisante, car il me fallait rentrer à Paris, mais réussie, dans un restaurant qui mérite le détour.

J’ajouterai deux remarques : le Mommessin 1933 plaisait tellement à tous que nous avons dit, à titre de plaisanterie : "il doit y avoir du bourgogne dans ce Chateauneuf pour qu’il soit si bon !", ce qui est amusant, car à l’époque, les baptêmes se faisaient plutôt dans l’autre sens. Et la deuxième est que je pensais que dans l’engouement pour Pégau, il y avait un peu un effet de mode ou un effet Parker. Or, si un 1983 est aussi bon, c’est la preuve irréfutable que ce domaine a une grande valeur, au delà des effets de mode. Et ça m’a plu.

de beaux vins en famille samedi, 27 janvier 2007

Nous allons déjeuner chez ma fille cadette. Le niveau des vins est sérieux. Un Château Laville Haut-Brion 1979 est absolument serein. L’image qui me vient en goûtant ce plaisir si naturel, c’est l’échauffement de champions de tennis. Sans le moindre mouvement apparent ils sont sur la balle, la propulsent avec force sans avoir l’air d’y toucher, et elle arrive là où il faut pour que le futur adversaire enchaîne dans une belle fluidité. Le Laville c’est ça. Il a du citronné, il a du miel et du beurré, et ça s’emboîte comme par magie. Qu’on lui présente du parmesan, du jambon espagnol ou du céleri, il est là, et renvoie des goûts qui font mouche. Le Château Léoville Poyferré 1967 est beaucoup moins détendu. Il arrive assez froid, tendu, et il faut la belle chair de la lotte aux morilles pour qu’il prenne des couleurs et devienne sociable. Il devient confortable, plaisant, sans grande complexité. Le Château Gilette crème de tête 1982 est le croupier du casino : tout passe par lui et il ramasse la mise. Malgré sa jeunesse il a une belle assise, et comble joyeusement nos papilles. Le lendemain mon fils vient déjeuner. Nous descendons en cave pour dénicher des vins qu’il faudrait boire. Un Corton Charlemagne Paul Bouchard 1971 a mauvaise mine. Malheur, le bouchon est tombé dans le vin. Anormal pour un 1971. Notre esprit de sacrifice cesse en voyant une bouteille de Vega Sicilia Unico 1991 que j’avais oublié de ranger. Elle n’était pas en casier. Elle n’ira pas.

Nous goûtons le Corton Charlemagne très foncé, et pendant quatre à cinq secondes, c’est assez plaisant. Puis c’est horrible. Nous n’irons pas plus loin que deux gorgées, la deuxième pour vérifier. C’est trop tard. Sur un filet de biche, le vin espagnol est éblouissant. De belles évocations nous viennent. Mon fils pense à la violette. Je vois des fruits rouges pâles comme la framboise ou la groseille. Ce vin est naturel, franc, simple dans l’expression, étonnamment porteur de bonheur. Il a la finesse des grands vins de Bordeaux et le sourire ensoleillé des grands vins du Rhône. C’est peut-être une synthèse parfaite des vins de plaisir. L’accord avec la biche est extraordinaire, car le vin s’amuse à imiter les petites baies de montagne qu’on ajoute parfois à cette chair. Nous nous regardions, mon fils et moi, conscients de la grandeur de ce vin quasiment idéal.

dîner du 25/01/2007 au restaurant Le Divellec jeudi, 25 janvier 2007

1.         Champagne Laurent Perrier Grand Siècle probablement de 1960 ~~ en vidange, mis pour voir

                                      crevettes grises et brochettes de saumon

2.         Champagne Pierre Gerbais Brut à Celles sur Ource

3.         Champagne Krug 1981

                                      oeufs brouillés crémeux à l’oursin

4.         Puligny-Montrachet les Pucelles Veuve Génin 1959

                                     belon (pied de cheval) frémie au champagne

5.         Château Margaux, Margaux 1952                  

                                    Saint-jacques au foie de canard poêlé

6.         Château Galan « Land limited by Saint-Julien” Vve Bordessoulles 1929

7.         Château Latour 1916

                                   bar sur peau braisé au Médoc

8.         Richebourg, Domaine de la Romanée Conti 1942

                                  bu seul, en intermède

9.         Savigny la Dominode Roger Poirier 1953

10.       Corton Cuvée Charlotte Dumay Hospices de Beaune Vanier 1945

                                  pigeon au long bec sur canapé, coulis de truffe

11.        Château Salins Rions 1ères Côtes de Bordeaux 1941

                                  Stilton

12.       Château Suduiraut 1928

                                  émincé d’agrumes, mangue et pamplemousse rose

 

dîner wine-dinners au restaurant Le Divellec jeudi, 25 janvier 2007

Le 82ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Le Divellec. J’ai pour Jacques Le Divellec une affection particulière, car il est toujours enthousiaste et en recherche de la qualité totale. Combien de chefs seraient restés comme lui jusqu’à 1 h 30 du matin pour savoir comment cela s’était passé ?

J’arrive à 16h45 pour ouvrir les bouteilles et tout a été mis en place pour que j’officie. Olivier, sommelier attentif et compétent, est lui aussi motivé par l’atteinte de la perfection. Il est rare que j’aie autant de mal à ouvrir les bouchons, ce qui fait un grand contraste avec le récent dîner au restaurant Ledoyen, car aujourd’hui presque tous les bouchons sont venus en lambeaux. Une surprise de taille m’attend, car lorsque je vois la capsule de Margaux 1952, capsule que j’avais photographiée lorsque j’ai pris le vin en cave, je constate qu’elle est en creux, ce qui n’était pas le cas avant. J’ouvre, et j’éprouve un choc : le bouchon est tombé dans la bouteille. Je sens immédiatement le goulot, et je pousse un « ouf » de soulagement : l’odeur n’est pas affectée par cet incident. La chute s’est produite pendant le transport ou lors d’une manipulation. Le vin est carafé, le bouchon est difficilement extrait de la bouteille par les efforts appliqués d’Olivier, et le liquide revient dans son écrin originel. L’odeur la plus extraordinaire est celle de Latour 1916 : une plénitude absolue. Celle du Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1942 est aussi rassurante à souhait. Le seul vin qui m’inquiète est un vin que j’ai rajouté : Savigny la Dominode Roger Poirier 1953.

Les convives ne sont pas ponctuels car Paris est une capitale où l’on reçoit des chefs d’Etat étrangers. Le menu composé par Jacques Le Divellec, après que nous en avons longuement discuté, pour l’esthétisme de la démarche, est le suivant : Œufs brouillés crémeux à l’oursin / Belons frémies au champagne / Saint jacques au foie gras de canard poêlé / Bar  sur peau braisé au saint-émilion / Bécasse sur canapé, coulis de truffes / Stilton / Emincé d’agrumes, mangue et pamplemousses. Bel exercice sur des produits rares au service des vins.

Ayant visité ma cave pour préparer de futurs dîners, j’avais repéré il y a deux jours une bouteille de champagne Laurent Perrier Grand Siècle vers 1960 en vidange. Elle avait perdu un quart de son contenu. L’occasion se présentait de commencer par ce vin que j’ajoutai au programme, pour en faire un sujet didactique. Le champagne est ouvert par Olivier au moment où nous passons à table, et je le découvre comme mes convives. La couleur est ambrée, la bulle est symbolique, mais en bouche, c’est extrêmement plaisant. J’avais pris soin de prévenir de ne pas s’arrêter au constat : « c’est madérisé », qui sonne comme une condamnation et empêche d’en profiter avec un esprit ouvert. Un des convives fit cette remarque : « vous en parlez avec des mots positifs, et nous vous suivons. Mais chacun de nous, chez soi, se ferait dire par ses amis : ton vin est mort ». J’acquiesce, je conviens du fait que ce serait la réaction normale, mais je fais analyser le goût, pour ce qu’il est. Force est de constater que ce vin n’a pas de défaut, si on admet qu’il s’agit d’un vin totalement différent. Sur des crevettes grises et des brochettes de saumon, c’est délicieux. Ce serait le compagnon idéal d’un foie gras.

Nous avons attendu longtemps que le dîner démarre, car on s’agitait fort en cuisine, ce qui nous rendit encore plus heureux de déguster la brouillade d’oursins. Le Champagne Pierre Gerbais Brut à Celles sur Ource non millésimé, de probablement dix ans, est assez agréable, sans personnalité affirmée, et sert surtout de tremplin au Champagne Krug 1981 qui a plus d’émotion que celui bu avec Rémi Krug, car il est ici sur son territoire de prédilection : la gastronomie. Et l’oursin lui va bien, qui lui permet de décliner des fruits roses frais, au-delà de son iode exacerbé.

Les assiettes qui arrivent sur notre table sont particulièrement impressionnantes, car les « pieds de cheval » sont des huîtres pour géant. Avec les doigts de deux mains mis en cercle, on ne pourrait pas en faire le tour. Le Puligny-Montrachet les Pucelles Veuve Génin 1959 a une magnifique couleur dorée. Il est, comme le Laurent-Perrier, dans une phase évoluée de sa vie. Mais cela convient parfaitement à la délicate crème qui enrobe l’énorme huître dont il faut manger le pied doucereux.

Je ne pensais pas que la sauce de la coquille Saint-jacques conviendrait au Château Margaux, Margaux 1952. J’eus peur en la voyant et je m’en ouvris à Olivier, mais je reconnus rapidement que Jacques Le Divellec avait vu juste. L’accord de la coquille, du foie gras avec le grand bordeaux est excitant. J’avais préféré mettre en garde les convives du risque d’un petit défaut du vin. Mais c’est un grand Margaux qui s’épanouit dans nos verres, dense et velouté. Sa trame douce est un plaisir raffiné. Je m’en veux en faisant ce compte-rendu de ne pas l’avoir inclus dans mon vote final, car il s’est révélé un très grand Margaux.

La portion de bar est aussi gargantuesque que les pieds de cheval. C’est sur la chair du poisson plus que sur la sauce très typée que deux vins grandioses vont briller. Ce qui étonne immédiatement du Château Galan « Land limited by Saint-Julien” Vve Bordessoulles 1929, c’est la jeunesse de sa couleur. Et tout est à l’avenant. Mes convives sont surpris de cette jeunesse et de la solidité gustative de ce vin à la longueur rare. Bien sûr, c’est seulement un cru bourgeois supérieur, et c’est pour cela que j’ai rappelé la mention naïve qui aimerait faire croire que c’est un Saint-Julien. Mais ce vin à l’acidité bien contrôlée a gagné en intelligence, et ravit le palais par sa maturité. Mon intérêt est évidemment porté vers le Château Latour 1916 qui est absolument époustouflant. Il est d’une perfection totale. Le nez m’avait ravi à l’ouverture. Un niveau dans le goulot pour une bouteille au bouchon d’origine est un événement à signaler. La robe est belle et jeune, le nez est d’un parfum envoûtant. Et en bouche, c’est l’idéal de ce que Latour peut devenir avec l’âge. Tout est équilibré et intégré. C’est un moment de bonheur intense. Je sens que mes convives me regardent autrement, même si la majorité de la table a déjà partagé l’un de mes dîners. Car un champagne avancé, un Puligny évolué, c’est bien gentil, mais où est le vrai charme des vins anciens ? Il est là, devant nous, avec deux vins exceptionnels.

Ayant ajouté deux vins au programme, il m’est apparu que nous devrions goûter le Richebourg, Domaine de la Romanée Conti 1942 seul, sans plat. Quel vin ! Notre groupe étant constitué d’une majorité d’amateurs de Bordeaux, il fallait guider le passage aux bourgognes. Mais ce vin intelligent sait s’adapter. Des senteurs envoûtantes, une onctuosité jointe à une légère salinité confèrent à ce vin délicat un charme certain. C’est une des très belles expressions du domaine de la Romanée Conti dans une année calme mais subtile, où la légèreté ne nuit pas à la longueur. Nous avons tous apprécié, comme le montreront les votes. Deux années de milieu de guerre s’étaient suivies.

L’oiseau à long bec est goûteux, viril. Le Savigny la Dominode Roger Poirier 1953 que j’avais ajouté n’aurait pas dû l’être. Je soupçonne un accident thermique qui l’a probablement torréfié. Manifestement consommable, il n’a pas de grandeur. En revanche, le Corton Cuvée Charlotte Dumay Hospices de Beaune Vanier 1945 est une belle réussite de l’année 1945 en Bourgogne. Joyeux, ce vin charnu et puissant sourit et chante dans nos palais. Il parait si facile à boire, vin de pur plaisir.

Le stilton est faire-valoir idéal pour un Château Salins Rions 1ères Côtes de Bordeaux 1941 élégant, simple, équilibré, délicat. Ces vins gagnent manifestement beaucoup avec l’âge. Nous étions encore en une année de guerre, sans qu’il s’agisse de ma part d’un choix délibéré. Un peu court, il ne renie pas son origine de « petit » vin, mais est sans doute nettement plus élégant que des versions plus jeunes.

L’adjoint de Jacques Le Divellec était venu me voir avant le repas pour parler du dessert. Il a réussi dans la simplicité, à créer un accord parfait. Alors que je sens par avance les accords qui vont briller, là où j’attendais la mangue sur le Château Suduiraut 1928, c’est en fait le pamplemousse rose qui a déployé tout le talent de ce sauternes que j’adore, l’un des plus grands que j’aie jamais bus. J’ai déjà mis trois fois cet immense vin dans des dîners. Celui-ci est l’un des plus discrets, ce qui justifie qu’au lieu d’être toujours n°1 dans mes votes, il ne le fut pas cette fois-ci, même si ce sauternes est éblouissant.

Le cérémonial des votes est assez intéressant. Huit vins figurent dans les quartés, ce qui est, une fois de plus, l’une de mes satisfactions. Quatre vins ont été couronnés d’une première place : Latour 1916 cinq fois, Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1942 quatre fois Château Galan 1929 et Suduiraut 1928 chacun une fois.  Le Richebourg figure dans tous les votes, ce qui n’est pas fréquent. Le vote du consensus serait : Latour 1916, Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1942, Suduiraut 1928 et Corton 1945.

Mon vote a été partagé dans l’ordre avec un convive et dans le désordre avec un autre : Château Latour 1916, Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1942, Corton 1945 et Suduiraut 1928.  

Le restaurant Le Divellec est une maison familiale. Toute l’équipe vibre à l’unisson. On guette nos réactions, on souffre si un détail ne va pas, on sourit et l’on souffle quand tout se passe bien. J’aime cette atmosphère concernée, amicale. Et Jacques est un exemple. Son implication exemplaire, alors qu’il a tout vu et tout vécu est particulièrement réjouissante. Il a créé, ce soir, un bel événement, car les vins, dont ce spectaculaire Latour 1916 ont dû partager la vedette. Et c’est bien.

dîner wine-dinners du 25/01/2007 – les vins jeudi, 25 janvier 2007

les deux champagnes

Puligny-Montrachet "les Pucelles" Veuve Genin 1959 à la très belle couleur

Château Margaux 1952 mis en bouteille au château, et venant de la cave Nicolas.

Cette bouteille de Latour 1916 n’a pas d’étiquette, mais l’année est très lisible sur la capsule, d’origine. Le niveau dans la bouteille est excellent (base goulot, dans le goulot).

Mention amusante sur l’étiquette de ce Chateau Galan 1929 : "land limited by Saint-Julien".

 Richebourg DRC 1942 à la bouteille de guerre, bleue du fait de l’absence de plomb. Mention "interdit d’exporter aux USA" pour protéger les agents locaux.

 Corton "Cuvée Charlotte Dumay", Hospices de Beaune Vanier 1945 (je sens que ce sera grand !)

 Chateau Salins, Rions 1941, un premières Côtes de Bordeaux comme je les aime, à la douceur subtile.

 Chateau Suduiraut 1928, un des plus immenses Sauternes de ma vie.

Immense verticale de Krug Vintage et Clos du Mesnil mardi, 23 janvier 2007

Les Caves Legrand accueillent Rémi Krug qui fait une des dernières grandes dégustations de ses champagnes, pour marquer 42 ans passés au service du vin qui porte son nom. Il est fier que certains champagnes portent sa marque et que de nombreux millésimes futurs seront influencés par le travail qu’il a fait, dans le cadre d’une vision à long terme. C’est la première fois qu’il fait une dégustation où sont comparés le Krug « Vintage » au Krug Clos du Mesnil, pour huit années où ont été produits à la fois le Vintage et le Clos du Mesnil. Le Vintage est un vin d’assemblage alors que le Clos du Mesnil est le petit bijou d’une parcelle ceinte de murs, de la taille de la parcelle de la Romanée Conti, voire un peu plus petite. Rémi est passionné, et décrit ses vins avec amour, comme s’il les découvrait à chaque fois. Il dit que sa stratégie n’est pas de faire de Clos du Mesnil un vin meilleur que le Krug Vintage, mais au contraire de faire de chacun le meilleur de ce que l’on peut faire, dans sa définition.

J’ai pris, comme d’habitude dans ces dégustations verticales, des notes sur un petit cahier, ce que je ne fais pas lors de dîners, et je vais les reproduire dans leur « jus », pour que vous viviez ces émotions comme je les ai vécues. Les redites sont laissées, car c’est au fil de la plume.

Le Krug Vintage 1995 est déjà très doré. Le nez est très chaleureux, de caramel. En bouche, il est déjà très fumé, bacon. Belle longueur, belle maturité, déjà. On sent l’iode et le citron vert.

Le Krug Clos du Mesnil 1995 est un peu plus rose. Le nez est très vineux et salin. En bouche il fait très peu assemblé. Je sens les fruits roses, les fleurs, le sel et les agrumes. Il est plus rêche mais il promet plus. Il va exploser dans quelques années. Le final est très agrume, avec un peu de miel, ce qui apparaît plus lorsque l’on a un peu grignoté.

Le Krug Vintage fait plus solide, carré. Le Krug Clos du Mesnil est plus romantique.

Le Krug Vintage 1990 est très doré, au nez intense. Quelle puissance ! On a une structure très carrée, très solide.

Le Krug Clos du Mesnil 1990 est plus pâle. Le nez est un peu coincé. En bouche, je marque un petit recul. Il n’est pas à 100% ce qu’il devrait être. Rémi vient sentir mon verre et ne voit pas d’anomalie. Mais en revenant sur ce millésime après avoir goûté d’autres années, l’imperfection est nette, même si le nez ne le révèle pas.

Le Krug Vintage 1989 a une belle couleur. Son nez est l’exacte définition d’un nez de champagne. En bouche, c’est déjà plus assagi, plus tranquille.

Le Krug Clos du Mesnil 1989 a une belle couleur dorée intense, voire foncée. Le nez est discret. La bouche est de fruit confit. Plein de soleil, ça, c’est du champagne. Mon voisin signale un final de menthe que je reconnais quand il me le dit. Avec un réchauffement dans le verre, on reconnaît du miel et du loukoum, tout en ayant cette fraîcheur qui est une signature de Krug.

Le Krug Vintage 1988 a un nez d’une intensité énorme. Ce qui me frappe dans ce champagne mythique que j’ai bu des dizaines de fois, c’est son côté iodé et salin.

Le Krug Clos du Mesnil 1988 a un nez minéral de pierre à fusil, incroyable pour un champagne à ce niveau d’intensité. Il est complètement exceptionnel. Il est sauvage. Et il rejoint le sauvage bourguignon tel que je l’adore. C’est immense. Je reconnais de la groseille et de la groseille à maquereau dans ce champagne fou. Le Krug Clos du Mesnil 1989 est élégant est bien élevé. Le Krug Clos du Mesnil 1988 est un fou chantant de charme infini.

Le Krug Vintage 1985 est moins doré. Mais en bouche, il est pain d’épices et pain doré. La bulle est forte, il y a du toasté, avec cette permanente fraîcheur.

Le Krug Clos du Mesnil 1985 démarre lentement. Il est d’une subtilité rare. Il glisse tellement en bouche que l’image qui me vient est celle d’une pirogue entraînée sur des rapides qui frotte de lourdes pierres rondes. C’est assez incroyable, et d’une fraîcheur inconcevable.

Avec le Krug Clos du Mesnil 1988 on avait atteint des sommets, mais avec ce 1985 éblouissant, c’est cette fraîcheur qui me paralyse et me laisse sans voix. Le Krug Vintage 1985 est viril, plein. Le Krug Clos du Mesnil 1985 est très huître, subtil.

Le Krug Vintage 1982 est d’un beau doré. Très archétypal, il est à mon sens la définition de Krug. Mais c’est presque trop scolaire. Le Krug Clos du Mesnil 1982 est très évolué. J’aime ce côté évolutif qui pianote sur la langue. Le Krug Vintage 1982 purement parfait est presque trop doctrinal. Le Krug Clos du Mesnil 1982 est du miel, du caramel qui offre parfois de l’huître si l’on passe d’un toast à l’autre du plateau qui nous a été offert pour apaiser une petite faim.

Le Krug Vintage 1981 est le premier à avoir un nez minéral. Que c’est beau. Il est fumé. Le Krug Clos du Mesnil 1981 a un nez magique, oriental. La bulle est puissante. Ce champagne est évolué aussi, mais ici un peu trop. Je sens qu’il est déjà passé sur un autre versant de sa vie. Le Krug Vintage 1981 est fabuleux et me plait par son gras.

Le Krug Vintage 1979 a un nez phénoménal et une bouche phénoménale. C’est grandiose. Le nez évoque le pétrole, la bouche est fumée, de caramel brûlé. Il a une personnalité folle. C’est fou. C’est complètement immense.

Le Krug Clos du Mesnil 1979 a un nez géant. En bouche, c’est de la framboise, des fruits rouges. C’est la béatitude absolue. Comment peut-on faire quelque chose d’aussi grand ? Il y a du fruit confit, de la fraise, mais aussi de l’épice, du poivre. C’est grand et la bulle est forte. C’est le plus grand Krug Clos du Mesnil 1979 que j’aie bu. C’est hors du commun.

Le Krug Vintage 1979 est immense, viril, à la personnalité forte. Les Krug Vintage de ce soir se montraient scolaires et parfaits. Ce dernier est canaille, excitant, grandiose. Le Krug Clos du Mesnil 1979 est magique. Ce fruit rouge est fou et devient lilas.

Rémi conclut cette dégustation par un magnum de Krug Grande Cuvée qui a de l’ordre de six ans et nous dit : « Krug, c’est la Grande Cuvée. C’est ça dont je suis fier ». Rémi a cette parole simple comme je les aime : « si vous voulez vous amuser à faire vous-même une grande cuvée, prenez tout ce qui reste des 16 vins dégustés, assemblez les. C’est ça la Grande Cuvée ».

Rémi Krug parle avec émotion de ses enfants. Il me parait impossible de classer ceux qui m’ont plu au-delà des autres. Ce qui frappe, c’est l’immense complexité des Krug Clos du Mesnil, qui changent d’une année sur l’autre, mais aussi d’une gorgée à l’autre du même verre. Je trouve un peu dommage d’avoir présenté les Krug Vintage à côté des Krug Clos du Mesnil, car ces vins de grande qualité, purs compagnons de la gastronomie, méritent d’être goûtés pour eux-mêmes. Les faire cohabiter avec les Krug Clos du Mesnil les réduit un peu, alors qu’ils sont immenses. Mais cet exercice un peu fou, qui est une première jamais tentée auparavant avait un mérite certain. On aura compris par les termes dithyrambiques que j’ai utilisés que j’ai aimé.

Christophe Navarre, président de Moët Hennessy, venu déguster en ami avec son épouse, a tenu à remercier Rémi pour son apport indispensable au renom de cette icône champenoise. Ecouter un passionné de ce calibre est un régal, presque aussi grand que le charme de ces vins infinis.

évolution des prix mardi, 23 janvier 2007

C’est toujours intéressant de regarder dans le rétroviseur. Voici des achats que j’ai faits en 1989 en salle de vente :

 

Chacun pourra mesurer l’évolution des prix.

Certains vins n’ont pas tellement augmenté (tout est relatif).

Mais pour les vins du 19ème siècle, il faudrait non seulement considérer que ce ne sont pas des francs mais des euros, et en plus, il faudrait prendre le prix pour une seule bouteille au lieu de deux !

Et ce n’est pas fini.

Vertical tasting of Krug Vintage and of Clos du Mesnil mardi, 23 janvier 2007

In 2007, Rémi Krug is doing one of the last great tastings of his champagnes, to mark 42 years spent serving the wine that bears his name. He is proud that certain champagnes carry his mark and that many future vintages will be influenced by the work he has done, as part of a long-term vision. This is the first time that he has led a tasting where « Vintage » Krug are compared to Krug Clos du Mesnil, for eight times they have been produced together in the same year. Vintage is a blended wine, while Clos du Mesnil is the gem of a walled plot, the size of the Romanée Conti plot, or even a little smaller. Rémi is passionate, and describes his wines with love, as if he is discovering them for the first time. He says his strategy is not to make Clos du Mesnil a better wine than Krug Vintage, but on the contrary to make each one the best that can be created, in its definition.

As usual in these vertical tastings, I took notes in a little notebook, which I don’t do at dinner parties. They are reproduced in their « juice », so that you experience these emotions as I experienced them. The repetitions are left, because it is the edge of the pen.

The 1995 Krug Vintage is already very golden. The nose is very warm, of caramel. In the mouth, it is very smoky, bacon. Good length, good maturity already. You can smell iodine and lime. The 1995 Krug Clos du Mesnil is a little rosier. The nose is winey and salty. In the mouth it is not completely assembled. I smell the pink fruits, the flowers, the salt and the citrus fruits. It is rougher but it promises more. It will explode in a few years. The finish is very citrus, with a little honey, which appears more when you have a little snacking. The Krug Vintage is more solid, square. The Krug Clos du Mesnil is more romantic.

The Krug Vintage 1990 is very golden, with an intense nose. What power! We have a very square, very solid structure. The 1990 Krug Clos du Mesnil is paler. The nose is a bit stuck. In the mouth, I take a step back. It’s not 100% what it should be. Remi comes to smell my glass and sees no anomaly. But looking back at this vintage after tasting other years, the imperfection is clear, even if the nose does not reveal it.

The Krug Vintage 1989 has a beautiful color. Its nose is the exact definition of a champagne perfume. On the palate, it is already quieter. Krug Clos du Mesnil 1989 has a beautiful intense golden color, even dark. The nose is discreet. The palate is of candied fruit. Full of sun, that’s champagne! My neighbor reports a mint finish that I recognize when he tells me. When warming in the glass, we recognize honey and Turkish delight, while having this freshness which is a signature of Krug.

The Krug Vintage 1988 has a nose of enormous intensity. What strikes me about this legendary champagne that I have drunk dozens of times is its iodine and saline side. Krug Clos du Mesnil 1988 has a mineral nose of flint, incredible for a champagne at this level of intensity. He is completely exceptional. He is wild. And he joins the wild Burgundian as I adore him. It’s huge. I recognize currant and gooseberry in this crazy champagne. The 1989 Krug Clos du Mesnil is elegant and well-bred. Krug Clos du Mesnil 1988 is a singing madman of infinite charm.

The Krug Vintage 1985 is less colorful. On the palate, it is gingerbread and French toast. The bubble is strong, there is toasted, with this permanent freshness. The 1985 Krug Clos du Mesnil starts slowly. It is of rare subtlety. It slips so smoothly in the mouth that the image that comes to me is that of a canoe driven on rapids rubbing heavy round stones. It’s quite incredible, and incredibly fresh. With the Krug Clos du Mesnil 1988 we had reached new heights, but with this dazzling 1985, it is this freshness that paralyzes me and leaves me speechless. The 1985 Krug Vintage is manly, full. The 1985 Krug Clos du Mesnil is very oyster, subtle.

The Krug Vintage 1982 is a beautiful golden color. Very archetypal, it is in my opinion the definition of Krug. But it’s almost too scholarly. Krug Clos du Mesnil 1982 is very evolved. I love that evolutionary side that tingles on the tongue. The purely perfect 1982 Krug Vintage is almost too doctrinal. Krug Clos du Mesnil 1982 is honey, caramel that sometimes offers oyster if we go from one toast to another from the plate offered to us to appease a little hunger.

The Krug Vintage 1981 is the first tonight to have a mineral nose. How beautiful. It is smoked. The 1981 Krug Clos du Mesnil has a magical, oriental nose. The bubble is powerful. This champagne is also evolved, but here a little too much. I feel like he’s already passed on another side of his life. The Krug Vintage 1981 is fabulous and I like its fat.

The Krug Vintage 1979 has a phenomenal nose and a phenomenal palate. It’s grandiose. The nose evokes petroleum, the palate is smoky, of burnt caramel. He has a crazy personality. It’s crazy. It’s completely huge. The 1979 Krug Clos du Mesnil has a giant nose. On the palate, it is raspberry, red fruits. It is absolute bliss. How can you make something so big? There is candied fruit, strawberries, but also spice, pepper. It’s big and the bubble is strong. This is the biggest Krug Clos du Mesnil 1979 that I have drunk. It’s out of the ordinary. The Krug Vintage 1979 is huge, manly, with a strong personality. Tonight’s Krug Vintage were academic and perfect. The latter is scoundrel, exciting, grandiose. The 1979 Krug Clos du Mesnil is magical. This red fruit is crazy and turns lilac.

Rémi concludes the tasting with a magnum of Krug Grande Cuvée which is around six years old and tells us: « Krug is the Grande Cuvée. That’s what I’m proud of « . Rémi has these simple words, as I like them: « if you want to have fun making a great cuvée yourself, take whatever is left in your glasses of the 16 wines tasted, assemble them. This is the Grande Cuvée « .

Rémi Krug speaks with emotion of his « children ». It seems impossible to me to rank those that I liked above the others. What is striking is the immense complexity of the Krug Clos du Mesnil, which changes from year to year, but also from one sip to another of the same glass. I find it a bit of a shame to have presented the Krug Vintage alongside the Krug Clos du Mesnil, because these high quality wines, pure companions in gastronomy, deserve to be tasted for themselves. Having them coexist with the Krug Clos du Mesnil reduces them a bit, while they are immense. But this somewhat crazy exercise, which is a first ever attempted, had a certain merit. We will understand by the rave terms I used that I liked. Christophe Navarre, president of Moët Hennessy, who came to taste as a friend with his wife, thanked Rémi for his essential contribution to the reputation of this Champagne icon. Listening to an enthusiast of this caliber is a treat, almost as great as the charm of these endless wines.