En cave, je prélève une bouteille de Château Latour 1973, pour voir ce que peut raconter cette année si mal placée dans la hiérarchie des millésimes. La bouteille a un niveau excellent, et le bouchon est magnifique, intact et bien souple, à peine humide, confirmant la qualité de la cave où ce vin repose depuis 20 ans.
Pour le mettre en valeur et préparer la bouche, je décide d’ouvrir un Côtes de Bourg, appellation contrôlée, caves Tauriac à Bourg en Gironde 1990. Ce vin fait partie d’un lot de très nombreux vins que j’avais achetés envrac à des prix infimes par bouteille. J’avais offert ces vins lors de grandes fêtes de mon entreprise et j’avais pu mesurer leur valeur.
Le Côtes de Bourg est un peu fumé, donne des signes d’âge, mais malgré sa modeste extraction, délivre un bien gentil message. Le palais est prêt pour le Latour qui était apparu à l’ouverture, deux heures avant, extrêmement typé et dense. Sur une épaule d’agneau à la sauce aillée, Latour 1973 se montre un excellent Latour, et surprend par une puissance que l’année ne devrait pas avoir. Un grand vin qui démontre – une fois de plus – qu’il faut se garder de systématiser l’importance des années, surtout quand le temps passe. Il montre aussi que les vins de ces années dites modestes doivent être bus hors comparaison. Dans une verticale, ce 1973 serait apparu surclassé par les meilleures années de Latour. Mais là, il est très bon. Alors, pourquoi le mettre en compétition. D’autant qu’il surclasserait un nombre considérable de vins de 1982. Alors … ne pas mésestimer les petites années, et ne pas les mettre inutilement en compétition.