Nous descendons dans le sud pour les fêtes de la Saint-Sylvestre. Je commande un plateau de fruits de mer à un restaurant du port, pour demain, le premier de trois dîners.
Les premiers amis arrivent à 13h40 et selon la tradition, j’ouvre un magnum de Champagne Salon, qui est comme le tir au pistolet qui marque le départ d’une course.
Le Champagne Salon magnum 2002 a eu ce matin un pschitt très dynamique. Dans le verre, la couleur est claire. Dès la première gorgée, on sent que le champagne est grand, plus que grand. Il est intense, jeune, vif mais avec une belle rondeur de plaisir. Un régal. Sur un pâté de tête de notre boucher préféré, c’est un bonheur. Avec de fines tranches d’andouille de Guéméné, le plaisir est aussi grand. Le summum est atteint sur un camembert Jort peu affiné qui fait chanter le champagne.
A 16 heures, ce sont deux autres amis qui arrivent. Le Champagne Salon accompagne un gâteau au chocolat, un peu moins compagnon de jeu que les cochonnailles précédentes.
Le plateau de fruits de mer est composé d’huîtres de deux sortes, grasses ou iodées, de crevettes roses, de langoustines et de pinces de crabe. J’ai envie d’associer chaque élément avec un vin différent. Et ce qui chatouille mes méninges, c’est d’essayer un Coteaux du Layon avec la pince de crabe.
Nous passons à table. Le Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1979 est particulièrement adapté aux deux sortes d’huîtres, offrant deux visages différents. C’est avec les huîtres iodées que je préfère la vivacité de ce beau champagne, alors que sur les huîtres grasses, il fait plus notaire de province.
Sur les crevettes nous buvons un Chablis Grand Cru Blanchot Vocoret 1988. A l’ouverture il m’avait fait un peu peur, mais il a retrouvé sa puissance et sa complexité. C’est un grand Chablis.
Sur les langoustines apparaît un Meursault Charmes Comtes Lafon 2003. Au début, il paraît calme après le vif chablis, mais rapidement il prend de l’ampleur et le mot charme associé à son appellation lui convient parfaitement. Là aussi, l’accord est pertinent. Le meursault paraît plus noble que le chablis mais le chablis est plus vif et expressif que le meursault.
C’est maintenant que je vais savoir si mon audace est justifiée. Le Coteaux du Layon Chaume Domaine La Roche Moreau 1992 est d’une délicatesse infinie. Il est doucereux, mais bien affirmé et l’accord avec la chair de la pince de crabe me ravit. J’adore explorer de telles associations improbables. Je suis aux anges.
Les quatre associations étaient pertinentes. La plus belle me semble être celle du chablis avec les crevettes et la plus originale celle du vin de Loire avec les pinces de crabe. J’ai trouvé le Coteaux du Layon particulièrement élégant. On n’a ni la puissance ni la complexité des sauternes, mais ce vin gracieux est enchanteur.
Des glaces à la vanille ou au caramel beurre salé ont conclu ce repas.
Le premier dîner lance bien l’aventure qui commence.