Le réveil est dur ! L’association « Rhône Vignobles » reçoit ce matin au domaine de Beaurenard environ 150 cavistes, agents, restaurateurs et sommeliers de la région. Les vignerons ont organisé de petits stands entre les fûts dans la cave de vieillissement. Et les visiteurs sont invités à goûter les vins des vignerons de l’association. L’originalité de cette dégustation est que les vins sont parmi les plus vieux de tous les domaines. Ainsi Daniel Coulon fait goûter un Chateauneuf-du-Pape blanc domaine de Beaurenard 1984 à la belle couleur dorée, évoquant la noix et la pâtisserie, et le Chateauneuf-du-Pape domaine de Beaurenard jéroboam 1937 que j’ai ouvert hier. Le nez est follement bourguignon, racé, raffiné. En bouche alors que beaucoup de personnes le trouvent jeune parce qu’il est fringant, je trouve qu’il fait parfaitement son âge, avec une sérénité assumée. Oserais-je dire qu’il n’a pas l’ombre d’un défaut ? Il évoque la cendre, les fumets délicats et a une légère sucrosité. C’est un très grand vin.
Jean-Michel Gérin présente une Côte-Rôtie domaine Gérin 1964 au nez puissant et joyeux. Le vin est superbe, mêlant la joie de vivre, une belle acidité et un grand raffinement. Il apporte la preuve éclatante que la Côte-Rôtie peut vieillir et bien vieillir.
Tous les stands sont tentateurs mais sachant que mon voyage va se continuer en Bourgogne, puisqu’après le déjeuner au domaine Beaurenard j’ai un dîner à Vosne-Romanée, je limite à ces trois vins ma dégustation. Dommage, car il y a de sacrées bouteilles.
Après la dégustation en cave, un repas pour 160 personnes se tient dans les chais où une longue table unique est installée entre les cuves en inox. Le menu est réalisé par Eric Sapet, le chef de « la petite maison » de Cucuron : pâté de chevreuil au foie gras, terrine de sanglier, pâté en croûte de colvert / consommé de palombe, tartine gourmande / les petits oiseaux en cocotte / lièvre à la Royale en deux services, le premier à la façon du sénateur Couteaux / le deuxième à la façon d’Antonin Carême. Pour avoir des chances d’être à temps à Vosne-Romanée, je n’ai pas goûté la deuxième version. Je n’ai pas fait carême !
Pendant le repas au rythme très lent, nous avons été abreuvés de vins des quinze vignerons de l’association, beaucoup plus récents et dans des formats dépassant parfois le magnum. Ces vins sont fort bons mais j’ai plus cherché à les éviter qu’à les goûter. Un Chateauneuf-du-Pape Cuvée Chaupin La Janasse rouge jéroboam 2001 m’a beaucoup plu par la fougue de son fruit, comme un Condrieu Vertige Cuilleron 2001 superbe par sa plénitude sereine. Je n’ai pas noté les autres vins qui venaient de droite comme de gauche et imposaient de vider le verre en cours pour faire plaisir au vigneron qui voulait verser son vin. La cuisine d’Eric Sapet est très traditionnelle mais bien exécutée. Elle est particulièrement riche et gourmande. Les petits oiseaux comme le lièvre sont goûteux et généreux.
Que dire de ces deux jours de folie ? Ce qui m’a frappé d’abord, c’est la générosité des ces quinze vignerons, bande de copains joviaux et bons vivants. Déguster avec eux est un plaisir. On sentait que chacun avait vécu un grand moment de partage et de connaissance, car tous n’ont pas l’habitude de côtoyer de tels vins anciens. L’émotion la plus forte pour la famille Coulon a été l’ouverture du 1880.
Nous sommes appelés à nous revoir, car un accueil aussi chaleureux ne peut rester sans suite.
photos – l’enseigne au domaine de Beaurenard
la dégustation en cave (au premier plan, le jéroboam de Beaurenard 1937)
l’impressionnante table pour 160 personnes
quelques photos du repas et un des vins