La couvaison n’aura pas duré bien longtemps. Car dans la chaleur communicative du dîner, nous avions pris rendez-vous pour déjeuner le lendemain chez Yvan Roux. Le soleil est radieux, les couleurs de la mer sur la rade de Giens sont magnifiques. Babette ouvre un Champagne Laurent Perrier Grand Siècle pour que nous dégustions une chiffonnade de « Pata Negra » absolument délicieuse. C’est vraiment ainsi que ce champagne trouve son sens. Mais malgré tout, le message un peu monolithique peine à maintenir l’attention. Suis-je saturé par ce champagne que je connais par cœur ? Il faudrait sans doute en boire de plus âgés.
Le menu composé par Yvan pour ce jour est ainsi rédigé : fricassée de seiches et de calamars / tombée de pousses d’épinards aux petites crevettes décortiquées, à l’échalote et ail confit, et le pavé de pagre à l’unilatérale / soufflé à la vanille de Madagascar et sorbet framboise. Comme hier les cuissons sont spectaculaires, les goûts sont d’une rare finesse dans leur simplicité.
J’ai apporté deux vins qui sont des achats de hasard. Le Châteauneuf-du-Pape Yves Chastan 1967 a perdu de son niveau dans la bouteille, fort teintée d’une lie collante. Ouvert au dernier moment le vin est d’une acidité marquée qui disparaît très vite. Je m’habitue à ce vin qui n’est pas déplaisant, mais je sens que mes amis accrochent moins à son goût de vin ancien. J’ouvre donc un Châteauneuf-du-Pape Domaine de l’Arnesque, Julien Biscarrat & Fils 1991. Effectivement on se raccroche aux saveurs infiniment plus amènes d’un Châteauneuf-du-Pape de 14° tout de même.
La chair du pagre est très prononcée. J’avais peur que les épinards ne luttent contre les rouges, mais en fait, traités en douceur, ils jouent de velours avec eux. La mission que je m’étais fixée est accomplie : le retour en France, dans notre douce France, par un soleil de rêve, est définitivement réussi.