Nous recevons dans le sud des amis du monde de la restauration. Elle est cuisinière et cuisine remarquablement. Son mari faisait équipe avec elle en dirigeant la salle et la sommellerie. Ce sont des gourmets connaisseurs.
Pour préparer leur venue je suis allé faire des emplettes chez notre boucher-traiteur ami. Sa boutique jouxte celle d’un marchand de vins que je vais saluer. Nous bavardons et je lui demande s’il a fait des découvertes. Il me suggère de prendre un Champagne Roger Coulon. Pourquoi ne pas l’essayer avec ces amis ?
L’apéritif consiste en une délicieuse tarte aux oignons (du jardin) préparée par mon épouse, dont l’avantage est que les saveurs sucrées de l’oignon vont convenir au Champagne Roger Coulon Heri-Hodie Premier Cru Extra Brut dégorgé en janvier 2021 qui est fait de pinot meunier dont 90% sont des vins de la réserve perpétuelle. La surprise est agréable car le champagne dosé à trois grammes n’a pas le caractère abrupt des extra-bruts. Il est bien construit, droit, agréable à boire et la suggestion du caviste se révèle pertinente. Ce champagne est même élégant.
Le menu préparé par mon épouse est : foie gras / poulet cuit à basse température / camembert Jort / gâteau au citron / gâteaux noisettes café.
Sur le délicieux foie gras préparé par ma femme je sers un Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en avril 2018. Le parfum de ce champagne est incroyable. On pourrait passer des heures à le sentir. C’est fou. Et bien sûr on mesure le fossé qui sépare ce champagne du précédent. Mais ça ne déprécie pas le Roger Coulon. Le champagne Selosse est incroyablement équilibré, intense et beaucoup plus civilisé que d’autres Substance. Cette gentillesse de ton n’est pas une habitude des champagnes Selosse. Je pense que celui-ci est probablement l’un des meilleurs Substance que j’aie bus.
Le poulet à la chair blanche est fondant tant il est cuit à la perfection. Le Rimauresq Côtes de Provence 1985 a été ouvert plus de quatre heures avant le déjeuner. Son parfum exhalait la garrigue. Ce vin est une récompense. Le parfum maintenant est large, civilisé, doux, tout en annonçant un vin puissant. En bouche c’est un miracle. Il y a bien sûr la garrigue et le romarin mais si on oublie ces signaux, il a tout d’un grand bourgogne, noble, équilibré, dans un état de perfection absolue. L’âge sourit aux Côtes de Provence et particulièrement à ce Rimauresq. On pourrait dire qu’il s’agit d’un vin parfait, car tout est assemblé et cohérent et il est inimaginable qu’il puisse être meilleur. L’accord du vin rouge avec le camembert Jort parfaitement affiné est irréellement grand.
Pour le dessert, j’ouvre un Champagne Laurent-Perrier Grand Siècle des années 60 qui, comme les autres du même âge, a un bouchon qui se cisaille, la lunule inférieure étant enlevée au tirebouchon. De couleur ambrée il a une bulle rare mais un joli pétillant. C’est un vin rond de plaisir. Doux, plein de charme, il accompagne bien les desserts.
Mon classement est : 1 – Rimauresq 1985, 2 – Substance de Selosse, 3 – Grand Siècle années 60, 4 – Champagne Roger Coulon. Les deux premiers de ce classement sont tout-à-fait exceptionnels, au sommet absolu de leur art. Beau déjeuner d’amitié.