Un ami fidèle, grand amateur de vins anciens, nous rend visite. Pour l’honorer, je pense ouvrir un champagne Salon 1990. Je n’aime pas que le vin vedette soit le premier aussi l’apéritif débutera par un autre champagne. Le champagne Dom Pérignon 1998 me plait toujours autant. Il m’évoque des fleurs blanches, délicates et frêles. C’est un grand champagne qui est gentiment excité par des olives noires et un jambon espagnol Serrano que l’on découpe en tranches de tailles diverses tant les outils adéquats de coupe manquent. Quand arrive le champagne Salon 1990, je suis réellement et physiquement pris de frissons. Car au-delà du nez intense, ce champagne expose instantanément son absolue perfection. Ce qui frappe, c’est la forte personnalité. Y reconnaît-on du miel, du muscat, des confitures de fruits variés, peut-être, mais ce n’est que l’écume de ce que le champagne affirme, qui n’a pas d’équivalent. Par rapport à la précédente bouteille du même, je le trouve un peu plus fumé et un peu plus à maturité. Il dévoile des pistes de ce que sont les grands Salon historiques. Le Salon est accompagné par des foies de lotte très goûteux. Mon gendre a préparé un coulis à base d’orange qui avantage le foie en extirpant son essence mais qu’il faut éviter avec le champagne. Une belle côte de bœuf aux pommes de terre et fenouil accueille le cadeau de mon ami, un Bonnes Mares Lionel Bruck 1966. A l’ouverture on percevait un léger coup de chaud normal pour la saison. Quand il est servi, c’est un vin chaleureux, velouté, qui est quand même un peu torréfié. Même s’il a quitté la définition stricte du Bonnes Mares, ce qui compte c’est qu’il est bon, gouleyant et joyeux.
Mon gendre est en compétition avec ma femme pour la confection de la mousse au chocolat. Il a réussi celle de ce soir à merveille. Le Mas Amiel Cuvée Charles Dupuis 1998 est totalement adapté, avec un boisé exotique canaille. En faisant les courses ce matin (si, si, ça m’arrive), j’avais pensé que des mirabelles se marieraient avec la mousse et le vin. Et j’ai eu l’intuition que le fruit devait se découper au couteau pour le mordre sans que les lèvres ne touchent le noyau, ce qui fait une différence de goût spectaculaire. Et l’on se rend compte que le Mas Amiel réagit beaucoup mieux sur la mirabelle qui suit le chocolat que sur le chocolat lui-même. J’adore ces expériences qui font penser à celles d’Hervé This, le pape de la gastronomie moléculaire.